Études de mythologie hindoue. V. Bhakti et avatâra (suite) - article ; n°1 ; vol.65, pg 87-238
153 pages
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Études de mythologie hindoue. V. Bhakti et avatâra (suite) - article ; n°1 ; vol.65, pg 87-238

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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 1978 - Volume 65 - Numéro 1 - Pages 87-238
152 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 10
Langue Français
Poids de l'ouvrage 14 Mo

Extrait

Madeleine Biardeau
III. Études de mythologie hindoue. V. Bhakti et avatâra (suite)
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 65 N°1, 1978. pp. 87-238.
Citer ce document / Cite this document :
Biardeau Madeleine. III. Études de mythologie hindoue. V. Bhakti et avatâra (suite). In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-
Orient. Tome 65 N°1, 1978. pp. 87-238.
doi : 10.3406/befeo.1978.3906
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1978_num_65_1_3906DE MYTHOLOGIE HINDOUE (V)< ÉTUDES
PAR
Madeleine BIARDEAU
IL BHAKTI ET AVATÀRA (suite)
Seconde Partie. Avatàra et roi terrestre (suite)
IL L'avatâra, modèle divin du roi (suite)
C. Le Mahâbhârata comme unité mythique (suite).
2. Arjuna, le roi idéal.
Concevoir le mythe épique comme un dédoublement d'un mythe
d'avatâra, qui cantonne l'incarnation divine dans un rôle de modèle
et d'instructeur pour reporter tout le poids de l'action sur le roi terrestre,
aide à réduire un certain nombre de contradictions ou de flottements
apparents. Ainsi de cette perpétuelle oscillation que nous avons notée
entre les yuga utilisés comme cadre temporel de l'épopée et la person
nification de deux yuga dans des asura incarnés : la présence de Vavatàra
Krsna entraîne obligatoirement la « datation » du récit épique à la
jonction entre le Dvâpara et le Kali, tandis que la transposition de
son intervention en un mythe royal de même modèle se traduit par
l'incarnation des asura Dvâpara et Kali dans deux des protagonistes1.
Pour que le mythe garde sa dualité significative, il faut que les deux
types de référence à Dvâpara et Kali soient conservés côte à côte dans
le même récit. La difficulté que nous éprouvons n'est que conceptuelle
et ne saurait gêner les mythographes. Il en est sans doute de même
pour la question irritante du rapport de l'action humaine à celle du
daiva : tantôt on nous dit que c'est le daiva qui est tout-puissant, au
point que personne n'est responsable du grand carnage de la bataille,
tantôt au contraire Dhrtarâstra, ou Duryodhana, ou aussi bien
* Pour I, II, III, IV, voir BEFEO LIV, p. 19-45, LV, p. 59-105, LVIII, p. 17-89, LXIII,
p. 111-263.
(1) On retrouve Kali et Dvâpara dans l'histoire de Nala et Damayantï, racontée dans
le Livre III du MhBh (52-79 ; 49-78). Le prince auquel ils s'attaquent est Nala, dont nous
verrons que le nom évoque celui d'Arjuna. Cf. ci-dessous, p. 189. MADELEINE BIARDEAU 88
Yudhisthira, porte le poids de la catastrophe. L'intervention de
Yavaiâra, qui se situe toujours à la jonction entre deux yuga participe
nécessairement du daiva inexorable, auquel il serait vain de vouloir
échapper. Si au contraire l'on se place du point de vue du roi qui, selon
son action, fait régner tel ou tel yuga, imposant alors au cours du temps
une causalité humaine, le daiva devient surmontable et le rôle du roi est
de le faire tourner à l'avantage de son royaume. Si le récit épique se
place à la jonction entre deux yuga, c'est le premier point de vue qui
domine; si au contraire on met l'accent sur la guerre à déclencher ou à
éviter, il s'agit d'abord d'un drame humain. Mais il est de la nature de
ce mythe double de garder ensemble les deux types de causalité, quelle
que soit la difficulté — conceptuelle encore — que nous éprouvions
à les penser ensemble. Cette difficulté ne peut qu'échapper aux auteurs
du mythe, dans un contexte culturel où l'idée d'une autonomie de
l'action individuelle, pour ne pas parler de liberté, est bien mal dégagée,
où l'homme ne peut aspirer qu'à accomplir son dharma et par là s'insérer
dans l'ordre du monde.
Nous ne sommes cependant pas au bout de nos peines, et nous n'avons
