La communication médiatisée est-elle un « usage » ? - article ; n°1 ; vol.132, pg 5-27
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Description

Communication et langages - Année 2002 - Volume 132 - Numéro 1 - Pages 5-27
Le terme « usage » tend à s'imposer pour désigner ce que les gens font avec les appareils de communication, souvent appelés «technologies». Mais la désignation d'« usage» est elle-même l'objet d'usages multiples qui convoquent des régimes de discours différents, fonctionnels, symboliques ou sociaux. Le texte qui suit interroge le sens que doit prendre la notion d'usage pour être pertinente au regard du pouvoir spécifique des médias informatisés. Le point de départ de notre réflexion porte sur la nature de ces médias et les formes et contraintes qu'ils offrent pour la communication, en tant que dispositifs d'écriture. Sur la base de plusieurs recherches collectives, cet article envisage les conditions d'une analyse ethnosémiotique des pratiques.
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Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 18
Langue Français
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Extrait

Yves Jeanneret
Emmanuël Souchier
La communication médiatisée est-elle un « usage » ?
In: Communication et langages. N°132, 2ème trimestre 2002. pp. 5-27.
Résumé
Le terme « usage » tend à s'imposer pour désigner ce que les gens font avec les appareils de communication, souvent appelés
«technologies». Mais la désignation d'« usage» est elle-même l'objet d'usages multiples qui convoquent des régimes de discours
différents, fonctionnels, symboliques ou sociaux. Le texte qui suit interroge le sens que doit prendre la notion d'usage pour être
pertinente au regard du pouvoir spécifique des médias informatisés. Le point de départ de notre réflexion porte sur la nature de
ces médias et les formes et contraintes qu'ils offrent pour la communication, en tant que dispositifs d'écriture. Sur la base de
plusieurs recherches collectives, cet article envisage les conditions d'une analyse ethnosémiotique des pratiques.
Citer ce document / Cite this document :
Jeanneret Yves, Souchier Emmanuël. La communication médiatisée est-elle un « usage » ?. In: Communication et langages.
N°132, 2ème trimestre 2002. pp. 5-27.
doi : 10.3406/colan.2002.3135
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/colan_0336-1500_2002_num_132_1_3135La communication
g
g médiatisée est-elle
^i un « usage»?
Q_ un Yves Jeanneret et Emmanuel Souchier
Le terme « usage » tend à s'imposer pour désigner ce pertinente au regard du pouvoir spécifique
que les gens font avec les appareils de des médias informatisés. Le point de
communication, souvent appelés «techno- départ de notre réflexion porte sur la nature
logies». Mais la désignation d'« usage» est de ces médias et les formes et contraintes
elle-même l'objet d'usages multiples qui qu'ils offrent pour la communication, en tant
convoquent des régimes de discours diffé- que dispositifs d'écriture. Sur la base de
rents, fonctionnels, symboliques ou plusieurs recherches collectives, cet article
sociaux. Le texte qui suit interroge le sens envisage les conditions d'une analyse
que doit prendre la notion d'usage pour être ethnosémiotique des pratiques1.
L'analyse des pratiques de communication en termes
d'« usages » est aujourd'hui répandue dans un champ interdis
ciplinaire fort large, qui va de l'ergonomie à la sociologie. Dans
certains courants de ces disciplines, la notion de « pratique » a
même disparu, au bénéfice de l'« usage ». Dans la communauté
des chercheurs en sciences de la communication aussi, les
expressions «usages sociaux», «études d'usage», «observ
ation des usages» ont peu à peu acquis, en quinze ans, le
statut de termes de référence. Ce fait lexical massif consacre à
1 . La problématique de cet article évoquée pour partie dans le texte d'une conférence
prononcée lors du Colloque international sur les usages et services des télécommunicat
ions (ICUST, juin 2001, ENST-Paris) se fonde sur un ensemble de recherches menées
depuis plusieurs années, notamment dans le cadre de l'action de recherche « Écrits de
réseau et circulation des textes et savoirs » (CNRS, « Programme télécomm
unications», 1999-2000). L'un des acquis de ce programme a été de constituer une
équipe interdisciplinaire dont les chercheurs sont tous engagés autour du même souci
de comprendre et de cerner les interrelations entre le technique, le sémiotique et les
