Bonaparte, l Orient et la «Grande Nation». - article ; n°1 ; vol.273, pg 289-301
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Description

Annales historiques de la Révolution française - Année 1988 - Volume 273 - Numéro 1 - Pages 289-301
C'est à Bonaparte qu'on est redevable du concept et de l'expression même de « Grande Nation », c'est lui du moins qui la transmet au Directoire en juillet 1797, comme écho d'une formule employée par une deputation du peuple mainotte (peuple de la Grèce péninsulaire). A mi-chemin de la vérité et de la légende, l'auteur suit le cheminement de l'idée, qu'il replace dans le contexte de la politique ottomane de Bonaparte, de sa vision du renouveau national grec et plus longuement des idées dont il est redevable à Volney, qui a lancé le thème dans « Les Ruines ». Sa réflexion sur l'Orient, et ses contacts avec le monde ottoman lui permettent de définir à partir du concept de Grande Nation l'expression symbolique d'un renouveau républicain, issu en partie de ses victoires, mais qui dans sa réalité profonde annonce déjà l'Empire. L'expression en tout cas est reçue et connaît un succès immédiat dans le contexte de la guerre de propagande du Directoire.
We have Bonaparte to thank for the notion and even the expression « la grande nation », in any case it was the who transmitted it to the Directoire in July 1797, like an echo of an expression used by a delegation of the people from peninsular Greece. The author follows the path of the idea — half-way between truth and myth— and sets it back into the context of Bonaparte's Ottoman policy; the author studies the latter's vision of a Greek national revival and on a wider scale the ideas he took from Volney who launched the theme in his Ruins. Bonaparte's thinking on the near East and his contacts with the Ottoman world allow him to define, through the Grande Nation concept, a symbolic expression of a republican revival, partly the fruit of his victories but which, in its deepest reality, already announces the Empire. In any case, the expression taken up and has great and immediate success in the context of the Directoire's propaganda war.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 32
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Henry Laurens
Bonaparte, l'Orient et la «Grande Nation».
In: Annales historiques de la Révolution française. N°273, 1988. pp. 289-301.
Citer ce document / Cite this document :
Laurens Henry. Bonaparte, l'Orient et la «Grande Nation». In: Annales historiques de la Révolution française. N°273, 1988. pp.
289-301.
doi : 10.3406/ahrf.1988.1215
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1988_num_273_1_1215Résumé
C'est à Bonaparte qu'on est redevable du concept et de l'expression même de « Grande Nation », c'est
lui du moins qui la transmet au Directoire en juillet 1797, comme écho d'une formule employée par une
deputation du peuple mainotte (peuple de la Grèce péninsulaire). A mi-chemin de la vérité et de la
légende, l'auteur suit le cheminement de l'idée, qu'il replace dans le contexte de la politique ottomane
de Bonaparte, de sa vision du renouveau national grec et plus longuement des idées dont il est
redevable à Volney, qui a lancé le thème dans « Les Ruines ». Sa réflexion sur l'Orient, et ses contacts
avec le monde ottoman lui permettent de définir à partir du concept de Grande Nation l'expression
symbolique d'un renouveau républicain, issu en partie de ses victoires, mais qui dans sa réalité
profonde annonce déjà l'Empire. L'expression en tout cas est reçue et connaît un succès immédiat dans
le contexte de la guerre de propagande du Directoire.
Abstract
We have Bonaparte to thank for the notion and even the expression « la grande nation », in any case it
was the who transmitted it to the Directoire in July 1797, like an echo of an expression used by a
delegation of the people from peninsular Greece. The author follows the path of the idea — half-way
between truth and myth— and sets it back into the context of Bonaparte's Ottoman policy; the author
studies the latter's vision of a Greek national revival and on a wider scale the ideas he took from Volney
who launched the theme in his Ruins. Bonaparte's thinking on the near East and his contacts with the
Ottoman world allow him to define, through the Grande Nation concept, a symbolic expression of a
republican revival, partly the fruit of his victories but which, in its deepest reality, already announces the
Empire. In any case, the expression taken up and has great and immediate success in the context of
the Directoire's propaganda war.L'ORIENT ET LA GRANDE NATION BONAPARTE,
Albert Mathiez, en 1929, signalait dans les Annales Historiques de
la Révolution française (1) un intéressant passage des Mémoires de
Barthélémy :
« Bonaparte écrivit au Directoire qu'un des chefs du peuple
maniotte, qui s'était rendu à Corfou avec quelques députés pour faire
acte de la soumission à la nation française, l'avait appelée la Grande
Nation. C'est là l'origine de cette qualification, qui fut accueillie avec
enthousiasme par le Directoire et qui a été si souvent répétée depuis
et d'une manière si ridicule. La Reveillère pleura de joie, courant dans
la salle, se frottant les mains en criant : « La Grande Nation ! Que c'est
joli ! Quelle belle idée 1 » (2)
On peut supposer que Mathiez avait l'intention de traiter cette
question dans son étude sur le Directoire, mais sa mort rendit le tra
vail inachevé.
Le contexte du passage de Barthélémy permet de dater la lettre
des mois précédant le 18 fructidor. La Correspondance de Napoléon
permet de préciser : il s'agit de la dernière semaine de juillet 1797.
Deux lettres au Directoire peuvent correspondre. La première est de
Milan, le 10 thermidor an V (28 juillet 1797) :
« Nos troupes sont arrivées à Corfou et y ont été reçues avec le
plus grand plaisir. L'on se souvient encore en Albanie et en Grèce de
Sparte et d'Athènes. J'ai déjà quelque correspondance avec les princi
paux chefs du pays, et la Grèce pourrait peut-être renaître de ses
cendres » (3).
Dans cette lettre, Bonaparte mentionne la présence de Desaix
venu voir l'armée d'Italie.
(1) P. 290.
(2) Mémoires de Barthélémy, Paris, 1914, p. 223.
(3) Correspondance de Napoléon 1", T. III, p. 269. 290 HENRY LAURENS
La seconde est toujours de Milan, le 14 thermidor an V (1er août
1797). Bonaparte donne plus de détails sur l'arrivée des Français à
Corfou et ajoute :
« Les îles de Zante, Céphalonie, Sainte-Maure ont le même désir
et expriment le même vœu, les mêmes sentiments pour la liberté ; l'ar
bre de la liberté est dans tous les villages ; des municipalités gouver
nent toutes les communes, et ces peuples espèrent qu'avec la protec
tion de la grande nation, ils recouvreront les sciences, les arts et le
commerce qu'ils avaient perdus sous la tyrannie des oligarques.
( — ) Le chef des Mainottes, peuple vrai descendant des Spartiates
et qui occupe la péninsule où est situé le cap Matapan, m'a envoyé un
des principaux du pays pour me marquer le désir qu'il aurait de voir
dans son port quelques vaisseaux français et d'être utile en quelque
chose au grand peuple. Je lui ai répondu la lettre dont vous trouverez
ci-joint la copie » (4).
La lettre au chef des Mainottes est du 12 thermidor an V (30 juillet
1797). Elle commence de la façon suivante :
« Le consul de la République française à Trieste m'a instruit de
l'attention qu'avait eue Votre Seigneurie de m'envoyer une deputation
pour me faire connaître le désir qu'elle avait de voir dans son port des
bâtiments français de l'armée d'Italie.
Les Français estiment le petit, mais brave peuple maniote, qui,
seul de l'ancienne Grèce, a su conserver sa liberté.
( — ) Je prie Votre Seigneurie d'accueillir agréablement les por
teurs de la présente, qui ont le plus grand désir de voir de plus près
les dignes descendants de Sparte, auxquels il n'a manqué, pour être
aussi renommés que leurs ancêtres, que de se trouver sur un plus
vaste théâtre » (5).
En fait, Barthélémy a commis une double confusion : l'expression
utilisée par les Mainottes a été traduite par « grand peuple » et ces der
niers ne se sont pas rendus à Corfou. On le sait, le fils du bey du Magne
a bien cherché à rejoindre Bonaparte, mais celui-ci se trouvait en
Styrie lors du mouvement conduisant à l'armistice de Leoben. Il laissa
la lettre au consul de France à Trieste qui la fit passer à Bonaparte
quand celui-ci revint à Milan (6).
L'expression « la grande nation » apparaît pourtant dans la deu
xième lettre au Directoire. Il faut donc chercher une autre origine. Le
(4) Ibid., p. 285.
(5)p. 282.
(6) Rodocanachi, Bonaparte et les Iles ioniennes, Paris, 1899, pp. 68-69. L'ORIENT ET LA GRANDE NATION 291 BONAPARTE,
journal de voyage de Desaix comporte une série de notes rapides sur
une conversation avec Bonaparte juste dans la période qui nous inté
resse :
« Idées sur l'Egypte, sur ses ressources. Projet sur elle, dévelop
pement. Paix avec l'Autriche et l'Angleterre, départ de Venise de
10 000 hommes et 8 000 Polonais pour l'Egypte; s'en emparer, avant
ages, détails. Avec 5 divisions, 200 canons. Assemblage de tous les
moyens, des hommes bien instruits. Voyages, Savary, Volney etc. Comm
unication avec les Pachas grecs, imprimerie grecque à Ancône, lettres
des Mainottes ou descendant de Spartiate, peuple libre, indépendant,
offrant 4 000 hommes ; lettre du pacha de Scutari.
Pacha de Bosnie qui appelle le général l'homme fort de la grande
nation. Les Albanais, surtout extrêmement favorisés, bien traités, ont
offert 6 000 hommes au général s'il en a besoin. Les Bosniaques lui ont de se réunir à lui pour marcher contre les Autrichiens ; il y a
des correspondances, des agents; il y caresse leurs principes, leurs
manières d'être ; il en est extrêmement aimé.
Le général a une grande et habile politique : c'est de donner à
tous ces gens-là une idée de la nation française. Il a reçu ordre
du Directoire de la répandre dans toute l'Afrique, la Grèce, par des
imprimeries, des proclamations. Il gagne les cœurs de toutes ces
nations ; il leur rappelle leur ancienne gloire, leur ancien nom ; il les
instruit des choses étonnantes et prodigieuses qu'ont faites les Fronç
as. Aussi tous sont-ils surpris de savoir ce qu'ils apprennent ; ils sont
très

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