Evaluation sociale dans les thèses de Mikhaïl Bakhtine et représentations de la langue - article ; n°1 ; vol.85, pg 6-21
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Evaluation sociale dans les thèses de Mikhaïl Bakhtine et représentations de la langue - article ; n°1 ; vol.85, pg 6-21

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Description

Langue française - Année 1990 - Volume 85 - Numéro 1 - Pages 6-21
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Peytard
Evaluation sociale dans les thèses de Mikhaïl Bakhtine et
représentations de la langue
In: Langue française. N°85, 1990. pp. 6-21.
Citer ce document / Cite this document :
Peytard Jean. Evaluation sociale dans les thèses de Mikhaïl Bakhtine et représentations de la langue. In: Langue française.
N°85, 1990. pp. 6-21.
doi : 10.3406/lfr.1990.6174
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1990_num_85_1_6174PEYTARD Jean
Université de Franche-Comté
Besançon
CRELEF-(G.S. 36-CNRS)
À Pierre- Jakez Hélias
pour de nouveaux rigodons
EVALUATION SOCIALE
DANS LES THÈSES DE MIKHAÏL BAKHTINE
ET REPRÉSENTATIONS DE LA LANGUE
Dans le Cheval d'orgueil \ à la page 206 (édition Pion, 1973), Pierre- Jakez Hélias
écrit : « Les instituteurs ne parlent que le français, bien que la plupart d'entre eux aient
parlé le breton quand ils avaient notre âge et le parlent encore quand ils rentrent chez eux...
Vous, nos parents, vous ne parlez jamais français. Personne dans le bourg ni à la
campagne ne parle français, à part cette malheureuse Madame Poirier. Nous n'avons pas
besoin de le faire, disent les parents, mais vous, vous en aurez besoin. Il y a encore des
vieux qui ne savent ni lire ni écrire. Ils n'avaient pas besoin de le savoir. Nous, nous en
avons eu besoin. »
Dans un entretien 2 enregistré au printemps 1956, un patoisant franco-provençal
du plateau Matheysin (Dauphine), Monsieur Emile V. (né en 1883, il avait à l'époque
73 ans) racontait : « Quand j'étais au front (guerre 1914-18) , il m'arrivait de me parler
tout seul ; je me parlais en patois. Les autres disaient « qu'est-ce qu'il raconte ce grand
imbécile ? » ; je leur disais « vous êtes trop bêtes pour comprendre »... Le patois, c'est
la langue de notre jeunesse ; on ne le parle presque plus... ici, il n'y a bientôt plus que des
internationaux » (immigrés polonais, italiens, espagnols, serbes, etc. travaillant aux
Houillères du Dauphine).
1. Pierre-Jakez Hélias, le Cheval d'Orgueil, Mémoires d'un Breton du pays bigouden, Paris,
Pion, coll. Terre des hommes, 1973.
2. Entretien d'une durée de trois heures réalisé en avril 1956 par Jean Peytard. Le témoin
(décédé maintenant) était un préposé des PTT en retraite. L'entretien est composé de récits, de
chansons en patois, d'un glossaire patois tranco-provençal-français et de commentaires sur les
parlers et les coutumes d'une bourgade du plateau Matheysin (à 40 km au sud de Grenoble). Deux exemples de diglossie. Deux énoncés où les représentations de la langue
marquent la relation de la langue première, maternelle (le breton ou un patois
franco-provençal), à son locuteur, et de celui-ci à la langue des autres. Paroles par
lesquelles le locuteur dit sa situation diglossique et se situe lui-même, quand il signale
cette frontière entre deux idiomes et son appartenance à un univers bilingue. Avec les
forces contraignantes d'une société où dominés et dominants trouvent leur place.
Dans Ce que parler veut dire 3, Pierre Bourdieu (p. 135) écrit : « la langue, le
dialecte ou l'accent sont l'objet de représentations mentales, c'est-à-dire de perception ou
d'appréciation de connaissance et de reconnaissance où les agents investissent dans leurs
intérêts et leurs présupposés. »
C'est sur les « actes d'appréciation » que cherche à se construire cette étude, en
prenant comme base les analyses que le groupe formé par M. Bakhtine, P. Medvedev
et V. Volochinov (groupe désigné par les initiales BMV) ont produites au long de leurs
publications, dans une période de cinquante ans, des années vingt aux années
soixante-dix.
Il s'agira de voir comment s'instaure dans ces travaux le concept dévaluation
sociale, portée au crédit de tout locuteur dans la pratique des énoncés qu'il produit.
