Changer d avis : le droit des décisions regrettées - article ; n°2 ; vol.52, pg 315-344
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Revue internationale de droit comparé - Année 2000 - Volume 52 - Numéro 2 - Pages 315-344
L'auteur fait appel à ce qu'il dénomme le principe de reliance (confiance/dépendance) et au principe d'intention pour analyser des situations dans lesquelles un individu prend une décision, puis change d'avis et veut revenir sur cette décision. Pourquoi ne serait-on pas libre d'agir ainsi ? Pourquoi une promesse ne permettrait-elle pas de ne pas s'obliger ? Après avoir exposé ces questions, l'auteur souligne les circonstances dans lesquelles un engagement est obligatoire selon le droit américain. Il s'interroge sur le problème de savoir si un simple échange de promesses est obligatoire bien qu'aucun des protagonistes n'ait agi en fonction de la promesse de l'autre personne. Enfin, il examine l'effet juridique de la promesse de faire des dons et celui des dons accordés. L'auteur conclut en insistant sur l'accroissement du principe de reliance, l'abandon du principe d'intention, et l'impact du paternalisme, au moins en ce qui concerne le common law américain.
The author invokes what he calls the « reliance principle » and the « intention principle » to analyze situations in which one makes a decision and then changes one's mind and wants to disregard thai decision. Why would one not want to be free to do so ? Why sould a promise be effective to commit oneself not to do so ? After discussing these questions, the author outlines the circumstances in which a commitment is binding under American common law. He addres-ses the enigma of why a simple exchange of promises should be enforce able although neither party has done anything in reliance on the other's promise. Finally, he turns to the legal effect of promises to rnake gifts and of completed gifts. The author concludes by noting the ascendancy of the reliance principle, the neglect of the intention principle, and the impact of paternalism, at least as far as American common law is concerned.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 36
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

M. E. Allan Farnsworth
Changer d'avis : le droit des décisions regrettées
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 52 N°2, Avril-juin 2000. pp. 315-344.
Abstract
The author invokes what he calls the « reliance principle » and the « intention principle » to analyze situations in which one
makes a decision and then changes one's mind and wants to disregard thai decision. Why would one not want to be free to do so
? Why sould a promise be effective to commit oneself not to do so ?
After discussing these questions, the author outlines the circumstances in which a commitment is binding under American
common law. He addres-ses the enigma of why a simple exchange of promises should be enforce able although neither party
has done anything in reliance on the other's promise. Finally, he turns to the legal effect of promises to rnake gifts and of
completed gifts. The author concludes by noting the ascendancy of the reliance principle, the neglect of the intention principle,
and the impact of paternalism, at least as far as American common law is concerned.
Résumé
L'auteur fait appel à ce qu'il dénomme le principe de reliance (confiance/dépendance) et au principe d'intention pour analyser des
situations dans lesquelles un individu prend une décision, puis change d'avis et veut revenir sur cette décision. Pourquoi ne
serait-on pas libre d'agir ainsi ? Pourquoi une promesse ne permettrait-elle pas de ne pas s'obliger ?
Après avoir exposé ces questions, l'auteur souligne les circonstances dans lesquelles un engagement est obligatoire selon le
droit américain. Il s'interroge sur le problème de savoir si un simple échange de promesses est obligatoire bien qu'aucun des
protagonistes n'ait agi en fonction de la promesse de l'autre personne. Enfin, il examine l'effet juridique de la promesse de faire
des dons et celui des dons accordés.
L'auteur conclut en insistant sur l'accroissement du principe de reliance, l'abandon du principe d'intention, et l'impact du
paternalisme, au moins en ce qui concerne le common law américain.
Citer ce document / Cite this document :
Allan Farnsworth E. Changer d'avis : le droit des décisions regrettées. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 52 N°2,
Avril-juin 2000. pp. 315-344.
doi : 10.3406/ridc.2000.18098
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_2000_num_52_2_18098R.I.D.C. 2-2000
CHANGER D'AVIS :
LE DROIT DES DÉCISIONS REGRETTÉES
E. ALLAN FARNSWORTH *
L'auteur fait appel à ce qu'il dénomme le principe de reliance (confia
nce/dépendance) et au principe d'intention pour analyser des situations dans
lesquelles un individu prend une décision, puis change d'avis et veut revenir
sur cette décision. Pourquoi ne serait-on pas libre d'agir ainsi ? Pourquoi
une promesse ne permettrait-elle pas de ne pas s'obliger ?
Après avoir exposé ces questions, l'auteur souligne les circonstances
dans lesquelles un engagement est obligatoire selon le droit américain. Il
s'interroge sur le problème de savoir si un simple échange de promesses
est obligatoire bien qu'aucun des protagonistes n'ait agi en fonction de la
promesse de l'autre personne. Enfin, il examine l'effet juridique de la de faire des dons et celui des dons accordés.
