Égypte pharaonique : le Roi-frontière - article ; n°1 ; vol.21, pg 9-15
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Description

Travaux de la Maison de l'Orient - Année 1993 - Volume 21 - Numéro 1 - Pages 9-15
7 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 54
Langue Français

Extrait

Jean-Claude Goyon
Égypte pharaonique : le Roi-frontière
In: La Frontière. Séminaire de recherche sous la direction d'Yves Roman. Lyon : Maison de l'Orient et de la
Méditerranée Jean Pouilloux, 1993. pp. 9-15. (Travaux de la Maison de l'Orient)
Citer ce document / Cite this document :
Goyon Jean-Claude. Égypte pharaonique : le Roi-frontière. In: La Frontière. Séminaire de recherche sous la direction d'Yves
Roman. Lyon : Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, 1993. pp. 9-15. (Travaux de la Maison de l'Orient)
http://www.persee.fr/web/ouvrages/home/prescript/article/mom_0766-0510_1993_sem_21_1_1803EGYPTE PHARAONIQUE : LE ROI FRONTIÈRE
Jean-Claude GOYON
Le pharaon gardien de l'intégrité du territoire
Une fonction, peu ou mal dégagée, relative à la fonction monarchique dans l'Egypte antique, liée au
maintien de Maât !, est la responsabilité du souverain face à l'intégrité du territoire national, qui
s'applique également à la notion de frontière.
La « terre » au sens large du terme est, pour l'Égyptien ancien, un don du divin, confié au
continuateur terrestre du modèle de l'établissement de l'ordre aux origines des temps : l'Horus-Roi.
Compte tenu du dualisme géographique de l'Egypte du sud au nord 2, le principe monarchique, unificateur
par nature 3, porte en lui-même, la définition des limites du « pays » d'Egypte selon l'axe du fleuve. Aux
plus hautes époques, les deux frontières originelles, car géographiques, du territoire sont automatiquement
fixées en deux points :
au sud, à la barrière granitique de la cataracte d'Assouan,
au nord, à la côte et à la mer qui marque la fin du Delta. Historiquement, ces limites obligées
seront repoussées pour Yempire, mais demeureront immuables pour la conception à l'échelon national de
ce qui est To-Mery, la Vallée, de la Nubie à la Méditerranée.
Toujours selon cette vision étroite de la configuration géographique du territoire, le profil
caractéristique de l'axe transverse du pays, de part et d'autre du fleuve, enserrant la plaine de Haute et
Moyenne Egypte entre les bords élevés des plateaux désertiques de l'est et de l'ouest, donne les bornes
théoriques latérales du champ d'influence royal. Ceci n'exclut nullement le contact vers les terrains
accessibles, au-delà des franges atteintes par les plus hautes eaux de la crue, ni, non plus, la pénétration
des déserts. Mais l'Égyptien, même lorsqu'il aura reconnu et occupé le littoral de la Mer Rouge à l'est, ou
la chaîne des oasis (Kharga, Dakhla, Farafra, Dungul) à l'ouest, n'intégrera pas réellement ces secteurs à sa
définition de Kernet, l'Egypte.
C'est pourquoi, le vocabulaire national parlera de divisions administratives internes (les nomes)
comme ayant leur point initial au sud, à Assouan : la « tête » (tp) du pays, et leur donnera un terme à la
mer, au nord, le « terme » (phw) de la terre 4. Quant aux « côtés », on les dénommera « les Deux
1. Principe dogmatique incarné de l'équilibre universel, de l'harmonie des actes humains avec la loi divine s' appliquant au
religieux comme au moral et au politique ; en dernier lieu, J. Assmann, Maât, l'Egypte pharaonique et l'idée de justice
sociale, Paris, Julliard, 1989.
2. Cf. J. Ph. Lauer, « Sur le dualisme de la monarchie égyptienne et son expression architecturale », BIFAO 55 (1955),
160 et notes ; J. C. Goyon, « Nombre et univers », La Magia in Egitto, Milan, 1987, 57, n. 4.
3. Sur le sema-taouy, union du « double pays » et la fonction royale, H. Goedicke, Mélanges G. Mokhtar I, Le Caire,
1985, 307-324.
4. G. Posener, « L'Orientation... », NAWG 1965/2, 70-71.
La Frontière
TMO 21, Lyon, 1993 1 0 J.-C. GOYON
Rives » (iäb.wy, duel) ou les « Deux Falaises » (Ln.wy), ce qui établit clairement l'idée restrictive que
l'on a voulu exprimer 5.
La tâche principale du pharaon est donc, tout d'abord, de veiller au maintien de ce dispositif territorial
équilibré, tant pour ce qui est des subdivisions légales internes que pour le contrôle des franges latérales de
l'est comme de l'ouest ; celles-ci ne coïncident d'ailleurs pas avec le bornage cadastral, occidental ou
oriental, des nomes, surtout dès lors qu'il existe des voies de pénétration vers les déserts. De ce fait, on
doit distinguer les pistes caravanières, jalonnées de points d'eau, les mines et carrières qui peuvent se
trouver sur les itinéraires d'orient ou d'occident du domaine de la Desheret, le « désert », pour les intégrer
aux Tjenouy, les « Deux Falaises », afin qu'elles soient pleine propriété de l'Horus-Roi 6.
La notion de «frontière» (tiS) comme moyen de marquer d'une séparation imaginaire son
territoire propre et celui de l'Autre n'est donc, du point de vue de l'Égyptien antique, que le lieu
d'apparition (ou la somme des points d'apparition) de la présence manifestée du roi, Horus, possesseur des
terrains de droit divin 7. Ceci paraît établi dès les plus hautes époques et probablement même au
prédynastique.
A ce stade, la frontière est surtout une barrière d'influence qui, en fait, ne s'applique qu'à certains
points de l'espace national :
à l'ouest, tout le long de la Vallée,
au nord et à l'est, dans la zone de l'isthme de Suez,
au sud, à la hauteur d'Assouan et, très vite, vers Sehel et Shellal puis en haute Nubie, jusqu'à
la seconde cataracte.
L'est paraît exclu, comme lié au point d'origine du soleil levant, sur toute la longueur du Nil
égyptien ; c'est peut-être parce que ses espaces pouvaient être aisément traversés, depuis le fleuve, en
quelques journées de marche et qu'il se terminait sur la protection naturelle de la Mer Rouge. La même
observation s'applique au nord, où le littoral méditerranéen marque le terme de toute avance. Ce n'est que
très tard qu'il sera surveillé et connaîtra des douanes.
Les textes les plus anciens qui évoquent la frontière (tiS, tash), consignent que c'est le roi qui
l'établit (smn) et cet acte correspond toujours à la mise en place d'une borne ou d'une stèle. L'objet est
sensé marquer la nature irréversible de la limite marquée, son déplacement ou sa transgression entraînant
un châtiment, soit pénal, soit d'ordre divin, ou les deux. On aura d'ailleurs le plus souvent association du
royal et du divin dans le décor du cintre des stèles érigées à cet effet. De même, une stèle frontière de
Sésostris III (XIIe dynastie, # 1900 a. C.) 8 sera dressée et consacrée comme une image ou réplique (twt)
du pharaon en personne. Sous Ramsès II, on précise encore que le souverain place le monument « où il
le désire » 9.
En accord avec la situation des origines, la « limite royale » ne semble s'appliquer qu'à la seule
définition nationale de l'Egypte. Face à l'histoire, cette restriction n'a pu être maintenue. Très tôt, en effet,
le pouvoir pharaonique a dû faire face à des agressions sur ses flancs (nord-est, ouest) et, plus encore, à ses
confins du sud (Nubie). L'intervention royale a pu, dans un premier temps, se limiter au rétablissement
des frontières en les « consolidant » (srwd) par le simple fait de repousser les invasions ; mais, très vite,
le pouvoir monarchique, en fonction du droit de suite, pourchassant fort loin les rezzous ennemis, est
passé à une démarche de type colonial amenant à la création de l'empire et à l'élargissement (swsh) des
limites ancestrales. Commencée avec l'aube de l'histoire de l'Egypte (Ancien Empire), avec la marche à
l'est vers les mines de turquoise et de cuivre du Sinaï, la constitution des marches impériales va
5. E. Hornung, « Von Zweierlei Grenzen im alten Ägypten », ERANOS Jahrbuch 48, Ascona, 1980, 393-426 (cité
Grenzen par la suite).
6. Sur ces termes, voir l'annexe lexicographique en fin d'exposé.
7. Cf. notice Grenzen dans LA Π/6 (1976), col. 896, n. 5.
8. Pour twt « stèle-roi », voir W. Barta, « Der Terminus twt... », Festschrift Ägyptisches Museum Berlin (Mitteilungen
aus der Ägyptischen Sammlung 8, Berlin, 1974), 51-54.
9. Kitchen, Ramesside Inscriptions II, 2

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