A la recherche d une pragmatique unifiée - article ; n°1 ; vol.32, pg 274-284
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Description

Communications - Année 1980 - Volume 32 - Numéro 1 - Pages 274-284
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 23
Langue Français

Extrait

Jef Verschueren
A la recherche d'une pragmatique unifiée
In: Communications, 32, 1980. pp. 274-284.
Citer ce document / Cite this document :
Verschueren Jef. A la recherche d'une pragmatique unifiée. In: Communications, 32, 1980. pp. 274-284.
doi : 10.3406/comm.1980.1489
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1980_num_32_1_1489Verschueren Jef
A la recherche
d'une pragmatique unifiée *
O. PRÉAMBULE d'un PRÉAMBULE.
La linguistique contemporaine ressemble à un petit bonhomme avec
une grosse bedaine. Ce ventre énorme, c'est la pragmatique. La pragma
tique a pris son départ dès que les linguistes se sont vus contraints de
reconnaître que toute linguistique ayant comme objet la langue en elle-
même et pour elle-même est privée d'entrailles. La langue est un phéno
mène essentiellement lié à la réalité sociale et à la cognition humaine et,
pour cette raison, l'étude de la langue sera réductionniste à moins qu'on
ne tienne compte de ces relations. Depuis une dizaine d'années, bien des
linguistes l'ont compris et se sont occupés de remplir la cavité splanchni-
que de notre petit bonhomme. Mais malheureusement, ils ont oublié
d'exercer en même temps ses muscles abdominaux. De là sa bedaine.
Sans doute la pragmatique est un des domaines les plus nuageux et confus
de la linguistique contemporaine. On dirait que c'est un domaine où on
peut construire des théories et mouler à volonté de nouveaux concepts
sans rendre compte et même sans prendre connaissance des théories et
des concepts qui ont été proposés par les autres linguistes. Je me propose
dans cette étude d'essayer d'unifier les théories de la présupposition, des
actes de langage et des implicatures conversationnelles. En d'autres mots,
je suis à la recherche d'une pragmatique linguistique qui soit à la fois
simple (c'est-à-dire qui élimine la confusion créée par la séparation habi
tuelle de trois phénomènes qui sont au fond comparables) et adéquate
(c'est-à-dire qui évite le réductionnisme résultant de l'étude d'un phéno
mène isolé ou de la tentative déplorable de décrire tout le domaine prag
matique dans des termes qui ne sont adéquats que pour la description
d'une fraction de ce domaine). Il va de soi que la présente étude n'est
qu'un préambule.
1. RELATIONS ENTRE LES NOTIONS DE BASE.
D'habitude, les études des présuppositions, des actes de langage et des
implicatures conversationnelles ont été conduites séparément, même
après que plusieurs chercheurs eurent attiré l'attention sur quelques rela-
* Je remercie Herman Parret et Anne-Marie Diller, qui ont réussi à camoufler mon
attentat à la langue française.
274 A la recherche d'une pragmatique unifiée
tions évidentes. Voici quelques exemples de relations dont la pertinence
saute aux yeux.
D'abord quelques relations entre les maximes conversationnelles x et
les règles proposées par Searle pour les actes de langage 2. La règle selon
laquelle une assertion que p ne devrait pas être prononcée à moins que le
locuteur n'ait quelque raison de croire à la vérité de p (ce qui est une des
conditions préparatoires de l'assertion) est manifestement une applica
tion spécifique de la maxime de qualité « Ne dites aucune chose qui ne soit
fondée ». En plus, les maximes de sont liées aux conditions de sin
cérité. Et la condition selon laquelle le locuteur doit croire que l'auditeur
est capable de faire ce qui lui est ordonné (ce qui est une condition prépa
ratoire de l'ordre) est une application spécifique de la maxime de perti
nence. Etc.
Ensuite, voici un exemple de la relation entre les implicatures conversat
ionnelles 3 et la force illocutionnaire 4. Considérez la notion d'un acte de
1. Les maximes conversationnelles proposées par H. P. Grice (1967 et 1975) sont
les suivantes. Il y a une maxime globale (A) et quatre maximes ou séries de maximes
subordonnées (de B à E) : A. Le principe de coopération : Faites en sorte que votre
