Au-delà des images inédites - article ; n°1 ; vol.68, pg 91-105
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Description

Communications - Année 1999 - Volume 68 - Numéro 1 - Pages 91-105
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 7
Langue Français

Extrait

Mr André Huet
Au-delà des images inédites
In: Communications, 68, 1999. pp. 91-105.
Citer ce document / Cite this document :
Huet André. Au-delà des images inédites. In: Communications, 68, 1999. pp. 91-105.
doi : 10.3406/comm.1999.2031
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1999_num_68_1_2031André Huet
Au-delà des images inédites
d'un INÉDIT écrivain : 1. adj. — Qui n.m. n'a Publier pas été édité des inédits. (texte). 2. La Qui correspondance n'est pas connu inédite —
nouveau, original, n.m. « ce que j'ai à vous révéler est absolument
inconnu. C'est de l'inédit » (Hugo) (Le Robert pour tous).
Onze ans séparent le choix d'« Inédits » comme titre d'une émission
télévisée destinée à révéler l'intérêt documentaire et patrimonial de films
réalisés par des non-professionnels [il s'agit d'une émission créée en 1979,
par André Huet, sur la première chaîne de la télévision belge RTBF dans
le cadre du Centre de production régional de Charleroi l] et une nouvelle
définition adoptée par les archivistes producteurs et chercheurs partici
pant au premier colloque européen consacré aux images de famille. Cette
dernière démarche répondait à la nécessité d'adopter un terme adéquat
pour désigner, en rapport avec nos pratiques et nos expériences, les images
qui motivaient notre rencontre :
Par « Inédits » nous entendons les images en mouvement évoquant tout
aspect de la vie de nos sociétés, hier et aujourd'hui, réalisées sur tous
les formats et supports et qui à l'origine n'étaient pas destinées à une
diffusion dans les circuits professionnels de l'audiovisuel (Association
européenne Inédits, Spa, Belgique, 1990).
Entre ces deux définitions, une prise de conscience et la naissance d'une
démarche revisitant un domaine cinématographique jusque-là marginal
isé sous l'appellation ambiguë de cinéma « amateur ».
La création officielle à Paris, en 1991 [au cœur d'un festival du film
amateur organisé par la Vidéothèque de Paris], de l'Association euro
péenne Inédits contribua à faire naître un courant d'intérêt pour ces
pellicules qui n'a cessé de grandir et de se diversifier depuis. Les archives
ont progressivement ouvert leurs portes aux films substandards, des pro-
91 André Huet
ductions utilisant ou révélant les archives familiales se sont multipliées
et, peu à peu, tous les domaines de la recherche ont été interpellés par
ces images.
Un peu comme les enfants qui s'extasient devant une malle aux trésors,
fascinés par l'importante quantité de ces « nouveaux documents », nous
nous sommes surtout préoccupés des images. Nous avons un peu négligé
d'interroger les gestes, le contexte familial et le discours personnel du
cinéaste qui nous révélait une autre réalité à travers la subjectivité de son
regard. Nous restions des « consommateurs » d'images, intéressés avant
tout par les anecdotes proposées par les films.
Si la démarche de quelques cinéastes a retenu notre attention, nous
nous sommes très peu interrogés jusqu'à présent sur l'utilisation des docu
ments au sein des familles, sur la manière dont les téléspectateurs rece
vaient, appréciaient ces images de particuliers, montées, sonorisées et
commentées par des professionnels de l'image. Pourtant, certaines réac
tions nous encouragent à prendre plus sérieusement en considération les
manifestations qui accompagnent l'exploitation de ces documents.
Nous témoignant sa reconnaissance pour avoir valorisé ses archives
familiales, un téléspectateur nous remercie de lui avoir ainsi permis de
rencontrer autant de personnes inconnues qui, au hasard de ses déplace
ments, lui ont témoigné un intérêt, voire de l'amitié, après la découverte
