A propos de l absolution de Canossa (27 janvier 1077) - article ; n°57 ; vol.61, pg 3-23
22 pages
Français

A propos de l'absolution de Canossa (27 janvier 1077) - article ; n°57 ; vol.61, pg 3-23

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
22 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

École pratique des hautes études, Section des sciences religieuses - Année 1948 - Volume 61 - Numéro 57 - Pages 3-23
21 pages

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1948
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Henri-Xavier Arquillière
A propos de l'absolution de Canossa (27 janvier 1077)
In: École pratique des hautes études, Section des sciences religieuses. Annuaire 1949-1950. 1948. pp. 3-23.
Citer ce document / Cite this document :
Arquillière Henri-Xavier. A propos de l'absolution de Canossa (27 janvier 1077). In: École pratique des hautes études, Section
des sciences religieuses. Annuaire 1949-1950. 1948. pp. 3-23.
doi : 10.3406/ephe.1948.17657
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ephe_0000-0002_1948_num_61_57_17657A PROPOS DE L'ABSOLUTION
DE CANOSSA.
(27 JANVIER 1077) hl
Le drame lointain de Canossa n'a pas cessé de susciter des contro
verses. La plus récente est celle que M. FJiche présente ainsi : «Tandis
que l'on avait toujours pensé jusqu'à présent qu'à Canossa, GrégoireVÏI
avait réintégré Henri IV tout à la fois dans la Communion de l'Eglise
et dans la fonction royale, M. le chanoine Arquillière, dans son livre
intitulé Saint Grégoire VII. Essai sur sa conception du pouvoir pontifical.
paru en ig34, a catégoriquement affirmé que le pape avait absous le
pécheur repentant, sans restituer sa couronne au roi déchu et sans
l'investir à nouveau du droit de gouverner l'Allemagne. Il faut recon
naître que cette opinion, toute nouvelle, s'appuie sur un argument
textuel de premier ordre, qoii avait échappé aux historiens antérieurs,
à savoir un passage de l'allocution prononcée par Grégoire VII au
concile romain de mars 1080 et insérée dans le Registre, ce qui ne
permet pas de douter de l'authenticité des paroles pontilicales. Pour
justifier la nouvelle sentence d'excommunication et de déposition
lancée contre Henri IV, le pape relate en un vigoureux raccourci les
faits qui se sont déroulés au cours des quatre dernières années et, à
propos de l'entrevue de Canossa, s'exprime en ces termes : Le voyant
si humilié et après avoir reçu de lui beaucoup de promesses de changement de
vie, je l'ai réintégré dans la communion, mais je ne l'ai pas rétabli dans la
( 1) Cette simple note se réfère à l'article de M. Aug. Fliciie, Grégoire VII, à Canossa,
a-t-il réintégré Henri IV dans sa fonction royale? paru dans les Studi Gregoriani, Rome,
19^7. Nous devons reprendre cette étude, avec plus d'ampleur, dans le t. IV des
Studi gregoriani. Nous nous contenterons surtout^dans cette brève réplique, de
laisser parler les textes du Registre de Grégoire VII.
J. 902757. a d'où je l'avais déposé au synode de Rome [1076) et je n'ai pas royauté,
obligé ceux qui lui avaient prêté ou qui lui prêteraient serment à lui garder
une fidélité dont je les avais relevés dans ce même synode.
« On:#V saurait être plus formel, poursuit M. Fliche, Grégoire VII,
en 108^, a déclaré en plein concile qu'en 1077, il n'avait pas annulé
la sen^ifcèe de déposition promulguée l'année précédente.
../-je I^faïgré la valeur incontestable qui s'attache à ce témoignage, la
~£Kese soutenue par M. Arquillière, se heurte à de sérieuses difficultés,
qui obligent à reconsidérer ce problème de Canossa(i).»
Au fond, tout le problème se ramène à ce point précis : quelle était
la pensée de Grégoire VII, au moment où il donnait l'absolution de
Canossa, le 27 janvier 1077. ^es litres ont donc une importance
capitale en cette matière et aucun historien n'en conteste la valeur
exceptionnelle (2). Il apparaît déjà qu'il faudrait des raisons singu
lièrement fortes pour admettre une contradiction aussi nette entre ses
déclarations de 1080 et l'intention qu'on lui prête d'avoir vraiment
réintégré dans la royauté l'illustre pénitent qu'il recevait dans la
