La Suède en 1946 - article ; n°6 ; vol.11, pg 541-552
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Description

Politique étrangère - Année 1946 - Volume 11 - Numéro 6 - Pages 541-552
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1946
Nombre de lectures 17
Langue Français

Extrait

George Soloveytchik
La Suède en 1946
In: Politique étrangère N°6 - 1946 - 11e année pp. 541-552.
Citer ce document / Cite this document :
Soloveytchik George. La Suède en 1946. In: Politique étrangère N°6 - 1946 - 11e année pp. 541-552.
doi : 10.3406/polit.1946.6258
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1946_num_11_6_6258LA SUÈDE EN 1946
Dès la fin de la première guerre mondiale, la Suède a accueilli l'idée et les
doctrines de la Société des Nations avec un zèle digne des plus grands éloges.
Bien que la décision lui fût cruelle, elle accepta sans réserve l'arbitrage
de la S. D. N. qui attribuait les îles d'Aland à la Finlande. De 1 920 à 1 936,
comme le Danemark et la Norvège, elle a désarmé dans une très large
mesure.
Après l'avènement d'Hitler, la situation évolua. Au moment de l'affaire
des sanctions contre l'Italie, les Suédois, quoique traditionnellement
neutres, acceptèrent le principe imposé par l'Angleterre. Ils se réjouirent
de voir la Grande-Bretagne sortir enfin de sa torpeur et prendre en main le
« leadership » des démocraties en Europe.
J'ai suivi cela de très près. Ce fut pour beaucoup de Suédois, qui s'orien
taient vers les pays anglo-saxons et vers la S. D. N., une catastrophe morale
de voir les grandes démocraties « se dégonfler », si j'ose m'exprimer ainsi,
dans l'affaire des sanctions. A partir de 1 935, j'ai pu observer ce phénomène
symptomatique, mais, hélas ! bien compréhensible : l'Angleterre perdant
rapidement son prestige, malgré sa popularité considérable, et l'Allemagne,
impopulaire, voyant son prestige s'accroître de jour en jour.
En 1 939, pendant « la drôle de guerre », les Suédois ont assisté avec stu
peur à l'écrasement de la Pologne par les Allemands sans que les Alliés,
anglais ou français, tirent un seul coup de canon et sans qu'un seul avion
allié jette une seule bombe sur l'Allemagne ou sur la Pologne.
La Suède pendant le conflit.
Puis survint la guerre russo-finlandaise, pendant laquelle les Alliés n'on
rien fait d'efficace, leur aide restant purement verbale. Il y a eu alors, en
Suède, un sentiment d'impuissance, de désespoir, l'impression que rien ne
résistait aux Allemands.
Cinq ans plus tard, comme je demandais au président du Conseil, Per
37 542 GEORGE SOLO.VEYTCHIK
Albin Hansson — qui vient de mourir, — pourquoi il s'était opposé, en 1939,
au passage des armées anglaises et françaises que MM. Chamberlain et
Daiadier prétendaient envoyer au secours de la Finlande, puisque, idéolo-
giquement, moralement, sentimentalement, il était évident que la Suède
avait tout intérêt à Voir la Finlande secourue par les Alliés, Per Albin Hans
son me répondit : « Après l'expérience des sanctions, de Munich, de la
Pologne, du début de la guerre mondiale, nous savions que les Anglais et les
Français ne pouvaient agir de façon efficace. Nous n'aurions fait qu'entraî
ner la Suède dans une guerre contre la Russie, et cela aurait été une catas
trophe non seulement pour nous, mais pour les Alliés. Nous ne voulions
pas transformer notre pays en champ de bataille. Une telle décision n'aurait
pas sauvé la Finlande, mais aurait été un désastre pour l'Europe occi
dentale. »
Je dois dire qu'il avait parfaitement raison, l'histoire l'a prouvé. Je
n'imagine pas de plus terrible catastrophe que celle qui attendait les Alliés
en Finlande. Plusieurs mois plus tard, en effet, au moment de l'invasion de
la Norvège et du Danemark, leur impréparation fut flagrante. Qu'auraient-
ils pu envoyer en Finlande ? Une défaite totale était inévitable. Elle aurait
facilité la victoire de l'Allemagne, peut-être avec la collaboration, sinon
l'alliance de Staline. J'ignore si Per Albin Hansson, pendant l'hiver tra
gique de 1939-1940, a agi avec une connaissance profonde de la situation ou
