L Union nationale camerounaise - article ; n°4 ; vol.20, pg 681-718
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Description

Revue française de science politique - Année 1970 - Volume 20 - Numéro 4 - Pages 681-718
L'union nationale camerounaise, par Jean-François Bayart
Le parti unique est un élément privilégié du système politique camerounais. L'Union nationale camerounaise résulte de l'unification d'un certain nombre de formations qui étaient l'expression politique des antagonismes tribaux ; elle est à la fois le symbole et le moyen du développement d'une conscience nationale camerounaise. Il s'agit d'un parti de masses dont le chef, M. Ahidjo, qui est aussi le chef de l'Etat, est le principe de toute autorité ; ce parti, qui a un quasi-monopole de la représentation, est essentiellement un instrument de communication entre le peuple et le président de la République. Si la conception de la vie politique au Cameroun est d'essence totalitaire, la pratique est beaucoup plus souple : les comportements tribaux subsistent, de même que la vie locale et les libertés individuelles. L'ambition de M. Ahidjo, en restructurant l'Union nationale camerounaise suivant les principes du centralisme démocratique, serait de dépasser le système africain de parti unique.
The national union of the Cameroons, by Jean-François Bayart
In the Cameroons the single party is a privileged element in the political system. The National Union is the result of the merging of a certain number of groups which were the political expression of tribal antagonisms; it is the symbol and the means of development of a national conscience. It is a mass party whose leader, Mr Ahidjo, who is also the President, is the source of all authority; this party which has a virtual monopoly of representation is essentially an instrument of communication between the people and the President of the Republic. If the idea of political life in the Cameroons is totalitarian in theory, in practice it is much more supple: tribal differences persist as does the pattern of local life and the existence of individual freedom. By restructuring the National Union on the principle of democratic centralization, Mr Ahidjo hopes to improve on the African single party system.
38 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 12
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Monsieur Jean-François Bayart
L'Union nationale camerounaise
In: Revue française de science politique, 20e année, n°4, 1970. pp. 681-718.
Résumé
L'union nationale camerounaise, par Jean-François Bayart
Le parti unique est un élément privilégié du système politique camerounais. L'Union nationale camerounaise résulte de
l'unification d'un certain nombre de formations qui étaient l'expression politique des antagonismes tribaux ; elle est à la fois le
symbole et le moyen du développement d'une conscience nationale camerounaise. Il s'agit d'un parti de masses dont le chef, M.
Ahidjo, qui est aussi le chef de l'Etat, est le principe de toute autorité ; ce parti, qui a un quasi-monopole de la représentation, est
essentiellement un instrument de communication entre le peuple et le président de la République. Si la conception de la vie
politique au Cameroun est d'essence totalitaire, la pratique est beaucoup plus souple : les comportements tribaux subsistent, de
même que la vie locale et les libertés individuelles. L'ambition de M. Ahidjo, en restructurant l'Union nationale camerounaise
suivant les principes du centralisme démocratique, serait de dépasser le système africain de parti unique.
Abstract
The national union of the Cameroons, by Jean-François Bayart
In the Cameroons the single party is a privileged element in the political system. The National Union is the result of the merging
of a certain number of groups which were the political expression of tribal antagonisms; it is the symbol and the means of
development of a national conscience. It is a mass party whose leader, Mr Ahidjo, who is also the President, is the source of all
authority; this party which has a virtual monopoly of representation is essentially an instrument of communication between the
people and the President of the Republic. If the idea of political life in the Cameroons is totalitarian in theory, in practice it is much
more supple: tribal differences persist as does the pattern of local life and the existence of individual freedom. By restructuring
the National Union on the principle of democratic centralization, Mr Ahidjo hopes to improve on the African single party system.
Citer ce document / Cite this document :
Bayart Jean-François. L'Union nationale camerounaise. In: Revue française de science politique, 20e année, n°4, 1970. pp.
681-718.
doi : 10.3406/rfsp.1970.393245
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1970_num_20_4_393245L'UNION NATIONALE CAMEROUNAISE
JEAN-FRANÇOIS BAYART
Le Cameroun est l'un des Etats africains les plus discrets. Rela
tivement négligé par la science politique, il ne défraye pas la
chronique par ses coups d'Etat ou d'éclat. M. Ahidjo, le président
de la République, n'a pas une renommée internationale comme
MM. Senghor, Nkrumah, Houphouët-Boigny, Sékou-Touré ou Nyerere.
Son régime politique mérite toutefois detre étudié. Hétérogène à
l'extrême, véritable microcosme de l'Afrique, le Cameroun, contrai
rement au Nigeria voisin, a connu une remarquable stabilité politique,
bien qu'il fût plongé dans la guerre civile lorsqu'il accéda à la souver
aineté. Il figure d'autre part parmi les pays à fort taux de croissance,
avec un taux d'accroissement moyen annuel du produit intérieur brut
de 8,6 c/o l.
