Une économie politique de la déglobalisation au Moyen Orient
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Une économie politique de la déglobalisation au Moyen Orient

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Une économie politique de la déglobalisation au Moyen Orient Mehrdad VAHABI
Introduction La littérature économique souligne souvent le rapport contradictoire entre la globalisation et l’Etatisme. Au vu de cette littérature, l’histoire de la globalisation au Moyen Orient et en Afrique du Nord 1 semble paradoxale. Depuis les années 1940 jusqu’aux années 1970, la plupart des pays du Moyen Orient ont suivi un modèle de développement avec une forte orientation interventionniste – redistributive  (Richards et Waterbury, 1996). Néanmoins, la croissance économique et l’intégration de la région dans l’économie mondiale ont atteint les niveaux les plus élevés au cours de cette période. La performance économique du Moyen Orient dans les années 1950 et 1960 était la plus élevée à l’échelle mondiale avec un taux de croissance de 6 pour cent. Entre 1960 et 1985, la région a connu un taux de croissance de 3.7 pour cent du PIB. Certes, ce taux était inférieur à celui de l’Asie de l’Est et de la région du Pacifique qui avaient enregistré un taux de 4.3 pour cent. Mais ce taux était plus élevé que le taux de 1.6 pour cent qu’avait connu la région de l’Amérique Latine et les Caraïbes (World Bank, 2003c). Les premiers signes alarmants d’une crise économique au Moyen Orient ont émergé au début des années 1980. A la fin de cette décennie, la région a traversé une crise majeure. Le ralentissement de la croissance économique a conduit d’abord le Maroc, la Tunisie, et la Jordanie à embarquer dans une politique de stabilisation depuis le milieu des années 1980. La plupart des pays de la région ont suivi le même chemin par la suite. Néanmoins, l’infléchissement des politiques interventionnistes et étatistes fortes n’a pas abouti à une intégration plus poussée de la région dans l’économie mondiale. Pendant les deux dernières décennies, cette région n’a pas pu bénéficier de l’expansion du commerce mondial et de l’investissement direct étranger (IDE). A présent, elle est une des régions les moins intégrées du monde (Hakimian et Nugent, 2004). Malgré d’importantes exportations d’hydrocarbures, la part des exports et des imports au PIB a baissé d’un taux initial de 100% au milieu des années soixante-dix (un des plus élevés parmi les pays en voie de développement) à 60% au milieu des années quatre-vingt dix, et a stagné depuis cette date. Hormis le pétrole, le commerce a été réduit d’un niveau équivalent à 53 pour cent du PIB au début des années quatre-vingt, et à 43 pour cent en 2000. Dans la même 1  Selon la classification de la Banque Mondiale (2003b), cette région couvre les vingt et un pays ou territoires suivants: les six pays membres du Conseil de Coopération du Golfe (le Bahrayn, le Koweït, l’Oman, le Qatar, l’Arabie Saoudite, et les Emirats d’Arabes Unis), et les quinze autres pays et territoires, à savoir l’Algérie, Djibouti, l’Egypte, l’Iraq, l’Iran, l’Israël, la Jordanie, le Liban, la Libye, Malte, le Maroc, la Syrie, la Tunisie, le Yémen, la bande de Gaza et la Cisjordanie. Ainsi, l’Afghanistan ne fait pas partie de cette région, bien que la position géopolitique de ce pays l’intègre dans cette région. Par ailleurs, même si l’Israël fait partie de cette région compte tenu des spécificités de son économie, on ne l’inclut pas dans l’économie politique de cette région. Par ailleurs, dans la suite de ce texte, chaque fois que l’on se réfère au Moyen Orient, on entend aussi le Moyen Orient et l’Afrique du Nord.
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veine, le commerce interrégional a stagné depuis les années soixante-dix représentant moins de 10 pour cent du commerce total. Certains auteurs ont attribué cette baisse au régime commercial protectionniste dans la région marquée par des taux tarifaires très élevés de l’ordre de 17 pour cent en moyenne (Yousef, 2004). D’autres chercheurs comme Nabil et Véganzonès (2004) ont souligné l’importance de la surévaluation des taux de change de l’ordre de 22 pour cent en moyenne pour l’ensemble de la région durant la période 1985-2000. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que seulement quatorze pays de la région font partie de l’Organisation Mondiale du Commerce (l’OMC), tandis que 6 demandes d’adhésion sont en suspens pour l’instant. L’état de l’investissement direct étranger (IDE) peut aussi paraître inquiétant. Hormis les petits pays du Golfe Persique, la région du Moyen Orient a reçu 2.2 milliards de dollars en termes de flux net de l’IDE en 2000. Ces flux ont atteint moins d’un demi-point (en pourcentage) du PIB pour la période 1985-2000. L’Egypte à elle seule a obtenu la moitié de cet investissement (1.2 milliards de dollars américains), tandis que la Jordanie (750 millions de dollars), et la Tunisie (560 millions de dollars) ont reçu chacune presque un quart. Les autres pays ont obtenu de très petites sommes et certains comme le Yémen ont connu l’exode du capital. Incontestablement, la région a enregistré un accroissement significatif de la part de l’IDE en 2005 en dépit des tensions géopolitiques. L’entrée de l’IDE a atteint 37.7 milliard de dollars qui était 74% supérieur au montant de l’année précédente. Cependant, la part relative des entrées de l’IDE dans la région reste négligeable en comparaison avec les autres pays en voie de développement (UNCTAD, 2005). Il faut aussi souligner que la grande partie de l’IDE a été absorbée par trois pays par ordre d’importance, à savoir les Emirats d’Arabes Unis (12 milliards de dollars), l’Egypte (5.37 milliards de dollars), et l’Arabie Saoudite (4.6 milliards de dollars). La hausse des recettes pétrolières pendant cette année a également contribué à l’expansion du commerce interrégional. Le Liban a notamment profité de cette hausse. L’Arabie saoudite en tant que soutien économique et politique ardent de la famille Hariri a investi considérablement au Liban jusqu’à la moitié de l’année 2006, date à laquelle l’Israël a attaqué le Liban, et l’IDE au Liban a été arrêté. De surcroît, l’élection du président Mahmoud Ahmedinejad en Iran et le dossier nucléaire iranien ont provoqué de nouvelles tensions se heurtant à l’IDE et au développement du commerce interrégional. Les tendances générales en cours ne se sont donc pas inversées pendant ces dernières années. Comment peut-on expliquer la globalisation économique des années 60 et 70, puis cette déglobalisation économique des deux dernières décennies ? L’objectif de ce papier consiste à explorer les causes de la déglobalisation économique de la région du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord depuis les deux dernières décennies. Cette déglobalisation économique s’inscrit dans un contexte de globalisation politique marquée par l’instabilité politique et les conflits violents. Nous allons nous demander si cette tendance est attribuable à un changement dans l’économie politique du Moyen Orient. A cet effet, trois types d’explications seront successivement introduits : une explication économique, une explication en termes de politique internationale et enfin
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