Frontières terrestres et frontières maritimes - article ; n°1 ; vol.35, pg 1-64
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Description

Annuaire français de droit international - Année 1989 - Volume 35 - Numéro 1 - Pages 1-64
64 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 165
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

M. le Professeur Daniel
Bardonnet
Frontières terrestres et frontières maritimes
In: Annuaire français de droit international, volume 35, 1989. pp. 1-64.
Citer ce document / Cite this document :
Bardonnet Daniel. Frontières terrestres et frontières maritimes. In: Annuaire français de droit international, volume 35, 1989. pp.
1-64.
doi : 10.3406/afdi.1989.2887
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1989_num_35_1_2887FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL ANNUAIRE
XXXV- 1989 - Éditions du CNRS, Paris.
FRONTIERES TERRESTRES ET FRONTIERES
MARITIMES
Daniel BARDONNET
1 . Frontières terrestres et frontières maritimes ? On pourrait penser que
rapprocher ces deux catégories de lignes divisoires n'est qu'un jeu de l'esprit
dépourvu de toute conséquence pratique, voire un rien provocateur. N'est-il
pas vrai, en effet, comme l'a souligné le professeur Prosper Weil dans son
beau livre sur les «Perspectives du droit de la délimitation maritime», qu'«A
première vue, les deux frontières paraissent n'avoir de commun que le
nom» (1).
La réalité n'est pas aussi simple : comme ce même auteur l'a lui même
admis et comme on tentera de le démontrer dans les présents développe
ments, frontières terrestres et frontières maritimes se croisent et se rap
prochent, beaucoup plus qu'on ne le penserait prima facie, dans ce chapitre
du droit international, à la fécondité inépuisable, qui est celui des frontières.
1) Les différences entre frontières terrestres et frontières maritimes
2. De prime abord, les différences entre les deux types de frontières sont
éclatantes, à la fois en raison de la nature des espaces délimités, des condi
tions d'établissement de ces différentes lignes divisoires et même de leur
signification symbolique. La Cour permanente d'Arbitrage avait déjà relevé
dans la Sentence qu'elle a rendue, le 23 octobre 1909, en l'affaire des Gris-
badarna, que «le territoire maritime correspondant à une zone d'une certaine
largeur, présente de nombreuses particularités qui le distinguent du terri
toire terrestre et des espaces maritimes plus ou moins complètement envi
ronnés de ces territoires» (2).
(*) Daniel Bardonnet, Professeur à l'Université de Droit, d'Economie et de Sciences
sociales de Paris, Secrétaire général de l'Académie de Droit International de La Haye.
Cet article a été rédigé d'après les notes d'une conférence prononcée, le 21 septembre
1989, à l'Uni versidad Internacional Menendez Pelayo de Valencia, dans le cadre du
séminaire organisé par le professeur José Juste Ruiz et consacré à «La delimitacion de
los espacios entre Estados en el derecho internacional actual» (18-22 septembre 1989).
(1) Paris, Pedone, 1988, p. 101 et, du même auteur, Délimitation maritime et délimitation
terrestre, in International Law at a Time of Perplexity, Essays in honour of Shabtai Rosenne,
Nijhoff, 1989, pp. 1021-1026.
(2) N.U., Recueil des Sentences arbitrales, vol. XI, p. 159. FRONTIÈRES TERRESTRES ET FRONTIÈRES MARITIMES
a) Les différences quant à la nature physique des espaces délimités
3. Il convient d'abord de rappeler les différences concernant le milieu
physique dans lequel se déploient les frontières maritimes et les frontières
terrestres.
Les espaces océaniques, par leur nature même, se caractérisent par leur
fluidité et leur homogénéité. «O mer inséparable !» s'écrie Saint-John Perse
dans «Amers». Le milieu marin est en effet constitué par «une masse conti
nue, cohérente, unique» et «toutes ses parties communiquent ensemble» (3).
Quelles que soient les conséquences juridiques des relations d'adjacence de
la terre et de la mer, la consistance même des espaces maritimes interdit
toute démarcation matérielle de la ligne divisoire.
Les espaces terrestres, au contraire, «se caractérisent par une fermeté
qui conduit à un cloisonnement rigoureux des compétences étatiques» (4) et
