Voyage à l'intérieur de l'OUA - article ; n°4 ; vol.63, pg 779-794

Albert Bourgi

Description

Politique étrangère - Année 1998 - Volume 63 - Numéro 4 - Pages 779-794
Journey to the Centre of OAU, by Albert Bourgi Thirty five years after it was founded, OAU is still arousing hope and disillusionment. While it continues to embody, in a more or less confused way, the myth of African unity, it is having great difficulty in freeing itself from the limits imposed by the member states and in enjoying the autonomy of action that is essential if it is to accomplish the missions set out in its constitution. But these handicaps have not prevented OAU from becoming a diplomatie instrument which, through small actions, has helped to integrate Africa into the international System and to enable it to take its share of responsibility in the conduct of international relations. It is from this — perhaps restrictive but more practical - angle that OAU should now be judged and its usefulness to the community of African nations be gauged.
Albert Bourgi entreprend ici une réévaluation de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), souvent critiquée et dénoncée pour son impuissance à régler les conflits africains et à faire face au sous-développement du continent. Or, selon lui, au-delà des ambitions affichées lors de sa création en 1963 et malgré les crises qui l'ont secouée, cette organisation conserve une utilité. Notamment en raison de la « mystique de l'unité africaine » quelle continue d'incarner, de son réalisme actuel sous l'impulsion de nouveaux dirigeants africains issus de la période de démocratisation, et de son action récente en matière de promotion des droits de l'homme, l'OUA, selon lui, joue un rôle essentiel dans les relations africaines et en tant que porte-parole de l'Afrique dans les instances internationales, à un moment oît la communauté internationale semble quelque peu délaisser ce continent.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: POLITIQUE_ETRANGERE
• Publié le: 01 janvier 1998
• Nombre de lectures: 145
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Bourgi
Voyage à l'intérieur de l'OUA
In: Politique étrangère N°4 - 1998 - 63e année pp. 779-794.
Abstract
Journey to the Centre of OAU, by Albert Bourgi
Thirty five years after it was founded, OAU is still arousing hope and disillusionment. While it continues to embody, in a more or
less confused way, the myth of African unity, it is having great difficulty in freeing itself from the limits imposed by the member
states and in enjoying the autonomy of action that is essential if it is to accomplish the missions set out in its constitution. But
these handicaps have not prevented OAU from becoming a diplomatie instrument which, through small actions, has helped to
integrate Africa into the international System and to enable it to take its share of responsibility in the conduct of international
relations. It is from this — perhaps restrictive but more practical - angle that OAU should now be judged and its usefulness to the
"community of African nations" be gauged.
Résumé
Albert Bourgi entreprend ici une réévaluation de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), souvent critiquée et dénoncée pour son
impuissance à régler les conflits africains et à faire face au sous-développement du continent. Or, selon lui, au-delà des
ambitions affichées lors de sa création en 1963 et malgré les crises qui l'ont secouée, cette organisation conserve une utilité.
Notamment en raison de la « mystique de l'unité africaine » quelle continue d'incarner, de son réalisme actuel sous l'impulsion de
nouveaux dirigeants africains issus de la période de démocratisation, et de son action récente en matière de promotion des droits
de l'homme, l'OUA, selon lui, joue un rôle essentiel dans les relations africaines et en tant que porte-parole de l'Afrique dans les
instances internationales, à un moment oît la communauté internationale semble quelque peu délaisser ce continent.
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Bourgi. Voyage à l'intérieur de l'OUA. In: Politique étrangère N°4 - 1998 - 63e année pp. 779-794.
doi : 10.3406/polit.1998.4804
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1998_num_63_4_4804:
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POLITIQUE ÉTRANGÈRE 4/98
Albert BOURGi Voyage à l'intérieur de POUA
Albert Bourgi entreprend ici une réévaluation de l'Organisation de l'unité afri
caine (OU A), souvent critiquée et dénoncée pour son impuissance à régler les
conflits africains et à faire face au sous-développement du continent. Or, selon
lui, au-delà des ambitions affichées lors de sa création en 1963 et malgré les crises
qui l'ont secouée, cette organisation conserve une utilité. Notamment en raison
de la « mystique de l'unité africaine » quelle continue d'incarner, de son réa
lisme actuel sous l'impulsion de nouveaux dirigeants africains issus de la période
de démocratisation, et de son action récente en matière de promotion des droits
de l'homme, l'OUA, selon lui, joue un rôle essentiel dans les relations africaines