pas encore cerné toutes les implications de cette dualité du mythe
épique pour une compréhension de sa structure. Si notre hypothèse est
juste en effet, on doit voir l'action se déployer autour de deux person
nages : celui de Yavaiâra et celui du roi.
Uavalâra, nul doute qu'il ne soit Krsna. Mais en quoi est-il avaiâra,
alors qu'il ne prend pas part au combat et se comporte plutôt à la
manière de la divinité suprême, témoin impartial ou deus ex machina ?
En d'autres termes, et indépendamment des déclarations non équi
voques du récit, qu'est-ce qui, dans sa « biographie » épique, le campe
comme avatâra ? Peut-être ne penserions-nous pas à évoquer ce problème
si nous ne connaissions par ailleurs les grands textes de la dévotion
krsnaïte et l'importance qu'ils accordent précisément à la partie de
la biographie de Krsna qui se situe hors du cadre épique. Nous aurons
à voir en quoi le de l'épopée est bien le Krsna total et non un
avatàra vidé de son contenu propre au profit du roi.
Mais auparavant, la question posée par l'autre personnage central
du mythe est plus urgente. Celui que le récit donne en clair pour le
roi est sans conteste Yudhisthira, le Dharmarâja. C'est Yudhisthira
qui est consacré roi lors du râjasuya, c'est encore lui qui célèbre Yasvame-
dha au lendemain de la guerre pour retrouver son trône. Sa victoire
a assuré le triomphe du dharma qu'il incarne sur Yadharma que symbolis
ait Duryodhana-Kali. Or le récit épique n'est à aucun moment fondé
sur la paire Krsna-Yudhisthira. Sans doute Krsna témoigne-t-il d'un
grand respect pour le Dharmarâja, puisqu'en tant qu'avalâra il ne peut
qu'être dévoué à la cause du dharma, mais le lien qui unit ces deux
personnages n'a rien de particulièrement étroit, rien qui soit comparable
à l'union de Krsna et d'Arjuna. Mais Arjuna — dont on perçoit bien
intuitivement que l'action est centrale — n'est jamais appréhendé
immédiatement comme roi. En soi, il n'est pas inconcevable que le
mythe utilise un langage chiffré pour nous livrer le personnage du roi.
La logique du récit que nous avons jusqu'à présent mise à jour nous ÉTUDES DE MYTHOLOGIE HINDOUE (V) 89
incite à poursuivre en ce sens : si Yavalàra et le roi doivent aller de pair,
on ne peut que chercher à rapprocher cette hypothèse de la relation
indissoluble qu'établit le mythe entre Arjuna et Krsna, et à voir en
Arjuna le roi idéal.
a. Nara et Nârâyana.
Presqu'innombrables sont les mentions de Krsna comme présence
de Visnu ou de Nârâyana sur terre. Tout aussi clairement attestée
est la relation d'Arjuna à Indra qui fait d'Arjuna le fils d'Indra : d'un
côté Yavalàra, de l'autre une « descente » du roi des dieux sur terre. On
voit déjà reparaître ainsi la dualité du mythe, où Yavatâra, présent
en ce monde, laisse la place à des princes, deva et asura incarnés, qui
vont assumer la lutte pour ou contre le dharma.
Mais à ces deux « descentes » divines se superpose dans les mêmes
héros une autre incarnation, celle qui, précisément, scelle leur unité.
Ils sont la renaissance sur terre des rsi Nara et Nârâyana. L'épopée
n'insiste pas beaucoup sur les deux rsi comme tels : ils sont toutefois
associés dans la lutte qu'il faut livrer aux asura pour assurer l'ambroisie
aux dieux (I 19; 17); ils sont aussi défiés ensemble par le roi
Dambhodbhava (V 96; 94), et l'on constate alors une intéressante
dichotomie des rôles, qui fait de Nara le personnage actif et de Nârâyana
un spectateur. Le rapport entre Arjuna et Krsna dans la bataille trans
paraît ici clairement, en même temps que l'on peut évoquer les deux
oiseaux de la Mundaka-upanisad (III 1), dont l'un mange tandis que
l'autre le regarde. On connaît aussi l'ermitage des deux rsi à Badarï,
mais leur généalogie reste floue : tandis qu'en VII 201 57 (172 51),
Vyâsa fait de Nârâyana un fils de Dharma, et fait naître ensuite Nara
du tapas de (ibid. 86; ibid. 80), le Nârâyanïyaparvan (XII
334 8-10; 321 8-10), attribuant toujours à Dharma la paternité de
Nârâyana, voit celui-ci se diviser, non plus en deux, mais en quatre :
Nara, Nârâyana, Hari et Krsna. Cependant Nara et Nârâyana y
forment encore une paire associée à Badarï. Les

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