La France et les Grecs sous la Révolution et l Empire, étude d une représentation à l échelle de peuples - article ; n°1 ; vol.286, pg 515-537
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La France et les Grecs sous la Révolution et l'Empire, étude d'une représentation à l'échelle de peuples - article ; n°1 ; vol.286, pg 515-537

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Description

Annales historiques de la Révolution française - Année 1991 - Volume 286 - Numéro 1 - Pages 515-537
Dimitri Nicolaïdis : France and the Greeks under the Revolution and the Empire, a study in representation as developed by national communities.
This study analyses the collective discourse of Frenchmen — consular agents, traders, travellers — concerning the people of Greece during the Revolution and the Empire in an effort to outline several collective representations of national types within a particularly complex field of research. Within the ever-present frame of reference of mythical ancient history, the Greek is of course portrayed here as degenerate and in need of regeneration but the Greece could still offer a few places where it was possible to discover the unaltered images of the Greek as people imagined them. In a series of reflected images, observers judged the Greek people in relation to their oppressors, the Turcs and in relation to the oppressed, the Armenians without losing sight of their Russian and English rivals whose influence was beginning to compete with that of the French. With the passing of events such as the occupation of the Ionian islands, different strategies and attitudes developed which set up the premises of the fantasy image later imposed by the current of philhelleniism.
Dimitri Nicolaïdis : La France et les Grecs sous la Révolution et l'Empire, étude d'une représentation à l'échelle de peuples.
Cette étude s'attache à analyser le discours collectif des Français — agents consulaires, commerçants, voyageurs — sur les Grecs pendant la Révolution et l'Empire dans le but de dégager une ou des représentations collectives, dans un champ particulièrement complexe. Si par référence au mythe antique omniprésent, il est évident que le Grec dégénéré est à régénérer, la péninsule peut toutefois offrir des sites où s'est conservée l'image inaltérée du Grec tel qu'on le rêve. Dans un jeu d'images réfractées, les observateurs apprécient les Grecs par références aux oppresseurs — les Turcs — aux opprimés — Juifs ou Arméniens — sans perdre de vue les rivaux russes et anglais dont l'influence concurrence celle de la France. Au fil des événements, comme l'occupation des îles ioniennes, des stratégies comme des attitudes différentes se dessinent, laissant percevoir ce qui s'imposera, à travers une image fantasmée, dans le courant philhellène.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Dimitri Nicolaidis
La France et les Grecs sous la Révolution et l'Empire, étude
d'une représentation à l'échelle de peuples
In: Annales historiques de la Révolution française. N°286, 1991. pp. 515-537.
Citer ce document / Cite this document :
Nicolaidis Dimitri. La France et les Grecs sous la Révolution et l'Empire, étude d'une représentation à l'échelle de peuples. In:
Annales historiques de la Révolution française. N°286, 1991. pp. 515-537.
doi : 10.3406/ahrf.1991.1459
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahrf_0003-4436_1991_num_286_1_1459Abstract
Dimitri Nicolaïdis : France and the Greeks under the Revolution and the Empire, a study in
representation as developed by national communities.
This study analyses the collective discourse of Frenchmen — consular agents, traders, travellers —
concerning the people of Greece during the Revolution and the Empire in an effort to outline several
collective representations of national types within a particularly complex field of research. Within the
ever-present frame of reference of mythical ancient history, the Greek is of course portrayed here as
degenerate and in need of regeneration but the Greece could still offer a few places where it was
possible to discover the unaltered images of the Greek as people imagined them. In a series of reflected
images, observers judged the Greek people in relation to their oppressors, the Turcs and in relation to
the oppressed, the Armenians without losing sight of their Russian and English rivals whose influence
was beginning to compete with that of the French. With the passing of events such as the occupation of
the Ionian islands, different strategies and attitudes developed which set up the premises of the fantasy
image later imposed by the current of philhelleniism.
Résumé
Dimitri Nicolaïdis : La France et les Grecs sous la Révolution et l'Empire, étude d'une représentation à
l'échelle de peuples.
Cette étude s'attache à analyser le discours collectif des Français — agents consulaires, commerçants,
voyageurs — sur les Grecs pendant la Révolution et l'Empire dans le but de dégager une ou des
représentations collectives, dans un champ particulièrement complexe. Si par référence au mythe
antique omniprésent, il est évident que le Grec dégénéré est à régénérer, la péninsule peut toutefois
offrir des sites où s'est conservée l'image inaltérée du Grec tel qu'on le rêve. Dans un jeu d'images
réfractées, les observateurs apprécient les Grecs par références aux oppresseurs — les Turcs — aux
