NOUVELLE: LES CAPRICES DU PASSE
22 pages
Français

NOUVELLE: LES CAPRICES DU PASSE

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
22 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Fanny et Paul se sont juste le temps d'un weekend. Vingt ans plus tard, à la faveur de Facebook, Paul retrouve les traces de Fanny qui est marié et mère de deux enfants. Face aux facéties du destin pourront-ils se retrouver?

Informations

Publié par
Publié le 21 juin 2012
Nombre de lectures 274
Licence : Tous droits réservés
Langue Français

Extrait

LES CAPRICES DU PASSÉ
"Il y'a des jours comme ça, où on aimerait rester blotti au fond de son lit, au chaud sous la couette, isolé du monde extérieur", se disait Fanny en se brossant les dents. Debout, à côté d'elle, Philippe son mari, le col de sa chemise bleu ciel relevé, était sur le point de nouer sa cravate. Le miroir leur renvoya l'image d'un couple uni et sans histoire. "Il était si beau ainsi vêtu dans son élégant costume gri"s, pensa-t-elle en suspendant son geste afin de l'aider. Leurs regards se croisèrent. Le cœur de Fanny se serra en lisant de l'inquiétude dans les yeux de son conjoint. En effet, depuis une semaine, il ne cessait de lui demander ce qui n'allait pas parce qu'il la sentait soucieuse, distraite voire même absente. Elle avait eu beau répondre que tout allait bien, hormis quelques petits soucis dû à un surcroît de travail, il insistait malgré tout et la harcelait au point de créer des tensions entre eux. Comment aurait-elle pu lui avouer que la période noire qui avait entachée leur passé quand elle était étudiante, avait ressurgi sans crier gare sous la forme d'un email expédié dans la messagerie de son journal "facebook"  
Tous les matins, dès son arrivée au bureau, Fanny lisait ses emails en savourant un café fort sans sucre, avant d'entamer une journée marathon qui la conduisait aux alentours de 19h. Un brin ennuyé par les harcèlements des internautes qui croyaient que seules les femmes faciles s'inscrivaient sur les réseaux sociaux, elle ne s'attarda pas sur leurs messages fleuries de citations empruntées à des sites spécialisés en la matière . Soudain, son attention se figea sur le profil sans photo d'un certain Paul qui prétendait l'avoir fréquenté il y'a une vingtaine d'années. Agacée par l'absence d'identifiant sur son mur, à croire qu'il avait créé cette page juste pour entrer en contact avec elle, elle lui répondit sèchement qu'elle ne savait pas qui il était malgré les détails qui attestait qu'ils se connaissaient. Puis, elle appuya sur la touche "envoyer" et se concentra sur le point des activités du DG dont elle était l'assistante.
Elle rédigeait le compte rendu d'une réunion dont elle avait été le rapporteur quand elle fut distraite par la sonnerie de sa messagerie. Machinalement, elle cliqua sur l'enveloppe qui clignotait et retint son souffle. Le bel homme qui lui souriait à travers l'écran n'avait jamais été un inconnu pour elle. Il avait joint sa photo, afin qu'elle sache que c'était lui l'expéditeur du message reçu quelques instant plus tôt . Il était resté le même hormis ses cheveux qui étaient devenus plus gris. "Dans notre famille, on a tous des cheveux blancs à partir de la vingtaine" lui avait-t-il révélé. Fanny leva les yeux sur le cadre qui contenait des photos de son mari et de leurs deux garçons, fruit d'un bonheur construit sur du roc. Puis son regard dériva vers des souvenirs enfouis au plus profond de sa mémoire depuis vingt ans.
 Fanny avait rencontré Paul dans la chambre de Chantal sa voisine de palier. Il était treize heures et elle voulait déjeuner aux "PALMIERS" , un groupe de paillotes rondes placées les unes à côté des autres. Les deux copines occupaient des chambres individuelles dans un des batiments en face dudit restaurant situé au sein du campus 2000. Craignant de ne rien trouver de comestible à pareille heure, elle avait surgi dans la chambre de Chantal dont la porte était maintenue ouverte toute la journée à cause de la chaleur. Elle la trouva assise sur son lit en train de discuter avec un inconnu qu'elle présenta comme étant le petit frère de Charles son copain que Fanny connaissait très bien. Paul, puisque c'était de lui qu'il s'agissait, était à peine plus âgé qu'elle. Etudiant en fin de cycle à l'Esca il était grand et mince. Fanny remarqua ses épais cheveux parsemés de mêches grises, la petite brèche qui attirait l'attention quand il souriait ainsi que son polo blanc à manches longues fourré dans un jean de couleur kaki . Pendant qu'elle l'observait, elle ne se rendait pas compte qu'il lui rendait la pareille. La poignée de mains qu'ils échangèrent était si chargée d'électricité qu'ils y mirent fin précipitamment, provoquant les rires moqueurs de Chantal qui selon elle assistait pour la première fois de sa vie à un coup de foudre en direct.
En lieu et place du resto, le jeune homme les invita dans un restaurant huppé en zone 4. Au début, l'atmosphère était légèrement tendue. Néanmoins, Chantal réussit à coup de blagues et de plaisanteries à créer une ambiance conviviale à laquelle ses deux compagnons, les amoureux comme elle surnommait intérieurement, finirent par participer. Fanny traitait Paul comme une simple connaissance. Elle s'interdisant la moindre relation ambigüe avec les hommes parce qu'elle avait Philippe dans sa vie.
