La différence ontologique chez M. Heidegger - article ; n°49 ; vol.56, pg 35-62
29 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

La différence ontologique chez M. Heidegger - article ; n°49 ; vol.56, pg 35-62

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
29 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue Philosophique de Louvain - Année 1958 - Volume 56 - Numéro 49 - Pages 35-62
28 pages

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1958
Nombre de lectures 62
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Albert Dondeyne
La différence ontologique chez M. Heidegger
In: Revue Philosophique de Louvain. Troisième série, Tome 56, N°49, 1958. pp. 35-62.
Citer ce document / Cite this document :
Dondeyne Albert. La différence ontologique chez M. Heidegger. In: Revue Philosophique de Louvain. Troisième série, Tome 56,
N°49, 1958. pp. 35-62.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1958_num_56_49_4945La différence ontologique
chez M. Heidegger
Dans ses réflexions sur les « Holzwege » M. De Waelhens écrit
très justement : « Qu'elle nous parle de l'origine de l'œuvre d'art,
de la nature de la technique, de la Phénoménologie de l'Esprit
selon Hegel, de l'athéisme nietzschéen, de la signification de la
poésie de Rilke pour notre temps ou encore d'une maxime d'Anaxi-
mandre dont serait issue toute la philosophie occidentale, toujours
la pensée de Heidegger en revient à méditer la distinction de l'étant
et de l'être » (1). Les nombreuses publications parues depuis les
Holzwege (qui sont de 1950), en particulier la dernière en date :
« Identitât und Differenz » (2> ne font que confirmer toujours davan
tage que la « différence ontologique », c'est-à-dire la différence qui
à la fois unit et sépare l'étant et l'être (Seiende und Sein), représente
vraiment le thème central de l'œuvre heideggerienne, celui qui lui
confère son sens et, partant, l'unité de son mouvement. Notre inten
tion dans ces pages n'est pas de parcourir cette œuvre pièce par
pièce mais de l'éclairer quelque peu à partir de ce centre.
I
Et d'abord que veut dire ce mot a centre » en philosophie ?
A quoi doit-il nous faire penser ?
Toute grande philosophie procède de quelque chose comme
d'un centre à partir d'où elle pense, mais aussi en vue de quoi elle
pense, car ce centre ou, pour reprendre une expression de G. Marc
el, ce « repère central » est moins une vérité pleinement possédée
qu'une vérité à conquérir et à dire, (em zu-Denk.ende dirait Hei
degger), une vérité avec laquelle et pour laquelle le philosophe ne
(l) A. De Waelhens, Chemina et Impasse» de l'Ontologie Heideggerienne. A
propos des Holzwege, Louvain, E. Nauwelaerts, 1953, p. 5.
<*» M. HEIDEGGER, Identitât und Digèrent, Gtinther Ne«ke Pfullingen, 1957. Albert Dondeyne 36
cesse de lutter (das Strittige). C'est elle qui fait que le philosophe
a quelque chose à nous dire, encore qu'il n'arrive jamais à le dire
tout à fait. Qu'on se rappelle la réflexion bien connue de Bergson
sur l'intuition philosophique : « Un philosophe digne de ce nom n'a
jamais dit qu'une seule chose : encore a-t-il plutôt cherché à la dire
qu'il ne l'a dite véritablement. Et il n'a dit qu'une seule chose
parce qu'il n'a vu qu'un seul çoint : encore fut-ce moins une vision
qu'un contact... » (3).
Ce texte de Bergson est intéressant. 11 nous invite à penser que
le thème central d'une philosophie n'est pas encore ce qu'il y a de
plus central en elle, puisqu'en sa qualité de thème il est le résultat
d'un effort de thématisation. Thématiser c'est essayer de « dire »,
d'exprimer, d'exposer au niveau et au moyen du discours. Mais ce
a dire » du discours s'alimente lui-même à quelque « contact » plus
originaire du philosophe avec une vérité qui, à la réflexion thémati-
sante, s'avère à ce point originaire, centrale et enveloppante qu'elle
est comme une source d'intelligibilité universelle, et, partant, un
foyer de lumière philosophique. Pour exprimer ce « contact » origi
naire avec ce que le philosophe a « vu » et s'efforce de « dire » h
lui-même et aux autres, il a été fait appel à des termes divers : on
