ma mère, ma mort
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Description

MA MERE, MA MORT Gauthier STEYER 1 L’enfance Je suis enfant de haine. Certains naissent dans l’amour, le bonheur, l’infortune ou la déveine, d’autres dans la malchance, la peur, dans la tristesse et la peine. Moi je suis né dans la haine. Premiers souvenirs, souvenirs de haine. Ceux du foyer de l’enfance. Là où l’on range les sans-familles, orphelins, mal-nés, les sans chance, les sans noms, sans rien. J’ai pas grandi seul. Autour plein d’autres petites gueules, frères et sœurs de chagrin. Je les hais. Depuis quand, j’en sais rien. Je les hais dans mes souvenirs les plus lointains. Ils m’interdisent mon narcissisme, ma toute puissance de petit gamin. Ils volent mes demandes d’exclusivité, mes envies de câlin, mes appétits de chairs, de chaleur, de touché, mes besoins de seins. Je suis un enfant chien, perdu dans une portée qui n’est pas mienne. Je suis un chiot abandonné, enragé, d’aussi loin que je me souvienne, prêt à mordre, à griffer, pour une place qu’ici personne n’a, que je n’aurai jamais, comme les autres autour de moi, petites vies perdues, animaux vaincus. Un regard, une attention, une parole, juste à moi, juste un instant, même s’il s’envole, pour me sentir vivre, pour que je sois, tout simplement, naturellement, 2 symbole de vie, d’une existence, lui redonner un peu de sens. Mais je survis pour mordre. Dans une vie de chien, je mords pour survivre, pour ne pas me plier aux ordres.

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Publié le 12 janvier 2013
Nombre de lectures 220
Langue Français

Extrait

MA MERE, MA MORT
Gauthier STEYER
1
L’enfance
Je suis enfant de haine. Certains naissent dans l’amour, le bonheur, l’infortune ou la déveine, d’autres dans la malchance, la peur, dans la tristesse et la peine. Moi je suis né dans la haine. Premiers souvenirs, souvenirs de haine. Ceux du foyer de l’enfance. Là où l’on range les sans-familles, orphelins, mal-nés, les sans chance, les sans noms, sans rien. J’ai pas grandi seul. Autour plein d’autres petites gueules, frères et sœurs de chagrin. Je les hais. Depuis quand, j’en sais rien. Je les hais dans mes souvenirs les plus lointains. Ils m’interdisent mon narcissisme, ma toute puissance de petit gamin. Ils volent mes demandes d’exclusivité, mes envies de câlin, mes appétits de chairs, de chaleur, de touché, mes besoins de seins. Je suis un enfant chien, perdu dans une portée qui n’est pas mienne. Je suis un chiot abandonné, enragé, d’aussi loin que je me souvienne, prêt à mordre, à griFer, pour une place qu’ici personne n’a, que je n’aurai jamais, comme les autres autour de moi, petites vies perdues, animaux vaincus.
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Un regard, une attention, une parole, juste à moi, juste un instant, même s’il s’envole, pour me sentir vivre, pour que je sois, tout simplement, naturellement, symbole de vie, d’une existence, lui redonner un peu de sens. Mais je survis pour mordre. Dans une vie de chien, je mords pour survivre, pour ne pas me plier aux ordres. Je voudrais être quelqu’un, je voudrais juste vivre, qu’on me voit, m’entende et me reconnaisse. J’attends une main, un signe, une caresse. Je ne reçois rien. Et je hais ceux qui ne me donnent rien, juste l’ essentiel, tout pour mon bien, de la nourriture, une hygiène et quelques soins, autant dire rien. Leur essentiel n’est rien, une survie de chiot, une sous vie d’humain. Et très tôt j’ai compris qu’il faut payer ces mains qui me donnent à boire, à manger, ceux qui assurent ma sous-vie. Ma sous-vie est leur métier. C’est moi qui leur permets de vivre. Moi, on ne permet rien. Juste de me taire et de sous-vivre. Je suis leur gagne pain. Je hais ceux que je fais survivre. Je hais ce que je suis, une sous-vie de merde, qu’il faut garder vivant, une merde de sous-chien, pour gagner un peu d’argent.
*
J’ai une mère, pas de père. Tous les dimanches je peux la voir, une occasion de ne plus me taire.
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Toute la semaine, impatient, j’attends, ma raison d’être, mon seul espoir. Je serre les poings et ferme les yeux. Je serre fort, j’ai mal, et tous les soirs, je la rêve, je la vois, je la respire, je la veux, ma vengeance, ma revanche, mon exutoire. Je renais, je revis, j’existe un peu. Elle m’enlace, me prend pour m’emmener. On s’envole loin dans le noir, pour disparaître, enïn ensemble, tout quitter. Puis je m’endors, il est si tard. Je suis en paix.