Issu de la grande bourgeoisie, métis, grand et beau il aurait pu faire carrière dans le mannequinat s'il l'avait voulu. De dix ans plus âgé qu'elle, il entretenait une liaison avec une pharmacienne au moment de sa rencontre avec Fanny encore au lycée. Pour elle, il avait mit fin à tout, allant même jusqu'à supporter les scandales que sa concubine déclenchait partout où ils se croisaient. Philippe avait été surnommé "nounours" par sa jeune amie, tandis que lui l'appelait fée clochette, bébé, poussin selon ses envies. Pour lui prouver son amour, il avait attendu qu'elle entre en cité avant de consommer leur union après s'être présentée officiellement à son père ,la mère le connaissant déjà .
Au départ, "l'adorable jalousie de nounours" comme le disait la jeune fille avec indulgence s'était transformée, petit à petit, en un sentiment plus malsain. Il avançait pour argument à sa jalousie maladive, qu'il était lui même surpris par ce qu'il éprouvait pour elle, vu qu'on le connaissait comme un tombeur et un coureur de jupons invétéré. Cependant, face à elle, il ne pouvait s'empêcher d'éprouver un sentiment protecteur de grand frère, de meilleur ami, d'amant et de futur époux. Il avait fini par se convaincre et Fanny à sa suite que c'était la seule façon de prouver qu'il l'adorait. Il la couvrait de cadeau, dévançant tous ses besoins, sur tous les plans. Ce n'était pas l'argent qui intéressait Fanny parce que ses parents lui versaient une somme substantielle comme argent de poche, mais plus tôt leur histoire d'amour . Celle-ci était en tout point semblable aux romans à l'eau de rose. En plus, cerise sur le gâteau, toutes ses promotionnaires lui enviaient le beau Philippe. Certaines, par méchanceté se demandaient ce qu'il trouvait à ce moineau sans intérêt. Et pourtant, le gars montrait une telle joie à son apparition quand il venait la chercher en voiture ou à moto ( dans le dos de ses parents), qu'elles commencèrent à regarder Fanny sous un angle différent. La rumeur courue qu'elle devait être une experte au lit pour scotcher un tel homme à sa botte; laquelle rumeur mourut aussi vite lorsque lylyne son bras droit , excédée par tant de médisances, révéla que le couple n'échangeait que des baisers. Fanny et Philippe vivaient en osmose, dans une bulle. Naïvement, pour n'avoir connu que lui, la jeune fille était persuadé que cela se passait ainsi dans tous les couples, même si ses sœurs prétendaient le contraire. Philippe lui répétait sans cesse, à longueur de journée, qu'elle l'aimait, elle lui appartenait, elle était sa propriété, un joli terrain en friche mis en valeur par ses soins. Par conséquent, il ne permettrait à personne de marcher sur ses plates bandes.
Lorsqu'elle arriva à l'université, la surveillance de ce dernier s'accrut, prenant une forme plus vicieuse, sans que l'attitude de sa chérie n'ait changé d'un iota: Il se mit à surveiller et à contrôler tous ses faits et gestes, allant même jusqu'à fouiller dans sa corbeille à papier et à renifler ses vêtements à la recherche d'un parfum autre que le sien. Il faisait le tri parmi ses copines et connaissances. Celles qu'il soupçonnait d'avoir des "Grotos" ou de tromper leurs copains était bannies de son entourage. Il lui interdisait d'avoir un binôme, la trouvant suffisamment intelligente pour travailler seul. Au besoin, il faisait appel à des potes qui l'aidaient à réviser. Il corrompait les boutiquiers ou les vendeurs de cigarette dont les commerces jouxtaient son immeuble. Il refusait de saluer ses promotionnaires qui par dérision l'avaient surnommé "le pointeur fou". Il la déposait à la fac, la ramenait après les cours. il faisait la même chose partout où elle désirait se rendre. Il se mettait en congé pendant les vacances universitaires. Il pouvait se le permettre parce qu'il gérait les affaires de son père. Seules Lylyne son amie d'enfance (qui se rendit en France pour poursuivre ses études) et Chantal sa voisine dont il connaissait le copain trouvaient grâce à ses yeux.