a parlé d'« intuition » et de « contact » (Bergson), d'« expérience
initiale » (Lavelle), de « fait primitif » (Maine de Biran), de « repère
central » (Marcel). Tout porte à croire qu'à cette diversité de termes
correspond une diversité de styles philosophiques, mais il n'est pas
moins évident qu'à travers tous ces termes se trouve visée une
certaine « initialité » radicale, un certain au-delà ou en-deçà du dis
cours, bref, une certaine expérience donatrice originaire à partir
de laquelle le philosophe parle, non pas pour la quitter, mais pour
lui rester fidèle et lui consacrer ses meilleurs efforts. Elle est comme
le lieu où le séjourne, où il a sa demeure et son travail,
et pour parler avec Heidegger, où est son fjfroç <4). Cest là que nous
devrons le rejoindre si nous voulons le comprendre, c'est-à-dire être
avec-lui, participer à sa vérité (au double sens d'avoir part et de
prendre part), bref dialoguer avec lui.
Que, pour comprendre une pensée neuve et originale, il faille
passer par ce centre ou, du moins, essayer de l'approcher autant
<*> H. Bergson, La Pensée et le Mouvant, 3« éd., Pari», Alcan, 1934, p. 141.
(*> M. HEIDEGGER, Platon» Lehre Oon der Wahrheit. Mit einetn Brief fiber den
Humanismus », Bern, A. Francke, 1947, pp. 106 «s. La ditférence ontologique chez M. Heidegger 37
que faire se peut, combien de fois ne l'avons-nous pas éprouvé sur
le vif, soit dans la méditation des grands auteurs, soit dans l'enseigne
ment philosophique ! Un auteur, c'est d'abord pour nous un texte,
c'est-à-dire un énorme assemblage de mots dont certains, que nous
soupçonnons être des mots-clefs, reviennent à une cadence régul
ière. Une première étape de la compréhension consiste à nous
familiariser avec ces à établir approximativement leur
sens, ne fût-ce qu'en consultant un dictionnaire philosophique. Que
veut dire « transcendantal » chez Kant ? Qu'est-ce que Kant entend
par « proposition synthétique à priori », « forme de la sensibilité »,
« catégorie de l'entendement », « schématisme de l'imagination
transcendantale » etc. ? Que veut dire « Da-sein », « Existenz »,
« verstehen », « Befindlichkeit », chez Heidegger ? Vient ensuite la
seconde étape de la compréhension : un commerce prolongé avec
le texte nous fait découvrir peu à peu sa structure intelligible, sa
cohérence logique interne. Tout s'articule autour des concepts-clefs
et ceux-ci s'organisent eux-mêmes en un tout : nous sommes main
tenant en présence d'un système solidement structuré, nous nous
sentons à même d'en faire un exposé cohérent, voire de le condenser
dans un résumé clair et bien charpenté qui en fait encore mieux
ressortir les jointures. Et cependant, nous ne sommes pas satisfaits
et ne pouvons nous défaire d'un sentiment d'étrangeté : bien que
le système en question nous fasse l'effet d'une construction puis
sante, extrêmement intelligente et ingénieuse, il donne néanmoins
l'impression d'un édifice en l'air, sans contact avec la réalité. Nous
admirons sa rigueur logique, mais dans notre for intérieur nous nous
demandons : mais de quoi, en somme, cet auteur parle-t-il ? Quel est
le problème avec lequel il se débat ? Que veut-il nous dire final
ement ? Quelle est la vérité de son système ? Jusqu'à ce qu'un beau
matin une promesse de lumière commence à poindre : nous avons
eu brusquement l'impression que le problème ou les problèmes avec
lesquels l'auteur se débat sommeillent aussi en nous ; nous croyons
même les avoir déjà un jour nous-mêmes rencontrés, ou du moins
entrevus de loin, mais comme nous ne nous sentions pas capables
de les dominer, nous les avions abandonnés sur le bord du chemin
et étions passés outre. A partir de cet instant tout est transformé,
nous n'avons plus affaire à quelque texte étrange et sibyllin ni à un
admirable échafaudage de concepts et de déductions, mais à un
auteur qui a quelque chose de nouveau à nous dire. Nous com
mençons à nous sentir chez nous alors que nous sommes chez lui, Albert Dondeyne 38
comme si nous étions de plain pied avec lui ; nous croyons entre
voir ce qu'il a « vu » : bref nous sommes au c

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents