Mise en page 1 - ANTROPOLOGICA (Sito di Antropologia) - Antropologica
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Baa-trayreB-nartiM:dseenpage115/11/016:515aPeg1
Décembre 2006
LESanciennes puissances coloniales sont régulièrement confrontées au surgissement du passé dans leurs rapports avec leurs possessions d’antan. Les crises diplomatiques entre le Zimbabwe et le Royaume-Uni ou entre la Côte d’Ivoire et la France, la polémique entre Paris et Alger sur l’œuvre coloniale, l’invocation des atrocités de la conquête par le colonel Kadhafi pour obtenir de l’Italie le financement de l’au-toroute Tripoli-Benghazi sont des illustrations, parmi beaucoup d’autres, de ce constat. Le Japon – puissance coloniale méconnue – n’échappe pas à la règle, dont les crimes pendant la Seconde Guerre mondiale et l’expansion territoriale à partir de la fin duXIXesiècle continuent d’obérer ses relations avec la Corée du Sud et la Chine. En Bolivie, le président Evo Morales, tout à sa nationalisation des hydro-carbures, pointe du doigt l’entreprise espagnole Repsol en dénonçant « les cinq cents ans de spoliation des richesses naturelles ». Or, il ne s’agit pas seulement d’une instrumentalisation politique ou diplomatique de la mémoire historique de la part de gouverne-ments roués et cyniques, même si, en l’occurrence, le caractère * Jean-François Bayart (bayart@ceri-sciences-po.org), chercheur au CNRS(Ceri-Sciences Po),estl'auteurnotammentdeleGouvernementdumonde.Unecritiquepolitiquedelaglobali-sation,Paris,Fayard,2004,lIllusionidentitaire,Paris,Fayard,1996etlÉtatenAfrique.La politiqueduventre,Paris,Fayard,1989,quivientd'êtrerééditéavecuneprefaceinédite. Romain Bertrand (bertrand@ceri-sciences-po.org), chercheur à la FNSPesPo)vienÉtd.dris,C(re-icSeicn defaireparaîtreMémoiresdempire.Lacontroverseautourdu«faitcolonial»,PauCro-quant/Savoir-Agir,2006.Ilestégalementl'auteurdeÉtatcolonial,noblesseetnationalismeà Java.LaTraditionparfaite,Paris,Kaltduneréflexioncom-munemenéedanslecadreduséminaaritrhe«a,Tr2aj0e0c5t.oiCreestadruticploeliteisqtulee:frÉutiat,nation,empire»du Centre d’études et de recherches internationales, et dans celui du programme « Legs colonial et gouvernance contemporaine » du Fonds d’analyse des sociétés politiques. Les auteurs remer-cient particulièrement Thornike Gordadze, Béatrice Hibou, Françoise Mengin, qui ont participé au programme « Legs colonial et gouvernance contemporaine », et l’Agence française de déve-loppement pour son concours, ainsi que tous leurs collègues historiens et anthropologues fran-çais, turcs, sénégalais, indiens, britanniques, néerlandais, allemands, italiens, mexicains et américains avec lesquels ils ont échangé.
Jean-François Bayart et Romain Bertrand*
1
De quel « legs colonial » parle-t-on ?
a-Bayart-Bertrand:Miseenpage115/11/0615:51Page2
De quel « legs colonial » parle-t-on ? « spontané » des manifestations anti-japonaises en Chine, durant l’an-née 2005, a pu prêter à sourire ou s’il est devenu de notoriété publique que le président Gbagbo et son entourage attisent et mani-pulent les émois nationalistes des Jeunes Patriotes ivoiriens au gré de la conjoncture. Dans toutes ces situations, le souvenir de l’occupation étrangère constitue un potentiel de passions irréductible à l’utilisa-tion tactique qui en est faite, et souvent contraignant pour les diri-geants nationaux eux-mêmes. Ainsi, la question des « femmes de réconfort » en Corée du Sud a gêné à intervalles réguliers, ces der-nières années, la diplomatie de Séoul du fait des mobilisations popu-laires qu’elle suscitait. En Afrique, les témoignages sont multiples qui attestent l’ancrage des représentations de l’aide publique au développement et des migrations dans le passé colonial. « Partir, c’est aussi un défi, une lutte entre la France et nous. Même si vous construisez un Mur de Berlin, nous le franchirons. On a été colonisés par la France, c’est en France qu’on doit aller », déclare par exemple un jeune Malien de Kabaté, dans la région deKayes1. Et le chanteur contestataire Alpha Blondy affirmait dès 1985 : « Nous sommes un meltingpotculturel,desmutantsculturelsquelOccidentacrééset qui font se gratter la tête. Ils sont venus et nous ont dit : “On va vous coloniser. Laissez tomber les pagnes et les feuilles. Prenez le tergal, le blue-jean, ray ban style.” Et puis, en cours de route, ils changent d’avis : “Écoute, ça revient trop cher, vous êtes indépendants !” Ca serait trop facile ! Nous ne voulons pas de cette indépendance-là. Nous voulons que cette coopération qui a si bien démarré continue. Tu sais que tu es condamné à me reconnaître, tu ne peux pas m’appe-ler bâtard ; je suis le fruit de ta culture. Je suis maintenant une pro-jection de toi […] Les Blancs ne doivent pas démissionner. Celui qui m’a conquis et qui m’a mis son verbe sur la langue, il n’a pas intérêt à se tromper. Je ne peux pas le luipermettre2. » Quant à Tiken Jah Fakoly, il chante : Après l’abolition de l’esclavage Ils ont créé la colonisation Lorsqu’on a trouvé la solution Ils ont créé la coopération Comme on dénonce cette situation Ils ont créé la mondialisation Et sans expliquer la mondialisation C’est Babylone qui nousexploite3. La mémoire de la colonisation et de l’esclavage nourrit des repré-sentations culturelles dont certaines formes de sorcellerie, telles que l’ekong, le culte de la Mami Wata ou la fantasmagorie reggae chez les 1. P. Bernard, « Mali, partir pour se nourrir », LeMonde, 4-5 décembre 2005, p. 15. 2.Libération,27septembre1985. 3.TikenJahFakoly,«Yenamarre»,Françafrique,UniversalMusic,2002. 2
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