Le Présent de noces
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Raoul Gineste — Le Parnasse contemporain, IIILe Présent de nocesIAu milieu des joyaux étincelants et lourdsDont elle allait parer sa gorge demi-nue,Elle vit un bouquet qu’une main inconnue,Avait mis là, parmi la soie et le velours.Or ce bouquet, formé ...

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Raoul GinesteLe Parnasse contemporain, III
Le Présent de noces
I Au milieu des joyaux étincelants et lourds Dont elle allait parer sa gorge demi-nue, Elle vit un bouquet qu’une main inconnue, Avait mis là, parmi la soie et le velours. Or ce bouquet, formé de fleurs presque fanées, Rien qu’à le voir serrait le cœur ; les nénuphars, Les glaïeuls maladifs, fils des matins blafards, Les lys, penchés sur leurs tiges déracinées, Entouraient les pavois qui charment les douleurs, Les safrans que l’on voit scintiller dans les herbes Et les dalhias lourds, dont les fraises superbes Étalent au soleil leurs sanglantes couleurs. Et ces fleurs avaient comme un parfum de souffrance ; Elles semblaient narrer un bonheur écroulé, La main qui les cueillit en ayant exilé Tout emblème d’amour heureux ou d’espérance ; Elles semblaient, dernier présent de quelque amant, Juste à l’heure où la vierge allait devenir femme, Être la plainte triste et navrante d’une âme Qui seule avait gardé la foi d’un doux serment. Alors, se souvenant, la blonde fiancée, Rêveuse, contempla le bouquet, puis le prit, Et, comme un vieux refrain, surgit dans son esprit Le roman oublié de la saison passée. Et, quand pour respirer le parfum de ces fleurs Elle approcha sa bouche infidèle et rosée, En croyant effleurer des gouttes de rosée, Sans pleurer elle apprit le goût amer des pleurs. II Au temps de notre amour, par les beaux soirs d'été, Par les soirs embaumés, pleins d’ineffables charmes, Un étrange désir m’a souvent tourmenté ; C’était de voir tes yeux profonds s’emplir de larmes. Car j’eusse recueilli, dans un amer baiser, Les perles de cristal lentement égrenées, Avec l’espoir mystique et fervent d’apaiser L’ardeur que ne pourront assouvir les années. Mais ton regard si pur ne s’est jamais voilé ; Il rayonnait avec la splendeur souveraine Et le calme fatal de l’azur étoilé, Et rien n’en a troublé la cruauté sereine. Or, voici qu’aujourd’hui tes yeux cerclés de noir Trahissent sans pitié les pleurs de l’insomnie ; Et voici que ton front se penche, sans espoir, Comme pour attester ce que ta fierté nie ; Voici qu’une implacable et muette langueur Te mine sourdement et voici que les fièvres Ont effacé les plis du sourire moqueur, Du sourire orgueilleux qui trônait sur tes lèvres.
Ton rêve s’est cassé les ailes, lourdement, Et tu pleures ton rêve, ô chère inoubliée ! … Te souvenant peut-être alors de cet amant Des bras de qui tu t’es follement déliée.
Tu pleures nuits et jours, sans te plaindre, tout bas ; Et l’époux qui n’a pas deviné tes alarmes, Lui qui n’a jamais su t’aimer ne viendra pas Boire en un long baiser l’amertume des larmes.
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