De l accord de Munich à la fin de l Etat tchécoslovaque - article ; n°1 ; vol.51, pg 31-46
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De l'accord de Munich à la fin de l'Etat tchécoslovaque - article ; n°1 ; vol.51, pg 31-46

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Description

Politique étrangère - Année 1986 - Volume 51 - Numéro 1 - Pages 31-46
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 59
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Hubert Beuve-Méry
De l'accord de Munich à la fin de l'Etat tchécoslovaque
In: Politique étrangère N°1 - 1986 - 51e année pp. 31-46.
Citer ce document / Cite this document :
Beuve-Méry Hubert. De l'accord de Munich à la fin de l'Etat tchécoslovaque. In: Politique étrangère N°1 - 1986 - 51e année pp.
31-46.
doi : 10.3406/polit.1986.3528
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1986_hos_51_1_3528POLITIQUE ÉTRANGÈRE I 31
N° 2 I AVRIL 1939
Hubert BEUVE-MERY • * l>«»"d
a la fin de l'Etat .%}??%? tcheco-slo , vaque
La Tchéco-Slovaquie indépendante n'est plus. Cet événement qui a vi
olemment secoué la conscience du monde a peut-être moins ému ceux
qui avaient commencé, dès l'accord de Munich, à porter le deuil de
l'Etat tchéco-slovaque. Aujourd'hui, il n'est plus temps de se demander si cet
accord était licite, étant donné les traités franco-tchécoslovaques, ni s'il était
nécessaire, étant donné la situation politique et militaire de l'Europe à l'a
utomne dernier. Mais il peut être utile de jeter un rapide coup d'œil sur les
mois qui se sont écoulés entre les promesses solennelles prodiguées par le
Fùhrer en septembre et son entrée à Prague le 15 mars. On y verra, après le
précédent autrichien, une nouvelle et douloureuse démonstration des méthodes
hitlériennes.
L'interprétation et l'application par le Reich de l'accord de Munich
A l'Occident, les voix les plus officielles ont reconnu qu'un sacrifice terrible
était imposé à la Tchéco-Slovaquie par l'accord de Munich. Mais tout aussitôt
ces mêmes voix développaient une argumentation de nature à rassurer les
esprits trop inquiets ou les consciences trop angoissées. La première justifica
tion invoquée n'était rien de moins que le maintien de la paix du monde. En
second lieu, on assurait à plus de trois millions d'Allemands ce droit de libre
détermination des peuples dont se réclamait naguère le traité de Versailles.
Enfin, la Tchéco-Slovaquie mutilée était assurée des plus précieuses contrep
arties.
Débarrassée de la plupart de ses Allemands, abondamment pourvue de livres
sterling et de francs par les soins de Londres et de Paris, efficacement
protégée par la garantie franco-britannique contre toute possibilité d'agression
sur ses nouvelles frontières, elle allait cesser d'être en Europe une pomme de
discorde et bientôt vaquer paisiblement à ses affaires comme la Suisse ou la
Suède.
* Ancien correspondant du Temps à Prague. 32 I POLITIQUE ÉTRANGÈRE
Malheureusement, et comme il était trop facile de le prévoir dès le premier
moment, cette interprétation optimiste devait, en fait, le céder à l'interpréta
tion de Berlin qui était toute différente. Car l'accord signé, la France avait
démobilisé en hâte ; on avait renoncé aux plébiscites prévus ; la Légion
britannique, déjà prête à partir, avait été débarquée et la commission interna
tionale composée des quatre ambassadeurs des puissances signataires restait
finalement seule chargée de l'application du pacte. Or, au sein de cette
commission siégeant à Berlin, l'Allemagne était en fait toute-puissante et, en
cas de désaccord, les représentants de la France et de l'Angleterre se trou
vaient bien en peine de faire prévaloir leur opinion. Les Tchèques ne purent
en douter bien longtemps. Se sentant livrés à merci, ils préférèrent accepter la
proposition allemande de négociations directes qui réduisait la commission
internationale à une simple instance d'enregistrement. L'Allemagne put donc
fixer librement et imposer les frontières de la cinquième zone d'occupation
prévue à Munich. Sous prétexte de procéder à la délimitation précise de la
frontière, elle imposa bientôt l'occupation d'une sixième zone qui englobait
