La question de Chypre. Un point de vue britannique - article ; n°3 ; vol.29, pg 217-230
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La question de Chypre. Un point de vue britannique - article ; n°3 ; vol.29, pg 217-230

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Description

Politique étrangère - Année 1964 - Volume 29 - Numéro 3 - Pages 217-230
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1964
Nombre de lectures 13
Langue Français

Extrait

Nancy Crawshaw
La question de Chypre. Un point de vue britannique
In: Politique étrangère N°3 - 1964 - 29e année pp. 217-230.
Citer ce document / Cite this document :
Crawshaw Nancy. La question de Chypre. Un point de vue britannique. In: Politique étrangère N°3 - 1964 - 29e année pp. 217-
230.
doi : 10.3406/polit.1964.2272
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1964_num_29_3_2272QUESTION DE CHYPRE LA
III
Un point de vue britannique
Chypre a peu de richesses naturelles et cette île n'a jamais
présenté, au yeux des Britanniques, qu'un intérêt stratégique.
En 1878, Disraeli, par la Convention de Chypre, ayant obtenu
des Turcs qu'il lui cédassent l'île, considérait cette dernière
comme « la clé de l'Asie occidentale ». Cette mesure avait
à l'origine un but. défensif et était destinée à prévenir l'ex-
pansionisme russe. Mais quatre années plus tard, l'Angleterre
était en possession de meilleures bases en Egypte, et les plans
envisagés pour le développement de Chypre étaient abandonn
és. La Convention de Chypre fut annulée durant la première
guerre, lors de l'entrée de la Turquie aux côtés de l'Allema
gne. Peu après, l'Angleterre offrit l'île à la Grèce à condition
qu'elle se porte immédiatement au secours de la Serbie. La
proposition n'eut pas de suite et en 1923, la Grèce et la Tur
quie reconnurent formellement, par le Traité de Lausanne,
la souveraineté britannique sur Chypre.
Juqu'en 1958, les gouverneurs britanniques étaient tous
fermement décidés à maintenir l'ordre à Chypre, pour des
raisons militaires ; on parlait souvent alors de problème
colonial lorsqu'on évoquait la question de Chypre. En fait,
le problème était plus complexe. Il fut parfaitement posé par
M. Creech Jones, travailliste, ancien secrétaire d'Etat aux
Colonies, lorsqu'il évoqua, en 1945, la situation et le pro
blème fondamental des droits d'une population vivant dans
une zone géographiquement appelée à devenir une base
stratégique : « ... L'histoire constitutionnelle de Malte, de NANCY CRAWSHAW 218
Gibraltar et de Chypre est un exemple des difficultés que l'on
rencontre lorsqu'il s'agit de décider quelles limites imposer
aux peuples mûrs pour l'autodétermination, quand les
nécessités stratégiques de l'Empire commandent notre
conduite... Certains donneraient la priorité aux désirs des
habitants et subordonneraient les considérations stratégiques
aux volontés qu'ils expriment. Quels que soient nos sent
iments vis-à-vis de la politique de puissance et des façons de
faire des impérialistes dans le passé, si l'on veut que la
sécurité mondiale devienne une réalité (et tout progrès fu
tur, toute liberté et tout développement sont liés à cette réa
lisation), il faut sans aucun doute faire un sérieux effort
pour réconcilier ces facteurs...» (1).
La tâche ainsi définie se compliquait du fait que les deux
communautés étaient de race et de religion différentes et
que leurs objectifs politiques différaient également.
Les Anglais se sont toujours distingués en l'occurrence par
leur inhabileté, et par l'opportunisme dont ont fait preuve
les hommes d'Etat des trois partis. Il n'est pas question de
brouiller les cartes en justifiant leur attitude par des buts
politiques. Gladstone, lui-même, chaud partisan de l'Enosis,
abandonna cette attitude lorsqu'il vint au pouvoir. Le grand
idéaliste socialiste, Lord Passfield (Sidney Webb), se place en
tête pour la brutalité des formules qui caractérisèrent les
déclarations ministérielles tout au long de l'administration
britannique à Chypre. (En 1929, il rejeta une pétition chy
priote grecque en disant : « Ce qu'il faudrait à Chypre actuel