* Enïn dimanche, je ne tiens plus. On m’a lavé, coiFé, habillé, déguisé, comme si j’avais changé de peau, j’avais mu. Je m’en fous, qu’on me laisse nu. On cache ma sous-vie pour un semblant de vie. Mais plus rien ne compte, j’ai trop attendu. Dimanche de pluie, dimanche de vie, le nez écrasé sur le carreau de vers froid, je guette ma reine, mon seul amour, mon énergie. De l’autre coté, la liberté, une famille, une vie, j’en suis sûr, il y a tout ça. Et moi je suis là, enfermé, surveillé, prisonnier, abandonné à des éducateurs spécialisés, spécialisés en survie de sous-vies. Mais elle viendra, elle, ma mère, elle me prendra et m’emmènera de l’autre coté, Loin, très loin, vers une famille, un père. Oui c’est sûr, elle ne peut pas m’abandonner. * Je l’aperçois à travers le rideau de pluie. Elle n’est pas seule, il y a un homme aussi. Il y a souvent des hommes, jamais les mêmes. Des hommes qui ne parlent pas et qui l’emmènent, des hommes inconnus, jamais un père.
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Je me redresse d’un bond et cogne le verre, et le verre vibre sous mes poings que je serre. C’est rare, mais aujourd’hui je crie, je ris. C’est bon, c’est chaud, c’est peut être la vie. Elle ne me voit pas. On m’attrape les mains. On me traîne loin de la vitre, on m’arrache à ma vie. On me parle mais je n’entends rien. Les murs tournent, les autres rient. Je veux crever ces gueules de chiots. Je veux mordre ces mains sur mes poings. Je me débats, je deviens fou, il fait si chaud. Une porte s’ouvre, des jambes, des bras viennent vers moi. On me lâche et je tombe dans ces bras. C’est elle, c’est ma mère, je la sens, je la prends, je l’embrasse, la serre, l’attache, je l’entends. Je veux rester là pour toujours, pour l’éternité, pour la vie, la mort, ne plus jamais être séparé. Je sens ses mains, elles me caressent, la tête, les joues, la bouche. Je me sens, mon corps, mon âme, mon sang, ma vie, sa vie, la notre, ensemble, réuni, une seule et même vie. Je suis ivre de vie, tout tourne, il n’y a plus rien autour, juste elle et moi fusionnés en un unique amour. Je lève la tête, je la vois qui sourit, elle me sourit, à moi, il y a un instant une sous-vie, maintenant une vraie vie. Elle me parle même, je ne comprends pas, ça ne fait rien. Elle est mouillée et chaude, tant pis, tant mieux. Je m’agrippe à ce corps que je veux mien, de toutes mes forces, de tout mon poids, autant que je peux. Puis sur mes épaules viennent d’autres mains, des mains étrangères, des mains que je ne veux pas. Ses mains à elle quittent mon visage, je la ïxe droit dans les yeux, elle ferme les siens, ne me regarde pas. On me tire en arrière, elle se détache un peu. Moi je ne veux pas qu’on nous sépare. Pourquoi ne fait-elle rien pour me retenir ?
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Je m’accroche à ses vêtements, je veux encore un peu y croire. Elle recule , moi on me tire. Je lâche ma prise, nos corps se quittent. Je cherche son regard, je veux savoir pourquoi. Elle me tourne le dos pour aller vers ce type. Elle parle, elle fume, elle rit, comme si je n’existe pas. Je ne comprends pas, je ne comprends rien ? Je suis là, elle aussi, et il ne se passe rien. L’éducateur a toujours ses pattes sur moi. Je reste immobile à l’observer, la désirer, à espérer, juste un signe, un regard, un n’importe quoi. S’il te plait, ne me laisse pas, ne m’oublie pas, touche moi. Elle continue à parler fort, à rire trop fort, trop faux, à fumer. Et l’homme aussi, et l’éducateur avec ses pattes sur moi, tous parlent. Elle rit seule et fort, aussi fort que j’ai mal. Je ne comprends rien à ce qui se dit, je ne veux pas, ne peux pas. J’ai trop mal à ma vie, trop mal à ma mère. Mon corps me fait mal, je ne peux plus me taire. Je crie, je hurle, je vomis ma sous-vie, ma survie de chiot, ma chienne de sous-vie, de petit chiot enragé, ma haine, mon mépris, ma détresse, ma solitude, mon envie d’elle, ma peur d’elle, ma peur de moi, ma peur de nous, mon dégoût de tous, mon dégoût de tout, mes espoirs, mes frayeurs, mon horreur d’elle. Et je tombe, exténué, vidé, à bout de moi, à bout de tout, au bout des pattes qui me rattrapent juste avant que je me cogne. Ma mère enïn me regarde, les yeux vides et ahuris. Nos regards se croisent. Encore une fois elle fuit. Je ne sais pas pourquoi, mais je la pardonne. Ce n’est pourtant pas la première fois, et cette nuit, comme toutes les autres nuits, je rêverai d’elle, ma mère, ma reine, mon seul amour, mon énergie.
