Les Faux As
20 pages
Français
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Description

Alors que les histoires concernant la « banlieue » défraient régulièrement la chronique médiatique, peut-on dire que nous sachions réellement ce que cache ce vocable finalement peu précis ?
C'est à un séjour au cœur des banlieues les plus chaudes, représentées principalement par la cité des Asphodèles, « Les Faux As » en verlan, que nous convie l'auteur de ce roman. L'usage d'une langue parfaitement correcte mais parsemée aux bons endroits de termes argotiques du cru contribue à mettre le lecteur dans le bain. L'originalité et l'humour, malgré certaines scènes particulièrement violentes, sont toujours au rendez-vous. Au travers de chapitres assez courts, Bernard Viallet nous dessine les portraits de tous ces habitants, jeunes ou vieux, français de souche ou étrangers, racailles ou policiers.
Sans rancœur, l'auteur nous décrit des gens finalement tous livrés à eux-mêmes, voyous mineurs s'extériorisant dans des exactions de plus en plus violentes et malsaines, citoyens français abandonnés par une police elle-même dépassée et craintive, clandestins courageux manipulés puis laissés à leur triste sort, politiques égoïstes, eux-mêmes inconscients de la réalité sociale.
Un roman d'amour réaliste et social ayant pour cadre une cité de non-droit partie à la dérive. Des personnages attachants, des situations réalistes. Du vécu et un véritable cri d'espoir devant une situation difficile.

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Publié par
Publié le 19 mars 2017
Nombre de lectures 5
Langue Français

