Montalembert et l Allemagne - article ; n°156 ; vol.56, pg 17-46
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Description

Revue d'histoire de l'Église de France - Année 1970 - Volume 56 - Numéro 156 - Pages 17-46
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur l'Abbé Victor
Conzémius
Pauline de Lallemand
Montalembert et l'Allemagne
In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 56. N°156, 1970. pp. 17-46.
Citer ce document / Cite this document :
Conzémius Victor, de Lallemand Pauline. Montalembert et l'Allemagne. In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 56.
N°156, 1970. pp. 17-46.
doi : 10.3406/rhef.1970.1832
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhef_0300-9505_1970_num_56_156_1832ET L'ALLEMAGNE* MONTALEMBERT
... « Chaque jour, je me confirme dans ma prédilection pour ce
pays, où je me fixerai certainement, si je suis jamais exilé de France.
La cause catholique fait ici d'immenses progrès, et je ne connais pas
de séjour plus consolant pour une âme religieuse 1. »
Ainsi écrivait, à Munich, dans son journal, Montalembert,
âgé de vingt-deux ans, le 23 août 1832, sans prendre en considé
ration la violente dispute qu'il avait eue avec Gorres pendant un
abondant repas chez le peintre Peter von Cornelius. Un critique
inamical pourrait qualifier d'enthousiasme romantique, suscité
par un sentiment religieux confessionnel restreint, ce naïf aveu
d'attachement envers l'Allemagne. Ce jugement fait-il mouche ?
l'historien a-t-il presque tout dit sur ce lien émotionnel s'il l'a
* Ouvrages souvent cités en abrégé :
Ahrens = L. Ahrens, Lamennais und Deutschland. Studien zur Geschichte
der franzôsischen Restauration (Munster, 1930).
Cornudet = L. Cornudet, Lettres à un ami de collège 1827-1830 (2e éd.,
Paris, 1884).
Derré = J. R. Derré, Lamennais, ses amis et le mouvement des idées à
l'époque romantique, 1824-1834 (Paris, 1962).
Gurian = W. Gurian, Die politischen und sozialen Ideen des franzosichen
Katholizismus, 1789-1914. (Munich, 1928).
Lallemand, Amis = P. de Lallemand, Montalembert et ses amis dans le
romantisme, 1830-1840 (Paris, 1927). Relations — P. de et ses relations
littéraires avec l'étranger jusqu'en 1840 (Paris, 1927).
Lamennais = Lettres de Montalembert à La Mennais. Soixante quatre
lettres publiées par G. Goyau et P. de Lallemand (Paris, 1932).
Lecanuet = E. Lecanuet, (3 vol., Paris, 1895-1902).
Losch = St. Losch, Dollinger und Frankreich. Eine geistige Allianz, 1823-
1871. Im Lichte von 56 bisher meist unbekannten Briefen mit zwei Dollin-
gerbildnissen (Munich, 1955).
Schnùtgen = A. Schnutgen, « Montalembert und das Rheingebiret bis
zum Erscheinen seiner Histoire de Sainte Elisabeth de Hongrie (1836) »,
dans Annalen des Historischen Vereins fur den Niederrhein, 1. 148 (1949), p. 62-
144.
Trannoy = A. Trannoy, Le romantisme politique de Montalembert avant
1843 (Paris, 1942).
1. P. de L\llemand, Relations ; p. 68. 18 V. CONZEMIUS
démasqué comme subjectif et même s'il l'attribue à l'influence
d'une solidarité confessionnelle ?
Nous ne pourrons donner réponse à cette question qu'après
avoir examiné de plus près cette subjectivité dans son origine
et ses effets. Il vaut la peine de l'essayer chez un homme qui fut
dans les années 40 et 50 du siècle dernier le chef politique des
catholiques français et qui en tant qu'avocat des « causes perdues >
possédait un prestige européen.
Montalembert fut de bonne heure en relation avec l'Allemagne
et la mentalité allemande. A Stuttgart, où son père était ministre
plénipotentiaire auprès du souverain du Wurtemberg, il passa
une année à l'âge de dix ans, et il apprit la langue allemande.
Ensuite il revint à Paris avec ses parents ; son père était tombé
en disgrâce auprès du gouvernement, à cause de ses opinions
libérales. Il reçut d'abord une éducation privée. En 1826 il entra
au collège Sainte-Barbe pour y suivre les dernières classes. Il
lut Schiller ; Victor Cousin, qui donnait amicalement des conseils
au collégien, l'incita à étudier Kant. A Hambourg, il acquit les
œuvres du philosophe de Kônigsberg, tandis qu'il se rendait
en Suède, où son père, réhabilité, représentait la France depuis
1827 2. Malgré l'incitation de Cousin de commencer d'abord par
la Critique de la Raison pratique, il ne trouva aucune joie à cette
lecture 3. Alors il rencontra l'aumônier de la princesse royale,
l'abbé Studach, originaire de Saint-Gall, ancien disciple de Sailer.