Au restaurant, Paul et Fanny tentaient en vain d'empêcher leur bras de se toucher, malgré la camaraderie instaurée entre eux. Puis, les pitreries du jeune homme finirent par briser la glace au point de se retrouver en train de piocher dans l'assiette de l'autre: "tiens! goute ça! qu'est ce que tu en penses?". "hum, c'est bon"! Avant le dessert, Chantal et Fanny se retrouvèrent dans les toilettes. -Tu as fait une touche, ma chérie dit la première citée en rectifiant sa coiffure devant le miroir. En plus, il est beau , libre et sérieux, à la différence de son grand frère qui est un vrai coureur de jupons. J'ai même une rivale à Kampala". En effet, les deux amies avait surpris, un soir, Charles en plein love dans le parking de l'immeuble de la fille en question. La bagarre entre le couple qui s'en était suivi avait fait le tour du campus. -Paul a l'air bien, en effet répondit Fanny. Cependant, n'oublies pas Philippe. Chantal lâcha un soupir excédé. -Petite soeur, tu ne connais rien à la vie. Ton histoire d'amour avec lui ressemble plus à de la prison qu'autre chose. Tu as quitté le giron de papa et maman pour celui de Philippe. Fais ta propre expérience de la vie avant de l'épouser. De toute façon, tu n'écoutes personne alors, à quoi bon parler. En plus, méfie toi, les métis sont racistes, ils se marient entre eux. Fanny éclata de rire devant une telle mauvaise foi. -Ah les femmes! si nounours savait ce que tu racontes dans son dos. -Il me découperait en petit morceau, fit Chantal en riant à son tour. Pendant ce temps, les pensées de Paul tournaient autour de l'amie de sa belle soeur. Il avait été attiré par ce petit bout de femme coiffée de minuscules dreadlocks, vêtue d'une tunique au couleur de la Jamaïque assortie à une mini jupe mini rouge, qui avait déboulé comme une tornade dans la chambre de sa belle sœur. Au dessert, il lui offrit une mousse au chocolat qu'elle accepta, à condition de le partager avec elle. Paul sauta sur l’occasion. Il inventa sur le champ un jeu dans lequel, chacun devait donner une bouchée à l'autre avec sa propre cuillère: "une bouchée pour toi et une bouchée pour moi". Après le déjeuner, il refusa de les ramener au campus faisant fi des hésitations de Fanny. Il prit donc la direction de Bassam et les conduisit à Azuretty "chez Alpha", réputé pour ses langoustes braisés. Ravie de se retrouver dans ce bel hôtel désert en cette veille de weekend, Chantal se jeta toute habillée dans la piscine, imité par Paul. Fanny refusa, malgré leurs supplications de se joindre à eux. Elle s'installa sur un transat à l'abri du soleil pour assister à la bataille que se livrait les deux amis. Quelques instants plus tard, le jeune homme sortit de l'eau et vint s'asseoir à ses côtés.
Sur le chemin du retour, Chantal insista pour s'arrêter à Port-bouet chez son vendeur préféré de "choukouya". Elle feignit d'ignorer les mimiques et les supplications de Fanny qui pointait du doigt sur sa montre. Après avoir fait un petit tour au glacier en zone 4, tout ce petit monde regagna le campus. De son côté, Chantal les laissa en tête à tête. Une fois le moteur éteint, il se tourna vers elle. -Je te revois quand, demanda Paul. Fanny haussa les épaules sans répondre. -Demain, proposa-t-il sans se formaliser par le mutisme de la jeune fille. On se fait un resto et après on va en boîte. -Non, refusa-t-elle. J'ai promis à ma sœur de l'accompagner à une soirée de gala des Leo club à l'ivoire. Ils accueillent de nouveaux adhérents. - Vendredi prochain? Fanny hocha la tête en guise de réponse. Comme elle ouvrait la portière pour descendre
de la voiture, il lui demanda "tu ne m'embrasses pas ?". Elle referma la portière et ils échangèrent un baiser passionné.
A Philippe qui lui demandait les raisons de son absence, elle répondit qu'elle avait passé l'après midi aux 220 logements dans la famille de Chantal. Il ne mit pas en doute ses dires vu qu'elle en avait l'habitude. Tout au plus, lui reprocha-t-il le fait de ne pas l'avoir prévenu avant de sortir avec son amie.
-Je vais au champ avec le vieux, dit Philippe. Tu m'accompagnes. -Non, répondit Fanny. Je vais profiter de ton absence pour me mettre à jour en finances publiques. -Et que feras tu ensuite, poursuivit Nounours" Ce jeu de questions/réponses qu'elle trouvait d'ordinaire si amusant, l'agaçait particulièrement ce matin là. Elle s'enferma dans un silence boudeur. En fait, l'attitude de son compagnon l'amenait à comprendre, malgré elle, le bien fondé des mises en garde de son entourage. Et puis, elle ne comprenait pas cette manie de vouloir coucher avec elle pour vérifier elle ne savait quoi, chaque fois qu’elle s'absentait plus de trois heures. Le chantage qui s'ensuivait quand elle refusait de se laisser faire l’insupportait. Elle avait envie de revoir Paul, mais elle ne savait comment s'y prendre. L'après midi passée en sa compagnie lui avait fait comprendre qu’à vingt deux ans, elle avait envie de vivre autre chose que cette perpétuelle inquisition dont elle faisait l'objet. Toutefois, il fallait se rendre à l'évidence: elle était la prisonnière de l'amour destructeur de Philippe. Elle se souvint de ce jour