Histoire et polémique, le massacre de Machecoul - article ; n°1 ; vol.291, pg 33-60
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Description

Annales historiques de la Révolution française - Année 1993 - Volume 291 - Numéro 1 - Pages 33-60
Jean-Clément Martin, History and Polemics : the Machecoul Massacres.
The Machecoul Massacres, that is, in March and April 1793, the execution or lynching of at least one hundred and fifty people considered as blues by the peasants, who had taken over this small town of the Loire Atlantique department, forms, in the Republicans' memory, the counterpart of the Lues Massacre engraved in the counterrevolutionary memory.
This careful study describes the economic, social, political and cultural conditions of this small region during the first years of the Revolution. It confirms the classic studies on the causes of the Vendée, except that the situation was probably even worse in Machecoul and the surrounding parishes because of the close geographical intermixing of patriots and non-patriots. They were literally neighbours. If the sociology of the victims holds few surprises (civil officiers, members of the local petite and moyenne bourgeoisie, Constitutional priests), that of the persecutors isn't very different. The activists were also merchants and local worthies; they had been opposing the new order of things since 1789 and in an atmosphere of religious division, they had galvanized rural discontent at the time of the drawing of lots.
Henceforth the Republican legend pointed to the Machecoul butchers as the very epitome of savage peasantry.
en fait que la situation était pire à Machecoul et dans les paroisses environnantes à cause de Pentremêlement géographique des patriotes et des non patriotes. Ils étaient littéralement des voisins.
Si la sociologie des victimes est peu surprenante (officiers civils, membres de la petite et moyenne bourgeoisie locale), celle des massacreurs n'est guère différente. Les activistes sont aussi des marchands et des notables locaux : ils se sont opposés depuis 1789 au nouvel ordre des choses et, dans une atmosphère de divisions religieuses, ont galvanisé le mécontentement rural manifeste au moment de la vente des biens nationaux.
Depuis lors, la légende républicaine fait des bouchers de Machecoul l'exemple type de la sauvagerie paysanne.
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 57
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-Claude Martin
Histoire et polémique, le massacre de Machecoul
In: Annales historiques de la Révolution française. N°291, 1993. pp. 33-60.
Citer ce document / Cite this document :
Martin Jean-Claude. Histoire et polémique, le massacre de Machecoul. In: Annales historiques de la Révolution française.
N°291, 1993. pp. 33-60.
doi : 10.3406/ahrf.1993.1542
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1993_num_291_1_1542Abstract
Jean-Clément Martin, History and Polemics : the Machecoul Massacres.
The Machecoul Massacres, that is, in March and April 1793, the execution or lynching of at least one
hundred and fifty people considered as "blues" by the peasants, who had taken over this small town of
the Loire Atlantique department, forms, in the Republicans' memory, the counterpart of the Lues
Massacre engraved in the counterrevolutionary memory.
This careful study describes the economic, social, political and cultural conditions of this small region
during the first years of the Revolution. It confirms the classic studies on the causes of "the Vendée",
except that the situation was probably even worse in Machecoul and the surrounding parishes because
of the close geographical intermixing of "patriots" and "non-patriots". They were literally neighbours. If
the sociology of the victims holds few surprises (civil officiers, members of the local petite and moyenne
bourgeoisie, Constitutional priests), that of the persecutors isn't very different. The activists were also
merchants and local worthies; they had been opposing the new order of things since 1789 and in an
atmosphere of religious division, they had galvanized rural discontent at the time of the drawing of lots.
Henceforth the Republican legend pointed to the Machecoul butchers as the very epitome of savage
peasantry.
Résumé
en fait que la situation était pire à Machecoul et dans les paroisses environnantes à cause de
Pentremêlement géographique des patriotes et des non patriotes. Ils étaient littéralement des voisins.
Si la sociologie des victimes est peu surprenante (officiers civils, membres de la petite et moyenne
bourgeoisie locale), celle des massacreurs n'est guère différente. Les activistes sont aussi des
marchands et des notables locaux : ils se sont opposés depuis 1789 au nouvel ordre des choses et,
dans une atmosphère de divisions religieuses, ont galvanisé le mécontentement rural manifeste au
moment de la vente des biens nationaux.
Depuis lors, la légende républicaine fait des bouchers de Machecoul l'exemple type de la sauvagerie
paysanne.HISTOIRE ET POLÉMIQUE,
LES MASSACRES DE MACHECOUL
Faut-il s'intéresser encore une fois aux massacres de Machecoul ? Dans
ce bourg de Loire- Atlantique (Loire-Inférieure en 1793) les insurgés,
« blancs », opposés à la Révolution tuent plus de cent cinquante républi
cains, des « bleus », dans les mois de mars et d'avril 1793. Ceux-ci ont
été, pour une part, exécutés sauvagement, pour une autre, jetés en prison
d'abord, puis petit à petit, jugés, attachés « en chapelet » et fusillés en
groupes. Étalées sur plus d'un mois, ces tueries ont eu immédiatement
un écho dans le département et dans le pays et, jusqu'à aujourd'hui (1),
ont fait accuser les insurgés de barbarie.