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*
Les jours, les semaines, les dimanches passent, comme passent mes rêves, comme mes espoirs trépassent. De plus en plus de dimanches vides, de dimanches morts, des après-midis le nez collé aux carreaux de verre, sur le dehors. J’attends. J’espère. Je pleure, rongé par le remord. Elle vient de temps en temps encore. Bien sûre c’est ma faute, de moins en moins souvent. Elle passe me voir, elle fume, elle rit, et moi j’attends. Puis elle repart, ni plus, ni moins, je dis plus rien. Je n’ai plus mal. Juste la voir c’est aussi bien. Je m’habitue, me résigne. C’est ma sous-vie. Le chiot grandit. Il s’endurcit. Je deviens chien, et mord toujours plus fort pour cette chienne de survie. Je mords les autres chiens, ceux de la meute, les chiens de rien, des chiens galleux, des chiens pouilleux, des sous-chiens. Je mords parce que je hais, je hais parce que je suis. Je mords pour chaque morsure de ma sous-vie. Le mal par le mal, œil pour œil, dent pour dent, pour ne plus rien sentir, ne plus souFrir dedans. Et il y a les grands, les éducateurs, les sous-parents. Ils me parlent, me retiennent, me menacent parfois, m’enferment, puis tout un tas d’autres gens qui me parlent et m’emmènent. Je me retrouve seul enfermé dans un bureau, seul en face de moi, en face d’un adulte bourreau. On me dit on va t’aider, on me dit qu’il faut parler, on me parle même d’amour, on me dit qu’on peut aimer. Je n’ai rien à raconter, je n’ai rien à aimer. On me parle de ma mère, que savent-ils de ma mère ?
Les mots me traversent sans même me toucher, des mots qui sonnent faux, des sons insensés, amers. J’essaie d’imaginer ce qu’est une mère,
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une famille, j’essaie encore d’espérer. Certains mots du bourreau résonnent un peu plus longtemps. Entre mes espoirs et mes questions, dans ma tête j’entends : Mère, famille, amour, dicile, impossible, pas seul, comprends… Je ne comprends rien, je ne veux pas comprendre. Parler, toujours parler, pour ne rien faire et ne rien dire, pour faire du vent, passer le temps, le temps de mentir. Je suis si las, c’est si long, je ne veux plus être là. Il n’y a rien à faire, je perds mon temps, je veux partir, je veux m’enfuir, je veux me fuir, je ne peux plus être là. Alors je grogne et j’avertis. J’en ai marre, ça sut ! Mais les adultes sont si têtus. Ça n’écoute pas, ça ne voit pas. J’ai dis ïni. Je me lève, il faut partir, et cet adulte qui continue. Je crie, je remue, des mains se tendent pour être mordues. Alors je mords, à pleine dents, jusqu’au sang, jusqu’aux cris.
* J’ai grandi dans la haine, j’ai grandi par la haine, haine ordinaire et malsaine toujours plus forte, plus dure, plus pure, à mon image, chaque jour plus fort, plus dur. Je ne sens plus rien, ne ressens plus rien, juste cette haine qui me fait vivre, me fait grandir, me fait souFrir, me fait du bien, qui comme mon sang coule dans mes veines, ma raison d’être et de sous-vivre. Je ne mords pas souvent, je n’ai plus besoin. Les autres m’évitent parce qu’ils ont peur de ma haine de chien, de mes coups de poings, mes poings d’humain, mes mains de douleur. Juste un regard ou juste un rien, et l’autre en face, sale gueule de chien, baisse sa gueule de chien de rien. On me respecte, on me reconnait, on me craint, parce que j’existe, je suis quelqu’un,
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et plus un rien ou un sous chien. Même les grands, les éducateurs, même eux me craignent et ils ont peur. Alors je joue et je m’amuse, avec leurs frayeurs, avec leur cœur, Je fais semblant, je fais l’enfant et puis je ruse. Quand j’en tiens un, je l’investis et le ïnis, Je le travaille, je le contrains et puis je l’use. * Nouveau bureau, nouveaux bourreaux. On m’a emmené loin de ma famille de rien, loin dans la ville de l’autre coté des carreaux. On est parti très tôt dans le froid du petit matin, Moi coincé entre deux gardes-chiens. La voiture s’est arrêtée au milieu de la ville, en plein dans la vie. Il y a tant de gens, tant d’humains, tant de bruits. La tête m’a tourné, je me suis cogné dans des jambes, des bras, partout autour de moi. Trop de corps, trop de vie, trop pour ce minuscule moi. De nouveau je me sens rien, petit, seul, trop faible, perdu dans la foule et le brouhaha. Perdue ma toute puissance, mes certitudes, mon assurance, perdue mon insolence, mon arrogance, ici je ne suis plus roi. Tout est démesuré, trop, je n’ai plus aucun repère. Je suis perdu dans l’immensité d’un autre univers, de l’autre coté de mon petit carreau de verre. Le nouveau bureau est grand, comme les gens qui sont dedans, comme le reste qui est dehors.