où, alors qu'ils regardaient "le crime était presque parfait", il lui avait dit qu'il comprenait les motivations de l'assassin. Il n'hésiterait pas à en faire de même au cas où... Il s'était interrompu quand elle avait exprimé son étonnement. Au bout de trente secondes, il répéta sa question. -Où veux tu que j'aille en ton absence s'emporta Fanny. Ta jalousie commence à me prendre la tête, si tu veux le savoir. J'aimerai bien souffler un peu! Adossé à des oreillers, ils suivaient les informations sur CFI. Apparemment, rien ne retenait son attention, puisqu'il zappait sans répis depuis son réveil. "arrêtes avec tes enfantillages mon poussin. Je ne suis pas jaloux. Je t'aime c'est tout. Et tu m'appartiens. Pourquoi veux-tu souffler? Je t'ai poser cette question parce que je veux pouvoir te visualiser en pensée tout en étant à Adiaké. Tu lis trop de romans ma petite chérie. Fais attention à Harlequin! Ton prince charmant est couché dans cette chambre à tes côtés. Ne l’oublie jamais. Tu ne souffleras et n'iras nulle part! " Il se mit à la chatouiller en riant aux éclats. Mais son rire sonnait faux. Afin de tuer dans l'oeuf, cette énième dispute qui pointait à l'horizon, Fanny sauta du lit, et se dirigea vers la salle de bain. Philippe l'y suivit. Pendant qu'ils s'habillaient, il revint à la charge. " Puisque tu as l'air de vouloir souffler, ou de t'intéresser à quelqu'un d'autre, je t'embarque avec moi à Adiaké. Je suis pas con mon bébé ! dépêchons nous, mon père ne va plus tarder. Pour la première fois, depuis cinq ans, elle refusa de lui obéir. Malgré lui, Nounours fut contraint d'abandonner la partie, parce que les klaxons du chauffeur qui devait le conduire au lieu dit retentissaient dans toute la maison; son père étant la ponctualité faite homme. "Sois sage recommanda-t-il en lui donnant un baiser sur le front. N'oublie pas que mon petit doigt te surveille". Après son départ, la jeune fille retourna sur le campus après avoir fait le ménage malgré la présence du boy cuisinier et de la fille de ménage. Jusqu'à dix neuf heures, Fanny exposait devant une Chantal tour à tour hilare et sérieuse ,
les raisons pour lesquelles elle ne devait pas se trouver dans la même pièce que Paul, a fortiori passer la soirée avec lui. Elle formulait ses craintes parce que le baiser qu'ils avaient échangé l'avait empêché de dormir malgré la présence de Philippe à ses côtés. Elle voulait se marier avec son Nounours le seul homme qu'elle ait connu et aimé jusqu’à présent. Mais comment le pourrait-elle alors qu'elle pensait sans arrêt à Paul. Jamais de la vie, elle n'avait pensé qu'un homme lui ferait autant d'effet sinon plus que Philippe. Puis la seconde d'après, elle s'en voulait d'accorder autant d'importance à ce qui après tout n'était qu'un simple "bisou". Bonne copine, Chantal supporta cette auto-flagellation, tout en essayant quand même de limiter ses débordements. Aux environs de 19h, elle l'informa gentiment que l heure de ' son RDV approchait. Comme si elle venait de prendre conscience qu'elle vivait quelque chose d'unique avec Paul, Fanny oublia toute ses hésitations pour se précipiter dans sa chambre. Quarante cinq minutes plus tard, Elle se présenta devant Chantal qui inspecta sa tenue. Elle tourna sur elle même, vêtue d'une robe bustier de couleur ivoire agrémentée d'un châle en voile satiné noir assorti à ses mules en velours à talon hauts et à sa minuscule pochette . Avec ses créoles à ses oreilles ainsi que les dreads savamment tressés par sa coiffeuse attitrée, elle ressemblait à une jamaïcaine ou une sud africaine. Certains de ses dragueurs en mal de compliments refusaient de croire qu'elle n'était ni l'une ni l'autre. Le cœur battant, elle alla à la rencontre de Paul en priant le ciel afin que Philippe ne vienne pas gâcher ces instants magiques. Le jeune homme était vêtu d'une chemise bleu roi manches longues à poignets mousquetaires portée avec des boutons de manchettes sur un pantalon noir. Comme dans un rêve elle monta dans la Mercédès mise à leur disposition par son frère. Ils dînèrent aux chandelles dans un petit restaurant chinois magnifiquement décoré situé à la rue des jardins. Ils se rendirent à quelques mètres de là, au Bentley's ,lieu de prédilection de la jeunesse dorée et branchée. Dans la boîte de nuit, Ils restèrent collés l'un à l'autre au son des zouks langoureux et des slows que le Dj, JC Kodjané ami intime de Paul, enchaînaient les uns à la suite des autres. Blottis dans les bras de Paul, Fanny les yeux fermés se laissait guider par son cavalier. On aurait dit que toutes les paroles des chansons ainsi que la musique sur lesquelles ils se mouvaient tendrement enlacés, avaient été composées uniquement pour eux. Au bout d'une heure, l'animateur enchaîna avec le groupe zaîko Langa, suivit de Kanda bongo man et de Kofi Olomidé. Sur les rythmes endiablés de kwassa kwassa, de madiaba et autres succès à la mode, Fanny démontra ses qualités de danseuse hors pair. Paul, épuisé par tout ce bruit déclara forfait et regagna son fauteuil sous le regard moqueur de son invitée. Confortablement installé, il observa et admira ses déhanchements en sirotant