certaines populations purement tchèques. Les nationaux-socialistes allemands
de Tchéco-Slovaquie auraient voulu plus encore. Finalement, ce furent les
autorités du Reich elles-mêmes qui préférèrent restreindre leurs prétentions et
rendre une cinquantaine de communes comptant une vingtaine de milliers
d'âmes. L'Allemagne n'avait en effet aucun intérêt à pousser immédiatement
sa victoire à l'extrême. Elle devait compter, au contraire, dans une situation
particulièrement embrouillée, avec l'éventualité de réflexes désespérés. Aux
confins occidentaux de la Bohême, les Chodes annexés n'avaient-ils pas parlé
de se battre avec des faulx pour ne pas manquer à leur tradition légendaire de
résistance au germanisme ? Et ne suffisait-il pas que le Reich ait tout préparé :
contrôle de toutes les grandes voies de communications, organisation des
Allemands demeurés en Tchéco-Slovaquie, utilisation de certains chefs slova
ques, etc., pour parer efficacement à toute velléité d'indépendance du nouvel
Etat ?
Il n'est donc nullement excessif de dire que l'Allemagne a interprété et
appliqué en toute liberté les clauses territoriales de l'accord de Munich. Dans
le même esprit et avec la même liberté, elle rendait quelques semaines plus
tard la sentence de Vienne, hors de toute intervention franco-britannique. Là
encore, la solution adoptée entre les prétentions contradictoires de la Tchéco
slovaquie et de la Hongrie, soutenue par la Pologne et l'Italie, entendait tenir
compte avant tout des intérêts allemands.
Ainsi, moins de cinq mois après l'accord de Munich, l'écart apparaissait
considérable entre les espérances de l'Occident et la réalité. La paix euro
péenne avait été prolongée, mais nullement consolidée. Trois millions d'All
emands avaient rejoint, contre le gré d'un assez grand nombre d'entre eux,
l'Allemagne nationale-socialiste, au nom du droit de libre détermination des
peuples. Mais du même coup, 800 000 Tchèques étaient annexés et un peuple
de 7 millions d'âmes (plus de 9 millions avec les Slovaques) se trouvait immé
diatement aux prises avec un gigantesque effort de germanisation. Quant à
l'Etat tchéco-slo vaque, loin de trouver la paix et les garanties de sécurité qui
lui avaient été promises, il se trouvait menacé, subjugué, sans défense, sans
garanties, sans recours possibles. A Paris et Londres, on reconnaissait implic
itement cette situation en remettant à plus tard la garantie des frontières si
solennellement promise. Quant à l'emprunt annoncé, dont il était à craindre DE L'ACCORD DE MUNICH À LA FIN DE L'ÉTAT TCHÉCOSLOVAQUE I 33
que l'Allemagne ne s'assurât plus ou moins largement le bénéfice, on décidait,
après de laborieuses discussions, de le réduire de près de 50 %.
La transformation juridique de l'Etat tchéco-slovaque
Les amputations successives qui ont suivi l'accord de Munich faisaient perdre à
la Tchéco-Slovaquie, on le sait, de 30 à 35 % de son territoire et de sa
population, et d'immenses richesses : charbon, bois, stations balnéaires et
climatiques, industries et productions de toutes sortes. A négliger les consé
quences d'ordre technique, ce qui paraît peut-être le plus étonnant dans ce
bouleversement, c'est qu'il ait pu s'accomplir, tout au moins dans les pays
historiques (Bohême, Moravie-Silésie), sans de graves convulsions. Cela tient
surtout à un certain fatalisme slave, à une certaine habitude du malheur. Cela
tient aussi et plus encore à l'esprit de discipline et au caractère profondément
sain de la population. Lorsque, au soir du 21 septembre, le peuple des
faubourgs refluait brusquement vers le centre de Prague, il y eut pour les
témoins étrangers mêlés à ce déferlement populaire des minutes
émouvantes, qui pouvaient aussi, à plus d'un titre, paraître inquiétantes. Mais
dans cette foule immense, ni le crime, ni même l'émeute ne grondaient. On ne
voyait que l'indignation, la stupeur, la protestation angoissée d'un peuple qui
se sentait terriblement frappé, complètement isolé et qui pourtant ne voulait
pas douter de lui-même. Aucun dés

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