et en tant que porte-parole de l'Afrique dans les instances internationales, à un
moment oît la communauté internationale semble quelque peu délaisser ce continent.
Politique étrangère
Ala veille de chaque sommet de l'Organisation de l'unité afri
caine (OUA) - et celui qui s'est tenu à Ouagadougou
(Burkina Faso) du 8 au 10 juin 1998 n'y a pas échappé —, une
même question revient : l'institution a-t-elle encore sa raison d'être
quand elle affiche son impuissance face aux conflits sanglants qui
déchirent le continent ? Cette interrogation prend toute son ampleur
quand elle se conjugue avec les maigres moyens que les États-membres
consentent à lui donner et les résultats dérisoires obtenus en compar
aison avec les ambitions déclarées lors de sa création en mai 1963.
Mais ce constat, aussi juste soit-il, ne rend pas compte d'autres réali
tés qui expliquent que l'OUA1 occupe aujourd'hui une place essentielle
Albert Bourgi est maître de conférences à la Faculté de droit et de science politique de Reims.
1. De nombreux ouvrages ont été consacrés à l'OUA, notamment sous l'angle institutionnel. Voir Boutros
Boutros Ghali, L'Organisation de l'unité africaine, Armand Colin, Paris, 1969 Zdenek Cervenka, The OAU
and its Charter, Praeger, New York, 1 969 Maurice Glélé-Ahanhanzo, Introduction à l'Organisation de l'unité
africaine et aux organisations régionales africaines, LGDJ, Paris, 1986. Edmond Jouve, L'Organisation de
l'unité africaine, PUF, Paris, 1984 J. Woronoff, Organizing African Unity, The Scarecrow Press, Metichen,
NJ, 1970.
Pour une approche plus thématique de l'OUA, on peut se reporter à Maurice Kamto, Jean-Emmanuel
Pondi, Laurent Zang, L'OUA: rétrospective et perspectives africaines, Économica, Paris, 1990. Michael
Wolfers, Politics in the Organization of Africa Unity, Mathuen et Co. Ltd, Londres, 1976, et enfin Pierre-
François Gonidec, Relations internationales africaines, LGDJ, Paris, 1996. 780 / POLITIQUE ÉTRANGÈRE
dans les relations internationales africaines et suscite un intérêt sou
tenu de la part de la communauté internationale. Malgré les nombreux
revers qu'elle a subis au cours de ses 35 années d'existence, l'institu
tion conserve une réelle puissance d'attraction comme en témoignent
une forte participation à ses travaux qui, d'année en année, ne s'est
jamais démentie et un maillage de plus en plus étendu de ses activités
diplomatiques. Sa capacité à surmonter les crises qui, à plusieurs
reprises, l'ont ébranlée, l'OUA la doit à la mystique de l'unité afri
caine dont elle continue d'être entourée et au réalisme dont elle a su faire
preuve dans l'accomplissement de ses missions. Tout en étant plus
modeste dans ses ambitions, l'organisation est parvenue à se rendre de
plus en plus utile à des États-membres qui, sans elle, n'auraient qu'une
existence plus ou moins factice sur le plan international.
De la mystique de l'unité africaine à l'outil diplomatique
L'OUA se distingue des autres grandes organisations régionales
(comme l'Organisation des États américains - OEA - ou la Ligue des
États arabes) par trois traits au moins, qui en font une institution à
part dans les relations internationales contemporaines :
- tout d'abord, et ce n'est sans doute pas l'aspect le moins important,
sur un continent toujours sensible aux symboles, l'organisation conti
nue d'exercer une très forte attraction sur les peuples africains. Même si
l'OUA, dans ses structures comme dans son fonctionnement, demeure
bien éloignée de l'idéal panafricain qui a longtemps servi de ferment à la
lutte de libération nationale et a fortiori du projet fédéral auquel
Kwamé N'Krumah avait donné ses lettres de noblesse, elle apparaît
toujours comme le vecteur de l'unité africaine. Or ce dernier objectif
demeure mobilisateur, comme en atteste, par exemple, la référence qu'y
font la plupart des constitutions africaines. À l'image des lois fonda
mentales malienne et béninoise qui, dans leurs préambules, réaffirment
solennellement « l'attachement à la réalisation de l'unité africaine », le
discours politique en Afrique véhicule largement la mystique du pan
africanisme présenté comme l'ultime rempart contre toutes les formes
d'ingérence extérieure et surtout comme un instrument d'affirmation
de l'identité culturelle.
Ces facteurs parmi d'autres expliquent la longévité d'une organisation,
créée dans l'euphorie en 1963, mais qui depuis a trop souvent été :
VOYAGE À L'INTÉRIEUR DE L'OUA / 781
source de désillusion et d'interrogations sur sa capacité à remplir les
missions assignées par la Charte constitutive d'Addis-Abeba2. La
charge symbolique dont est entourée l'OUA lui a en fait permis de
surmonter les nombreuses crises qui ont jalonné son existence. Que
ce soit en 1975-1976, lors de la fameuse fracture entre progressistes et
modérés provoquée par les conflits en Afrique australe, et notamment
en Angola, ou au début des années 80 à propos du Sahara occidental,
l'adhésion de l'opinion publique africaine à l'idéologie panafricaine
qu'incarne encore l'organisation a eu finalement raison de tous le