son verre. Sur la piste de danse, Fanny rivalisait d'ardeur avec les trois serveuses qui l'accompagnaient pour la circonstance. La série de funk ne leur laissa aucun répit. Les quatres danseuses rivalisaient d'ardeur en s'admirant dans les miroirs qui leur renvoyaient leurs reflets. Paul la rejoignit sur la piste quand la voix de Didier Bilé entonna les premières notes de la chanson à succès "Gboglo Koffi". A son tour, il prouva à sa cavalière, que le zouglou et la gestuelle qui allait avec, n'avait aucun secret pour lui. Ils dansèrent jusqu'au bout de la nuit. Enfin, épuisés et heureux, ils quittèrent la boîte dans un silence complice. Ils se glissèrent furtivement dans la chambre de Paul afin de ne pas réveiller sa sœur aînée chez qui il habillait. Là, dans cette chambre dont le décor resterait à jamais gravé dans leur mémoire, tout ne fut que douceur, tendresse, insouciance, éclats de rire parfois teintés de gravité, lorsque Paul se mit à faire des projets pour tous les deux. Il lui parla longuement de ce que serait leur vie après sa sortie de l'ESCA; de la certitude qu'elle était la femme de sa vie à la minute où leurs regards s'étaient croisés; de sa décision de l'épouser et d'en faire la mère de ses enfants; il voulait la présenter dès la semaine suivante à sa sœur aînée et tutrice qui représentait sa mère et son père trop tôt disparus. Fanny dit oui à tout, en se promettant de mettre fin
à sa relation avec Philippe. Ils émergèrent de ce petit coin de paradis dans la nuit du dimanche à lundi aux alentours de quatre heures du matin. Dans le même parking, les deux amants se promirent à coup de baisers enflammés amour et fidélité. Finalement, ils réussirent à se décoller avec la promesse de se revoir le soir même. Ils ne se revirent plus jamais. La détresse de Philippe suite à sa disparition mit fin à tous ses rêves de bonheur avec Paul. Sur une impulsion, qu'il qualifia de terrible par la suite, il abandonna son père en plein chantier. D'Adiaké au campus 2000, il conduisit sans lever le pied de l'accélérateur. Face aux dénégations de Chantal qui affirmait ignorer où se trouvait la jeune fille, et sourde aux menaces d'attenter à sa vie si elle ne passait pas aux aveux, il s'emporta, injuria, pleura; rien y fit. Au contraire, il se fit mettre à la porte par quelques étudiants zélés qui passaient par là. Déterminé à retrouver Fanny, il fit le tour de tous les endroits où elle était censée se trouver, en commençant par le domicile de ses parents d'où il fut chassé par les gardiens, parce qu'il les accusait d'être "des mauvais parents qui ignoraient où leur fille passait ce weekend". Ainsi, durant deux jours, il se lança à la recherche de fanny. Ce fut une loque imbibée d'alcool que Fanny trouva couché devant la porte de sa chambre alors qu'il détenait le double de ses clés. Philippe sombra dans un coma éthylique qui faillit l'emporter. A la clinique, Fanny subit sans broncher la colère et le mépris de sa mère; laquelle ne se gêna pour la menacer de briser la carrière et la vie du père de Fanny au cas elle s'aviserait "de fatiguer, encore une fois, son unique enfant". A la sortie d'hôpital, mentalement fragile, le malade demanda à la jeune fille bourrée de remords de quitter le campus afin de s'installer avec lui à Biétry dans une coquette villa. En complicité avec un de ses amis pharmaciens, il remplaça sa boite de pilule par du placebo. Elle tomba enceinte deux mois plus tard, croyant faire partie du pourcentage de femmes sur lesquelles la pilule ne produisait aucun effet. Ils se marièrent en grande pompe, avec la bénédiction de son père qui tenait à son honneur comme à la prunelle de ses yeux et, la satisfaction mêlée de haine de sa belle mère qui jusqu'à son décès ne lui pardonna pas cette escapade. Vingt ans après, par le biais des réseaux sociaux, il l'avait retrouvé. A cet égard, dans son message, il l'informait avoir mis fin à son mariage parce que le souvenir de Fanny, avec l'âge, le tourmentait de façon récurrente. Son unique fille venait de se marier. Plus rien ne le retenait à New York. Elle était la femme de sa vie, et il envisageait de revenir à Abidjan, pour être plus près d'elle. Par ailleurs, Il ne passa pas sous silence, les nuits sans sommeil passées à se demander pourquoi elle l'avait abandonné. Il ne cacha pas non plus sa détermination à lutter pour la récupérer. Son frère en total désaccord avec son projet, le persuada de partir aux USA . Fanny fut tirée de ses souvenirs par sa collègue Fatim venu l'avertir que l'heure de leur comité de direction hebdomadaire approchait. Elle prit son bloc notes et le compte rendu qu'elle rédigeait. Avant, d'éteindre son ordinateur, elle s'attarda sur la photo de Paul qui lui souriait à travers l'écran. Elle ne put s'empêcher de rire devant les caprices du passé qui la ramenait là où tout avait commencé. ************************************************************************ Ali le maître d'hôtel de "Chez Alpha" rangeait les verres sur les étagères du bar en pensant à ce qui avait marqué son après midi. Les romantiques et les amoureux, ils en avaient vu passés dans son établissement depuis une dizaine d'années qu'il travaillait dans cet établissement. Cependant, le couple qu'il avait eu sous les yeux quelques heures auparavant, l'avaient ému plus que de raison. L’homme était arrivé une heure avant sa dame de cœur. Il avait marqué un arrêt devant la piscine. Les mais dans les poches, il en avait fait le tour comme il exécutait un rituel. Puis, il s'était assis sur un transat. Les mains croisées, le torse légèrement en avant, il avait fixé