Le parti unique semble être un élément privilégié du système poli
tique camerounais. En effet, « vouloir caractériser le régime politique
d'un Etat africain par référence au texte constitutionnel, c'est projeter
un schéma abstrait et vide sur une réalité différente que l'on se
condamne à ne jamais connaître » 2.
C'est l'Union camerounaise (devenue Union nationale cameroun
aise en 1966) qui sera l'objet de cette analyse, et plus particulièrement
les conditions dans lesquelles elle est née et s'est imposée, ses carac
téristiques structurelles et la nature du régime qu'elle a donné au pays.
TRIBALISME ET MULTIPARTISME
En 1958, la conscience tribale est l'élément essentiel de la société
camerounaise. Elle peut se résumer à une opposition entre trois
complexes ethniques : celui du Nord (foulbé, féodal, musulman), celui
du Sud (bantou, clanique, chrétien) et celui de l'Ouest (semi-bantou,
1. Chiffre cité par M. Ahidjo au congrès, de Garoua (1969).
2. Mahiou (A.), L'avènement du parti unique en Afrique noire, Paris, Librairie
générale de droit et de jurisprudence, 1969, p. 12.
681 Jean-François Bayart
divisé en chefferies, essentiellement chrétien). Elle trouve une expres
sion politique au gré de l'émancipation progressive du pays. Les
antagonismes ethniques prennent une nouvelle dimension qui les
exacerbera.
Le Cameroun oriental, territoire sous tutelle de l'O.N.U., confié
à la France, accède à l'autonomie interne en 1956 (loi-cadre Defïerre),
autonomie confirmée et complétée par un nouveau statut au mois de
décembre 1958. M. Mbida forme le premier gouvernement le 10 mai
1957. Renversé, il est remplacé par M. Ahidjo, le 18 février 1958.
Le Cameroun accède à l'indépendance le 1er janvier 1960. En fait,
il avait une vie politique embryonnaire depuis 1946, la Constitution
française prévoyant l'envoi de représentants des territoires d'outre-mer
au Parlement de la métropole. Plusieurs partis animent cette vie
politique, et ce pluralisme, reconnu encore aujourd'hui par la Consti
tution, cesse dans la pratique dès 1962. Ce sont les rapports entre ce
multipartisme et le tribalisme que l'on va tenter de dégager. On
réservera une place à part à l'une de ces formations, l'U.P.C, en raison
du mode de lutte qu'elle a choisi.
En dépit de sa vocation nationale, celle-ci ne saura pas dépasser une
implantation régionale et ethnique. L'échec du mouvement syndical
(1945-1947) incite le secrétaire général de la C.G.T., Um Nyobé, à
fonder un parti politique, une section camerounaise du R.D.A. qui
prendra le nom d'Union des populations du Cameroun lors de son
premier congrès, à Dschang (1950). Comme dans d'autres territoires
africains francophones, la formation politique a une origine professionn
elle, donc non tribale. L'U.P.C. est un parti nationaliste qui demande
dès 1949 l'indépendance dans un délai fixé, et ne cesse par la suite
de durcir ses revendications. Parallèlement, elle refuse l'évolution du
R.D.A. auquel elle est affiliée. Son nationalisme très strict l'amène
naturellement à condamner les antagonismes ethniques. Mais son
origine syndicale s'avère être un handicap, dans la mesure où elle
tend à faire correspondre son implantation à celle du syndicalisme,
c'est-à-dire à la région du Sud-Ouest. Fait caractéristique, tous ses
dirigeants sont Bassa (Ruben Um Nyobé, Matip), Bamiléké (Ouandié
et Kingué), Bamoun (Moumié) ou Douala (le prince Dika Akwa).
L'évolution politique va accentuer cette régionalisation et cette triba-
lisation. Afin d'enrayer l'avance de l'U.P.C. lors des élections de 1952,
l'administration française suscite la naissance de forces concurrentes
appuyées sur des associations tribales ; les luttes politiques revêtent
bientôt un visage traditionnel et tournent finalement au désavantage
du mouvement nationaliste. Celui-ci se réorganise alors sur le modèle
682 L'Union nationale camerounaise
révolutionnaire et communiste et il en adopte les méthodes. Tout
cela implique un encadrement encore plus étroit des masses et leur
mobilisation permanente. Compte tenu du bas niveau culturel des
militants, les mots d'ordre font jouer les motivations traditionnelles.
Le processus s'accélère lorsque le gouverneur, M. Roland Pré, en arrive
à interdire l'U.P.C, qui passe alors dans la clandestinité.
Les élections du mois de décembre 1956, pour lesquelles Um Nyobé
se résigna à lancer le mot d'ordre de l'abstention, permettent de mesurer
assez précisément son implantation réelle. Dans la région du Wouri
(essentiellement la ville de Douala), seulement 22 % des électeurs
inscrits participent au scrutin, et le chiffre tombe à 12,5 % dans la
Sanaga-Maritime. Dans le Mungo, le taux de participation s'élève à
66 %, dans le Nyong-et-Sanaga à 70 %, dans le Ntem à 80 %. Or
les deux régions où l'influence de l'U.P.C. est prédominante ne

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