Etienne Lamotte (1903-1983) - article ; n°1 ; vol.74, pg 6-28
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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 1985 - Volume 74 - Numéro 1 - Pages 6-28
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 68
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Hubert Durt
Etienne Lamotte (1903-1983)
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 74, 1985. pp. 6-28.
Citer ce document / Cite this document :
Durt Hubert. Etienne Lamotte (1903-1983). In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 74, 1985. pp. 6-28.
doi : 10.3406/befeo.1985.1660
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1985_num_74_1_1660ETIENNE LAMOTTE
1903-1983
PAR
Hubert DURT
La personnalité de Mgr Etienne Lamotte1 , décédé le 5 mai 1983, a pu sembler se dissimuler
derrière une œuvre immense et d'une minutie sans pareille. Il saluait la «distinction» de
grands esprits comme Nàgârjuna, Asaňga, Vasubandhu pour n'avoir quasi rien confié
d'eux-mêmes dans leur œuvre. A fortiori, devait-il penser, leur traducteur et exégète doit-il
s'effacer derrière ces grands modèles d'effacement. D'autre part, par discrétion et par une
conscience aiguë de l'impermanence, et par conséquent de la valeur du moment qui passe, il
n'aimait ni les trop longues conversations — que de fois n'a-t-il pas loué le Vinaya d'avoir
condamné la parole oiseuse (sambhinnapralàpa)? — ni les trop grands sujets. Là aussi,
l'apologue du Buddha comptant les feuilles de simšapa2 ou le silence de Vimalakïrti lui
servaient de précieuses références. Il abhorrait par dessus tout les questions sur les rapports
entre sa profonde vocation religieuse chrétienne et son inlassable investigation de la doctrine
bouddhique.
Et pourtant, l'exégète et historien majeur du bouddhisme que fut Etienne Lamotte était
doué d'une personnalité chaleureuse et a vécu une bien vie plus mouvementée qu'on pourrait
le supposer. C'est à travers de nombreuses épreuves qu'il a atteint son but: laisser une œuvre
écrite bien ordonnée, restituant le plus fidèlement possible une pensée subtile, lointaine dans
le temps et dans l'espace, mais dont la valeur est universelle et permanente. Il n'avait pas
l'orgueil de se faire connaître, mais le souci qu'a l'artisan consciencieux de fournir des outils
de travail bien faits. Dans son cas, il s'agissait d'ajouter quelques livres à ceux dont le fait de
«rester» constituait pour lui le plus beau mérite scientifique.
Le souci de l'organisation de son œuvre motivait son horreur de la dispersion. En tout état
de cause, n'avait-il pas à assumer un programme d'enseignement incroyablement lourd ainsi
1 Voir la Notice sur Mgr E. Lamotte, Professeur à Г Université de Louvain , Louvain, 1972, 44p. , qui contient des
résumés rédigés par E . Lamotte lui-même sur chacun de ses livres et articles principaux. La préface "L'œuvre de Mgr
Etienne Lamotte" [par D. Donnet] au volume Indianisme et Bouddhisme, Mélanges offerts à Mgr E. Lamotte, PIOL
23, Louvain, 1980, p. vn - xvi, est une paraphrase de cette notice, avec mise à jour de la bibliographie jusqu'à 1980.
Les derniers articles d'E. Lamotte (1981-1984) sont signalés à la p. 27 du présent article.
2 «La personnalité et l'esprit de Sàkyamuni», BCL, 1955, p. 213; Histoire du bouddhisme indien, Louvain,
1958, p. 53. Etienne Lamotte 2
que de nombreuses charges administratives? Les charges lui venaient avec les honneurs
scientifiques, puisque, comme il le remarquait, «plus quelqu'un travaille et donc a besoin de
tout son temps, moins on le laisse en paix!» Chacun sait combien l'œuvre d'Etienne Lamotte
est intimement liée à celle de son maître Louis de La Vallée Poussin. Il est cependant possible
à présent de mieux distinguer l'originalité respective des deux phares de l'école belge.
E. Lamotte a consacré à son maître plusieurs évocations, dont le joyau de ce genre ingrat
qu'est sa «Notice sur Louis de La Vallée Poussin, Membre de l'Académie» (26p.) dans le 131e
volume de V Annuaire de l'Académie royale de Belgique (1965). Il s'agit d'un texte reflétant
l'humanité, la science et la qualité littéraire à la fois du modèle et du peintre. Toutefois, la
seule critique que se permettait E. Lamotte à l'égard du maître qu'il vénérait était le regret
que La Vallée Poussin n'ait pas éprouvé davantage, en dehors de ses ouvrages majeurs «qui
restent», le souci de l'organisation de son œuvre: des trésors de pensée et d'information se
trouvent disséminés dans une multitude d'articles et de notes que l'on doit reconstituer
comme un puzzle à travers des publications collectives et des périodiques du monde entier.