l'eau qui miroitait sous les rayons du soleil. A cette heure de l'après midi, il faisait très chaud; Ali pouvait comprendre qu'on ait envie de piquer une tête dans la piscine. Mais apparemment, l'homme n'était pas là pour se baigner. Il était vêtu d'un blue jean et d'un polo gris Ralph Lauren à manches courtes. Il paraissait soucieux et jetait un coup d'oeil sur sa montre toutes les deux secondes. Pendant qu'Ali l'observait, Paul contemplait les changements intervenus au niveau du standing de l'hôtel où il avait emmené fanny vingt ans auparavant. Des bâtiments annexes servant de chambres ainsi que des paillotes placés face à la mer avaient été rajoutés. On avait même créé une salle d'exposition dont les tableaux, masques statuettes et autres sculptures donnaient un aperçu de la richesse culturelle de la région Au bout d'une trentaine de minutes, il se leva et se dirigea à pas lent vers le réceptionniste. D'une voix grave, il commanda un gin tonic "beaucoup de tonic, et très peu de gin, précisa-t-il. Et, s'il vous plait , mettez autant de glaçons que vous pourrez en trouver". Ali sauta sur l'occasion pour parler du temps, de la chaleur, afin d'amener son visiteur à lui donner le motif de sa présence en ces lieux un jeudi après midi. En effet, il était doué pour faire parler ses clients. Contrairement aux autres, il buta sur les réponses débitées sur un ton laconique mais poli de son interlocuteur. Comprenant qu'il dérangea, il abandonna sans rancune la conversation pour se réfugier derrière son bar. Pendant qu'il rinçait les verres, bercés par la voix douce de Julio Iglesias que diffusait en sourdine les hauts parleurs, il vit une ravissante dame, élégamment vêtue d'un ensemble maxi cintré en pagne dans les tons rouge et bleu qui moulait son buste et sa silhouette menue, se diriger vers lui en jetant des regards furtifs autour d'elle. Elle semblait chercher quelque chose ou quelqu'un. Son visiteur se redressa quand il l'aperçut. Son visage s'illumina pendant qu'il se dirigeait les bras ouverts à grandes enjambées vers elle. Ali remercia le ciel que l'endroit fut désert. Le couple enlacé sous ses yeux avait perdu toute pudeur et toute notion du bie être. Discrètement, il s'éclipsa en prenant soin de fermer derrière lui les grandes portes fenêtres. Fanny et Paul ne se rendirent pas compte du départ du vieux serveur. Ils se souriaient, se dévoraient des yeux, chuchotaient leurs prénoms à l'infini. Les deux amoureux savaient qu'il en serait toujours ainsi. Peu importait le temps qu'il passerait loin l'un de l'autre. Ils s'aimeraient toujours. En riant, ils s'élancèrent vers la plage. Fou de bonheur, Paul la souleva de terre et la maintint contre sa poitrine jusqu'à ce qu'ils atteignent la paillotte la plus proche de la mer. A ses côtés, Fanny oublia tout ce qui n'était pas lui. Elle savait que le temps des confidences et des choix viendraient. Cependant, ce qu'elle savait par dessus tout, c'était la certitude absolue qu'elle avait eu raison de venir à ce rendez vous qu'ils s’étaient fixés, bien avant le retour de Paul. Ils avaient échangé près de cinq cent messages sur le thème de leurs retrouvailles au bord de cette plage, leur plage. Ils en avaient parlé en long en large. Ils en avaient rêvé. Et maintenant Paul était là, et la magie de son amour aussi. Rien n'avait changé, ni le goût de ses baisers, ni la chaleur de son étreinte, ni le parfum de son corps. Fanny savourait tout cela comme un cadeau que le ciel lui faisait. Sous la paillotte, à l'abri des regards et même du soleil, qui se faisait moins brulant, plus tendre et plus doux pour eux, le temps suspendit son vol. Affamés l'un de l'autre, jamais rassasiés, chacun prenait ce que l'autre lui donnait avec gourmandise et sans pudeur. La brise de mer et l'air frais les chassèrent de leur cachette. Se tenant par la main, et leurs chaussures dans l'autre, ils se réfugièrent dans une chambre sans savoir qu'Ali, complice involontaire de leur histoire d'amour, leur avait attribué celle réservée aux jeunes mariés. Fanny ressentit une certaine appréhension quand Paul lui ôta ses vêtements. Elles avaient des fines vergetures sur les fesses et le ventre qui la complexaient un peu d'autant plus que Philippe, qui la voulait parfaite, lui offrait les produits les plus chers pour les faire disparaître. Ses seins faisaient également l'objet de ses attentions onéreuses. il la talonnait depuis un moment pour qu'elle se fasse mettre des implants. Ce qu'elle refusait
farouchement. Paul retint sa main quand elle tenta de d’éteindre la lumière. Tout ce qu'il voyait le ravissait. Face a son regard sincèrement admiratif et à sa douceur qu'elle n'avait jamais oublié, elle se laissa aller.
