Erreur simulée et logique différentielle - article ; n°1 ; vol.16, pg 36-59
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Description

Communications - Année 1970 - Volume 16 - Numéro 1 - Pages 36-59
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 4
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jean Simeray
Erreur simulée et logique différentielle
In: Communications, 16, 1970. pp. 36-59.
Citer ce document / Cite this document :
Simeray Jean. Erreur simulée et logique différentielle. In: Communications, 16, 1970. pp. 36-59.
doi : 10.3406/comm.1970.1228
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1970_num_16_1_1228Jean Simeray
Erreur simulée et logique différentielle
II est sans doute inutile de rappeler longuement les difficultés et les incerti
tudes qui se rencontrent depuis longtemps dans l'étude des faits littéraires, et
qui subsistent à peu près intégralement malgré tous les efforts qui sont faits pour
les résoudre. Disons seulement que sans nulle modestie nous proposerons à notre
tour une approche de ces problèmes, que nous croyons au moins nouvelle, à
défaut d'autre chose. Nous définirons d'abord l'essentiel du fait littéraire comme
un effet de sensibilité produit par une lecture ; nous admettrons ensuite que cet
effet de correspond à une structure logique : il s'agira de constituer,
à partir des faits littéraires, une logique qui leur soit propre (c'est-à-dire qui ne
soit pas nécessairement l'une des logiques déjà existantes), et qui, étant issue
des faits littéraires eux-mêmes, aura des chances de pouvoir s'appliquer à leur
étude. Indiquons maintenant quelle est l'une des principales données de fait qui
ont servi de substance de base pour notre travail d'analyse : il s'agit de la notion
d'erreur simulée. L'importance de cette notion nous est apparue à la suite d'un
très banal travail sur fiches : le classement et la manipulation d'un certain nombre
de « faits de style », puisés au hasard dans divers traités, ont révélé de façon inat
tendue une fréquence relativement grande de cette structure, qui par elle-même
semble dénuée de toute signification. Il faut ajouter du reste que l'erreur simul
ée en question est une bien curieuse chose, car de la part de celui qui l'énonce
elle exclut tout acte délibéré de simulation. Mais donnons-en plutôt quelques
exemples pour voir de quoi il s'agit. Ces exemples seront d'une trivialité voulue,
pour bien marquer que leur choix importe peu. On connaît la plaisanterie péri
odiquement exploitée par les dessinateurs humoristes : un homme en train de se
noyer crie : « Au secours, je ne sais pas nager », et un autre, accoudé sur le para
pet, dit : « Moi non plus je ne sais pas nager, et je ne crie pas pour cela. » Ecar
tons ici toute considération sur la théorie de l'effet comique, et constatons sim
plement que la plaisanterie est fondée sur une erreur simulée : le second person
nage fait semblant de croire que l'autre crie parce qu'il ne sait pas nager, — alors
que visiblement il lui est impossible de se tromper sur ce point. Cependant il y
a un second fait sur lequel nous insisterons également, c'est que très évidemment
jamais ce second personnage n'a eu la moindre intention de simuler une erreur,
ni le moindre sentiment d'avoir fait une pareille chose. Mais prenons un autre
exemple pour recouper celui que nous venons de donner. Bergson cite une scène de
dispute où un cocher de fiacre traite son client noir de « mal lavé ». Ici encore on
aperçoit facilement l'erreur simulée sur laquelle est fondé ce trait comique :
36 Erreur simulée et logique différentielle
le cocher fait semblant de croire que la couleur noire de son client provient d'une
insuffisance d'ablutions. Mais ici encore cette remarque ne vaudrait rien si elle
n'était aussitôt complétée par une autre : jamais assurément le cocher n'a eu
la moindre intention de simuler quoi que ce soit, et surtout pas une erreur. On
voit ainsi que si l'on veut faire la « psychologie » du cocher, il ne faut surtout pas
parler d'erreur simulée, car ce serait tout simplement faux ; et voilà pourquoi la
notion simulée est toujours passée inaperçue, ou a toujours été dédai
gnée ; et c'est à bon droit, nous n'y insisterons jamais assez. Mais quant à nous,
ce n'est pas de la « psychologie » que nous voulons faire, et sans doute n'y insist
erons-nous jamais assez non plus. Notre problème est d'ordre logique, et il se
trouve posé par l'existence de cette structure particulière, constituée par l'e
rreur simulée sans acte délibéré de simulation ; telle est, si l'on veut, la matière
première qui nous était fournie par la nature des choses et que nous avons tenté
d'analyser et d'exploiter.
