Ce qui se passe en Afrique du Sud - article ; n°1 ; vol.8, pg 52-61
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Description

Autres Temps. Les cahiers du christianisme social - Année 1985 - Volume 8 - Numéro 1 - Pages 52-61
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 11
Langue Français

Extrait

Beyers Naude
Ce qui se passe en Afrique du Sud
In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°8, 1985. pp. 52-61.
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Naude Beyers. Ce qui se passe en Afrique du Sud. In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°8, 1985. pp. 52-61.
doi : 10.3406/chris.1985.1052
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1985_num_8_1_1052ACTUALITÉ
Beyers Naudé*
Frères et sœurs en Christ, il y a tant de choses que je désire partager
avec vous au sujet de la situation en Afrique du Sud. Quand j'ai reçu cette
invitation à venir en France, j'ai demandé que du temps me soit réservé
pour vous rencontrer. Cela me paraissait d'une importance vitale, et
j'aurais été très déçu que cela ne soit pas possible.
Je vous dis cela en particulier à cause de ce qui se passe en Afrique du
Sud actuellement. La crise à laquelle nous sommes confrontés n'est pas
seulement celle du pays, mais aussi la crise intérieure de l'Eglise. De cette
crise-là, vous entendez peu parler dans la presse, parce que celle-ci est
davantage intéressée par son aspect politique et économique.
Mais la crise que le pays a créée est, pour les chrétiens, d'une impor
tance vitale. Je vais donc vous faire une description de la situation du
pays.
Vous avez vu à la télévision, vous avez entendu à la radio, vous avez lu
dans la presse ce qui s'est passé en Afrique du Sud au cours de l'année
écoulée. Actuellement, après les restrictions apportées par notre gouver
nement à l'information, vous voyez, vous entendez, vous lisez beaucoup
moins de nouvelles de ce qui se passe dans notre pays. La presse a subi de
terribles restrictions, car la police, dans les zones « en état d'urgence »,
contrôle tout ce qui se passe, et personne ne peut rien publier sans que ce
qui a été écrit soit contrôlé par la police.
La nouvelle Constitution
Je vais commencer en expliquant pourquoi nous croyons que la crise
actuelle est si sérieuse.
Premièrement, parce que la nouvelle Constitution, que le gouverne
ment a promulguée en 1984 et qui a été acceptée par un référendum
Pasteur, Secrétaire Général du Conseil Chrétien des Eglises d'Afrique du Sud.
Exposé donné à la Commission sociale économique internationale de la Fédération pro
testante de France le 28 novembre 1985 (traduction).
52 auprès des Blancs (ceux qui votent en Afrique du Sud), a mis sur pied un
gouvernement fondé sur un système « tri-caméral » (trois Chambres),
c'est-à-dire une Chambre pour les Blancs, une pour les Métis et une pour
les Indiens, (ces deux dernières à titre consultatif seulement). Le pouvoir,
de ce fait, reste entièrement entre les mains des Blancs. Même si les Métis
ou les Indiens votaient ensemble contre un projet, ils ne pourraient jamais
obtenir la majorité contre les Blancs. Le danger de ce système de gouver
nement est qu'il donne l'impression d'être un Parlement multiracial,
mais, en fait, le pouvoir reste aux mains des Blancs.
Le second danger, c'est l'augmentation des pouvoirs donnés au Prési
dent de l'Etat, en tant qu'exécutif, en Afrique du Sud. Constitutionnelle-
ment, il a plus de pouvoirs que n'en ont jamais eu ses prédécesseurs.
Mais le troisième danger est plus grave : c'est que les Noirs sont exclus
et n'ont aucun accès au Parlement, ni aucun droit politique quelconque, à
quelque niveau que ce soit, dans le pays.
C'est là le message que cette nouvelle Constitution a apporté à la vaste
majorité noire du pays. Elle leur a dit : « Nous vous avons définitivement
exclus de l'avenir de l'Afrique du Sud. Vous n'avez pratiquement jamais
eu le droit de vote dans le passé; actuellement, vous avez une petite place;
dans l'avenir, vous n'en aurez aucune ».
Toutes les affaires noires tombent donc sous la juridiction du premier
ministre et de son gouvernement.
Et c'est pour cela qu'il y a eu une réaction de colère immédiate de la