Sans crainte, Fanny accepta de sortir dîner dehors. Et pourtant, Philippe connaissait tellement de monde, qu'elle risquait d'en croiser certains. En prévision de son escapade, elle avait acheté des vêtements, des bikinis et de la lingerie fine durant ses pauses déjeuners. Elle avait mit tous ces effets vestimentaires ainsi qu'une trousse de toilette dans un élégant petit sac de voyage qu'elle avait dissimulé sous son bureau. L’odeur de la température douce donna l'envie à Paul de se rendre à pied au restaurant qui se situait à dix minutes de l'hôtel, mais Fanny l'en dissuada, évoquant la situation sécuritaire du pays. Aucun sujet sensible ne fut abordé durant le dîner. En parlant de tout et de rien, ils dégustèrent les succulentes côtelettes d'agneau accompagnés d'une salade composé pour elle, et de frites pour lui, le tout arrosé d'un "mouton cadet" que Fanny dilua de "Sprite",sous le regard moqueur et désapprobateur de son compagnon qui ne comprenait pas qu'elle commit un tel "crime de lèse majesté". Coquine, elle l'obligea à goûter son breuvage qu'il avala en faisant la grimace suscitant les rires de cette dernière. Ils parlèrent de leurs enfants et de leur boulot respectif: l'amour et la fierté du père transparaissait dans les propos de Paul pendant qu'il parlait de Stacy, sa fille. Seul bémol, il la trouvait trop jeune pour se marier. Cependant, il avait cédé parce qu'il appréciait son gendre. Par ailleurs, l'affection que ses parents lui temoignait contribua à apaiser ses craintes. Fanny évoqua à son tour, les liens forts et complices qui l’unissaient à Ange Philippe et Philippe-Emmanuel ses enfants, " ses bodyguards" comme elle les surnommait. En effet, ils avaient hérité tous les deux de la taille et de la carrure de leur père. Depuis le déclenchement de la crise post électorale, ses enfants vivaient à Londres. Grâce et à travers les réseaux sociaux, elle communiquait avec eux tous les jours. Emmanuel-Philippe son cadet, très protecteur, tenait à échanger avec elle dès son réveil. A dix sept ans, sa mère était tout son univers, contrairement à son frère aîné qui était plus attaché à son père. Fanny ne s'en formalisait pas outre mesure: dans sa famille, sa mère et sa sœur formait un duo face au reste de la fratrie que cette complicité ne dérangeait pas. Au dessert, Paul commanda une mousse au chocolat et ré é es mêmes gestes qu'il y'a vingt ans. "Éternel romantique, le chahuta-t-elle attendri ppar tsao ln côté chevaleresque, pendant qu'elle avalait docilement les bouchées qu'il lui présentait. "Avec toi, je ne changerai jamais", répondit-il en absorbant sa part de dessert qu'elle lui donnait à son tour. A la fin du repas, il commanda un cognac. Une fois le breuvage posé devant lui, il sortit un cigarillo, une boite plate et élégante d'allumettes extra longues et un fume cigare. il leva le doigt vers le serveur en lui montrant les trois objets posés devant lui. Celui -ci donna son accord par un hochement de tête. Fanny observa attentivement les gestes de son compagnon qui commenta les étapes de rituel propre aux connaisseurs: vicer le tube au bout du cigarillo, allumer son cigare, puis rejeter la fumée pour évacuer le goût un peu âpre de la première bouffée, aspirer à nouveau. Laisser la fumée envahir votre cavité buccale, sans inhaler. Retirer le cigare de sa bouche, savourer son arôme, puis expirer doucement. Puis il tendit l'objet à sa compagne qui, sans hésiter, aspira une longue bouffée. Comme une bonne élève, elle suivit ses indications mais elle la recracha aussitôt en toussant. Paul lui donna de légères tapes dans le dos jusqu'à ce que la fin de la crise. Obstinée, elle refit une deuxième qui s'avéra payante. L'arôme sucré de la bouffée chatouilla ses papilles, avec un arrière gout âcre qui n'était pas désagréable. Paul lui ôta le cigarillo des doigts et le posa sur un cendrier. Il lui raconta des anecdotes sur les premiers essais de quelques amis. La soirée se poursuivait paisiblement. Ils consommèrent leur digestif en prenant leur temps.
Très tôt, le lendemain matin, Paul enfila un short et un teeshirt blanc en essayant de faire le moins de bruit possible, mais ce fut peine perdue. -où vas tu, demanda-t-elle en sortant de sous les couvertures. -faire du jogging au bord de la plage -j'arrive, fit-elle en bondissant hors du lit. Dehors il faisait encore nuit. Fanny laissa Paul courir devant elle pendant qu'elle le suivait en trottinant derrière lui. Il la trouvait ravissante dans son jogging rouge. Il le lui dit en la surnommant au passage "le petit chaperon rouge". De temps en temps, il la rejoignait à reculons ; puis repartait en adoptant un rythme plus soutenu. Au bout de trente minutes, il revint vers elle . Main dans la main, ils marchèrent sur le bord de la plage dans un silence complice, insouciant et heureux. Le soleil se levait paresseusement, pas du tout pressé de réveiller les habitants de ce petit coin de paradis. A leur retour, Paul marqua un arrêt devant un babyfoot qui trônait au beau milieu du patio. Du regard, Fanny lui lança un défi, qu'il releva sans se faire prier. Ils échangèrent une poignée de main solennelle avant d’entamer un mini tournoi. Voulant jouer selon les règles de l'art, il fut battu à plate couture par sa partenaire qui se déchaîna sur les manettes, sautilla, les faisant tourner comme des manivettes. Ali spectateur invisible, ne put s'empêcher de rire en voyant la mine dépitée du perdant. -Après l'effort, place au réconfort et à la douceur dit Fanny en entraînant Paul vers une paillote ou ils dégustèrent un solide petit déjeuner.
Durant le reste de la journée et dans l'après midi, ils louèrent des vélos pour faire un peu de tourisme. Natif de la région, Paul fit découvrir à sa compagne l'autre versant de Bassam. Il n'avait pas non plus perdu son patois, puisqu'il demanda à plusieurs reprises son chemin dans sa langue maternelle.