seulement par intuition. Mais son refus de laisser passer les troupes alliées
en Finlande a servi la cause de la démocratie au lieu de la trahir, comme
beaucoup l'ont dit à cette époque.
La vraie crise est venue, pour la Suède, non pendant la guerre finlandaise,
qui, du reste, a été de courte durée et qui fut l'occasion, pour de très nom
breux Suédois, d'aider de leur mieux les Finie ndais en leur fournissant des
milliers de volontaires, des munitions, de la nourriture, du matériel de
guerre, des crédits, à titre semi-officiel ; elle a éclaté le 9 avril 1 940, lors-
qu'Hitler s'est rué sur le Danemark et la Norvège.
Il ne s'agissait plus alors de neutralité ou de problèmes diplomatiques,
mais d'une question de vie et de mort pour les Suédois. La guerre, brusque
ment, arrivait à leur porte. Les deux nations sœurs étaient envahies, et le
même sort attendait la Suède.
On a souvent reproché au gouvernement suédois de n'être pas immédiate
ment intervenu en faveur du Danemark et de la Norvège, on a présenté sa
politique de neutralité comme une trahison morale. Or c'est voir les choses
sous un angle faux que d'affirmer que les Suédois ont été neutres : ils ne
l'ont pas été du tout. A ce moment-là, et pendant toute la guerre, les Suédois
étaient sentimentalement dressés contre l'Allemagne, à l'exception de
quelques réactionnaires farouches, ou bien des opportunistes et des SUÈDE EN 1946 543 LA
mécontents comme le propriétaire de deux grands journaux de Stockholm,
Torsten Kreuger, et le rédacteur en chef, Borje Brillioth. A partir du
moment où il s'est agi de la guerre en Scandinavie, de la guerre entre
l'Allemagne et les deux démocraties sœurs, les sympathies de la Suède
presque tout entière étaient nettes. Toutefois, entre les sympathies et
les moyens d'action, la marge est grande. La Suède, entre les deux guerres,
avait désarmé, et je ne crois pas qu'elle aurait pu intervenir pour aider
efficacement Danois et Norvégiens. Elle aussi, en 1 940, aurait été écrasée
comme le furent les deux pays voisins et tant d'autres.
Les Suédois, cependant, en 1940 et 1941 , ont pu réaliser un réarmement
intensif ; ils l'ont fait en moins de trois ans, à une cadence comparable à
celle du réarmement américain. Ils ont dépensé 2 milliards de couronnes
par an, ce qui représente, pour un pays de 6 millions et demi d'habitants,
un sacrifice financier sans précédent ; 750 000 Suédois environ ont été appel
és sous les drapeaux.
Tout en réarmant, la Suède n'a jamais cessé d'aider les Norvégiens et les
Danois. Ce fut tout d'abord une terre de refuge. Des milliers de Danois et
de Norvégiens ont pu s'y abriter ; ils y ont trouvé du travail, ils y ont fait
également de l'entraînement militaire dans la « police auxiliaire » et prépa
rèrent ainsi la libération de leur pays.
La Suède a été, en outre, à un moment donné, l'unique lien entre les
pays occupés, d'une part, et le gouvernement norvégien à Londres, le Comité
de Libération danois, les Américains et le monde occidental, d'autre part.
S'il est vrai que la Suède a eu de très grendes compleisences'pour les
Allemands, il n'est pas moins vrai que l'side active qu'elle a fournie aux
Alliés, et notamment aux Norvégiens et aux Danois, a été plus importante
encore. Mais on n'en parlait pas autant... On peut reprocher au gouverne
ment suédois, comme on l'a souvent fait, d'être allé au-devant des desiderata
allemands. Il a notamment permis aux Allemands le trafic ferroviaire entre
la Norvège occupée et l'Allemagne. A ces reproches, Per Albin Hansson
répondait que la Suède ne voulait pas fournir à Hitler le moindre prétexte
à une invasion. Il fallait aussi, au cas où la Suède aurait dû se battre, que le
pays demeurât uni derrière son gouvernement et que personne n'eût le droit
de dire que la guerre aurait pu être évitée. La suite des événements a justifié
cette argumentation. Le gouvernement suédois devait s'occuper avant tout
des intérêts de la Suède.
C'était évidemment un manque de solidarité envers la Norvège et le
D

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