Celui-ci lui apprit que Kant était dépassé, en Allemagne, qu'il y
avait à Munich une école philosophique catholique dont les chefs
étaient Schelling, Baader et Zimmer, dont le but était de rendre
la religion compréhensible en partant de la philosophie 4. Cette
directive venait à la rencontre de l'intention et du but qu'il
s'était proposés en entreprenant ses études philosophiques :
la preuve de la connexion étroite du christianisme avec la philo
sophie et la liberté 5. Le jeune étudiant se plongea aussitôt dans
l'étude de ces philosophes ; du haut de sa nouvelle position philo
sophique, il se livrait à des discussions sur des questions de
sophie et de théologie avec son ami parisien Cornudet et il
attaquait aussi l'éclectisme de son maître Cousin 6. L'Allemagne
2. Cornudet, p. 109, 120 et sv.
3. Lecanuet, t. I, p. 57.
4.p. 137 (28 nov. 1828).
5. « Je me proposai pour but la démonstration évidente de l'union du
Christianisme avec la philosophie et la liberté. C'est là l'idée qui a présidé
à toutes mes études, qui chaque jour prend de nouvelles forces dans mon âme
et qui sera probablement l'idée dominante de ma vie ». Montalembert à
V. Cousin, dans J. Barthélémy de Saint-Hilaire, Victor Cousin, cité
d'après Derré, p. 628.
6. Cornudet, p. 180 et sv. l' MONTALEMBERT ET ALLEMAGNE 19
était pour Montalembert, le pays où la poésie n'avait pas encore
sombré 7. Le fameux livre de Madame de Staël nourrissait son
enthousiasme croissant de jour en jour, pour la littérature de ce
pays 8.
Tandis que son ami Cornudet ne se laissait gagner que lent
ement par le feu de cette germanophilie, Montalembert trouva à
ses sympathies germaniques un allié en la personne de François
Rio, historien de l'art. Le breton Rio, bien qu'il fût de dix ans
plus âgé, était lié d'amitié avec lui depuis 1826, et de lui-même il
avait commencé l'étude des auteurs allemands 9. Quand Monta
lembert retourna en France en 1829, il échangea avec lui ses livres
allemands et les fruits de ses lectures d'auteurs allemands. Rio en
fut tellement charmé qu'il décida à la prochaine occasion de
visiter l'Allemagne, en particulier le cercle qui entourait Gôrres
à Munich : au retour d'un voyage en Italie il arriva à Munich
en 1830 ; Schelling, Baader et Gorres, le comte Moy et Dôllinger
le reçurent aimablement et le confirmèrent dans son projet de
recherche d'un art chrétien. Les échanges avec Montalembert
furent poursuivis. Rio se passionnera pour la peinture chrétienne
avec les mêmes motifs que Montalembert le fit pour l'architecture
gothique. Les dires de Rio concernant le cercle munichois de la
revue Eos déterminèrent son jeune ami à visiter de son côté la
Mecque du catholicisme en Allemagne du Sud. Quand les « Pèle
rins de Dieu et de la liberté » quittèrent Rome en août 1832,
alors que leur affaire n'était pas jugée, Montalembert proposa de
prendre la route passant par Munich 10. Comme à l'Avenir, un
cercle de personnages à la même mentalité s'étaient réunis, qui
voulaient susciter la montée d'un catholicisme combatif, grâce
à la revue hebdomadaire Eos : Franz von Baader, visionnaire
apocalyptique, Joseph von Gorres, le maître du journalisme
catholique, le comte Moy, attaché à la stricte orthodoxie, et Ignaz
Dôllinger, historien de l'histoire de l'Église, qui naviguait dans les
mêmes eaux. L'entreprise se trouvait dans l'ombre portée par
l'activité enseignante du philosophe Schelling réclamé trop tôt pour
un catholicisme d'avant-garde. Sa conversion repoussée fit un effet
de désillusion sur ses collaborateurs hétérogènes. En 1832 Y Eos
arrêta sa publication n.
7. Cornudet, p. 162.
8. Ibid., p. 272.
9. Sur Rio et le romantisme, cf. J. Derré, p. 615 sv. ; sur ses relations
avec Dôllinger et le cercle munichois Eos, cf. Losch, p. 24-44.

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