Le ralentissement de l investissement est plutôt le fait des petites entreprises tertiaires
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Le ralentissement de l'investissement est plutôt le fait des petites entreprises tertiaires

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Au cours de la première moitié des années 90, l'investissement des entreprises est demeuré faible et en dessous du niveau que les modélisations macro-économiques permettaient de prévoir. Cette divergence tient en partie à un comportement d'investissement très différencié suivant la taille et le secteur d'activité. La diminution de l'investissement en volume dans les grandes entreprises et l'industrie recouvre en réalité le recul de la part de ces deux catégories d'entreprises dans la valeur ajoutée : ce constat d'ensemble se révèle trompeur lorsqu'on appréhende les comportements au niveau individuel. En dehors de l'influence du taux d'intérêt réel, peuvent jouer en effet à ce niveau les garanties offertes par les entreprises sans capacité suffisante d'autofinancement, aux organismes de crédit. Cela conduit à adjoindre au taux d'intérêt, le taux de marge et le taux d'endettement, en tant que variables explicatives du taux d'investissement. Une telle estimation est effectuée en distinguant une phase de croissance (1985-1990) et une phase de récession (1991-1996). Ces variables se révèlent plus déterminantes pour les petites entreprises que pour les grandes. Les variables de financement (taux de profit et d'endettement) jouent plus fortement en période de récession, et cela principalement pour les petites entreprises. Le taux d'intérêt et le taux de marge ont un impact plus sensible dans le tertiaire que dans l'industrie. À l'inverse, l'influence de l'endettement ne s'exerce que dans l'industrie, et en phase de croissance. Enfin, quelle que soit la phase de croissance, l'investissement des grandes entreprises ne semble dépendre d'aucune de ces variables. Au total, les petites entreprises ont été plus touchées par le resserrement de la politique monétaire, car elles n'ont pas accès à d'autres modes de financement que les crédits bancaires.

