Le plan Schuman de Paul Reuter. Entre communauté nationale et fédération européenne - article ; n°5 ; vol.48, pg 645-663
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Revue française de science politique - Année 1998 - Volume 48 - Numéro 5 - Pages 645-663
The schuman plan of paul reuter. between national community and european federation Along with Jean Monnet, Paul Reuter was one of the main inspirers of the declaration of 9 May 1950, and an active negotiator of the treaty which was to create the first European Community. The author traces the ideological origins of P. Renter's discourse, both bureaucratic and aca­demic, especially the technical/political opposition ; he relates its elements to P. Reuter1 s biography and to a series of institutional positions which he connects with his stands. The ana­lysis makes it possible to describe the forms of conversion and transfiguration of the Third Way ideology as well as the spirit of the 1930s, of which the European Community is an expression, although that is never recognized. * Ce texte est une version légèrement remaniée d'une contribution présentée aux Journées d'études de Strasbourg, « La question technocratique. De l'invention d'une figure aux transfor­mations de l'action publique », Institut d'études politiques de Strasbourg, 13 et 14 novembre 1997. Je tiens ici à en remercier les organisateurs, et particulièrement Delphine Dulong qui a eu la gentillesse de me faire part de ses très constructives observations. Bernard Lacroix a su, quant à lui, m'accorder sa lecture attentive et son actif soutien.
Paul Reuter fut, avec Jean Monnet, un des principaux inspirateurs de la déclaration du 9 mai 1950, et l'un des actifs négociateurs du traité qui donnera naissance à la première Communauté européenne. L'auteur restitue les origines idéologiques du discours à la fois bureaucratique et universitaire (et notamment l'opposition entre « technique » et « politique » de Reuter), et rap­porte les fragments de ce discours à la trajectoire biographique de Paul Reuter et à une série de positions institutionnelles, qu 'il relie à ses prises de position. Cela permet de donner un aperçu des formes de conversion et de transfiguration de l'idéologie de la troisième voie mais aussi de l'humeur des années trente, dont la « Communauté » « européenne » est une des expressions, jamais reconnue comme telle.
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 63
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Antonin Cohen
Le plan Schuman de Paul Reuter. Entre communauté nationale
et fédération européenne
In: Revue française de science politique, 48e année, n°5, 1998. pp. 645-663.
Citer ce document / Cite this document :
Cohen Antonin. Le plan Schuman de Paul Reuter. Entre communauté nationale et fédération européenne. In: Revue française
de science politique, 48e année, n°5, 1998. pp. 645-663.
doi : 10.3406/rfsp.1998.395306
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1998_num_48_5_395306Résumé
Paul Reuter fut, avec Jean Monnet, un des principaux inspirateurs de la déclaration du 9 mai 1950, et
l'un des actifs négociateurs du traité qui donnera naissance à la première Communauté européenne.
L'auteur restitue les origines idéologiques du discours à la fois bureaucratique et universitaire (et
notamment l'opposition entre « technique » et « politique » de Reuter), et rap-porte les fragments de ce
discours à la trajectoire biographique de Paul Reuter et à une série de positions institutionnelles, qu 'il
relie à ses prises de position. Cela permet de donner un aperçu des formes de conversion et de
transfiguration de l'idéologie de la troisième voie mais aussi de l'humeur des années trente, dont la «
Communauté » « européenne » est une des expressions, jamais reconnue comme telle.
Abstract
The schuman plan of paul reuter. between national community and european federation
Along with Jean Monnet, Paul Reuter was one of the main inspirers of the declaration of 9 May 1950,
and an active negotiator of the treaty which was to create the first European Community. The author
traces the ideological origins of P. Renter's discourse, both bureaucratic and aca-demic, especially the
"technical"/"political" opposition ; he relates its elements to P. Reuter1 s biography and to a series of
institutional positions which he connects with his stands. The ana-lysis makes it possible to describe the
forms of conversion and transfiguration of the Third Way ideology as well as the "spirit of the 1930s", of
which the "European" "Community" is an expression, although that is never recognized.
* Ce texte est une version légèrement remaniée d'une contribution présentée aux Journées d'études de
Strasbourg, « La question technocratique. De l'invention d'une figure aux transfor-mations de l'action
publique », Institut d'études politiques de Strasbourg, 13 et 14 novembre 1997. Je tiens ici à en
remercier les organisateurs, et particulièrement Delphine Dulong qui a eu la gentillesse de me faire part
de ses très constructives observations. Bernard Lacroix a su, quant à lui, m'accorder sa lecture attentive
et son actif soutien.LE PLAN SCHUMAN DE PAUL REUTER
ENTRE COMMUNAUTÉ NATIONALE
ET FÉDÉRATION EUROPÉENNE
ANTONIN COHEN
En 1951, dans le troisième numéro de la toute nouvelle Revue française de
science politique, le professeur Paul Reuter se propose de faire l'exégèse du
traité signé le 18 avril de la même année et instituant entre six pays européens
une Communauté européenne du charbon et de l'acier. « Une certaine conception
politique d'ensemble a sans doute inspiré les rédacteurs du Traité », affirme Paul
Reuter, mais « quelle est-elle ? » ' :
« Le caractère indépendant et, si l'on ose l'écrire "apolitique" de la Haute Autor
ité a été très remarqué. Certains ont vu une menace directe contre l'esprit
démocratique ; d'autres ont prononcé l'accusation redoutable de technocratie. En
fait, depuis la proposition du 9 mai 1950 ces craintes ont perdu une partie de leur
fondement : un certain nombre de décisions de la Haute Autorité ne peuvent être
prises qu'avec avis conforme du Conseil des ministres, la Haute Autorité a été
rendue politiquement responsable devant une Assemblée, et elle est soumise au
contrôle d'une Cour de justice » 2.