Extrait

LES FAUX AS (Roman)
Bernard VIALLET
LES FAUX AS
Editions Emma Jobber
Du même auteur
« Le Mammouth m’a tué » (Editions Tempora) « Ulla Sundström » (TheBookEdition & Amazon Kindle) « Dorian Evergreen » (TheBookEdition & Amazon Kindle) « Bienvenue sur Déliciosa » (TheBookEdition & L’IvreBook) « Opération Baucent » (The BookEdition & Amazon Kindle) « Expresso Love » (CSP & Bookless Editions) « Montburgonde » (CSP & Amazon Kindle) « L’aéronaute embourbé » (CSP & Amazon Kindle)
Le droit est le jugement de valeur qu’une force porte sur une force moins forte qu’elle… (H de Montherlant) La raison du plus fort est toujours la meilleure... (Jean de La Fontaine ) Les hommes sont si bêtes qu’une violence répétée finit par leur paraître un droit…(Helvétius ) La violence crée le désordre et le désordre est le principe de tout mal… (Hermès Trimégiste )
A Joëlle, Emmanuelle, Marianne et Benoît
Pour suivre l’actualité de l’auteur, retrouvez-le sur son site : www.bernardviallet.fr ou sur Facebook : https://www.facebook.com/bernardvialletauteur/
CHAPITRE 1 Asphodèles, Asphos, Faux As...
La Cité des «Asphodèles» est bien vilaine, en dépit de son joli nom. D’abord, elle est à l’écart de tout et donne l’impression, vue de loin, d’avoir été posée ou plutôt abandonnée au milieu des champs. Et puis, il faut prendre un bus crado, plein de tags et de rayures sur les vitres, se traîner dans des zones dites industrielles ou commerciales avant d’y arriver enfin. Ainsi, la population se retrouve loin de tout, de la vie, du centre-ville. Cette cité, construite dans les années soixante-dix, est composée de quatre « barres » d’immeubles de cinq étages tout en longueur, mais pas trop hauts, et de trois tours de vingt qui montent leur laideur vers un ciel triste et gris. Il paraît qu’au début, c’était assez sympa, mais ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui. A cette époque, les gens étaient ravis de l'aubaine. Ils avaient enfin trouvé le calme, un certain confort, la salle de bain, les W-C, le chauffage central. C’était propre, coquet, agréable. Les HLM avaient même fait planter trois ou quatre sapins par-ci, semer du gazon par là, installer une balançoire, un tourniquet et un bac à sable. Il n’y avait pas de quoi se plaindre, bien au contraire. Quand on s’y présente maintenant, ça fait tout drôle pour qui l’aurait connu autrefois comme, par exemple, les premiers habitants. Déjà, il n’y a plus d’herbe, rien que de la terre battue, transformée en boue gluante l’hiver et en poussière envahissante l’été. Comme il n’y a pas de véritable terrain de foot ou de basket dans le coin, ça fait des années que ça piétine, court derrière des ballons et la verdure s’est fait la malle depuis
longtemps. Les chiens se défaussent un peu partout, alors il faut regarder où l’on marche. Et puis on est surpris par cette inscription énorme, barbouillée à la bombe sur le mur aveugle de la barre B : « Nique la police ». Avec ça et les bagnoles brûlées, on sait où on est, on ne peut pas se tromper. Un tas de petits choufs de six à huit ans maxi sifflent ou braillent « Teuss, teuss… » dès qu’un individu se pointe. Du moment que l’arrivant n’habite pas aux Asphos ou aux « Faux As » comme ils disent en verlan, c’est un intrus et donc un suspect. Il faut dire qu’il s’en passe de belles par ici. On trouve des seringues et des capotes un peu partout. Les gamins jouent avec. Les poubelles ont un drôle d’allure noirâtre vu que certains s’en servent pour leurs feux de camp. Chaque bâtiment comprend six escaliers avec un petit hall d’entrée tout défoncé (comme ceux qui tiennent les murs et font chier les gens à longueur de journée). Les vitres de la porte d’entrée sont cassées et les boîtes aux lettres crevées pendent lamentablement. Comment font les gens pour le courrier ? Ils se démerdent, ils guettent le facteur. De toutes façons, pour ce qu’il y a à recevoir, des factures, des commandements à payer et de la pub, c’est pas bien grave, ça peut tomber de la boîte et se retrouver à cramer dans la poubelle. Par là-dessus une odeur tenace de pisse, de Crésyl et de feuilles brûlées (en fait c’est l’odeur de la beu, mais tout le monde ne la reconnaît pas forcément). Pour se remonter le moral, le visiteur peut encore jeter un coup d’œil sur les expressions graphiques des artistes locaux : au B4 c’est une queue énorme avec deux couilles poilues surmontées du commentaire suivant : « J’enc… les blancs » au feutre noir indélébile. Le territoire est marqué de toutes les façons possibles. La porte qui mène aux caves est défoncée, un courant d’air froid et puant s’en échappe. Les adultes, même les moins craintifs, ne s’y risquent plus depuis longtemps. En fait, c’est le terrain de jeu des grands frères. Les caïds s’y
réunissent, font leur business. Il parait qu’ils y ont installé un baisodrome, une salle de muscu et même une petite mosquée. C’est ce qu’on dit, mais comme personne n’y va voir… D’ailleurs, tout le monde s’en fout, ils peuvent bien faire ce qu’ils veulent. Les gens respirent le même air, marchent dans la même crasse, mais la plupart s’ignorent. Certains raseraient plutôt les murs. Les Rodriguez et les Sanson habitent au quatrième, c’est l’avant-dernier étage qu’on atteint par un escalier. Dans un sens, ils sont contents de ne pas habiter dans les tours. Là-bas, il paraît que l’ascenseur est en panne un jour sur deux. Les malheureux habitants doivent se taper les vingt étages à pinces, c’est vraiment pas folichon. En plus, les derniers étages ont tellement été défoncés, les portes fracturées et les sanitaires volés. La plupart des appartements sont squattés et plus personne d’honnête ne s’y aventure. Aventure c’est le mot qui convient surtout au G. Pas grand monde n’a envie de se risquer par-là, eu égard aux embrouilles. Une fois ou deux, sur le terre plein, on en a retrouvé qui étaient arrivés en bas plus vite que l’ascenseur. Ça défenestre pas mal dans le coin, suffit d’une histoire et « l'accident » est bien vite arrivé… Alex, dix ans, monte les étages avec son cartable qui lui pèse un peu. Quand il descend, il trouve ça plus marrant, il peut le balancer à chaque étage. Tout est pété dedans, ça fait chier la prof, mais c’est pas grave pour ce qu’il travaille à l’école. Il y attend la récré pour jouer au foot et puis l’heure de la cantine et surtout celle de la sortie. Des fois, il faut qu’il ramène les courses. Il file chez l’épicier arabe. Avec le bar tabac, c’est tout ce qui reste de la « Cité Commerciale » du début. Avant, il y avait une petite dizaine de boutiques, mais la plupart des commerçants ont fini par plier bagages, sans doute qu’ils faisaient pas leur beurre ou qu’ils en avaient marre de se faire remettre des vitrines neuves à tout bout de champ. Il trouve tout ce qu’il lui faut chez
l’Arabe, même le pinard ou les croquettes pour chat. Le bar-tabac fait journaux, loto et PMU. Depuis que le patron est un Turc, ça moufte plus. Plus de castagnes, plus d’embrouilles et plus de vitrine cassée. On sait pas trop pourquoi le bougnat du début s’est tiré. Parait qu’il a vendu pour trois fois rien et qu’on aura bientôt un « Quick-kébab. » Vivement qu’il arrive, vu qu’Alex, comme tous les gamins, adore ça, avec toute cette bidoche dans les « grecs » et cette graisse qui vous dégouline sur le menton. Et en plus, ils peuvent les bourrer de moutarde ou de ketchup. Mais, pour l’instant, il faut encore aller en ville, chez les bourges, pour en déguster un !
CHAPITRE 2 Monsieur Brahim
Monsieur Brahim, c’est l’Arabe qui tient l’épicerie. En fait, c’est un Tunisien, une vraie engeance de commerçants, ces gens-là. On dirait qu’ils ont ça dans le sang… Tous les matins, dimanche compris, il ouvre la supérette vers 7h et ne ferme jamais avant minuit. Il s’accorde juste une heure ou deux pour la prière du vendredi, mais c’est tout. Ouvert non-stop, Carrefour ne peut pas en dire autant ! Les trente-cinq heures, Monsieur Brahim, il s’assoit dessus. On dirait même qu’il vit dans sa boutique. Il a mis un petit écran sur une étagère en face du comptoir, mais c’est pas de la télé surveillance, juste les télés tunisiennes, marocaines, Al-djazeera etc, qu’il capte avec sa parabole. « Comme ça, je suis un peu au pays, qu’il dit, je me tiens au courant. » Il trône derrière son comptoir. Il a l’embonpoint rassurant, le geste onctueux, poli, mais sans plus. La moustache grise, un début de calvitie. Il n’est pas trop mécontent de son sort. Il vit petitement, déjeune dans l’arrière-boutique, royaume de son épouse qui s’habille en traditionnel, ne sort presque jamais et parle à peine le céfran. — Et avec ça, Mame Rodriguez ? — Trois livres de couscous… Brahim prend une sorte de petite pelle arrondie et pioche la graine dans un grand sac en papier kraft pour en remplir un plus petit qu’il dépose sur son antique balance. Plein de trucs
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