On postulera, dès lors, que l'activité d'évaluation ressortit aux et révèle les
représentations mentales du locuteur quant à la « langue » où il produit ses propres
discours, et dans laquelle, volens nolens, « il est-se-situant ».
La construction du concept d'évaluation sociale chez BMV se réalise dans une
durée et par une variété d'études, qui visent aussi bien l'esthétique générale, la
psychologie que la linguistique ou la littérature. Et de manière solidairement
organisée : entendant par là que les thèses du groupe sur le langage, ne peuvent être
saisies autrement qu'en l'ensemble de ces disciplines, simultanément envisagées.
Il conviendra de tracer un parcours dans l'œuvre du groupe BMV de manière à
délimiter la frontière du concept « évaluation sociale ».
On montrera d'abord que les « thèses sur le langage » ne cessent de se construire
et de s'affirmer tout au long des écrits de BMV, ce qui oblige à prendre distance à
l'égard des thèses de T. Todorov sur l'évolution de la pensée de M. Bakhtine ; on
établira ensuite entre les écrits du groupe BMV un réseau de correspondances et
d'échos qui constitue la cohérence de ces écrits, à envisager comme un seul ensemble ;
on dégagera enfin la fonction du concept d'évaluation sociale dans l'œuvre du groupe,
comme sa valeur opératoire dans l'analyse des discours actuellement produits en
langue française.
3. Pierre Bourdieu, Ce que parler veut dire. L'économie des échanges linguistiques, Paris,
Fayard, 1982. Linguistique et translinguistique comme constantes dans les œuvres de
M. Bakhtine
Avant d'étudier les travaux de Volochinov 4 et de Medvedev 5, pour autant que
l'on puisse les authentiquer, on prendra comme aperçu d'ensemble des thèses du
groupe la préface que T. Todorov a écrite pour le volume Esthétique de la création
verbale, de M. Bakhtine 6, son dernier ouvrage paru en langue française, en 1984
(Gallimard, Paris).
La préface de T. Todorov 7 doit être lue comme partie de l'ensemble de ses
travaux sur M. Bakhtine. Dans Mikhaïl Bakhtine, le principe dialogique (Le Seuil,
Paris, 1981), T. Todorov propose une analyse et un exposé de forte rigueur de la
problématique et de la thématique bakhtinienne ; il porte à la connaissance des
lecteurs de langue française une série d'articles inédits de BMV ; il donne une
bibliographie extrêmement détaillée des écrits du groupe dans laquelle sont annonc
ées, dès 1981, des études qui se retrouveront en 1984 dans Esthétique de la création
verbale (on notera que cette bibliographie est à utiliser en complément de celle qui est
donnée dans le Freudisme (L'Age d'homme, Lausanne, 1980) qui reproduit la
bibliographie de Problèmes de poétique et d'histoire de la littérature, publiés en 1973 à
Saransk, pour les 75 ans de M. Bakhtine).
4. Volochinov Valentin Nikolaievitch (1897-1934).
a) Le Discours dans la vie et le Discours dans la poésie, 1926.
b) Au-delà du social. Essai sur le freudisme, Moscou/Leningrad. Éd. nationales. In l'Étoile
(revue de littérature, de politique et de science populaire), 1925, n° 5, pp. 186-214.
c) Le Freudisme. Essai critique, Moscou/Leningrad. Éd. nationales, 1927, 164 pages.
Éditions en français : sous le nom de M. M. Bakhtine (V.N. Volochinov), Lausanne, L'âge
d'hommes, 1980.
d) Le Marxisme et la Philosophie du langage. Problèmes fondamentaux d'une méthode
sociologique appliquée à la science du langage, Leningrad, 1929. Deuxième édition en 1930.
Édition en français : sous le nom de M. Bakhtine (V.N. Volochinov), le Marxisme et la
Philosophie du langage. Essai d'application de la méthode sociologique en linguistique, préface de
Roman Jakobson. Traduit du russe et présenté par Marina Yaguello. Paris, Éd. de Minuit, 1977.
5. Medvedev Pavel Nikolaievitch (1891-1938), la Méthode formelle en critique littéraire.
Introduction critique à une poétique sociologique, Leningrad, Ressac, 1928, 232 pages. Traduction
en anglais : The formal method in literary scholarship. A critical introduction to sociological poetics .
Baltimore and London, The Johns Hopkins University Press (USA), 1978.
6. Mikhail Mikhaïïovitch Bakhtine (1895-1975).
a) Problèmes de l'œuvre de Dostoievski, Leningrad, Ressac, 1929. Réédition revue et
augmen

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