Bali et l islam : 2. Coexistence et perspectives contemporaines - article ; n°4 ; vol.60, pg 45-64
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Bali et l'islam : 2. Coexistence et perspectives contemporaines - article ; n°4 ; vol.60, pg 45-64

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Description

Archipel - Année 2000 - Volume 60 - Numéro 4 - Pages 45-64
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Couteau
Bali et l'islam : 2. Coexistence et perspectives contemporaines
In: Archipel. Volume 60, 2000. pp. 45-64.
Citer ce document / Cite this document :
Couteau Jean. Bali et l'islam : 2. Coexistence et perspectives contemporaines. In: Archipel. Volume 60, 2000. pp. 45-64.
doi : 10.3406/arch.2000.3580
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_2000_num_60_4_3580BALI
Jean COUTEAU
Bali et l'islam :
2. Coexistence et perspectives contemporaines
Comme nous l'avons vu dans la 1ère partie de cette étude {Archipel 58),
Bali pensait l'islam, selon les termes cosmologiques du royaume concent
rique (i). Comment l'islam, javanais et non-javanais, se représentait-il en
retour Bali? Bali, de toute évidence, n'occupait pas autrefois l'imaginaire de
Java - tant Pesisir que Mataram - de la même manière qu'il le fait
aujourd'hui. Les chroniques javanaises qui traitent des contacts avec Bali ne
parlent jamais des Balinais en des termes de différence : on traite les
Hollandais de «kafir» (infidèles) mais pas les Balinais, qui sont visiblement
eux aussi pensés comme à l'intérieur du système concentrique javanais, fût-il
édulcoré(2). Un visiteur de la fin du XIXe siècle, venu pourtant à Bali pour
apprendre à devenir un meilleur musulman (nyantri), assiste sans broncher à
des cérémonies balinaises(3). Par ailleurs les rois et princes locaux n'ont pas
hésité à employer des troupes balinaises. Surapati mentionné plus haut, mais
aussi Trunajaya dans sa révolte contre Mataram à la fin du XVIIe siècle, et
1. Vickers (1987 : 34-37) étudie à travers le texte balinais du Malat, la représentation balinaise
des royaumes extérieurs.
2. Voir à ce sujet les Babad Sembar, Tawang Alun, Mas Sepuh, Bayu, et Notodiningratan in
Arifïn, 1995 (1) ; voir aussi Arifin, 1980 et Kumar, 1976.
3. Raden Sastrawijaya, in Vickers, 1994 : 9-12. Dans une note, Vickers (1987 : 52, note 92),
se référant à Tjiptoatmodjo, rapporte que le fameux écrivain javanais du XIXe siècle
Ronggowarsito étudia lui aussi l'islam à Bali (Tabanan). Sur Diponegoro, voir Carey, 1981 :
250, note 58.
Archipel 60, Paris, 2000, pp. 45-64 Jean Couteau 46
Diponegoro qui prit les armes contre les Hollandais entre 1825 et 1830, firent
appel à des auxiliaires balinais (4). Le roi de Sumenep, et d'autres princes
Madourais, avaient également des alliances militaires avec les Balinais(5).
Les informations sont beaucoup plus rares encore en ce qui concerne les
réseaux musulmans non-javanais, donc a priori plus «orthodoxes», qui se
sont considérablement élargis depuis 150 ans. Certaines communautés pos
sèdent des textes malais en écriture arabe pegon ou jawi, mais à notre
connaissance, aucune étude de contenu n'en a jamais été faite.
Les informations que nous avons sur les mosquées sont assez minces.
Dans une courte note sur la mosquée al Huda de Gelgel, Ambary(6) note,
outre la date de restauration du bâtiment (1863), que son architecture est
similaire à celle des mosquées anciennes de Java. Plus conséquente est l'étu
de récente sur les mimbar (chaires) réalisée par FadillahC7) dans sept mos
quées balinaises. On en déduit d'abord que les mimbar, bien que qualifiés
d'anciens, datent tous de la période charnière de la fin du XIXe-début XXe
siècle ; juste au moment donc où la colonisation multipliait les canaux de
communication avec le monde musulman nousantarien et international :
l'arrivée des kiyai en grand nombre se traduisait par un mouvement de res
tauration des édifices religieux. Ensuite, il apparaît que les apports syncré-
tiques les plus généraux sont aussi les plus voilés. Ainsi le mimbar est-il
construit comme un padmasana (siège du lotus : autel de Suryâditya).
L'auteur voit également une adaptation du motif kala makara dans les por
tiques (g). Enfin une différence importante apparaît selon les origines : les
mimbar bugis, sauf à Kepaon, font peu appel à des éléments décoratifs bali-