Si un mort est toujours un mort de trop, toute guerre civile ou étrangère
charrie, hélas, son lot d'atrocités, si bien qu'on ne voit pas très bien où
se trouverait l'originalité et l'intérêt de ce qui s'est passé à Machecoul,
et qu'à première vue il peut paraître inutile de se pencher sur cet épisode,
sauf à vouloir faire preuve d'érudition, ou à tenter de relancer les polé
miques. Pourtant l'occasion de ce bicentenaire de la Révolution, alors que
les discussions sont vives sur la place de la violence dans le processus révo
lutionnaire, que la Terreur continue d'alimenter les débats nationaux,
Machecoul illustre les enchaînements qui ont conduit des populations à
s'entretuer, permet de comprendre comment les pires violences ont été
rendues possibles. En même temps, il est possible de comprendre comment
ces événements sont devenus dans l'immédiat — et un siècle plus tard —
des occasions de disputes. Deux histoires — l'une de 1793, l'autre de 1793
à 1889 — sont ainsi à mener qui ne sont pas anecdotiques, mais qui peuvent
rappeler que l'écriture de l'Histoire peut se réaliser à propos des pires
violences sans recourir à des jugements de valeurs, sans se polariser outra
geusement sur les actes de violence, sans abandonner les règles de l'exigence
scientifique.
(1) Max Gallo rappelle les massacres de Machecoul dans un débat télévisé qui l'oppose à Philippe
de Villiers en juillet 1989, sur TF1.
Annales Historiques de la Révolution Française — 1993 — N° 1 34 JEAN-CLÉMENT MARTIN
1. — Machecoul en 1789, unité et rivalités
En 1789, les changements survenus sont bien accueillis à Machecoul,
mais ils bouleversent les habitudes : la création des départements affecte
les populations qui souhaitaient continuer de bénéficier des importants avan
tages fiscaux qu'elles possédaient dans les « Marches séparantes » du Poitou
et de la Bretagne (de Bouin à Gétigné en passant par Machecoul). Le nouveau
découpage administratif rend caduc les privilèges des Marches, et anéantit
la contrebande, puisque tout le pays est dorénavant soumis au même régime
fiscal ! La richesse de cette petite région reposait, heureusement, sur d'autres
activités, la terre est fertile, et marais, bocages et plaines calcaires assurent
une complémentarité essentielle. A l'époque, le marais éleveur de chevaux,
de bovins et de canards, vend ses produits aux bourgs, qui reçoit également
les et les froments du bocage, où se pratique la polyculture. Près
de Port-Saint-Père, le châtelain de Briord, Joseph de Charette, décédé avant
1789, avait lancé de nouvelles méthodes agronomiques, se spécialisant dans
l'élevage bovin et insistant sur la nécessité de disposer d'une bonne main-
d'œuvre agricole. Pourtant la production de sel de Bourgneuf est menacée
par l'envasement de la baie, tandis que l'industrie est quasiment absente
de la région, mis à part les industries navales florissantes de Paimbœuf
et le grand nombre de moulins autour de Machecoul qui en font un des
centres de la meunerie. Nantes est considérée comme une sangsue avide
des revenus des campagnes, dans lesquelles l'habitat est dispersé en hameaux
ou petits villages, reliés, très efficacement par les canaux.
Pourtant les idées de la ville se sont largement répandues. Nombre
de cahiers de doléances, rédigés dans le printemps 1789, se sont inspirés
des modèles lancés par le comité Cottin, groupe de pression « patriote »
partisan des réformes et des revendications du Tiers État face à l'oppos
ition absolue des nobles bretons et poitevins d'accorder des changements.
Même dans le cahier unique des Marches, où les trois ordres se sont
assemblés pour défendre leurs intérêts communs, des divisions sont percept
ibles (2). Ainsi, la région de Machecoul n'est-elle pas à l'écart des rythmes
nationaux. Les esprits sont mobilisés par les luttes politiques et, dans les
villes et les bourgs, des « bourgeois » sont actifs dans les chambres de
lecture et sont impliqués dans les courants philosophiques, conduits par
le régent du collège de Machecoul, Gaschignard père. Cette élite rédige,
dans la paroisse de La Trinité de Machecoul, un cahier de doléances réfléchi,
qui condamne la réforme de Lamoignon de mai 1788, stigmatise les morts
de janvier 1789 à Rennes et propose un plan pour éponger la dette publique.
Les privilèges fiscaux des deux premiers ordres devraient être abolis, les
revenus des abbayes et des prieurés être remis à l'État pour quelques années,
(2) Cahiers de doléances de Loire- Atlantique, conseil général de Loire-Atlantique, Nantes, 1989. MASSACRE DE MACHECOUL 35 LE
en même temps que quelques congrégations religieuses seraient supprimées.
Ces sentiments sont partagés par beaucoup. L'opposition est vive à
rencontre des abbayes, grands propriétaires comme celle de Sainte-Marie-
sur-Mer, ou quasi désertes, comme l'abbaye de la Chaume à Machecoul,
tandis que beaucoup de cahiers souhaitent

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