Le déclin (relatif) de l Amérique - article ; n°4 ; vol.52, pg 865-881
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Description

Politique étrangère - Année 1987 - Volume 52 - Numéro 4 - Pages 865-881
En février 1941, Life titra que le monde vivait le « siècle américain », déclaration qui correspondait à une réalité économique. Aussi, il parut naturel aux Etats-Unis de faire bénéficier de leur protection militaire les pays qui sollicitaient leur aide au cours de l'après-guerre. Mais, parallèlement à l'importance croissante de ces engagements, à partir de 1945, la part des Etats-Unis dans la production industrielle et agricole mondiale commence à diminuer et se dessine l'amorce de l'érosion de la stratégie mondiale américaine. Si les puissances économiques et militaires d'un pays ne suivent pas des chemins parallèles, le déclin de l'influence militaire suit souvent avec un léger retard celui de la puissance économique relative. De plus si on analyse la situation actuelle et future des Etats-Unis, il faut garder à l'esprit les difficultés beaucoup plus graves des Soviétiques. Ne s'agirait-il pas pour les Etats-Unis d'assurer une bonne gestion du déclin relatif? S'ils ne peuvent pas conserver leur position prééminente, les gouvernements américains successifs devraient pouvoir orchestrer des adaptations de façon à équilibrer les engage ments du pays et sa puissance... ».
The (Relative) Décline of America, by Paul Kennedy
In February of 1941, the US magazine Life announced that this was the « American century ». The daim accorded well with the economie reality, and in the postwar period, it seemed natural that the US provide military protection to countries soliciting its help. But as these commitments grew, its share of world agricultural and industrial production fell, and its global strategy started to erode. Economie and military power do not follow parallel paths, military influence often lasts longer than économie. In fact, the USSR is also facing limits to its military power. The problem for the USA is to ensure proper management of its relative decline. Dominance is no longer possible, but governments can make equilibrating arrangements to harmonise commitments to potential.
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Paul Kennedy
Le déclin (relatif) de l'Amérique
In: Politique étrangère N°4 - 1987 - 52e année pp. 865-881.
Résumé
En février 1941, Life titra que le monde vivait le « siècle américain », déclaration qui correspondait à une réalité économique.
Aussi, il parut naturel aux Etats-Unis de faire bénéficier de leur protection militaire les pays qui sollicitaient leur aide au cours de
l'après-guerre. Mais, parallèlement à l'importance croissante de ces engagements, à partir de 1945, la part des Etats-Unis dans
la production industrielle et agricole mondiale commence à diminuer et se dessine l'amorce de l'érosion de la stratégie mondiale
américaine. Si les puissances économiques et militaires d'un pays ne suivent pas des chemins parallèles, le déclin de l'influence
militaire suit souvent avec un léger retard celui de la puissance économique relative. De plus si on analyse la situation actuelle et
future des Etats-Unis, il faut garder à l'esprit les difficultés beaucoup plus graves des Soviétiques. Ne s'agirait-il pas pour les
Etats-Unis d'assurer une bonne gestion du déclin relatif? S'ils ne peuvent pas conserver leur position prééminente, les
gouvernements américains successifs devraient pouvoir orchestrer des adaptations de façon à équilibrer les engage ments du
pays et sa puissance... ».
Abstract
The (Relative) Décline of America, by Paul Kennedy
In February of 1941, the US magazine Life announced that this was the « American century ». The daim accorded well with the
economie reality, and in the postwar period, it seemed natural that the US provide military protection to countries soliciting its
help. But as these commitments grew, its share of world agricultural and industrial production fell, and its global strategy started
to erode. Economie and military power do not follow parallel paths, military influence often lasts longer than économie. In fact, the
USSR is also facing limits to its military power. The problem for the USA is to ensure proper management of its relative decline.
Dominance is no longer possible, but governments can make equilibrating arrangements to harmonise commitments to potential.
Citer ce document / Cite this document :
Kennedy Paul. Le déclin (relatif) de l'Amérique. In: Politique étrangère N°4 - 1987 - 52e année pp. 865-881.
doi : 10.3406/polit.1987.3717
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1987_num_52_4_3717ÉTRANGÈRE I 865 POLITIQUE
Paul KENNEDY Le déclin (relatif) de l'Amérique
En février 1941, quand le magazine Life d'Henry Luce titra que
le monde vivait le « siècle américain », cette déclaration cor
respondait aux réalités économiques. Les Etats-Unis, avant
même que de participer à la Seconde Guerre mondiale, fabriquaient
un tiers des produits manufacturés du monde, soit plus du double de
la production de l'Allemagne nazie et près de dix fois celle du
Japon. En 1945, après la défaite des pays fascistes, les alliés des
Américains étant économiquement exsangues, cette proportion
approchait de la moitié, soit un pourcentage jamais atteint jusque-là
ni depuis par une seule nation. Les Etats-Unis, plus qu'aucun autre
grand empire — empire romain, espagnol ou britannique de l'époque
victorienne — , semblaient alors destinés à dominer la politique
internationale sur des décennies, voire des siècles.
