Un triangle dangereux : Inde-Pakistan-Afghanistan - article ; n°3 ; vol.68, pg 583-598
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Politique étrangère - Année 2003 - Volume 68 - Numéro 3 - Pages 583-598
A Dangerous Triangle: India-Pakistan-Afghanistan, by Gilbert ETIENNE
The India-Pakistan-Afghanistan triangle has found itself, since the attacks of 9/11 and the launching by Washington of the long war against terrorism, at the heart of the new world disorder. The changing and contradictory relationship between India and Pakistan, the ambiguous relations which link the latter to today's Afghanistan, as well as the apparently very friendly relations between New Delhi and Kabul: all of these elements form the background over which different factors of instability are intertwined, whether these relate to religious fundamentalist movements, desperate economie difficulties or the trafficking of much coveted opium and heroine. The increasing weight of the United States in Central Asia and in the Middle East, in par-ticular since the intervention in Iraq, add to the instability or at least to the political tensions which riddle a region in which Iran, Russia and China have not given up on their desire to exert their influence as well.
Le triangle Inde-Pakistan-Afghanistan se trouve placé, depuis le 11 septembre 2001 et le lancement par Washington de la « longue guerre contre le terrorisme », au cœur du nouveau désordre mondial. Les relations changeantes et contradictoires entre l'Inde et le Pakistan, les liens ambigus qui unissent celui-ci et l'Afghanistan d'Hamid Karzaï, et l'entente apparemment très cordiale entre New Delhi et Kaboul : tout cela forme une toile de fond sur laquelle s'enchevêtrent des facteurs internes d'instabilité, qu'il s'agisse de mouvements religieux fondamentalistes, de difficultés économiques ou du trafic d'opium et d'héroïne, objet de toutes les convoitises. Le poids croissant des Etats-Unis en Asie centrale et au Moyen-Orient, en particulier depuis l'intervention en Irak, vient ajouter, sinon à l'instabilité, du moins aux tensions politiques qui traversent la région, où l'Iran, la Russie et la Chine n'ont pas renoncé non plus à exercer leur influence.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 127
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Etienne
Un triangle dangereux : Inde-Pakistan-Afghanistan
In: Politique étrangère N°3-4 - 2003 - 68e année pp. 583-598.
Abstract
A Dangerous Triangle: India-Pakistan-Afghanistan, by Gilbert ETIENNE
The India-Pakistan-Afghanistan triangle has found itself, since the attacks of 9/11 and the launching by Washington of the "long
war against terrorism", at the heart of the new world disorder. The changing and contradictory relationship between India and
Pakistan, the ambiguous relations which link the latter to today's Afghanistan, as well as the apparently very friendly relations
between New Delhi and Kabul: all of these elements form the background over which different factors of instability are
intertwined, whether these relate to religious fundamentalist movements, desperate economie difficulties or the trafficking of
much coveted opium and heroine. The increasing weight of the United States in Central Asia and in the Middle East, in par-ticular
since the intervention in Iraq, add to the instability or at least to the political tensions which riddle a region in which Iran, Russia
and China have not given up on their desire to exert their influence as well.
Résumé
Le triangle Inde-Pakistan-Afghanistan se trouve placé, depuis le 11 septembre 2001 et le lancement par Washington de la «
longue guerre contre le terrorisme », au cœur du nouveau désordre mondial. Les relations changeantes et contradictoires entre
l'Inde et le Pakistan, les liens ambigus qui unissent celui-ci et l'Afghanistan d'Hamid Karzaï, et l'entente apparemment très
cordiale entre New Delhi et Kaboul : tout cela forme une toile de fond sur laquelle s'enchevêtrent des facteurs internes
d'instabilité, qu'il s'agisse de mouvements religieux fondamentalistes, de difficultés économiques ou du trafic d'opium et
d'héroïne, objet de toutes les convoitises. Le poids croissant des Etats-Unis en Asie centrale et au Moyen-Orient, en particulier
depuis l'intervention en Irak, vient ajouter, sinon à l'instabilité, du moins aux tensions politiques qui traversent la région, où l'Iran,
la Russie et la Chine n'ont pas renoncé non plus à exercer leur influence.
Citer ce document / Cite this document :
Etienne. Un triangle dangereux : Inde-Pakistan-Afghanistan. In: Politique étrangère N°3-4 - 2003 - 68e année pp. 583-598.
doi : 10.3406/polit.2003.1237
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_2003_num_68_3_1237POLITIQUE ETRANGERE 3-4/2003
Un triangle dangereux :
Gilbert ETIENNE ■ Inde-Pakistan-Afghanistan j n i - * a? u ■ *
Le triangle se trouve placé, depuis le 11 septembre
2001 et le lancement par Washington de la « longue guerre contre le terro
risme », au cœur du nouveau désordre mondial. Les relations changeantes et
contradictoires entre l'Inde et le Pakistan, les liens ambigus qui unissent celui-
ci et l'Afghanistan d'Hamid Karzaï, et l'entente apparemment très cordiale entre
New Delhi et Kaboul : tout cela forme une toile de fond sur laquelle s'enchevê
trent des facteurs internes d'instabilité, qu'il s'agisse de mouvements religieux
fondamentalistes, de difficultés économiques ou du trafic d'opium et d'héroïne,
objet de toutes les convoitises. Le poids croissant des Etats-Unis en Asie centrale
et au Moyen-Orient, en particulier depuis l'intervention en Irak, vient ajouter,
sinon à l'instabilité, du moins aux tensions politiques qui traversent la région,
où l'Iran, la Russie et la Chine n'ont pas renoncé non plus à exercer leur
influence.