communion de l'Eglise, en janvier 1077. Bien plus, il faudrait consi
dérer que, sur une question à laquelle il n'a pas cessé de penser
depuis Canossa — toutes ses démarches le démontrent - brusquement
il s'inflige un démenti à lui-même, il ment à sa propre pensée, alors
que rien ne l'obligeait à le faire et que sa sentence de 1080 aurait
eu la même valeur sans la précision qu'il a jugé bon d'introduire dans
l'historique des événements antérieurs.
Voyons les faits de plus près. M. Fliche explique ainsi l'attitude du
pape à Canossa : «Grégoire VII a consacré à l'entrevue de Canossa
(t) A. Fliche, Grégoire VII à Canossa a-t-il réintégré Henri IV dans sa fonction
royale? dans les Studi Gregariani, I, 378-874.
(2) «Document d'une exceptionnelle valeur... c'est à la correspondance de
Grégoire VII... qu'il faut s'adresser avant tout pour connaître le grand Pontife qui
a su imprimer à la Réforme son allure décisive i> écrivait M. Fliche, La Réforme gré
gorienne, Paris, 1926, t. II, p. k et3i. _ 5 —
une bulle qui lui est de très peu postérieure et à laquelle on a toujours
attribué le caractère d'un procès-verbal (1). Or, il n'y exprime, en
aucune façon, la réserve que l'on a pu relever dans son allocution du
7 mars 1080; il constate simplement qu'il a délié le «roi» de l'ana-
thème, qu'il l'a «accueilli dans la grâce de la communion et dans le
sein de l'Eglise», après avoir reçu de lui edes garanties qui figurent
à la suite de la lettre». Si le pape avait réellement pensé, poursuit
M. Fliche, que, malgré ces garanties, Henri IV devait continuer à
s'abstenir de tout acte inhérent à' la fonction royale, il n'aurait pas
manqué, semble-t-il, de le faire connaître aux Allemands, afin de guider
leur comportement à l'égard de leur souverain, et, si ceux-ci n'avaient
pas redouté que Henri IV ne fut réintégré dans la royauté par l'abso
lution qu'il avait reçu, ils ne se seraient sans doute pas autant pressés
d'élire un nouveau roi malgré l'avis des légats pontificaux (2). 55
Constatons d'abord que jamais, ni dans le document allégué, ni
dans aucune lettre ultérieure, Grégoire VII n'a parlé d'une réintégra
tion d'Henri IV dans la royauté, qu'il aurait accomplie à Canossa.
Une opération d'une telle envergure ne pouvait guère, semble-t-il,
se faire par voie de sous-entendu. La sentence de 1076 avait fort bien
spécifié les diverses condamnations qui frappaient le roi de Germanie.
Voici la partie essentielle de cette sentence :
«De la part du Dieu tout puissant, Père, Fils et Saint-Esprj,
j'interdis au fils de l'empereur Henri. . . le gouvernement de tout le
royaume des Teutons et de l'Italie ; je relève tous les chrétiens du
serment de fidélité qu'ils lui ont prêté ou qu'ils lui prêteront ; je défends
que toute personne lui obéisse comme à un roi ... Je le lie en ton nom
(saint Pierre) du lien de l'anathème (3). »
II y avait donc trois sanctions, fort liées entre elles, il faut le recon
naître, qui s'étaient abattues sur le «roi». Mais ces sanctions, Grégoi
re VII les avait déjà conçues comme séparables. Dès l'année précédente
( 1) Registrum, IV, 1 a. Cette buiie est, en effet, lu compte rendu officiel du drame
de Cauossa, l'ait par le principal acteur, avec uue autorité exceptionnelle .
(a) A. Fuchb, Grégoire VII à Canossa... (Studi gregoriani, I, 3 7 5).
(3) Registrum, III, 10a (édit. Caspar, p. 370-271) '
des — 6 —
( 1 075), dans ses fameux Dictatuspapee, où il précise l'étendue de ses pou
voirs, sous la proposition XII, il déclare : il est permis au pape de déposer
l'empereur, sans y adjoindre la moindre condition et sans en faire la con
séquence de l'excommunication (1). D'autre part, en i 07A, il avait, lancé
l'anathème contre Robert Guiscard, sans le déposer de son pouvoir (9).
Il conçoit donc et la déposition comme susceptibles
d'ê're disjointes. Que, dans la sentence de 1 080, il ait d'abord excom
munié le roi, qu'il l'ait déposé ensuite, cela paraît en effet plus logique
et manifeste un progrès de sa pensée (3); mais nous avons à nous
préoccuper avant tout de ce qu'il pensait en 1077 et nous constatons
qu'au moment de

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents