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Informations
Publié par | DIALOGUES_D-HISTOIRE_ANCIENNE |
Publié le | 01 janvier 2006 |
Nombre de lectures | 46 |
Langue | Français |
Extrait
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DISCOURS ET DÉBATS POLITIQUES DANS
1LE ROMAN GREC ANTIQUE
2Cécile BOST-POUDERON
RÉSUMÉ
Le propos de cette contribution est de montrer comment le politiko"
logo" (une expression qui, à l’époque impériale, recouvre aussi bien
l’éloquence délibérative que l’éloquence judiciaire) est mis à contribution dans
les romans d’amour grecs antiques, et ce que l’importance prise par ce type de
discours dans ces œuvres peut révéler comme système de valeurs. Loin de n’être
qu’un simple jeu littéraire, le recours au politiko" logo" pourrait manifester
l’attachement de ces « romanciers » et de leur public à un idéal politique qu’ils
ne voulaient pas voir disparaître : celui de la cité grecque classique.
ABSTRACT
The subject of this contribution is to demonstrate how the politiko ~
logo~ (an expression which in the imperial period referred to deliberative
oratory as well as judicial oratory) is used in ancient Greek love romances, and
what the importance of this type of speech in these works reveals as a system of
values. Far from being just a simple literary game, the recourse to politiko~
logo~ could demonstrate the attachment of these “romance writers” and their
public to a political ideal which they did not want to see disappear: the classical
Greek city.
1. Entendons dans le « roman d’amour » grec antique (erwtiko" logo") qui est aussi « roman
historique », c’est-à-dire : Chairéas et Callirhoé de Chariton, Les aventures de Leucippé et
Clitophon d’Achille Tatius, Daphnis et Chloé de Longus, Les Éthiopiques d’Héliodore et, dans une
moindre mesure, les Éphésiaques de Xénophon d’Éphèse. Sauf indication contraire, nous
empruntons le texte et la traduction (éventuellement modifiée par nos soins) des éditions des Belles
Lettres, Collection des Universités de France, Paris.
2. Université de Tours.
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328 C. BOST-POUDERON
INTRODUCTION
Le point de départ de cette étude sera le constat d’une absence : l’absence,
dans les romans grecs anciens, de débats politiques au sens où nous l’entendons
aujourd’hui, ou tels qu’on en trouve, par exemple, dans une œuvre voisine, par son
genre et par son époque, comme la Vie d’Apollonios de Tyane de Philostrate
– entendons des débats sur la chose politique, sur la politeia proprement dite. Il
est, sur ce point, tout à fait remarquable que les mots mêmes de politeia,
monarcia, dhmokratia n’apparaissent nulle part dans le texte des romans de
Chariton, d’Achille Tatius, de Longus ou d’Héliodore.
Or, cette absence, ou quasi-absence, de véritables débats politiques va de pair,
dans ces mêmes romans, avec la présence insistante, bien que parfois purement
formelle, de toutes sortes de discours politiques.
Il nous a donc semblé bon, après avoir relevé l’absence ou plus exactement la
pauvreté du débat politique dans ces textes, de mesurer, en contrepoint, toute
l’ampleur qu’y prend le discours politique, pour voir quel rôle lui est assigné dans
l’écriture romanesque et finalement déterminer de quelle idéologie il est porteur.
ABSENCE (OU RARETÉ) DE DÉBATS POLITIQUES
DANS LE ROMAN GREC
3Revenons tout d’abord à la Vie d’Apollionos de Tyane .
Aux chapitres 27-41 du livre V, Philostrate rapporte la rencontre d’Apollonios
4et de Vespasien à Alexandrie, un épisode (au départ sans doute historique ) dans
lequel apparaissent les figures de Dion de Pruse et du philosophe stoïcien Euphratès
et au cœur duquel un débat politique divise les quatre hommes.
Dans leur condamnation unanime de l’exercice tyrannique du pouvoir, chacun
des trois interlocuteurs de Vespasien exprime une préférence particulière. Celle du
philosophe Euphratès va au régime démocratique qu’il conseille à Vespasien
d’instaurer :
ÔRwmaioi" to dhmokrateisqai pollou axion kai polla twn ontwn autoi"
ep e keinh" th" politeia" ekthqh: paue monarcian, peri h" toiauta
eirhka" kai didou ÔRwmaioi" men to tou dhmou krato", sautw de to
eleuqeria" autou" arxai.
3. Vie d’Apollonios de Tyane, LCL, 1960 ; trad. franç. de P. Grimal, Romans grecs et latins, Paris,
1958.
4. Sur fiction et historicité dans La vie d’Apollonios de Tyane, voir G. Grosso, « La Vita d’Apollonios
di Tiana comme fonte storica », ACME, 1954 ; E. L. Bowie, « Apollonios of Tyana : Tradition and
Reality », ANRW II. 16. 2 (1978) ; G. Anderson, Philostratus, Londres, 1986.
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DISCOURS ET DÉBATS POLITIQUES DANS LE ROMAN GREC ANTIQUE 329
« Les Romains ont grande estime pour la démocratie et une grande partie de leur
empire a été conquise sous ce régime : mets fin à la monarchie, dont tu as parlé
en termes si vifs, et donne aux Romains le gouvernement du peuple et à toi la
gloire d’inaugurer pour eux le début de la liberté » (V, 33).
L’opinion de Dion est mitigée. Le rhéteur se déclare en effet partisan de la
démocratie, tout en tenant ce régime pour inférieur à l’aristocratie, mais préférable
aux tyrannies et aux oligarchies :
dhmokratian de aspazomai men - kai gar ei th" aristokratia" httwn hde h
politeia, alla turannidwn te kai oligarciwn airetwtera toi" swfrosi -
dedia de mh ceirohqei" hdh ÔRwmaiou" autai ai turannide" pepoihkuiai
calephn ergaswntai thn metabolhn kai mh dunwntai mhte eleuqeriazein
mhte pro" dhmokratian anablepein, wsper oi ek skotou" e" aqroon fw"
bleyante". […] Didou ÔRwmaioi" airesin th" autwn politeia", kan men
airwntai dhmokratian, xugcwrei: touti gar soi pollwn men turannidwn
meizon […] ei de monarcian prosdecointo, tini loipon allæ h soi
yhfisasqai thn archn panta" …
« Je suis partisan de la démocratie, cela est vrai – car même si ce régime est
inférieur à l’aristocratie, les sages n’en doivent pas moins le préférer aux
tyrannies et aux oligarchies –, mais je crains que ces mêmes tyrannies, parce
qu’elles ont avili les Romains, ne rendent le changement difficile et qu’ils ne
puissent ni se comporter en hommes libres ni regarder en face la démocratie,
comme des gens qui, sortant des ténèbres, se trouvent soudain en pleine lumière.
[…] Laisse aux Romains le choix de leur gouvernement. S’ils choisissent la
démocratie, accorde-la leur : cela serait pour toi plus beau que plusieurs
tyrannies […] Mais s’ils préfèrent la monarchie, à qui peuvent-ils donner le
pouvoir sinon à toi ? » (V, 34).
Apollonios arbitre leur différend en ces termes :
« Je crois que vous faites fausse route en essayant de mettre fin à une
monarchie alors que, en pratique, la décision est d’ores et déjà acquise, et que vous
vous complaisez à des bavardages d’adolescents et oiseux en la circonstance. […]
Pour moi, je ne me préoccupe guère de politique, car je vis sous le gouvernement
des dieux, mais je n’aime pas voir le troupeau des humains périr par manque d’un
berger juste et p