opprimés — Juifs ou Arméniens — sans perdre de vue les rivaux russes et anglais dont l'influence
concurrence celle de la France. Au fil des événements, comme l'occupation des îles ioniennes, des
stratégies comme des attitudes différentes se dessinent, laissant percevoir ce qui s'imposera, à travers
une image fantasmée, dans le courant philhellène.LA FRANCE ET LES GRECS
SOUS LA RÉVOLUTION ET L'EMPIRE
Étude d'une représentation
à l'échelle de peuples
« Lorsque j'ai entendu pour la première fois à l'audience du Direc
toire exécutif prononcer que Rome était libre, mon cœur tressaillit, et les
larmes coulèrent de mes yeux. Comment, me disais-je en moi-même, Rome
est libre et Athènes est esclave ! Athènes le berceau de la Liberté ; le temple
où cette Divinité fut pour la première fois adorée par les hommes ; le domicile
des Muses ; la Patrie de tant de Héros, enfin, languit sous le joug du Despo
tisme le plus avilissant; et personne ne pense plus à l'en délivrer! Ce
sentiment affreux fit tant d'impression sur mon âme que j'en ai senti les
plus tristes effets... » (1). Ainsi s'exprime en 1798 le citoyen Félix Beaujour,
consul à Salonique, dans un mémoire au lyrisme caractéristique, où abondent
métaphores et figures symboliques. Cette succession d'abstractions quand
il s'agit d'épancher son cœur, est tout à fait révélatrice des rapports qui
unissent deux Nations dont les destins semblent enfin se croiser en cette
année de tous les dangers : la française et la grecque. D'un côté nous avons
le représentant d'une « France en Révolution », conscient de la force
conquérante de sa Patrie et obsédé par la valeur phare des temps nouveaux,
la Liberté, celle qui plonge ses racines dans le siècle des Lumières, et au-
delà dans l'Antiquité. De l'autre nous avons la Grèce telle qu'il se la repré
sente; mais celle-ci, embellie par ces images flatteuses, perd en réalités
tangibles ce qu'elle gagne en grandeur abstraite ; ses habitants disparaissent
totalement derrière ces deux éléments dont l'un se conjugue au passé, la
Gloire, et l'autre au présent, la Servitude. Alors même que pour la première
(1) « Mémoire sur les affaires de la Grèce » du citoyen Félix Beaujour, 14 vendémiaire an VII/5
octobre 1798 (Archives du Quai d'Orsay).
Annales Historiques de la Révolution Française — 1991 — N° 4 516 DIMITRI NICOLAIDIS
fois la France se trouve en guerre avec l'Empire ottoman oppresseur et
tyrannique, la représentation de la Grèce se trouve réduite à une dialec
tique entre le modèle omniprésent et écrasant de l'Age d'Or des Solon
et Lycurgue, et la situation présente d'esclavage, propice à la compassion.
Ces réflexions peuvent paraître dérisoires au regard de la réalité des
faits, de l'Histoire politique qui se joue ailleurs sur les champs de bataille
ou dans les antichambres de la diplomatie. Pourtant, aujourd'hui, l'on
prend de plus en plus conscience de rinintelligibilité de l'Histoire lorsque
les mentalités de ses acteurs ne sont pas prises en considération. Et comment
pourrait-on vraiment comprendre ce grand rendez-vous manqué qu'est
l'histoire des relations franco-grecques pendant la Révolution, sans s'inté
resser à la façon dont les Français se représentaient les Grecs ? Reste que
l'enjeu essentiel de cette étude est qu'à travers l'image des Grecs et son
évolution, c'est un certain aspect de l'identité de la France que nous décou
vrons. Ainsi, indirectement, tous les Grecs que nous rencontrons au travers
de la correspondance consulaire, des mémoires ou des récits de voyage,
contribuent à apporter une réponse à la question : « Qu'est-ce qu'être
Français sous la Révolution? ». C'est grâce à la confrontation avec l'autre,
le différent, que se dessine en creux le portrait du locuteur.
Cette aventure dans le champ encore très ouvert de l'Histoire des mental
ités donne donc une importance première à la dimension méthodologique
de cette analyse. Il ne s'agit pas seulement d'une contribution à l'histori
ographie révolutionnaire, mais aussi à l'épistémologie. Car pour arriver à
cerner, à donner une cohérence au discours collectif des Français sur les
Grecs, il a fallu décomposer les mécanismes de la représentation, séparer
les différents niveaux, les différents passages qui permettent de construire
intellectuellement cette image. Cette opération consiste à mesurer des déca
lages : d'abord celui qui sépare la réalité perçue de l'ensemble des repré
sentations préexistantes, cet univers mental qui conditionne le point de
vue, et où le puissant réfèrent antique est la clé de lecture incontournable ;
ensuite il y a le décalage entre l'autre et soi-même, qui, nous le verrons,
est la seule façon de rendre intelligible la représentation; enfin il y a le
décalage entre l'action et le discours, et les interférences qu'il ne peut
manquer d'y avoir entre les deux. Et c'est ce dernier décalage qui donne
peut-être sa vraie dimension à notre étude dans la mesure où elle nous
engage dans une temporalité inhabituelle pour l'historien des mentalités :
la courte durée, l'événement. Il y a en effet un certain paradoxe à vouloir
étudier sur le court terme un phénomène dont les racines sont si profon
dément enfouies dans le tissu complexe du psychique collectif. Une repré
sentation n'évolue en effet que lentement, et il peut sembler arbitraire
d'analyser ses manifestations en dehors de la longue durée, a fortiori quand
la période choisie correspond à un moment

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