Il nous fallait donc trouver un instrument, créer un « organon », capable d'effec
tuer cette analyse ; ce sont les résultats de cette recherche que nous exposerons
partiellement ici. A partir des données de fait, nous avons procédé à rebours,
remontant de proche en proche pour atteindre des principes qui nous permet
tront maintenant de présenter un exposé de forme synthétique, où se trouve
ront en quelque sorte déduites les formes types rencontrées dans le réel. — Pré
cisons enfin que ces analyses ne resteront pas limitées au domaine du comique,
comme pourraient le faire penser les exemples donnés ci-dessus ; l'étude du
comique n'est pas pour nous un but, mais seulement un moyen privilégié pour
faire apparaître certaines structures cachées. Il s'agit, pensons-nous, de struc
tures logiques à caractère universel, dont le champ d'application déborde la
rgement les faits de littérature eux-mêmes. Vers la fin de notre étude, nous avons
été amené à examiner quelque peu la notion de communication. Car la product
ion de l'effet de sensibilité de pôle positif — objet principal de notre recherche —
est peut-être liée à l'existence (ou au moins à la virtualité) d'un échange entre
deux individus distincts. C'est du moins ce que paraît suggérer le développement
de certaines de nos formules.
Avant que nous n'entrions dans la partie technique de notre exposé, une r
emarque est peut-être nécessaire. Les différentes formules que nous avons établies
ci-après sont faites de façon à éliminer la sensibilité que l'Observateur porte en
lui, et à empêcher qu'elle n'aille se mêler avec celle qu'il cherche à étudier. Mais
cela entraîne quelques conséquences : dans ce qui suit, ce n'est pas seulement de
l'impersonnalité qu'on trouvera, mais une sorte de dépersonnalisation ; ce n'est
pas contre la froideur seulement qu'il faudra se prémunir, mais contre une sorte
de réfrigération brutale, qui risque de surprendre fâcheusement si l'on n'en est
pas dûment averti.
I. FORMULE FI : THÉORÈME DU « SPECTACLE PUR DE L'ERREUR »
a) Soit un personnage A donnant à une question Q une réponse [a]. L'en
semble formé par cette question et cette réponse constitue une proposition,
notée Q[a] ; cette proposition représente l'opinion de A, notée :
H-MQM)
37 Jean Simeray
Soit d'autre part un personnage B donnant à la mime question Q une réponse
[b] ; on aura comme précédemment :
b) Toute opinion est constituée par une proposition rapportée à un Objet.
Dire que l'opinion de A est Q[a], c'est dire que A rapporte la proposition Q[a]
à un certain Objet, qui sera désigné par O». De même, B rapporte la proposition
Q[b] à un objet qui sera par 0t>.
c) On supposera qu'il n'y a aucune sorte de doute de A sur son opinion Q[a].
Dès lors il n'existe chez A aucun écart entre son opinion Q[a] et l'objet corre
spondant O» ; autrement dit, dans la perspective de A, l'opinion Q[a] et l'objet
0» sont indiscernables ; c'est ce qu'on appelle le « réalisme naïf ». Pour écrire la
relation d'indiscernabilité entre Q[a] et Oa, on utilisera une double flèche char
gée d'un I, à lire « indiscernable de » ; on aura donc :
0-MQM <-i->Oà)
(auquel on Ce aura qui de correspond doit même se lire : ainsi cette : Dans opinion) la perspective sont indiscernables. de A, l'opinion En ce Q qui [a] et concerne l'objet 0» B,
d) On supposera maintenant que A prend connaissance de l'opinion de B ;
le problème proposé consiste à examiner ce qui se passe chez le « spectateur >
A. — Pour ce dernier, l'opinion Q[b] de B représente, en regard de sa propre
op

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