part de la majorité noire du pays, de la part des populations métisses et
indiennes.
Elles ont dit clairement : « Ce que le gouvernement a fait, c'est une
Constitution totalement nouvelle ». C'est pour cela que 80% de la popul
ation indienne, par exemple, n'a pas participé au vote pour élire les
représentants de la chambre pour les Indiens. Cela prouvait leur refus
total. Et le refus de la majorité noire a été clairement exprimé par la for
mation de PUnited Democratic Front (U.D.F.) qui est une organisation
politique regroupant à peu près sept cents organisations : noires, métisses
indiennes et blanches, qui s'opposent à la nouvelle Constitution.
L'U.D.F. a reçu un support massif immédiat de la part de la majorité des
gens en Afrique du Sud. Allan Boesak, qui est président de l'Alliance
Réformée Mondiale, est un des membres-fondateurs, tout comme Des
mond Tutu et moi-même. L'U.D.F. exerce une énorme influence sur
l'ensemble du pays. La communauté blanche d'Afrique du Sud — parce
qu'elle a si peu de contacts avec la communauté noire — a été complète
ment prise de court par la réaction de rejet massif, de refus et de résis
tance de la part de la population noire.
Je dis, sans hésitation, que cette nouvelle Constitution signifie qu'il n'y
aura jamais de paix dans notre pays. C'est la crise majeure résultant de
beaucoup de faits et d'actions menées par les gens et par le gouvernement.
53 La crise de renseignement
Le second aspect fondamental de la crise dont je voudrais parler, c'est
la crise grave de l'enseignement pour les Noirs en Afrique du Sud. Pen
dant des années, les Noirs ont protesté contre le système d'éducation
séparée : pour les Blancs, pour les Métis, pour les Indiens et pour les
Noirs. C'est un système discriminatoire. Pour les Noirs, il s'appelle Educ
ation pour les Bantous.
En 1976, les étudiants du Soweto ont voulu faire une marche pacifique
pour protester contre ce système d'éducation bantoue. Et cela surtout
quand le gouvernement a voulu leur imposer la langue afrikaans. Le
résultat de cette manifestation pacifique a été que six à sept cents jeunes
étudiants noirs ont été tués au cours des mois suivants dans l'ensemble du
pays. La police a réprimé la protestation en tirant et en tuant.
A partir de ce moment, et quelque que soient les chiffres avancés, il n'y
a plus jamais eu de paix dans le système d'éducation en Afrique du Sud. Il
y a eu sans arrêt des manifestations d'écoliers, des écoles en grève puis
fermées par les autorités, etc. Et cela, spécialement au cours des derniers
dix-huit mois. Tout le système d'éducation bantoue est contesté, entraî
nant le désordre dans les écoles et les universités noires.
Les universités métisses participent également à ce mouvement de pro
testation et accompagnent les jeunes Noirs dans leurs manifestations cont
re le système d'éducation qui est le leur, et contre le sort qui leur est
réservé en Afrique du Sud.
Il s'agit donc bien d'une crise majeure plutôt que d'un simple pro
blème, ce qui conduit à la crise qui secoue l'Eglise.
Cela paraît incroyable qu'un gouvernement puisse autoriser une polit
ique aussi dure. Pourquoi n'écoute-t-il pas les étudiants et les professeurs,
quand ceux-ci leur font part de leurs espoirs et de leurs vœux ? Nous
avons demandé un entretien avec le gouvernement pour pouvoir lui poser
nos questions. Mais il ne nous a été accordé que dix minutes ! Comment
pouvions-nous leur parler de ce dont nous avaient chargés les parents et
les élèves, les étudiants et les professeurs ? Mais c'étaient dix minutes et
rien de plus !
La délégation était conduite par l'évêque (luthérien) Manas Buthélezi,
et nous avons essayé de nous asseoir et de discuter. Sans résultat.
L'impression que nous avons eue est que le gouvernement ne voulait rien
écouter. Et que le système resterait ce qu'il est actuellement.
La crise économique
II faut que je parle maintenant de la crise économique dans notre pays.
Auparavant, tant que le prix de l'or était élevé et que tout marchait
bien, il n'y avait aucun problème en Afrique du Sud pour maintenir le
54 système de l

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