nais, et lorsque c'est le cas, ceux-ci sont des motifs sans valeur symbolique
réelle, alors qu'à Gelgel et Kecicang (Karangasem) où les influences java
naises et sasak sont plus importantes, les motifs balinais sont au contraire
très nombreux. Faut-il y voir une opposition entre les gens de la côte, plus
nousantariens et orthodoxes, et les gens de l'intérieur, plus au contact de la
culture agraire balinaise et de tradition plus syncretiste ? Probablement, bien
que dans le deuxième cas l'adaptation à la culture locale ne permette pas de
conclure à une déviation significative par rapport à l'islam.
4. Sur Diponegoro, voir Carey, 1981 : 250, note 58.
5. Vickers, 1987 : 42; cf. Sutjipto Tjiptoatmodjo, 1983 : 198-210, 403. Selon nos informat
ions, il y aurait à Sumenep un kampung constitué de descendants de Balinais.
6. Ambary, 1985 : 39-41.
7. Fadillah, 1992:93-114.
8.1992 : 110.
Archipel 60, Paris, 2000 Bali et l'islam : 2. Coexistence et perspectives contemporaines Al
Les tombes musulmanes sont plus révélatrices, bien qu'elles ne soient pas
très anciennes pour la plupart. Certaines n'ont aucune marque, et faute de
fouilles, ne sont pas identifiables. La plupart semblent dater du XIXe siècle,
telles les tombes de Serangan, dont la structure rappelle celle des mausolées
Bugis de Goa et Tallo (Makassar) (9>. La tombe la plus fameuse est celle que
l'on trouve dans le village de Satra, à un kilomètre à l'ouest de Gelgel. Dans
le kramat (tombe sacrée) du village reposeraient les restes de l'envoyé de la
Mecque, celui dont nous avons vu qu'il viendrait de Jaratan à Java-Est, et non
pas du Gujerat. Une autre tombe intéressante pour notre objet se trouve à côté
de la mosquée de Loloan : sans nom ni date, cette tombe, photographiée par
Abu BakarU°), avait la particularité d'être ornée d'un Bedawang Nala, la tor
tue cosmique de la mythologie balinaise. Lors d'une visite récente, le
Badawang Nala avait disparu - comme d'ailleurs toute trace de culte. La spé
culation sur l'origine des tombes peut être instructive. On a ainsi trouvé il y a
une trentaine d'année une tombe «ancienne» sur une des collines au-dessus
du village musulman - en majorité sasak - de Pancasari à Bedugul. On en a
décelé l'origine en faisant appel aux services d'un dukun médium, selon une
pratique bien connue des Balinais à la recherche de leurs ancêtres. En dépit de
la dakwah musulmane, la vieille mentalité a la vie dure !
Encore différent est le cas du Pura Kramat (temple/tombe) de Mas
Sepuh, c'est-à-dire Pangeran Danuningrat, roi de Blambangan à la fin du
XVIIIe siècle, que l'on trouve dans le village de Seseh, à une quinzaine de
kilomètres à l'ouest de Kuta. Ce prince, soupçonné d'avoir voulu se révolter
contre son suzerain, le roi de Mengwi, avait été convoqué en audience par ce
dernier (H). Une fois débarqué, l'audience lui fut refusée et il fut tenu à
l'écart des populations, puis tué à Seseh sur ordre du roi. Tourmenté par le
remords, ou plus vraisemblablement désireux d'échapper à la malédiction du
défunt, le roi de Mengwi lui fit construire un petit mausolée, non loin de la
plage de Seseh. Celui-ci est géré comme un temple par la famille royale de
Mengwi, qui en est le propriétaire : il a ses rizières pour son entretien, son
jour de festival (Pagerwesï), son prêtre de temple (pemangku), et l'essentiel
de son rite est balinais. Ce qui le distingue est le fait qu'à la place d'un
temple, il y a une tombe. Cependant au lieu d'être porteuse d'impureté
(sebel), comme une tombe ordinaire, celle-ci est considérée comme
9. Wirawan, 1979-1980 : 8-9.
10. On peut encore voir la photo dans Brandan, 1995 : 19.
11. D'après la Babad Mas Sepuh, le roi de Mengwi serait Gusti Nglurah Agung Sakti, le
gendre de Panji Sakti de Buleleng ; cf. Arifin, 1995 : 1 19-129.
Archipel 60, Paris, 2000 48 Jean Couteau
magique. Avant chaque cérémonie importante, la maison de Mengwi
dépêche une délégation au pura kramat pour en faire notification officielle
(mepejatï) à Mas Sepuh. En dehors du festival, les Balinais y viennent aussi
demander faveur ou guérison et présentent à cet effet une offrande daksina et
une petite donation. D'après le pemangku, de nombreux «saints hommes»
(kiyai) viennent aussi de J

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