qui permet, au moyen de l'abornement, une véritable concrétisation sur le
terrain de la frontière internationale. L'existence d'accidents naturels, no
tamment orographiques ou hydrographiques, ainsi qu'une présence humaine
possible dans la zone à délimiter sont autant de facteurs qui ne peuvent
être ignorés au cours du processus de délimitation terrestre et qui viennent
compliquer d'autant la détermination du tracé d'une bonne frontière (5). Or,
de toute évidence, ces facteurs n'entrent pas en ligne de compte dans le
processus de délimitation maritime.
b) Les différences quant aux conditions d'établissement des deux types de frontières
4. Aux différences tenant au milieu naturel que frontières terrestres et
frontières maritimes sont appelées à séparer vient s'ajouter une différence
essentielle qui concerne leurs conditions d'établissement respectives (5 bis).
5. La détermination des frontières terrestres est en effet de nature fo
ndamentalement politique. Aucune règle de droit international ne prescrit
quelles frontières terrestres doit avoir un Etat et aucun principe n'a jamais
présidé à la répartition des espaces terrestres entre les groupes humains.
Comme l'a fortement souligné Charles De Visscher, «c'est le fait historique
qui a décidé de leur attribution à un groupement d'êtres humains» (6).
(3) A. Rivier, Principes du droit des gens, Paris, A. Rousseau, 1896, t. I, p. 234, par. 17. Cf.
les observations de G. Gidel, Le international public de la mer, Paris, Sirey, 1932, t. I, pp. 39-
42 et de Ch. De Visscher, Problèmes de confins en droit international public, Paris, Pedone, 1969,
p. 42.
(4) Ch. De ibid., p. 42. A l'exception naturellement des fleuves frontaliers, puisque
les frontières fluviales ne font pas l'objet, à l'instar des frontières maritimes, de démarcation, au
sens technique du terme (cf. infra, par. 52).
(5) Au sens où l'a entendu, par exemple, la Commission de Conciliation franco-siamoise dans
son rapport du 27 juin 1947 (C.I.J., Mémoires, plaidoiries et documents, Affaire du temple de
Preah Vihear, 1962, vol. I, pp. 21-35, à la p. 30 notamment). Cf. les remarques de M. Foucher,
Fronts et frontières, Un tour du monde géopolitique, Paris, Fayard, 1988, pp. 9-11.
(5 bis) On remarquera cependant que, dans l'affaire de la délimitation de la frontière ma
ritime dans la région du golfe du Maine (arrêt du 12 octobre 1984), la Chambre de la Cour in
ternationale de Justice a estimé «qu'une délimitation, qu'elle soit maritime ou terrestre, est une
opération juridico-politique» (C.I.J., Rec. 1984, p. 277, par. 56).
(6) Les effectivités du droit international public, Paris, Pedone, 1967, p. 100. Cf. P. de La-
pradelle, Mme P. Bastid, La frontière. Le territoire Etude dans de droit le droit international, international Paris, contemporain, Les éditions D.E.S. internationales, de Droit public 1928, 1953- p. 11;
54, Paris, Les Cours de Droit, pp. 162-163, 166-167 et 216; D. Bardonnet, Les frontières terrestres
et la relativité de leur tracé, Recueil des Cours de l'Académie de Droit international, 1976-V, vol.
153, pp. 22-23 : P. Weil, op. cit., Perspectives du droit de la délimitation maritime, pp. 35-36. FRONTIÈRES TERRESTRES ET FRONTIÈRES MARITIMES
Le plus souvent, le tracé des frontières terrestres est donné dans des
dispositions conventionnelles négociées entre les souverains territoriaux voi
sins sur la base de considérations de nature complexe, d'ordre géographique,
historique, ethnique, économique, stratégique, pour tout dire politique, per
mettant d'ajuster des intérêts contradictoires. La Sentence arbitrale rendue
le 18 février 1977 dans l'affaire du Canal de Beagle analysait ainsi le Tratado
de Limites du 23 juillet 1881 entre l'Argentine et le Chili : «like most trea
ties, it represented a compromise between the different and often conflicting
claims of the Parties» (7).
Cette constatation générale touchant le caractère politique de l'établi
ssement des frontières terrestres ne signifie évidemment pas que leur tracé
soit étranger à toute considération juridique. Des problèmes de droit se po
sent même, tout au long des étapes successives que comporte la déterminat
ion d'une frontière terrestre qui doit être, autant que

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