contribution conversationnelle aille dans le sens de la conversation ; B. Maximes de
quantité : (i) Faites votre contribution suffisamment informative ; (ii) Ne faites pas votre trop informative ; C. Maximes de qualité : Essayez de dire la vérité ; (i)
Ne dites pas ce que vous ne croyez pas ; (ii) Ne dites rien qui ne soit fondé ; D. Maximes
de pertinence : Faites en sorte que votre contribution se rapporte au sujet de la conver
sation ; E. Maximes de manière : Soyez clair ; (i) Évitez l'obscurité d'expression ; (ii)
Évitez l'ambiguïté ; (iii) Soyez concis (évitez la prolixité redondante) ; (iv) Faites en
sorte que votre discours soit ordonné. Grice convient que toutes les maximes ne sont
pas d'une importance égale. Ainsi B(i) est sans doute plus importante que B (ii) .
2. Pour la description systématique des actes de langage, Searle (1969) propose
quatre types de règles ou de conditions : A. Les conditions propositionnelles spécifient
certaines restrictions par rapport à la référence et au prédicat. Par exemple, une condi
tion de l'acte de promesse est que le sujet parlant (L) parle d'une action future (F)
accomplie par lui-même. B. Les conditions préparatoires contiennent certaines impli
cations de l'acte ; l'acte manque de sens à moins qu'elles ne soient satisfaites. Pour
l'acte de promettre il faut que l'auditeur (A) préfère que L fasse F, et que L croie que
A préfère F ; en outre, il ne doit être évident ni pour L ni pour A que L ferait F indépe
ndamment de sa promesse C. Les conditions de sincérité décrivent l'état psychologique
exprimé dans l'acte. Ainsi une promesse exprime l'intention de L de faire F. D. Les
conditions essentielles présentent l'essence ou la valeur de l'acte. Par exemple, promettre
quelque chose a la valeur d'un engagement de faire F.
3. Les implicatures conversationnelles (H.P. Grice, 1967 et 1975) sont les sens impli
qués ou suggérés d'un énoncé qu'on peut calculer au moyen d'une série de maximes
conversationnelles. Voici quelques illustrations de la manière dont on peut calculer
des implicatures au moyen des maximes. Considérez la phrase « Je
n'ai plus d'essence » et la réponse « II y a un garage de l'autre côté de l'église ». La réponse
implique conversationnellement que le est ouvert et qu'on y a de l'essence à
vendre. Autrement, la maxime de pertinence serait violée. Parfois des maximes sont
clairement violées, mais on peut déduire tout de même des implicatures en supposant
que de toute manière le principe de coopération est observé par le locuteur. C'est en
termes pareils que Grice explique des phénomènes comme l'ironie, la métaphore, etc.
Son exemple de l'ironie est la phrase « Jean est un ami très cher », prononcée quand
les deux interlocuteurs savent que Jean, avec qui le locuteur a été très amical jusqu'à
maintenant, a révélé un secret du locuteur à un de ses rivaux. Puisque les deux inter-
275 Verschueren Jef
langage indirect. Une phrase comme « II fait froid ici » a la forme d'une
assertion, mais dans certaines circonstances elle peut véhiculer une
demande de fermer la porte. D'après Searle (1975) de pareils actes possè
dent une double force illocutionnaire : la force primaire (la demande dans
notre exemple) et la force secondaire par laquelle la force primaire est
obtenue indirectement. Une assertion comme « II fait froid ici » véhicule
une demande de fermer la porte seulement parce qu'autrement la maxime
de pertinence serait violée (dans certaines circonstances, il n'est pas vra
iment nécessaire de dire quelque chose que chacun peut sentir par lui-
même) : l'interprétation alternative est construite (au moyen d'une impli-
cature conversationnelle) pour restaurer la balance de coopération qui
a l'air d'être troublée. Ainsi l'implicature conversationnelle est le pro
cessus par lequel la force primaire de beaucoup d'actes de langage indirects
est obtenue.
Enfin, il y a des relations entre les actes de langage et la présupposition
qui sont mises au jour dans la littérature linguistique. Considérons la défi
nition suivante de la présupposition, proposée par C.J. Fillmore (1971 :
380) : les phrases d'une la

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