Dans ces circonstances, il parut naturel (quoique parfois malaisé) aux
détenteurs du pouvoir de décision de faire bénéficier de la protection
militaire des Etats-Unis les pays qui leur demandaient leur aide dans
les années turbulentes de l'après-guerre. Citons leur engagement
d'abord en Grèce et en Turquie, puis, à partir de 1949, leur
contribution massive à l'OTAN, leurs relations privilégiées avec
Israël et, souvent, à l'opposé, avec l'Arabie Saoudite, la Jordanie,
l'Egypte et de petits pays arabes, leurs obligations à l'égard de leurs
partenaires des organisations régionales de défense comme l'OTASE,
le CENTO et l'alliance de l'ANZUS. Plus près de chez nous, il y eut
le traité de Rio et les plans de défense spéciaux de l'hémisphère avec
le Canada. Au début des années 70, comme le souligne Ronald
Steel, les Etats-Unis « avaient plus d'un million de soldats cantonnés
dans 30 pays, étaient membres de 4 pactes régionaux d'alliance défen
sive et participaient activement à un cinquième, avaient signé des
traités de défense mutuelle avec 42 nations, appartenaient à 53 organi
sations internationales et fournissaient une aide économique ou mili
taire à près de 100 pays du monde entier ». A la fin de la guerre du
Vietnam, l'effectif des troupes américaines stationnées à l'étranger
* J. Richardson Dilworth Professor d'histoire à l'Université de Yale. I POLITIQUE ÉTRANGÈRE 866
diminue certes énormément, mais la totalité des obligations améri
caines qui subsistaient aurait sans nul doute époustouflé les pères
fondateurs.
Toutefois, tandis que les engagements des Etats-Unis ont crû réguli
èrement après 1945, leur part de la production industrielle mondiale
et du produit mondial brut commença à diminuer, au début assez
lentement, puis de plus en plus vite. En un sens, on pourrait
affirmer que ce déclin ne veut rien dire. Ce pays est aujourd'hui
beaucoup plus riche dans l'absolu qu'en 1945 ou en 1950, et la
plupart des citoyens américains jouissent d'un niveau de vie bien
supérieur en termes absolus. D'un autre côté, néanmoins, on peut
s'inquiéter de la diminution de la part de la production américaine
au niveau mondial en raison de ses rejaillissements sur la stratégie
planétaire de ce pays qui ne s'estime pas seulement par ses forces
militaires mais aussi par d'autres éléments associés (économiques,
sociaux, politiques et diplomatiques) qui contribuent au succès d'une
politique nationale à long terme.
L'érosion de la stratégie mondiale des Etats-Unis
L'effritement progressif du fondement économique de la puissance
américaine avait plusieurs causes. En premier lieu, l'industrie natio
nale a connu un recul par rapport à la production mondiale non
seulement dans les secteurs traditionnels comme les textiles, la sidé
rurgie, les chantiers navals et la chimie lourde mais également —
quoiqu'il soit difficile de se prononcer sur l'issue définitive du combat
industriel et technique qui se livre actuellement — dans les domaines
de la robotique, de l'aérospatiale, de l'automobile, des machines-
outils et de l'informatique. Ces deux secteurs connaissent des pro
blèmes considérables : dans les industries traditionnelles et de trans
formation, le fossé entre les salaires aux Etats-Unis et dans les
nouveaux pays industrialisés est tel qu'aucune mesure d'accroissement
de la productivité ne saurait le combler. Mais, si les Etats-Unis
essuyaient une défaite dans la bataille pour les techniques de pointe,
ce serait un désastre plus grand encore.
Les Etats-Unis reculent également dans un deuxième domaine, celui-
là plus inattendu : l'agriculture. Il y a dix ans à peine, les experts
annonçaient un déséquilibre mondial terrifiant entre les besoins al
imentaires et la production agricole. Mais les scénarios prévoyant la
famine et la catastrophe suscitèrent deux réactions puissantes. Pre
mièrement, on assista à des investissements massifs dans l'agriculture
américaine à partir des années 70, les agriculteurs tablant sur les
perspectives de ventes importantes de produits alimentaires à l'étran
ger. Deuxièmement, on lança des recherches à grande échelle, finan
cées par l'Occident, pour trouver des moyens scientifiques d'accroître
les rendements des cultures dans le Tiers-Monde. Le succès de ces APRÈS LE KRACH ILES ÉTATS-UNIS I 867
efforts fut tel qu'un nombre croissant des pays du Tiers-Monde sont
devenus des exportateurs de produits agricoles et donc des concurr
ents des Etats-Unis. Simultanément, la Communauté économique
européenne est devenue un grand producteur d'excédents agricoles
du fait de sa politique de soutien des prix. Par conséquent, les
experts parlent maintenant d'un « monde noyé dans la nourriture »
et, de ce fait, les prix agricoles ont chuté brutalement ainsi que

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