Politique étrangère
En dépit de troubles et de graves tensions, comme le massacre de
2 000 musulmans indiens au Gujarat, en 2002, qui faisait suite
à celui de 57 militants hindous, l'Inde n'a pas connu les crises
dramatiques qui ébranlèrent la Chine, l'Indonésie, le Pakistan,
l'Afghanistan ou l'Iran... Grâce à Jawaharlal Nehru (Premier ministre
de 1947 à 1964), les structures démocratiques se sont enracinées au
point de n'être plus guère contestées.
La montée en puissance du parti nationaliste hindou, le BJP
(Bharatiya Janata Party), au pouvoir dans un gouvernement de coali
tion depuis 1998, constitue certes un élément important. Le BJP s'est
entouré en effet d'une nébuleuse d'organisations militantes qui peu
vent recourir à la violence : attaques contre des musulmans et des
Gilbert Etienne est professeur honoraire d'économie du développement aux Instituts universitaires des hautes
études internationales et d'études du développement de Genève. .
584 / POLITIQUE ETRANGERE
chrétiens, critiques des fêtes étrangères comme la Saint- Valentin1, etc.
Le BJP et les formations qui lui sont apparentées prônent l'identité
hindoue, affaiblie par les longs siècles de domination musulmane. Il en
résulte des courants anti-pakistanais et des comportements hostiles ou
méfiants à l'égard des musulmans indiens (13 % de la population, soit
plus de 130 millions). Pour le BJP - et ce sentiment ne se limite pas à
ses partisans -, l'Inde est en train de s'affirmer en tant que grande
puissance : arme nucléaire, lancement de satellites, prouesses en infor
matique, renouveau industriel. L'économie y connaît l'un des plus
forts taux de croissance du monde (+ 5 à 6 % par an).
Scènes intérieures et facteurs externes
Le Pakistan, en revanche, est toujours à la recherche d'institutions
relativement stables. Déjà, en 1952-1954, la classe politique était
rongée par des dissensions entre les provinces, et entre celles-ci et le
pouvoir central. Après un bon début (1958-1965), le général-président
Ayyub Khan sombre en 1969. Après la sécession du Pakistan oriental,
devenu Bangladesh, l'intermède pseudo-démocratique du Premier
ministre Zulfikar Ali Bhutto n'est pas concluant (1972-1977). Lui
succède le général-président Zia Ul-Hak (1977-1988), qui redresse
l'économie mais ouvre la boîte de Pandore de l'islamisation. Les
espoirs mis dans la démocratisation de 1988 à 1999 sont déçus. A deux
reprises alternent au pouvoir Benazir Bhutto et Nawaz Sharif, qui
font tous deux preuve d'une insigne médiocrité, rehaussée par les
progrès de la corruption et la faiblesse de l'économie. Si bien qu'en
octobre 1999, le coup d'Etat du général Pervez Moucharraf est
accueilli avec soulagement même dans les couches les plus démocrat
iques de la société.
A ces problèmes récurrents s'ajoute la montée des facteurs religieux.
Le président Zia a joué l'apprenti sorcier avec l'islamisation du pays.
Jusqu'alors, les partis religieux avaient été contenus par les politiciens et
par les militaires. Le président a agi par opportunisme - les milieux rel
igieux avaient contribué à la chute de Bhutto père - et par conviction,
Zia étant un musulman pratiquant, quoique sans excès.
1 Cf. C. Jaffrelot et T. Hansen (dir.), The B.J.P. and the Compulsion of Politics, New Delhi, Oxford University
Press, 2002. UN TRIANGLE DANGEREUX : INDE-PAKISTAN-AFGHANISTAN / 585
Les dissensions parfois sanglantes entre sunnites et chiites (15 % de la
population) à propos de l'application de la charia rebondissent pério
diquement, avec de nouveaux massacres en 2003. Elles sont avivées
par les pétrodollars saoudiens teintés de wahhabisme qui financent les
madrasas sunnites, tandis que les madrasas chiites sont soutenues
par l'Iran. Les madrasas, surtout sunnites, vont devenir des pépinières
de militants pakistanais, afghans, arabes et autres, y compris d'Occi
dentaux musulmans, dès le début des guerres afghanes (1979). Dans
certains cas, la lecture du Coran fait bon ménage avec l'apprentissage
des armes. En 1999, 11 000 madrasas étaient enregistrées ; il en exis
terait aujourd'hui 30 000 {The Herald, Karachi, septembre 2002).
L'armée pakistanaise et Tinter Service Intelligence (ISI, les très puis
sants services secrets), appuyés par les Etats-Unis, l'Arabie Saoudite,
l'Egypte et d'autres pays, encadrent les militants qui se joignent aux
combattants afghans.
L'année 1994 est marquée par une nouvelle escalade. Formés dans les
madrasas pakistanaises dépendant des partis religieux, les « étudiants »
afghans réfugiés au Pakistan renforcent à Kandahar le mollah
Mohammed Omar et ses partisans. De 1994 à 1999, 80 000 Pakistanais
auraient ainsi combattu en Afghanistan, selon Ahmed Rashid {Foreign
Affairs, novembre-décembre 1999). Avec un fort soutien de l'armée

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