Tout en s'imposant un régime de travail incroyablement exigeant, E. Lamotte fut plus
économe de ses forces et nous laisse une œuvre construite comme une cathédrale dont tous
les éléments contribuent à l'ensemble. Seule l'amitié ou la fidélité pouvait l'écarter tempo
rairement de son chantier principal. Ainsi en fut-il pour ses évocations3 de La Vallée Poussin,
Sylvain Lévi, etc., mais nous verrons aussi que certaines de ses meilleures études brèves,
données à des «mélanges» honorant ses amis, trouvent une place privilégiée dans l'ensemble
de son œuvre. D'autre part, nombreux sont ses articles de périodiques qui ont servi de ballon
d'essai avant que le sujet traité trouve sa destination et sa mise au point définitive dans un de
ses ouvrages alors en cours d'élaboration.
C'est en mettant l'accent sur la très remarquable «organisation» de l'œuvre d'E. Lamotte
que la présente notice voudrait rendre un hommage d'admiration et de reconnaissance à un
maître qui comptait des disciples par son enseignement à Louvain mais, plus encore, des
fidèles partout dans le monde, venus à lui grâce à la lecture de ses écrits.
* * *
Cadet d'une famille nombreuse et très unie, Etienne Paul Marie Lamotte naquit à Dinant,
le 21 novembre 1903. Ses ancêtres vivaient à Ave, village situé à la lisière des Ardennes et de
la Vallée de la Meuse. Son père, Georges Lamotte, magistrat et historien distingué, fut aussi
3 Citons, en suivant l'ordre chronologique de leur publication:
— «Louis de La Vallée Poussin», Revue du Cercle des Alumni de la Fondation Universitaire, IV, 3, 1933, p. 1-17.
— de la Poussin (Notice nécrologique)», Le Flambeau, 21, 3, 1938, p. 275-286.
— «Notice sur le Chevalier Charles de Harlez de Deulin», Annuaire A.R.B. , 119e année, 1953, p. 414 440.
— «L'œuvre indianiste de Roger Goossens», Nouvelle Clio, 6, 1954, p. 193-198.
—«Paul Demiéville», Orbis, 6, 1957, p. 230-235.
—«Mgr Théophile Lefort», Le Muséon, 72, 1959, p. 251-255.
—«Gérard Garitte», Orbis, 9, 1960, p. 232-247.
— «L'œuvre bouddhique de Sylvain Lévi», Hommage à Sylvain Lévi pour le centenaire de sa naissance, Institut de
Civilisation Indienne, Paris, 1964, p. 35-51.
— «Notice sur Louis de La Vallée Poussin, Membre de l'Académie», Annuaire A.R.B , 131e année, 1965, p. 145-168.
Traduction japonaise dans Buddhist Seminar, Ótani University, № 3, 1966, p. 77-94. Une traduction anglaise, par
Eric Grinstead, est encore inédite.
— «Lettre à Olivier Lacombe du 7 février 1967», Louis Renou, In Memoriam, Institut de Civilisation Indienne, Paris,
1967, p. 31-33. Hubert Durt 3
un excellent humaniste classique. E. Lamotte aimait à rappeler qu'il se fiait à son père, qui
mourut nonagénaire en 1952, pour l'interprétation de passages difficiles en grec ou en latin.
Son enfance fut traversée par la lre Guerre mondiale, qui commença en 1914 par des
massacres de populations civiles dans la vallée de la Meuse, en particulier à Dinant. Cette
période troublée obligea les siens à se retirer en pleine forêt. C'est là que le jeune Etienne
contracta une familiarité avec la nature dont il conserva la nostalgie et qu'il put entretenir par
des retours réguliers à son pays d'origine, à la belle demeure d'Ave dont une partie remonte
au XVIIe siècle.
E. Lamotte fit de très bonnes études d'humanités gréco-latines au Collège Notre-Dame de
В elle- Vue à Dinant. Il devait évoquer plus tard, avec conviction, ces collèges de province où,
à l'abri de la distraction, l'on garde le sens de l'effort et des classiques4. Suivant l'exemple de
son seul frère aîné, Armand Lamotte, il prit le chemin de la prêtrise. Comme l'évêque de son

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