Extrait du recueil de nouvelles "Instants insolites"
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Publié le 24 avril 2014
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Langue Français

Extrait

Introduction« Instantsinsolites», est une série de onze nouvelles décalées dans lesquelles s’entremêlent sujets d’actualité et éléments fantastiques. Le fil rouge qui relie les 11 nouvelles entre elles est le moment particulier et insolite où le narrateur est confronté à un temps fort de son existence, moment où son destin peut changer de cap. Une pointe d’étrangeté et de fantastique vient souvent agrémenter le réalisme des histoires.
BiographieNée en 1955à Bruxelles,Christiane Willemse vit près de la capitale. Après une carrière bien remplie en tant que professeure dans l’enseignement de promotion sociale et la création de cours d’anglais et de néerlandais en ligne, elle profite de sa préretraite pour reprendre la plume et s’adonner à sa passion de l’écriture. C’est ainsi qu’est né son premier recueil de nouvelles.
1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11.
Sommaire
Ticket, s’il vous plait !
Confession très intime
Le meilleur ami de la femme
Piège de verre
Comme deux gouttes d’eau
De mémoire de canard
Belle illusion
Sens mortel
Rendez-vous insolite
Reflets de femme
Dis-moi à quoi tu songes !
Ticket, s’il vous plaît !janvier 2011 Une dernière journée de travail venait de s’achever et Célia regagnait sa demeure. La porte d’entrée refermée, elle jeta négligemment ses clefs sur le petit guéridon dans le hall. Elle se sentait lasse. Du regard, elle interrogea le petit miroir vénitien au-dessus du mur en crépi: ses traits fatigués ne la surprirent pas. Elle venait de passer le mois le plus éprouvant de sa carrière de chargée de mission, à la «Communauté française ». Mais qu’est-ce qui l’avait poussée à demander, à 55 ans, sa mise à la préretraite ? Était-ce la gestion des cours de langues en ligne, qui ne lui plaisait plus ? Ou le différend qui l’avait opposée à un inspecteur et avait laissé des traces dans leurs rapports ultérieurs ? Elle n’aurait pu le dire. Peut-être souhaitait-elle, tout bonnement arrêter, pour faire l’inventaire de sa vie professionnelle et affective. Dans le train qui la ramenait à la gare de son domicile, en périphérie bruxelloise, elle avait lu la superbe carte qui accompagnait le pot d’orchidées blanches, offert à son départ du bureau. L’émotion l’avait étreinte en parcourant les pensées amicales que ses anciens collègues, enseignants pour la plupart, avaient rédigées à son intention.
Et soudain, elle avait repensé à l’accordéoniste transi en cet après-midi hivernal. Il jouait «la vie en rose », et Célia lui avait jeté 50 cents. Bien peu de passants pressés avaient noté sa présence, sauf peut-être ce jeune joggeur, qui avait bousculé Célia lorsqu’elle avait lancé la piécette. Ce n’était pas dans ses habitudes de faire l’aumône aux nombreux sans-abris qui quémandaient aux alentours de la gare du Nord. Mais aujourd’hui, c’était une situation inhabituelle, et l’accordéoniste l’avait gratifiée d’un franc sourire: petite consolation à son humeur chagrine. Arrivée à la gare de Grand-Bigard, elle était descendue tenant fermement le pot d’orchidées d’une main, de l’autre son sac et son attaché-case. Elle avait déposé le tout dans le coffre de sa voiture givrée, qui l’attendait au parking. L’idée voluptueuse de prendre un grand bain chaud en arrivant chez elle l’avait réconfortée. Ensuite, elle téléphonerait à Marcus, son compagnon biologiste, qui participait à un séminaire à Paris. Dans la maison, tout était calme. Elle ouvrit la porte de la cuisine et s’étonna de ne pas voir apparaître Nelson, son petit Shih-Tzu, si affectueux. Soudain, un mauvais pressentiment s’empara de Célia. Pourquoi l’animal n’accourait-il pas, frétillant de la queue et jappant pour accueillir sa maîtresse ? Elle ouvrit la porte du salon: une vision d’horreur la figea sur place. La pièce d’habitation se trouvait dans un état de désordre indescriptible. Des livres de la bibliothèque jonchaient le sol et un vase de cristal s’étoilait en mille morceaux scintillants sur le carrelage.