des films de son père. La lettre énumère les lieux et le nombre de ren
contres et se termine par ces mots : « Cette rediffusion m'a en tout cas
incité à reprendre quelques vieux films de mon père pour les retravailler
et les rendre présentables. »
Plus récemment, une série consacrée à des films tournés par des familles
belges ayant vécu en Chine, des années 30 à nos jours, a provoqué l'acti-
vation d'un véritable réseau de personnes qui ont, de près ou de loin,
participé à cette aventure. La plupart ne se connaissaient que de nom.
Réagissant aux témoignages diffusés, elles cherchent aujourd'hui à nouer
des contacts, à se rencontrer afin d'évoquer leurs expériences. Un premier
échange de correspondance a déjà abouti à l'organisation d'un repas
convivial au cours duquel des témoins de différentes générations ont
partagé des souvenirs et échangé des documents photographiques et des
films copiés sur VHS.
Tout se passe comme si la diffusion d'images familiales contribuait à
redonner une place dans la société à ces cinéastes et à ces acteurs du
quotidien trop longtemps relégués dans l'espace dévalorisé des « amat
eurs ».
Les premières années d'exploitation des inédits pourraient être appa
rentées aux pratiques Aw. found footage défini par Danièle Hibon comme
étant « l'élaboration d'un film par la récupération d'éléments déjà filmés
92 des images inédites Au-delà
et donnant naissance, par le montage, à une œuvre originale2 ». Le réa
lisateur-auteur professionnel prenait en charge la sélection et le montage
des images, le choix des commentaires et des personnes interviewées. Une
pratique caractérisée par la juxtaposition, la combinaison de fragments
hétéroclites qui s'inscrit dans cette autre pratique artistique et littéraire
du collage qui, de Francis Picabia à Marcel Duchamp en passant par
Tristan Tzara, Raoul Hausmann ou Max Ernst, sans oublier Dziga Vertov
et Henri Storck, s'est développée dès la Première Guerre mondiale.
En jetant un regard rétrospectif sur les différentes productions, pouvons-
nous pour autant affirmer avec Danièle Hibbn qu'« après le montage
photographique, le montage filmique favorise le détournement [...], désa
morce la morale dominante ou la propagande et fait apparaître un sens
caché, critique, politique, social ou psychanalytique3 » ? Sans adopter
prématurément cette opinion, ne négligeons pas l'hypothèse qui mériterait
d'être étudiée.
La multiplication des questionnements nous introduit peu à peu dans
une nouvelle époque, caractérisée à la fois par une prise en considération
du sens de ces pratiques et par l'engouement manifesté par les médias
contemporains pour ce type d'images. Sans négliger la recherche de nou
veaux documents ni le soin apporté à leur sauvegarde et à leur exploita
tion, le moment est peut-être venu de consacrer une place plus importante
à l'écoute des auteurs eux-mêmes et à une recherche appliquée au sens
de notre action et aux utilisations des inédits dans d'autres domaines que
ceux des médias.
Un film parmi d'autres.
Il y a peu, réagissant à plusieurs faits divers exceptionnels impliquant
le décès de plusieurs patients, le secrétaire d'État français à la Santé,
Bernard Kouchner, disait : « Je voudrais que s'invente dans notre pays un
environnement particulier du passage vers la mort, un nouveau rituel de
la fin de vie4. » Echappant aux modes, les inédits ont pratiquement
abordé tous les sujets, notamment le décès d'un être cher. Les citoyens
n'ont pas attendu que le sujet prenne place dans l'actualité du jour pour
comprendre la nécessité de socialiser la mort et le droit pour chacun de
bien vivre sa mort.
Témoin, ce document découvert en 1987 parmi d'autres films familiaux
dans une boîte de pellicules portant une inscription manuscrite : Maman.
Intrigués par le titre, nous avons visionné le film 16 mm muet à la
table. Des scènes truculentes alternaient avec des évocations plus tristes,

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