L'auteur conclut en insistant sur l'accroissement du principe de
reliance, l'abandon du principe d'intention, et l'impact du paternalisme, au
moins en ce qui concerne le common law américain.
The author invokes what he calls the « reliance principle » and the
« intention principle » to analyze situations in which one makes a decision
and then changes one's mind and wants to disregard that decision. Why
would one not want to be free to do so ? Why sould a promise be effective
to commit oneself not to do so ?
After discussing these questions, the author outlines the circumstances
in which a commitment is binding under American common law. He addres
ses the enigma of why a simple exchange of promises should be enforceable
although neither party has done anything in reliance on the other's promise.
Finally, he turns to the legal effect of to make gifts and of
completed gifts.
* Professeur de droit, Columbia University. Cet article se base sur des parties du livre
de l'auteur, Changing Your Mind : The Law of Regretted Decisions (Yale University Press
1998). Remerciements à Alexia BREUVART pour avoir traduit cet article en français. REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 2-2000 316
The author concludes by noting the ascendancy of the reliance princi
ple, the neglect of the intention principle, and the impact of paternalism,
at least as far as American common law is concerned.
« Tous les jours », proclame la publicité d'un film, « vous prenez
un million de décisions ». Dans quelle mesure un individu est-il libre de
revenir sur une décision s'il change d'avis ?
Il est certes fait grand cas de la liberté de changer d'avis. Jean
Jacques Rousseau, il y a deux siècles, déclarait dans Du Contrat Social :
« II est absurde que la volonté se donne des chaînes pour l'avenir ». Bien
entendu, changer d'avis et revenir sur une décision devraient être permis,
si l'on n'a rien fait d'autre que de prendre une décision. Bien que nous
ayons commencé la journée en décidant de sortir du lit, libre à nous de
changer d'avis et de faire la grasse matinée, si notre emploi du temps le
permet. Avoir l'intention de sortir du lit n'est rien de plus qu'une première
étape et il est ensuite tout aussi possible d'avoir l'intention contraire.
Cependant, le droit impose des limites à cette liberté de changer
d'avis. Considérons les situations suivantes : prendre la résolution d'arrêter
de fumer, promettre de vendre une ferme à un acheteur, léguer un héritage
à un parent, donner une collection de manuscrits à une université, ou
déclarer tenir une peinture par fidéicommis à l'intention d'un ami. Décider,
promettre, léguer, donner, ou déclarer, représentent une seconde étape.
La loi devrait-elle imposer des contraintes à celui qui change d'avis,
regrettant d'avoir franchi cette seconde étape ? La loi devrait-elle sanction
ner celui qui revient sur sa décision alors qu'il a franchi la seconde étape ?
Considérons le procès d' Enricho Navarolli, inculpé par l'État d' Ill
inois de trafic de drogue. L'État, par l'intermédiaire de ses avocats, avait
décidé d'être clément envers Enricho, s'il aidait à démanteler le réseau
de drogue. Ainsi l'État avait fait un deuxième pas en promettant à Enricho
de réduire les chefs d'accusation et d'accepter de réduire la gravité des
charges, s'il promettait, en échange, de coopérer en tant qu'agent secret
et de plaider coupable. Enricho non seulement donna sa promesse, mais
il effectua aussi sa part du marché en servant d'agent secret, ce qui
constituait un risque considérable pour sa famille et pour lui-même. Avant
qu'il ne plaide coupable, cependant, l'État changea d'avis et lui refusa
sa clémence, en soutenant qu'il n'était pas tenu de respecter sa décision
première.
Mais l'État avait fait d'avantage que de prendre une décision. Il avait
fait un deuxième pas en faisant une promesse, et Enricho avait non
seulement donné sa propre promesse en retour, mais l'avait également
tenue en partie, en comptant sur celle de l'État. L'État aurait-il dû être
libre de changer d'avis et de renier sa promesse ? Le juge de première
instance décida gue non. Il conclut que la avait force obligatoire
et ordonna à l'Etat de la tenir.
Par cette décision, le juge appliqua l'un des principes généraux du
droit des contrats les plus contraignants. Il y a de cela près de deux mille
ans, le juriste romain Papinien l'avait formulé en ces termes : « Nul ne E.-A. FARNSWORTH : CHANGER D'AVIS 317
peut changer d'avis si c'est au préjudice d'un autre ». J'appellerai ceci
le principe de reliance ], selon lequel la confiance/dépendance — reliance
— de celui à qui la promesse est faite a pour résultat de lier le prometteur.
L'État d'Illinois avait changé d'avis au préjudice d'Enricho. Celui-ci,
confiant dans la promesse de l'État, s'était déjà pratiquement acquitté de
sa part du marché. Si de telles promesses n'étaient pas exécutoires, comme
le formula plus tard un juge de la Cour suprême de l' Illinois,

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