lement, c'est moins de palabres et plus de travail construc-
tif ».) Récemment, une déclaration maladroite d'un porte-
parole du gouvernement travailliste mit le gouvernement
grec dans un sérieux embarras alors qu'il s'efforçait de suivre,
dans la question de Chypre, une politique modérée ; quant
à la crise finale de 1954, elle fut précipitée par une série de
fautes commises par des ministres conservateurs.
(1) Strategic Colonies and their future. Fabian Colonial Bureau, octobre 1945, p. 5. CHYPRE 219
L'Enosis et les Anglais
Le mouvement pour l'union avec la Grèce (Enosis) avait
pris naissance avant l'arrivée des Anglais en 1878. Le natio
nalisme grec fut encouragé par l'attitude tolérante des
autorités britanniques envers les activités de l'Eglise ortho
doxe grecque et envers les établissements d'enseignement
secondaire grecs. L'Eglise, à Chypre, continua, comme par
le passé, d'exercer une influence prépondérante dans les
affaires civiles, contrairement à ce qui se passait en Grèce,
où Eletherios Venizelos et d'autres libéraux cherchaient à
restreindre les pouvoirs des évêques. La politique britan
nique, en ce qui concerne l'enseignement, semble avoir été
inspirée à la fois par des considérations pro-helléniques et
par des raisons d'économie. Les premiers gouverneurs
anglais, nourris de littérature classique, ne voyaient rien à
redire à un programme qui tendait à exalter l'histoire de la
Grèce antiques, ignorant les entorses apportées à la vérité
historique en vue de favoriser l'irrédentisme grec. Un tiers
environ des enseignants venaient de Grèce ; leur traitement
était payé par le gouvernement grec ; les programmes étaient
soumis à l'approbation du ministre de l'Education à Athènes.
Les autorités britanniques espéraient qu'en fermant les yeux
sur la sédition qui était prêchée dans les églises et dans la
l' presse, Enosis le resta feu s'éteindrait un sujet de de rhétorique lui-même : ; les pendant bonnes des relations années,
entre la Grèce et la Grande-Bretagne empêchaient qu'il ne
devînt une source de frictions internationales. L'absence de
violence dans l'île — les émeutes de 1931 mises à part —
donnait faussement l'impression que le mouvement, tout en
causant parfois de l'irritation, n'était pas inquiétant.
Les Chypriotes turcs ont toujours été fermement opposés
à tout système de gouvernement qui les mettait sous la
domination de la majorité grecque. Dès 1882, ils présen
tèrent une pétition au britannique réclamant 220 NANCY CRAWSHAW
l'égalité de la représentation dans les affaires locales en i
nvoquant le précédent de l'Asie mineure, où les chrétiens,
bien que minoritaires, avaient le même nombre de voix que
les musulmans dans les conseils administratifs. Toute agi
tation grecque en faveur de l'Enosis était suivie d'une
protestation turque. L'incertitude quant à l'avenir politique
de l'île provoqua en 1919 la formation d'un petit parti
chypriote turc qui prônait le rattachement à la Turquie. En
fait, les intérêts turcs étaient garantis par la structure du
Conseil législatif, les votes combinés des Turcs, des fonc
tionnaires et du président excédant ceux des Grecs. Après les
émeutes grecques de 1931, la Constitution et les élections
municipales furent suspendues. L'administration britannique
sembla s'installer à demeure ; l'agitation publique en faveur
de l'Enosis diminua : ainsi disparaissait la cause principale
des inquiétudes des Chypriotes turcs.
Des tendances séparatistes sont cependant à la base même
de la structure sociale de Chypre. Chaque communauté a
gardé ses propres organisations, religieuses et éducatives. Les
Grecs et les Turcs se mêlent peu socialement et les mariages
mixtes sont interdits, sauf si l'un des époux adopte la rel
igion de l'autre. Les secteurs grecs et turcs dans les villes et
les villages mixtes sont bien définis alors même que les pro
priétés et les activités ont tendance à s'interpénétrer. Dans
les activités principales et dans la banque, les communautés
sont séparées. Les Grecs excellent dans le négoce ; les Turcs
sont avant tout une communauté agricole et u

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