Il est vrai que, comme commentateur, Paul Reuter n'est pas le plus mal placé pour
juger de l'évolution du « plan Schuman » entre la déclaration du 9 mai 1950, dont il
est, avec Jean Monnet, Etienne Hirsch et Pierre Uri, l'un des principaux
« inspirateurs », et le texte final d'un traité qu'il aura, en tant qu'« expert » de la délé
gation française aux négociations de Paris, membre du groupe de travail chargé des
« questions institutionnelles »3, largement contribué à «rédiger». D'autant que, si
l'on en croit Jean Monnet, c'est lui qui « fut à l'origine de la Haute Autorité, du mot
comme de la chose » 4.
1. Paul Reuter, « La conception du pouvoir politique dans le plan Schuman », Revue française
de science politique, 1 (3), juillet-septembre 1951, p. 256-276. Ici, p. 256. Cf. aussi : « Quelques
aspects institutionnels du plan Schuman » (signé P. R.), Revue du droit public et de la science poli
tique en France et à l'étranger, 1951, p. 105-124 ; et, plus tard : La Communauté européenne du
charbon et de l'acier, Paris, LGDJ, 1953 (avec une préface de Robert Schuman).
2. Paul Reuter, « La conception du pouvoir politique dans le plan Schuman », art. cité,
p. 270.
3. Archives nationales, 8 1 AJ 1 3 1 , « Liste des délégations et répartition au sein des groupes ».
Les discussions relatives au plan Schuman s'ouvrent le 20 juin 1950 à Paris. Le groupe de travail
sur les questions institutionnelles est composé de seize membres, dont Paul Reuter et André Gros,
qui ont la particularité commune (en dehors du fait d'avoir publié ensemble un recueil de docu
ments internationaux : Traités et documents diplomatiques, Paris, PUF, 1960), d'avoir été complè
tement délaissés par les historiens de la « construction européenne » dont l'attention s'est presque
entièrement focalisée sur la personne de Jean Monnet.
4. Jean Monnet, Mémoires, Paris, Fayard, 1976, p. 352. Pierre Gerbet est à peu près le seul
historien à accorder une quelconque attention à Paul Reuter dans la « genèse » du plan
Schuman ; cf. Pierre Gerbet, « La genèse du plan Schuman. Des origines à la déclaration du
9 mai 1950 », Revue française de science politique, 6 (3), juillet-septembre 1956, p. 525-553.
Cf. aussi (bien que le rôle de Paul Reuter y ait été considérablement effacé) Pierre Gerbet, La
construction de l'Europe, Paris, Imprimerie nationale, 1994 (lèreéd. 1983).
645
Revue française de science politique, vol. 48, n° 5, octobre 1998, p. 645-663.
© 1998 Presses de la Fondation nationale des sciences politiques. LA HAUTE AUTORITÉ À LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE : « TECHNIQUE » ET DE
« POLITIQUE » DANS LE PLAN SCHUMAN
Né à Metz en 191 1, Paul Reuter, dont le père est avocat, est lui-même docteur en
droit '. D'abord chargé de cours à l'université de Nancy, puis professeur à la faculté
de droit de Poitiers (il est reçu premier au concours d'agrégation de 1938), Paul
Reuter devient, après guerre, directeur adjoint du cabinet de Pierre-Henri Teitgen
successivement ministre de l'Information en 1944 et ministre de la Justice en 1945
(il est aussi conseiller technique du cabinet Teitgen lorsque celui-ci deviendra
ministre des Forces armées en 1947), avant d'être nommé «jurisconsulte adjoint »
au ministère des Affaires étrangères en 1948 2. Dans ses Mémoires, Jean Monnet
raconte comment le « hasard » fit venir jusqu'à son bureau, rue de Martignac, ce
« jeune professeur de droit » que le Commissariat au plan consultait sur la
« législation antitrust »3. De cette rencontre, le 12 avril 1950, Paul Reuter donnera
plus tard une version circonstanciée4 : « Rabier, proche collaborateur de Monnet ...
m'explique que Jean Monnet, que je ne connais qu'un peu, s'ennuie et que je devrais
lui dire bonjour. Malgré ma résistance inspirée par un sentiment de respectueuse
déférence, il me pousse dans le bureau de Jean Monnet. Je présente à ce dernier mes
respects et lui demande comment il va. Il me répond de sa voix directe : "Mal mon
ami", et sur une nouvelle question de ma part il me déclare sans transition : "Ils la
lanceront, mon ami, la bombe atomique... et alors..." ». C'est à la suite de cet échange
que Jean Monnet soumet à Paul Reuter l'idée d'un &#

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