La sexualité au japon à travers la littérature
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UNIVERSITE PAUL CEZANNE - AIX-MARSEILLE III INSTITUT D’ETUDES POLITIQUES MEMOIRE pour l’obtention du Diplôme La sexualité au Japon à travers la littérature Rémi FEUILLASSIER Mémoire réalisé sous la direction de Monsieur Masaaki Suzuki L’IEP n’entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur. Mots clés : Sexualité, littérature, érotisme, Japon, liberté, corps, mœurs, fûzoku, sociologie historique. Résumé : De prime abord, le Japon apparaît comme une société stricte où les rapports sociaux obéissent à de nombreuses règles. Cependant la sexualité semble échapper à ces règles. En s’appuyant sur un corpus de livres japonais abordant la sexualité et les mœurs, nous essaierons de montrer que cette simple opposition entre contrainte sociale et sexualité libre doit être dépassée. La sexualité et le rapport au corps au Japon se sont construits en corrélation avec les évolutions de la société japonaise et non en opposition ou en dehors de celles-ci. Il n’y a pas un hiatus entre la sexualité et la société japonaise. Ce faisant, nous dresserons un tableau de quelques thèmes récurrents au sein de la littérature érotique japonaise et nous verrons quelles ont été les conditions d’énonciation et de réception de ce discours sur la sexualité. Remerciements Je tiens à remercier Monsieur Masaaki Suzuki qui a accepté de diriger ce mémoire et a toujours été disponible pour répondre à mes questions et m’aider à mener à bien à ce travail. Je tiens également à remercier Monsieur Michel Camau qui a accepté d’être le codirecteur de ce travail. Je n’oublie pas également Monsieur Kevin Varden dont le séminaire « Tôkyô, past and present » à l’université de Meiji Gakuin m’a fourni de précieux éléments pour comprendre certains aspects du Japon au début du XX° siècle. Enfin, je tiens à remercier Tanaka Ryû pour son aide. SOMMAIRE Introduction 1.0 Une liberté de ton et des thèmes vieux de plusieurs siècles. 1.1 Définition de la sexualité et brève présentation de quatre ouvrages érotiques français du XX° siècle. 1.2 Ihara Saikaku : littérature érotique et liberté au XVII° siècle. 1.3 La littérature érotique japonaise au XX° siècle : entre tradition et remise en cause. 2.0 Essai de sociologie historique sur la sexualité au Japon. 2.1 Le shintô et le bouddhisme face à la sexualité. 2.2 Le rite du bain dans la société japonaise et ses conséquences. 2.3 La politique et la création d’un espace de liberté autour de la sexualité. 2.4 La restauration Meiji et l’influence occidentale : la construction d’un nouvel omote. 2.5 Un début de littérature érotique revendicatrice au Japon. Conclusion NOTES PRELIMINAIRES ET CARTE Nous avons utilisé le système Hepburn pour la transcription en alphabet latin des termes japonais. Les noms propres des auteurs japonais sont donnés dans l’ordre Nom de famille - prénom comme le veut l’usage courant au Japon. Les noms d’auteurs occidentaux sont quant à eux donnés dans l’ordre Prénom – Nom de famille. Nous avons fait le choix de retranscrire en japonais le nom des auteurs japonais lors de leur première occurrence ainsi que les termes relatifs à la sexualité. Les autres termes japonais n’ayant pas de rapport direct avec la sexualité sont seulement retranscrits en alphabet latin. Nous avons également choisi d’utiliser l’expression “littérature érotique” pour désigner les ouvrages abordant des questions relatives à la sexualité même si leurs auteurs les ont écrits sans intention d’éveiller un quelconque désir chez le lecteur. Ce choix a été fait pour éviter certaines lourdeurs de style. 6 INTRODUCTION 7 « JAPON : Tout y est de porcelaine. » Gustave Flaubert, Le dictionnaire des idées reçues. « Si je veux imaginer un peuple fictif, je puis lui donner un nom inventé, le traiter déclarativement comme un objet romanesque, fonder une nouvelle Garabagne, de façon à ne compromettre aucun pays réel dans ma fantaisie (mais alors c’est cette fantaisie même que je compromets dans les signes de la littérature). Je puis aussi, sans prétendre en rien représenter ou analyser la moindre réalité (ce sont les gestes majeurs du discours occidental), prélever quelque part dans le monde (là-bas) un certain nombre de traits (mot graphique et linguistique), et de ces traits former délibérément un système. C’est ce système que j’appellerai : le Japon. » Roland Barthes, L’empire des signes. Un premier voyage au Japon est souvent synonyme de surprises et d’émerveillements. L’un des plus anciens témoignages de voyageur européen au pays du Soleil Levant est celui du père portugais Luís Fróis (1532-1597). Ce dernier se rendit au Japon en 1563, alors connu sous le nom de Cipango, en tant que missionnaire jésuite pour essayer d’évangéliser les Japonais. De ses quelques années