Il n’y a plus de bruit, plus de mouvement, tout est calme, serein, comme quand on dort. Assis entre mes gardiens, je suis presque bien. Je me serre même un peu contre un garde-chien. Derrière le bureau, il y a un visage sévère, qui me scrute, me cherche, me dévisage,
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m’étouFe et me tape sur les nerfs. Mes éducateurs me souent qu’il faut rester sage, il faut bien écouter et ne pas trop bouger. Il y a aussi tout près, un homme en noir, avec une robe, un peu comme un curé, un curé ou un corbeau, méchant corbeau tout noir. Le corbeau me regarde, parfois me sourit. J’ai envie de le crever, lui et son regard pourri. L’autre derrière le bureau commence à parler, il me dit qu’il est le juge, celui des enfants. Et il me parle de ma mère, des morsures et des blessures. On s’occupe bien de moi, moi je suis trop méchant, Mais maintenant je suis grand et je comprends. Il en est sûr, tout s’arrangera et j’irai mieux avec le temps. Je n’ai pas écouté, j’avais déjà tout entendu. Puis les adultes parlent entre eux, pendant longtemps, de gardien à juge, de juge à corbeau, de corbeau à gardien. Quand les adultes parlent, c’est toujours pendant longtemps. Puis tout le monde se tait. Le regard sévère du juge revient. Il se pose sur moi et me brule les yeux. Je ne baisse pas la tête, je ne suis plus un chien. Au contraire je la relève et le ïxe du mieux que je peux. Il me dit tu as entendu ? Il me demande tu as compris ? Je ne sais pas pourquoi j’ai secoué la tête et dis oui. Alors on s’est tous levés, il m’a dit on se reverra, quand tu seras dans ton nouveau foyer, d’ici quelques mois. Il m’a dit bonne chance, j’espère que ça ira. Tout le monde a souri, tout le monde a dit oui, sauf moi. * J’ai mis ma main dans celle du gardien. Pour la première fois ça m’a fait du bien. Je crois que l’éducateur a été surpris. Il m’a regardé avec un air étonné, m’a tiré un peu plus près de lui. J’ai presque couru pour suivre ses enjambées, en traversant les rues et les gens, dans ses pas sûrs de géant.
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AFalé sur la banquette arrière de la voiture, le nez toujours contre la vitre, dans la buée, je proïte de ce cocon, ce nid douillet, pour observer, dans un moment de rupture, la réalité, la vérité, de l’autre coté. Le voyage est long, presque bon. Je suis bien, enveloppé dans une douce chaleur. Tout est étouFé, les sons et les odeurs. Quand même il y a enfoui, tout au fond, de mon ventre, au cœur de mon cœur, comme une angoisse, une sorte de peur. Un autre foyer, c’est ce qu’il m’avait dit. On voulait m’enlever de là où je suis ? Là où j’ai fait ma place, la famille où j’ai grandi ? On veut se débarrasser, me rejetter, on me banni ? Est ce qu’ils avaient menti ? Est ce que j’avais compris ? Et ils avaient tous l’air content dans le bureau, satisfaits, souriants, ravis. C’est donc ça. Il faudra recommencer tout de nouveau, repartir sur de nouvelles haines. On veut m’enlever mon semblant de vie. La voiture roule, les gardiens m’emmènent, mais pour aller où ? Le nez contre la vitre j’essaye de me remémorer le chemin du matin, celui de l’aller. Mais je ne reconnais rien dans cette immensité. Quand enïn j’aperçois les murs de ma prison, les murs de l’institution, ceux de ma maison. La voiture entre dans la cour, je suis presque soulagé de retrouver mon univers, retrouver ce foyer. De l’autre coté de la cour je regarde mon carreau, petit carreau de verre qui éclaire ma chambre contre lequel j’écrase mon nez à attendre, à espérer, imaginer et rêver bien au chaud. Je le hais ce carreau qui me sépare de la vie, J’ai tant besoin de lui pour rester en survie. * Ce soir au repas j’ai posé des questions.
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