Mais surtout, elle aperçut le chien sans vie, recroquevillé, un lacet lui enserrant le cou. Cette mystérieuse strangulation n’avait occasionné aucune trace de sang. C’était plutôt la position fœtale du chien, et sa langue tirée qui provoqua chez Célia la nausée. Elle s’agenouilla péniblement auprès de Nelson, incapable de rassembler ses idées. Son cerveau avait du mal à démarrer, tout comme sa voiture par ces temps de froidure. Un frisson lui parcourut le dos lorsqu’elle prit enfin conscience qu’elle n’était peut-être pas seule dans la maison. Quelqu’un avait très bien pu se réfugier à l’étage, lorsqu’elle avait tourné la clé dans la serrure. Elle se précipita dans le hall d’entrée et gravit, deux à deux, les marches de l’escalier de chêne. Haletante, elle s’arrêta devant les portes des chambres. Seule la porte de la salle de bain était entrouverte. Célia y jeta un coup œil sans rien y remarquer. Par la fenêtre, on distinguait l’immense frêne qui délimitait le jardin embrumé. Déjà, la soirée s’annonçait. Des fenêtres de maisons avoisinantes s’éclairaient une à une. Célia se précipita alors vers sa chambre à coucher. D’une main moite, elle ouvrit la porte. Ici encore, pas le moindre signe de présence humaine. La couette rabattue, comme une bête tapie, attendait les occupants du lit. Sur la commode, la photo de sa fille Vanessa souriait dans son cadre argenté. Les vêtements de son compagnon Marcus étaient méticuleusement rangés sur la chaise, comme à son habitude. Elle referma la porte et se dirigea vers son bureau. Sous la porte, une lueur inhabituelle attira son attention. Avait-elle oublié une lampe, ce
matin, avant de partir au Ministère? C’était peu probable. Ne valait-il pas mieux appeler la police locale? Les pensées s’entrechoquaient dans sa tête douloureuse. Malgré l’angoisse insoutenable qui l’étreignait, Célia décida d’ouvrir délicatement la porte. Et là, elle constata que les tentures avaient été tirées par une main anonyme et masquaient la rue. Son ordinateur personnel était ouvert et diffusait une lumière crue dans la pénombre de la pièce. L’étrangeté de la situation l’interpella. Elle se pencha vers l’écran, et vit qu’un document Word était ouvert. Très intriguée, elle s’assit et crut défaillir lorsqu’elle lut le texte qui s’affichait en lettres capitales : « Tu ne perds rien pour attendre». Son regard apeuré fit le tour de la chambre, mais ne détecta rien qui puisse, de quelque façon que ce soit, expliquer la missive. Il fallait maintenant réagir vite, prendre les bonnes décisions, malgré le froid qui lui glaçait les mains. Elle s’empara du téléphone et forma fébrilement le numéro du commissariat de police… À l’autre bout du fil, l’inspecteur Derijke promit d’envoyer au plus vite une patrouille de deux agents. Mais ses effectifs étant réduits, il ne pouvait quitter son poste au commissariat que « s’il y avait mort d’homme », commenta-t-il, sans plaisanter. La mort d’un chien, même par strangulation, ne justifiait pas son déplacement, pensa amèrement Célia. Et que dire de la menace écrite sur l’écran de son ordinateur ?L’inspecteur, placide, lui déclara que ce n’était pas la première fois que des amis facétieux envoyaient un message inquiétant sur l’écran d’une
connaissance. Célia fulminait, mais n’osa plus insister. Elle s’arrangerait, de toute façon, avec les policiers de faction. La première chose qu’elle entreprit, lorsqu’elle eut terminé sa conversation, fut de fermer les volets des portes-fenêtres de la salle à manger. Au-dehors la nuit était tombée, et les ombres des arbustes et buissons enveloppaient la grande terrasse d’un linceul. Le cri d’une chouette, fit tressaillir Célia. «Grand Dieu, l’on se croirait dans un mauvais polar», pensa-t-elle. Il devait bien y avoir une explication plausible à tout ce qui se produisait depuis son retour à la maison. Lorsqu’elle voulut fermer le volet de la cuisine, elle s’aperçut que la porte donnant sur le jardin n’avait pas été verrouillée. Une distraction inhabituelle qu’elle payait très cher maintenant. En attendant la police, Célia se pelotonna frileuse dans le fauteuil de cuir, face à la télévision.
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