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Langue Français

Extrait

047-064 - Article 5 29/06/2001 09:24 Page 47
ENTREPRISES
Le ralentissement
de l’investissement
est plutôt le fait
des petites entreprises tertiaires
Richard Duhautois*
Au cours de la première moitié des années 90, l’investissement des entreprises est demeuré
faible et en dessous du niveau que les modélisations macro-économiques permettaient
de prévoir. Cette divergence tient en partie à un comportement d’investissement très diffé-
rencié suivant la taille et le secteur d’activité. La diminution de l’investissement en volume
dans les grandes entreprises et l’industrie recouvre en réalité le recul de la part de ces deux
catégories d’entreprises dans la valeur ajoutée : ce constat d’ensemble se révèle trompeur
lorsqu’on appréhende les comportements au niveau individuel.
En dehors de l’influence du taux d’intérêt réel, peuvent jouer en effet à ce niveau les
garanties offertes par les entreprises sans capacité suffisante d’autofinancement, aux
organismes de crédit. Cela conduit à adjoindre au taux d’intérêt, le taux de marge et le
taux d’endettement, en tant que variables explicatives du taux d’investissement. Une
telle estimation est effectuée en distinguant une phase de croissance (1985-1990) et une
phase de récession (1991-1996).
Ces variables se révèlent plus déterminantes pour les petites entreprises que pour les
grandes. Les variables de financement (taux de profit et d’endettement) jouent plus for-
tement en période de récession, et cela principalement pour les petites entreprises. Le
taux d’intérêt et le taux de marge ont un impact plus sensible dans le tertiaire que dans
l’industrie. À l’inverse, l’influence de l’endettement ne s’exerce que dans l’industrie, et
en phase de croissance. Enfin, quelle que soit la phase de croissance, l’investissement
des grandes entreprises ne semble dépendre d’aucune de ces variables.
Au total, les petites entreprises ont été plus touchées par le resserrement de la politique
monétaire, car elles n’ont pas accès à d’autres modes de financement que les crédits
bancaires.
*Richard Duhautois appartient au département des études économiques d’ensemble, division marchés et stratégies d’entreprises, Insee.
Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d’article.
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donc le niveau de richesse de l’entreprise près une croissance soutenue entre 1985
qui détermine le niveau d’investissementAet 1990, l’investissement des entreprises
(cf. Rosenwald (1999) pour une recension defrançaises a stagné jusqu’en 1996. Il est resté
la littérature dans ce domaine). Dans cettependant cette période au dessous du niveau
optique, l’effet d’une politique monétaire prédit par les modélisations macro-éco-
restrictive (une hausse des taux d’intérêt) nenomiques. Cet article se propose d’avancer
s’exerce pas seulement sur le coût du capital,quelques éléments d’explication à cette diver-
mais se traduit aussi par une baisse de lagence, en les recherchant au niveau micro-éco-
richesse de l’entreprise. L’accès au crédit denomique. Une telle divergence peut tenir en
celle-ci est alors soumis à des conditions pluseffet à la forte hétérogénéité constatée à ce
dures. Ce durcissement contribue à détériorerniveau : les entreprises connaissent des évolu-
son activité et amplifie l’impact de la politiquetions très contrastées de leurs investissements
monétaire. Celui-ci n’est donc pas identiqueselon leur taille et leur secteur d’activité (1).
pour toutes les entreprises : les petites ne dis-
posant que du crédit bancaire pour se finan-C’est dans les grandes entreprises et le secteur
cer, subissent plus durement les contraintes industriel que l’investissement en volume a
de financement. De même, les entreprises dudiminué au début des années 90. Mais cette
secteur tertiaire semblent avoir plus de mal àévolution reflète en partie des déformations
se financer que les entreprises de l’industrie.de structure. La part de l’industrie et celle des
grandes entreprises dans la valeur ajoutée
Ces deux catégories d’entreprises sont-ellestotale ont enregistré un recul permanent entre
plus sensibles que les autres aux conditions de1985 et 1996. En réalité, les petites entreprises
financement, en particulier durant les phasesseraient davantage que les grandes à l’origine
de récession, ainsi que l’affirme la théoriede cette faiblesse de l’investissement: ce
(Oliner et Rudebush, 1994) ? Tester cette affir-qu’atteste l’évolution à partir de 1993 du ratio
mation conduit à analyser la relation entreinvestissement sur valeur ajoutée relatif à
investissement et conditions de financementcette catégorie d’entreprises.
par type d’entreprise (taille et secteur). En
revanche, une telle démarche n’a pas valeur Cette faiblesse de l’investissement peut être
de test pour les hypothèses sous-jacentes à lareliée à la hausse des taux d’intérêt réels.
théorie du canal du crédit.Celle-ci se traduit par un choc sur le coût de
financement externe des entreprises. Ce coût
Pour ce faire, on estime une équation déduitejoue de manière différente selon la phase du
d’un modèle de contrainte de solvabilité : l’in-cycle conjoncturel. En période de croissance,
vestissement des entreprises non contraintesles taux d’intérêt auraient un impact réduit sur
financièrement est fonction de la demandel’évolution de l’investissement, laissant l’effet
anticipée et des coûts relatifs, alors que l’inves-accélérateur jouer le rôle déterminant. Cela se
tissement des entreprises contraintes dépendvérifie dans la seconde moitié des années 80,
en outre d’autres variables (indice de profitau cours desquelles l’investissement et les taux
(taux de marge), taux d’intérêt (taux d’intérêtd’intérêt réels augmentent simultanément. En
réel apparent (4))), et d’un indice d’endet-période de récession, au contraire, les taux
tement (endettement de l’entreprise de lamais aussi d’autres caractéristiques de la struc-
période précédente).ture financière des entreprises joueraient sur
l’investissement (2).
Le canal traditionnel (via les taux d’intérêt)
ne semble pas le seul canal par lequel la poli-
1. Cette argumentation est confirmée par une étude similaire
tique monétaire peut influencer les décisions à partir de données européennes (Beaudu et Heckel, 2001).
2. Pour une analyse du lien entre contraintes de financement d’investissement. Une autre approche, l’analyse
et cycle conjoncturel, se reporter à l’article de Crépon et
du canal large du crédit, privilégie la limitation Rosenwald dans ce même numéro.
3. L’organisme de crédit peut, par exemple, utiliser les actifsde l’offre de crédit et sa propagation sur la
immobilisés de l’entreprise comme collatéral (Bernanke, Gertlersphère réelle. Ainsi, un organisme de crédit et Gilchrist, 1996). Si la valeur des actifs de l’entreprise est supé-
peut utiliser les actifs de l’entreprise comme rieure au montant qu’elle désire investir, l’entreprise n’est pas
contrainte financièrement. En revanche, si cette valeur est infé-garantie des prêts qu’il accorde (3). Si ces
rieure à ce montant, l’entreprise est contrainte financièrement.
actifs sont suffisamment élevés par rapport au 4. Le taux d’intérêt réel apparent (frais financiers/endettement -
taux de croissance des prix) ne représente pas ici le taux d’inté-montant des prêts sollicités, l’entreprise n’est
rêt de long terme usuellement déterminant de la théorie de
pas contrainte financièrement. Dans le cas l’investissement, mais un indicateur de solvabilité pour les orga-
nismes de crédit.contraire, l’entreprise est contrainte. C’est
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Ce modèle est estimé sur un fichier de don- L’investissement en volume a diminué
nées fiscales portant sur un grand nombre d

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