passées là-bas, il reste un recueil de diverses observations connu sous le nom de Traité de Luís Fróis, sur les contradictions de mœurs entre Européens et 1Japonais . Certaines de ces observations portent sur le physique des Japonais : « Nos [ceux des Européens] nez sont éminents, et certains aquilins ; les leurs [ceux des Japonais] petits, avec des narines 2étroites. » D’autres traitent des mœurs et coutumes : « Nous enterrons nos morts ; la plupart du 3temps, les Japonais brûlent les leurs. » . Certaines de ces notes sont accompagnées d’un jugement 1 Luís Fróis, Traité de Luís Fróis, S.J. (1585), sur les contradictions de mœurs entre Européens et Japonais, traduction de Xavier de Castro et Robert Schrimpf, Chandeigne, collection Magellane, 1993 (1° édition en portugais et allemand en 1955). 2 Ibid., p.43. 3 Ibid., p.71. 8 1moral et le ton employé laisse sous-entendre un relativisme culturel qui ne fait qu’insister sur les différences entre l’Occident et le Japon. Cependant, ce livre est un témoignage précieux qui souligne la surprise voire l’incompréhension des Européens face à certains comportements des Japonais. Aujourd’hui encore, et ce malgré le développement des moyens de communication qui permettent de mieux connaître un pays avant de s’y rendre, le Japon continue de surprendre. En 1982, l’écrivain, photographe et cinéaste français Chris 2Marker choisit d’appeler un de ses recueils de photos sur le Japon Le dépays . Titre qui traduit bien son étonnement face à certains aspects du Japon. Il est un point particulier qui surprend souvent les Occidentaux : le rapport des Japonais à la sexualité et à la nudité. Dans son traité, le père Luís Fróis ne manqua pas de relever quelques détails de la vie des monastères japonais qui le surprirent : « En Europe, la claustration des nonnes est étroite et très rigoureuse ; au Japon, les couvents de biqunis [nonnes] servent de bordels. » « Chez nous, la pureté de l’âme et la chasteté du corps sont enseignées ; chez les bonzes, toute la 3vermine intérieure et tous les abominables péchés de la chair. » Son illustre prédécesseur au Japon, François Xavier (1506-1552), fut lui aussi choqué par le comportement des moines bouddhistes : « Il y a moins de péchés parmi les laïcs, et je vois qu’ils entendent plus facilement raison que ceux qu’ils considèrent comme leurs prêtres et qu’ils appellent bonzos, lesquels sont enclin à des péchés dont la nature a horreur, et qu’ils confessent sans chercher à les nier ; et cela est si public et si connu de tous, hommes et femmes, jeunes et vieux, que personne ne trouve cela étrange ou abominable, puisque c’est si commun […] Ces bonzos ont de nombreux garçons dans leurs monastères, et ils commettent leurs corruptions avec eux , et ce péché est si commun que, bien qu’il leur paraisse un mal à 4tous, ils n’en sont pas troublés. » Pour mieux comprendre la réaction des deux Jésuites, il faut rappeler que la sodomie était condamnée par l’Eglise en Europe depuis le XIII° siècle. Ceux qui s’y livraient étaient passibles du bûcher. Le moines bouddhistes japonais ne furent pas les seuls à choquer les missionnaires européens. A la même époque, le Jésuite italien Matteo 1 Par relativisme culturel, nous entendons l’idée qu’il y a une « singularité sinon l’inréductibilité des cultures entre elles ». Daniel- Louis Seiler, La méthode comparative en science politique, Paris, Armand Colin, 2004, p.66. 2 Chris Marker, Le Dépays, Paris, Herscher, coll. Format/photo, 1982. 3 Luís Fróis, Traité de Luís Fróis, S.J. (1585), sur les contradictions de mœurs entre Européens et Japonais, op. cit., p.55 et p.63. 4 François Xavier cité par Bernard Faure dans Sexualités bouddhiques, entre désirs et réalités, Paris, Flammarion, collection Champs, 2005, p.196. 9 1Ricci (1552-1610) condamna lui aussi les comportements homosexuels des moines chinois . Ces deux témoignages datent de la fin du XVI° siècle et ne peuvent bien sûr pas être généralisés. Cependant, ils laissent sous-entendre que les moines Japonais du XVI° siècle n’ont pas le même rapport à la sexualité – et aux normes qui s’y rapportent - que leurs homologues européens. Avant de livrer moi aussi mes premières impressions sur la sexualité au Japon, il convient de faire un détour par les années précédant mon premier voyage au Japon afin de mieux comprendre l’image du Japon que j’avais pu me construire. Entré à l’IEP d’Aix-en- Provence à l’automne 2003, j’avais décidé de suivre l’enseignement de japonais dans cette école. Tout débutant en japonais fait rapidement face à un problème : les différents niveaux de langue et de politesse. Certes il existe différents niveaux de langues en français et c’est un truisme de dire qu’un étudiant ne parle pas de la même façon lorsqu’il s’adresse à un
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