Les conséquences sur la politique extérieure des Etats-Unis de certains aspects de la vie politique intérieure du pays - article ; n°1 ; vol.20, pg 27-40
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Les conséquences sur la politique extérieure des Etats-Unis de certains aspects de la vie politique intérieure du pays - article ; n°1 ; vol.20, pg 27-40

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Description

Politique étrangère - Année 1955 - Volume 20 - Numéro 1 - Pages 27-40
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 12
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Robert G. Neumann
Les conséquences sur la politique extérieure des Etats-Unis de
certains aspects de la vie politique intérieure du pays
In: Politique étrangère N°1 - 1955 - 20e année pp. 27-40.
Citer ce document / Cite this document :
Neumann Robert G. Les conséquences sur la politique extérieure des Etats-Unis de certains aspects de la vie politique
intérieure du pays. In: Politique étrangère N°1 - 1955 - 20e année pp. 27-40.
doi : 10.3406/polit.1955.2604
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1955_num_20_1_2604CONSÉQUENCES SUR LA POLITIQUE EXTÉRIEURE LES
DES ÉTATS-UNIS DE CERTAINS ASPECTS DE LA VIE
POLITIQUE INTÉRIEURE DU PAYS
L'importance croissante des États-Unis dans les affaires internationales
a fait naître un intérêt très vif pour la politique et les institutions intérieures
de ce pays. On s'aperçoit, en effet, du lien très étroit qui existe dans tous
les pays entre la politique extérieure et la politique intérieure. Cependant,
bien que cet état de fait soit très connu, on n'en tire pas toujours toutes les
conséquences.
Tout d'abord, les yeux de l'étranger, et tout particulièrement des corres-r
pondants étrangers, sont fixés sur Washington, où l'on croit que sont prises
les grandes décisions. Cette attraction presque mystique de Washington est
fortement nourrie par une vaste bureaucratie fédérale imbue de son impor
tance qui caractérise dans le monde entier le fonctionnariat.
Peut-être compare-t-on Washington trop facilement à Paris ou à Londres,
où sont réunis non seulement les gouvernants et les parlements, mais
aussi les chefs des partis politiques, ainsi que leurs comités directeurs et
leurs secrétariats. Dans ces grandes capitales européennes se trouvent aussi
les journaux les plus importants, les centres de radiodiffusion et de la télé
vision, et le foyer principal de la vie intellectuelle et de la pensée du pays.
Rien de cela ne s'applique à Washington. Cette belle ville, dont le plan
a été conçu par un architecte français, n'est point le centre de la pensée
américaine. Un grand nombre de ses habitants se considèrent de passage,
même s'ils deviennent très Washingtoniens. C'est une ville sans vie civique,
à l'exception de la vie fédérale, sans atmosphère véritablement métropol
itaine, sans intérêts communs assez nombreux pour pouvoir soutenir son
propre « orchestre symphonique » (que possèdent presque toutes les villes
importantes du pays).
En Amérique, les partis politiques organisés n'existent que sur le plan
local dans le cadre de l'État. Il n'y a pas de politique pour l'ensemble du 28 ROBERT NEUMANN
pays. L'organisation nationale est une organisation fantôme. Les comités
nationaux républicains et démocrates ne sont nullement des comités direc
teurs du type européen. Us ne sont que des comités de coordination destinés
à organiser le travail des campagnes électorales présidentielles. Ils ne
dirigent pas les partis ; ils ne prennent pas de décisions sur la politique
étrangère ou intérieure du parti ; ils ne s'occupent ni de doctrine, ni de
programme. Les sénateurs et les membres de la Chambre des Représentants
ne sont jamais membres du comité national de leur parti ; ils ne sont pas
les véritables chefs de leur parti — à part quelques exceptions. L'orga
nisation locale des partis rend presque impossible à quelqu'un qui est
éloigné de l'État une grande partie de l'année la direction effective de ce
parti.
En revanche, il arrive que des sénateurs et des membres de la Chambre
soient étroitement contrôlés par l'organisation locale. Dans le feu des
campagnes électorales, les candidats opposés s'accusent bien mutuellement
d'être les créatures de tel ou tel « boss » (chef) ; en fait, dans la majorité
des cas, ces accusations sont sans base réelle. Un candidat a besoin, très
souvent, du soutien qu'une organisation puissante peut lui donner, mais
l'organisation, elle aussi, a besoin d'élus.
En outre, l'usage très répandu, dans les campagnes électorales, de l'arg
ument qu'un autre candidat est contrôlé par un « boss » indique qu'un tel
candidat n'est pas très bien vu du corps électoral, qui, par le moyen des
élections primaires, peut se débarrasser de lui. Ce sont, en effet, ces élections
primaires qui ont commencé à éliminer le « boss » classique.
Le défaut d'organisation nationale a pour résultat que les partis poli
tiques américains n'arrivent pas à devenir, comme en Europe, les cata
lyseurs de l'opinion publique. En effet, les partis politiques ont tendance à
suivre les grands courants de l'opinion publique plutôt qu'à vouloir la diriger.
La vie politique des États-Unis est actuellement fortement influencée
par l'expérience des territoires de l'Ouest. C'est le professeur Frederick
Jackson Turner qui donna une nouvelle tendance à la pensée historique des
États-Unis en démontrant l'importance de la « frontière » dans la formation
du caractère américain (1). Il est possible que, dans quelques générations,
cette théorie ne soit plus valable. Mais il est incontestable que l'exigence de
la vie dans les grands espaces sauvages connus sous le nom de « frontière »
affectait notablement la vie politique et démocratique américaine.
La « thèse de la frontière » ne peut à elle seule expliquer le mouvement
démocratique, car, d'une part, les mêmes tendances existent à l'Est du pays
(à moins qu'on ne considère toute l'Amérique comme « frontière »), et,
(1) P. J. Turner, < Contribution of the West to American Democracy », Atlantic Monthly,
January, 1903 ; The Frontier in American History, New York, 1920. POLITIQUE AMÉRICAINE 29
d'autre part, le XIXe siècle est caractérisé par un accroissement de l'esprit
démocratique en Europe comme en Amérique. Mais, à la frontière, dans les
territoires de l'Ouest, l'administration locale et communale comptait seule.
Washington était très loin. L'Ouest, avec ses promesses de terre libre et ses
hommes libres, attirait les esprits indépendants, les mécontents. Dans la
vie rude et sévère de l'Ouest, l'opinion de chaque homme — et même de
chaque femme — avait plus de poids ; c'était l'Ouest qui créait le type du
leader fort, opportuniste, sans doctrine politique spécifique, mais qui
comprenait superbement les désirs et les aspirations du peuple. Andrew
Jackson, l'homme de l'Ouest, montait la première véritable campagne
électorale moderne sur une base populaire de très grande envergure.
Frustré de la présidence par un marchandage peu honnête en 1824, il
s'engageait dans une campagne électorale quatre ans plus tard avec une
formule qui est encore actuellement en vigueur. Ce fut l'Ouest qui élargit
considérablement l'ampleur de la consultation électorale. Le Kansas fit
son entrée dans l'Union en 1861, avec une constitution qui permettait aux
femmes de voter sur toutes les questions scolaires ; en 1 869, le territoire du
Wyoming établissait le suffrage des femmes et leur éligibilité. (J'ajouterai
qu'en 1917 tous les États de l'Ouest des États-Unis avaient donné le suf
frage aux femmes.)
Le but de ce genre' de politique était toujours le contrôle du pouvoir plutôt
que la réalisation d'une doctrine ou d'un programme. Mais, quand le combat
pour le pouvoir se déroulait dans une atmosphère démocratique et popul
aire, il fallait obtenir le soutien du peuple. C'est pourquoi les partis poli
tiques américains firent un grand effort pour se mettre au niveau de l'opi
nion publique courante.- C'est en particulier le cas en politique étrangère,
où les organisations de partis — toujours sur le plan local et étatique exclu
sivement — ont peu d'intérêts particuliers à défendre et sont donc prêts à
suivre les tendances et les préjugés du public.
Un tel état de choses encourage celui-ci à s'exprimer librement, tendance
également nourrie par le caractère d'une jeune nation qui dispose de vastes
espaces gaspillés, qui est donc généreuse, enthousiaste et peu réticente.
Ainsi les 

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