pratiques (les «usages») des «médias informatisés». Recherches qui se poursuivent
dans le cadre du programme « Écrire, lire & récrire. Objets et pratiques de l'écrit d'écran
et des écrits de réseaux » de la Bibliothèque publique d'information (Direction du livre et
de la lecture, ministère de la Culture et de la Communication, 2000-2002). 6 Épistémologie
la fois une forme de travail et un type d'objet. Car si ces recher
ches se fondent pour une part sur une conception large de
l'usage comme forme de la vie sociale, héritée de Michel de
Certeau, elles se sont concrétisées de façon privilégiée sous
l'espèce d'un contexte d'observation et d'une définition des
pratiques liées, l'un et l'autre, à un type d'objets, les «technol
ogies », au fil de leurs successives nouveautés.
Le terme « usage » est donc lié à toute une histoire, dont il porte
la richesse et les ambiguïtés. Il parle d'emblée à certaines
communautés de chercheurs, pour lesquelles il évoque moins
un concept précis qu'un style de recherche menée sur une
série de « terrains » concrets et situés : l'usage existe d'abord
sous l'espèce des «études d'usage», un lieu dans lequel a été
rendue possible un certain type d'attention à des pratiques non
légitimées, non inscrites, non rationalisées. Dans l'histoire des
recherches, la plasticité même de la notion d'usage a sans
doute été jusqu'ici une source de fécondité, de liberté et de
capacité à faire avec les contextes sociaux, institutionnels et
économiques sans se laisser absorber par eux2.
Notre propre relation à cette notion est différente, dans la
mesure où nos problématiques ne partent pas de la notion
d'usage, mais de celle de pratique de communication3. Elle
procède avant tout d'une réflexion sur la communication et ses
langages, sur le jeu entre les signes, les supports qui les véhi
culent et les formes que les médias donnent aux situations de
communication. De ce point de vue, ce que les études d'usage
ont élaboré paraît fondamental, dans la mesure où les dimen
sions signifiantes des médias, nouveaux ou non, ne se
comprennent qu'à partir des pratiques qui les mobilisent, dans
^ 2. L'analyse reflexive que propose Joëlle Le Marec de sa propre expérience de ce
\ champ de recherches montre bien le bénéfice heuristique d'une notion comme celle
<b d'usage, qui demande un effort pour reconsidérer en permanence ce dont il est ques-
co tion dans les interactions sociales (Le Marec J., Ce que le «terrain» fait aux concepts:
c vers une théorie des composites, mémoire pour l'habilitation à diriger les recherches,
^ Université Paris VII, 2002). Dans le travail ethnographique, la plasticité de la notion et sa
c capacité à être investie de projets et de représentations multiples est une ressource
■.§ essentielle. Il est important de souligner que le travail effectif des chercheurs s'est
2 souvent développé au sein de la thématique programmatique des usages, mais large-
§ ment en polémique interne avec elle.
| 3. Cf. Communication & Langages, n° 107, 1996, « L'Analyse des pratiques de commu-
o nication». communication médiatisée est-elle un « usage »? 7 La
leur diversité et en relation avec les contextes sociaux où elles
se déploient. Mais il n'est pas certain, d'un autre côté, que
définir ces pratiques comme des « usages » soit de nature à les
prendre en compte réellement dans ce qu'elles ont en propre.
C'est cette tension entre l'importance d'un champ de recherche
et le caractère problématique de la notion qui le fédère que
nous souhaiterions interroger ici. L'analyse des usages auto-
rise-t-elle ou exclut-elle la dimension symbolique des objets?
Symétriquement, l'analyse des pratiques de communication en
tant que telles peut-elle rencontrer, et à quelles conditions,
l'ethnographie des usages? Le point de vue ici développé ne
procède pas d'une évaluation des recherches menées dans le
champ des usages ; il veut contribuer à un examen critique de
la notion, d'un point de vue particulier dans lequel la prise en
compte de la dimension langagière et signifiante de la réalité
médiatique intervient comme condition première de définition
des pratiques. Plutôt que de considérer la notion d'usage
comme allant de soi, nous nous demandons quelle est sa réelle
vigueur aujourd'hui, de quelles questions elle reste porteuse. Il
nous semble en effet possible aujourd'hui de faire retour sur la
notion d'usage, non pour la défendre ou la critiquer, mais plutôt
pour interroger ce dont elle procède et élu

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