********************************************************************* Dans la soirée, Ils retournèrent à l'hôtel où ils dînèrent tranquillement d'une soupe de fruits de mer et des fruits de saison. A peine, furent-ils couchés que Paul lui posa la question qui lui brûlait les lêvres depuis le début de leur retrouvailles: - Comment se fait-il que tu passes deux nuits hors de chez toi? -parce que j'en ai envie Paul, répondit-elle en lui donnant un baiser sur le bout du nez. -mais encore, insista-t-il. -je suis sensée être à Grejiberry, sur une île derrière Sassandra, aux funérailles du beau-père de Lydie ma sœur aînée. J'ai assisté à la levée de corps et à la messe de requiem ce matin en sa compagnie. Ensuite, en accord avec ma sœur, je suis restée à Abidjan pour être avec toi. -il t'a laissé partir comme ça, dit le jeune homme qui gardait encore en mémoire le souvenir d'un homme jaloux et possessif dont lui avait parlé Chantal son ex belle sœur. Trois jours loin de lui? Fanny émit un petit rire amusé obligé par loyauté de défendre son mari: -ce n'est pas ogre que je sache, et je ne suis pas séquestré, mon chéri. -si tu le dis, je veux bien te croire, fit Paul en prenant un air sceptique. Chantal qui était devenu entre temps son ex belle sœur, lui avait parlé en long et large de son rival. -arrêtes, rétorqua-t-elle en riant, avec l'âge, il est devenu moins possessif. Je voyage, je vais en mission, au village. Pour en revenir à son absence aux funérailles de mon beau, je dois t'avouer que ce n'est pas la grande entente entre Philippe et ma famille. Ils se voient à peine, en dehors des cérémonies durant lesquelles ils sont obligés de se rencontrer. L'attitude condescendante de feue sa mère y est pour beaucoup. Elle adoptait une attitude froide et hautaine qui horripilait mon père. Alors que pour ma mère, cette femme n'était rien moins qu'une pauvresse qui avait épousé un nom.
-bonjour l'ambiance, ironisa-t-il. Tu as nagé dans ses eaux troubles pendant tout ce temps? - oui, à condition qu'aucun mot déplacé ne sorte de sa bouche. Ce qu'elle s'est bien gardé  de faire jusqu'à sa mort. Je pouvais m'accommoder de ses haussements de sourcils et de ses mimiques ironiques. Cependant, le seul point positif que je lui reconnaissais, c'est l'adoration sans limite qu'elle vouait à ses petits enfants. Elle leur a d'ailleurs légué son immense fortune. Elle avait une façon très amusante de parler d'eux sans prononcer le nom de leur mère. A croire qu'ils avaient été conçus par le Saint Esprit. Paul éclata de rire à ces propos. -jusqu'à son décès, son chauffeur fit la navette entre sa maison et la mienne. Elle ne mit jamais les pieds chez moi, j'en fis de même pour elle. Paul me rend la pareille concernant mes parents. -as tu au moins su pourquoi elle te haïssait autant, s'enquit Paul que tout cela dépassait. Fanny fut sur le point de répondre "à cause de toi; de mon escapade avec toi; de mon amour toi, que seul une femme intuitive comme elle peut deviner, même si on s'applique à démontrer le contraire; à cause de cette passion qu'elle devinait sous mon air calme et posé". Elle se souvenait comme si c'était hier de l'ultime conversation qu'elle avait eu avec sa belle mère après son accouchement. Un matin, de très bonne heure, cette dernière s'était rendu chez sa belle fille Sur son insistance, leur domestique l'avait réveillé. La mère de Philippe semblait mal à l'aise dans le somptueux salon décoré par sa belle fille après avoir décliné son aide . Et elle s'arrangeait pour le faire savoir en ne posant que le bout de ses fesses dans le fauteuil en cuir marron, agrémenté d'un châle aux couleurs batik dans lequel elle trônait droit et raide comme la justice. -Vous n'aimez pas mon fils, attaqua-t-elle, les yeux étincelants de colère. Je vous observe, et je ne vois qu'une greluche qui s'applique à jouer un rôle de mère et d'épouse aimante. Vous aimez l'autre, le voyou avec lequel vous avez disparu durant ce fameux weekend. Avec vos airs de sainte nitouche, vous pouvez tromper tout le monde sauf moi. Mon fils n'est qu'un pis aller, et je mettrai ma main au feu que vous referez la même bêtise quand votre amant réapparaîtra. Regardez vous, on sent en vous une passion mal dissimulée sous vos grands airs. Mais qu'est ce que Philippe vous trouve? Quelconque, est le mot qui convient quand je pense à vous. Je vous aurais pardonné si vous étiez une infidèle notoire qui sautait sur tout ce qui porte un pantalon en ce bas monde. Oui, j'aurais compris et pardonné. Mais donnez votre cœur à un autre homme que mon fils, qui doit se contenter des restes de ce vaurien? ça jamais je nous le pardonnerais. Je tiens à vous le dire de vive voix. Fanny, se félicita d'avoir gardé son calme ce jour là. De surcroît, la joie de Philippe suscitée par la visite matinale de sa mère acheva de la convaincre du bien fondé de son attitude. Cependant, elle trouvait injuste de faire l'objet de cette attaque. En toute honnêteté, quand elle avait décidé de s'unir à son fils, elle avait banni Paul de son cœur. Un seul être vous manque et tout est dépeuplé. Peu importe qu'elle y fut arrivé ou non. Là n'était pas la question. Ce qu'il fallait retenir, c'était l'amour qu'elle pouvait donner à Philippe en pareille situation. Elle était au courant des manigances utilisé pr ce dernier pour la mettre enceinte. En effet, elle s'était rendu a la pharmacie pour signaler l'inactivité de sa pilule. La fragilité mental de celui-ci l'avait empêché de déclencher un scandale. En outre elle en comprenait les raisons sans les excuser. Le silence observé par Fanny gênait Paul. -Fanny, mon cœur, ne me caches rien. Je t'en pries, dis moi tout. Ne me caches plus rien. Racontes moi tout ce qui s'est passé après notre...séparation. Il buta ce mot. Nous ne devons plus rien nous cacher. Parle-moi. Nos échanges via facebook m'ont laissé sur ma faim alors que je t'ai raconté les vingt ans passés loin de toi à Boston. Je t'ai également parlé de ce que je comptais faire ici comme affaire. De mes revues, out, je t'ai tout dit de
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents