Le principe de la liberté de candidature dans les Constitutions africaines : étude comparée des conditions d’éligibilité
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Le principe de la liberté de candidature dans les Constitutions africaines : étude FRPSDUpH GHV FRQGLWLRQV G¶pOLJLELOLWp ESSOH EUGUE RICHARD, Doctorant en Droit Public et Science Politique, Université Félix Houphouët-Boigny, Abidjan-Cocody. essoheugue@yahoo.fr 3ODQ GH O¶DUWLFOH: Introduction I- /H GURLW FRPPXQ GH OD OLEHUWp G¶rWUH FDQGLGDW: des restrictions admises A. /D QDWLRQDOLWp HW O¶kJH GX FDQGLGDW GHV FULWqUHV GH EDVH 1/ De la nationalité initiale et exclusive à une nationalité simple /¶DEDLVVHPHQW GH O¶kJH GX FDQGLGDW XQ VLJQH G¶RXYHUWXUH B. La résidence et la moralité du candidat, des conditions classiques complémentaires /H GpIDXW GH SUpVHQFH HIIHFWLYH XQH PDQ°XYUH G¶H[Flusion 2/ La moralité et la probité, des conditions au contenu imprécis a) La moralité et la probité du candidat, des exigences légitimes b) DesFDV G¶DEXV GX IDLW GH O¶LPSUpFLVLRQ II- /H GURLW H[RUELWDQW GH OD OLEHUWp G¶rWUH FDQGLGDW: des conditions défavorables àO¶RXYHUWXUH SROLWLTXH A. /¶LQRSSRUWXQLWp GH FHUWDLQHV FRQGLWLRQV /¶H[RUELWDQFH GX FDXWLRQQHPHQW HW OH QLYHDX G¶LQVWUXFWLRQ GX FDQGLGDW a) Le caractère exorbitant du cautionnement b) /H GHJUp G¶LQVWUXFWLRQ GX FDQGLGDW /¶LQYHVWLWXUH SDUWLVDQH RX OH SDUUDLQDJHpopulaire, une condition inconvenante a) /¶LQYHVWLWXUH XQH H[LJHQFH LQFRPSDWLEOH DYHF OH QRXYHDX FRQWH[WH SROLWLTXH b) La nécessaire érection des candidatures indépendantes, en principe B.

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Publié le 13 juillet 2016
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Le principe de la liberté de candidature dans les Constitutions africaines : étude comparée des conditions d’éligibilitéESSOH EUGUE RICHARD, Doctorant en Droit Public et Science Politique, Université Félix Houphouët-Boigny, Abidjan-Cocody. essoheugue@yahoo.fr Plan de l’article: Introduction I-Le droit commun de la liberté d’être candidat: des restrictions admises A.La nationalité et l’âge du candidat, des critères de base1/ De la nationalité initiale et exclusive à une nationalité simple 2/ L’abaissement de l’âge du candidat, un signe d’ouvertureB.La résidence et la moralité du candidat, des conditions classiques complémentaires 1/ Le défaut de présence effective, une manœuvre d’exclusion 2/ La moralité et la probité, des conditions au contenu imprécis a)La moralité et la probité du candidat, des exigences légitimes b)Descas d’abusdu fait de l’imprécisionII-Le droit exorbitant de la liberté d’être candidat: des conditions défavorables àl’ouverture politiqueA.L’inopportunité de certaines conditions1/ L’exorbitance du cautionnement et le niveau d’instruction du candidata)Le caractère exorbitant du cautionnement b)Le degré d’instruction du candidat2/ L’investiture partisane ou le parrainagepopulaire, une condition inconvenante a)L’investiture, une exigence incompatible avec le nouveau contexte politiqueb)La nécessaire érection des candidatures indépendantes, en principe B.Des conditions d’éligibilité excessives1/ La confession religieuse du candidat 2/ L’origine nationale du conjoint et la participation à la révolutiona)L’exigence de l’origine nationale du conjoint du candidatb)La justification de la participation à la Révolution de novembre 1954
Conclusion
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De façon générale, les conditions d’éligibilité à l’élection présidentielle mais aussi aux
élections législatives et locales sont similaires. On retrouve des prescriptions relatives à la nationalité et à l’âge du candidat; à la résidence continue sur le territoire national et à la moralité du candidat ; àl’investiture par un parti politique et au paiement d’une caution. Dans le traitement de ces questions, qui sont parfois sources de graves conflits et qui traduisent les difficultés de construction démocratique des nations, le juge électoral n’a pas toujours donné l’impression d’abonder dans le sens de l’égalité des candidats. Dans cet exercice délicat,il est 1 apparu comme le porte-voix d’une prétendue injusticeélectorale, manquant ainsi de participer 2 à l’édification de l’Etat de droit.
En revanche, au-delà de l’office épineux du juge, dans certains pays, les conditions qui sont soumises à l’éligibilité sont exclusives, du fait de leur caractèresui generis. Atypiques, ces 3 restrictions tiennent à des réalités propres à ces Etats .
Il ressort en effet, de la lecture combinée et comparative des dispositions constitutionnelles et législatives deux types de conditions. Le premier type rassemble les 4 conditions d’éligibilitécommunes aux Etats , et forment de ce fait,ce que l’on peut qualifier de droit commun de la liberté d’être candidat (I). Le second type des conditions, du fait de leurs particularités contextuelles, en ce qu’elles ont un droit de cité limité à certains pays, peuvent
être valablement appréhendées comme le droit exorbitant de la liberté de candidature (II).
1 La place et le rôle du juge constitutionnel dans la relation entre élection, pouvoir et démocratie sont au cœur du débat politique. Son impartialité est indexée surtout dans le contentieux relatif au scrutin présidentiel. Voir, CONAC (G.), « Démocratie et élection »,Démocratie et élection dans l’espace francophone, op. cit. p. 11 et s. ; DIAKHATE (M.),L’émergence du droit électoral dans les Etats de l’Afrique subsaharienne francophone, le cas du Bénin, du Mali, du Sénégal, Thèse, droit public, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, 2012.
2 HOLO (T.), « Emergence de la justice constitutionnelle »,in Pouvoirs, n° 129, op. cit. p. 101-102.
3 Dans certains pays de l’Afrique, les candidats aux élections présidentielles par exemple, sont appelés à satisfaire, en plus des conditions générales et communes, à des conditions qui tiennent souvent de la culture religieuse et/ou nationaliste. La légitimité et le caractère démocratique de ces critères sont à plaindre. C’est le cas en Algérie, en Egypte et en Tunisie.
4 Article 38 de la Constitution du Burkina Faso (juin 1991) ; article 72 de la Constitution de la RDC (février 2006) ; ème article 50 de la Constitution malgache (septembre 2010) ; article 47 de la Constitution du Niger (7 République) ; etc.
2
I-Le droit commun de la liberté d’être candidat: des restrictions admisesPar droit commun de la liberté d’être candidat, on entend regrouper ici les critères 5 classiques d’éligibilité, partagés par la plupart desEtats démocratiques modernes . Les détails de ces critères diffèrent selon les pays et aussi selon la nature du poste à briguer. Très souvent, 6 le législateur est plus exigeant vis-à-vis des candidats aux scrutins présidentiels .
Pour l’essentiel, lescritères se résument à la nationalité, à l’âge minimum, à la résidence, à la jouissance des droits civils et politiques, à la moralité et à la probité du candidat.
Toutefois pour les besoins de l’étude, nous choisissons de les regrouper, d’une part en critères
de base (A), comprenantla nationalité et l’âge minimum du candidatet d’autre part, en critères classiques complémentaires (B), notamment, la durée de résidence et la moralité du candidat.
A.La nationalité et l’âge du candidat, des critères de baseLa nationalité et l’âge minimum apparaissent comme les premières conditions auxquelles doit satisfaire tout candidat aux scrutins. La législation ne fait pas de distinction 7 entre le citoyen et la citoyenne . Dans certains pays, comme le Niger, les conditions tenant à la 8 nationalité et à l’âge ne sont pas les mêmes pour toutes les élections.Il ne s’agit pas pour nous
de faire une distinction entre les conditions d’éligibilité selon les types d’élections mais, plutôt
5 Fondamentalement, les candidatures sont régies par le principe d’égalité qui veut que toutes les candidatures individuelles ou collectives soient soumises au même traitement.Ce principe s’applique aux électeurs mais aussi aux candidats à l’élection, de même qu’aux partisqui concourent à l’expression du suffrage. Cela ressort explicitement de la décision du 18 novembre 1982 selon laquelle le principe d’égalité «s’oppose à toute division par catégories des électeurs ou des éligibles»(82-146 DC, Rec. p. 66 ;A.J.D.A.,1983, p. 80, note BOULOUIS (J.).Il est donc indispensable que les conditions d’éligibilité ne soient pas érigées en obstacles insurmontables. Voir entre autres MELIN-SOUCRAMANIEN (F.), « Devenir candidat : quels filtres »,Pouvoirs, n° 138, 2011, La candidature à la présidentielle, p. 19-31. V. aussi dans le même numéro : FRANCOIS (B.), « Histoire des candidatures à l’élection présidentielle », p. 5-17 ; JAN (P.), « Typologie des candidats », p. 57-73.
6 Aux termes de l’article 50 de la loi fondamentale malgache «Tout candidat aux fonctions de Président de la République doit être de nationalité malagasy, jouir de ses droits civils et politiques, avoir au moins trente cinq ans à la date de clôture du dépôt des candidatures, résider sur le territoire de la République de Madagascar depuis au moins six mois avant le jour de la date limite fixée pour le dépôt des candidatures et avoir satisfait à l’enquête de moralité».
7 «Tous les Gabonais des deux sexes, âgés de quarante (40) ans au moins, sont éligibles à la présidence de la République; de même les candidats au parlement, gabonais d’origine, doivent être âgés de quarante (40) ans au moins». Article 10 et 35 de la Loi N° 3/91 du 26 mars 1991 portant Constitution de la République du Gabon.
8 Article 84, de la Constitution précitée.
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de relever la variation des exigences tenant aussi bien au degré de la nationalité qu’à la différence de l’âge minimum requis.
A l’analyse, on constate un assouplissementqui tient compte de l’esprit d’ouverture. L’on esteffectivementpassé de l’exigence d’une nationalité initiale et exclusive à une nationalité simple (1). De même, la tendance est aujourd’hui à l’abaissement de l’âge du candidat (2).
1/ De la nationalité initiale et exclusive à une nationalité simple L’exigence de la citoyenneté est au fondement de la jouissance et de l’exercice des 9 droits civils et politiques. On comprend pourquoi l’électeur est d’office éligible sous réserve 10 des conditions propres fixées pour chacune des élections. L’extension de nos jours, du droit de suffrage à des étrangers, perturbe sérieusement la relation, citoyenneté/nationalité et droit de 11 vote. Il n’empêche, le candidat aux élections nationales doit rapporter la preuve du lien juridique qui l’attache à l’Etat, c'est-à-dire sa nationalité. En cette matière, les Etats peuvent valablement exiger que ce lien entre lui et le candidat à la gestion des affaires publiques, soit intime ou moins strict.
Dans le sensde l’intimité stricte, la législation électorale ivoirienne nous donne un exemple éloquent. Comme si la nationalité d’origine du candidat et des parents de celui-ci ne suffisait pas, le candidat à l’élection présidentielle doit rapporter la preuve qu’il ne s’est jamais 12 prévalu à aucun moment de sa vie, d’une autre nationalité. Le degré du lien national exigé au candidat, a fait dire àcertains que, cette disposition avait pour objet d’écarter l’ancien premier 13 ministre de Houphouët-Boigny, Alassane Ouattara . Pourd’autrespar contre, taxés de
9 Selon la Constitution américaine : «Nul ne pourra être élu Président s’il n’est citoyen de naissance ou s’il n’est déjà citoyen des Etats-Unis au moment de l’adoption de la présente Constitution…» (Article 2, sect. 1).
10 er Article 17 de loi n° 2000-514 du 1août 200, portant Code électoral de la République de Côte d’Ivoire.
11  DUCHESNE (S.), « Citoyenneté, nationalité et droit de vote : une association perturbée »,Pouvoirs, n° 120, 2006, p.71-81.
12 Cette disposition était déjà contenue dans le code électoral de 1994 (articles 49 et 50) et sera plus tard reprise par le nouveau code de 2000 voté par référendum. La particularité réside dans la constitutionnalisation des conditions d’éligibilité. C’est une tendance dans l’Afrique post parti unique et pro-démocratique, consécutivement à la période des transitions.
13 OURAGA (O.), op. cit.p. 60, note 188.
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14 nationalistes ,l’exigence de la nationalité exclusiveest fondée. Pour eux, le candidat à la magistrature suprême doit donner toutes les garanties de son attachement affectif et séculaire
pour défendre au mieux les intérêts des ivoiriens et de la Côte d’Ivoire.Cela servirait à verrouiller l’accession au poste de président de la République à tout arriviste.
A l’analyse, on se rend bien compte que dans le cas de la Côte d’Ivoire, l’exigence
d’une nationalité initiale et exclusive coïncide avec le multipartisme qui entraîneune pluralité de candidatures.Les conditions d’éligibilité sous le parti unique étaient moins rigoureuses. Le mérite revient, effectivement au code électoral de 1994, adopté sous la présidence de Konan Bédié,d’édicterde nouvelles conditions d’éligibilité restrictives. Ces conditions seront par 15 ensuite, constitutionnalisées par la révision constitutionnelle du 02 juillet 1998 . Vu sous cet angle, on peut croire que le durcissement des conditions vise à décourager la pluralité des
candidatures.
Ce degré de restriction se lit aussi dans la législation de certains pays. Par exemple, au 16 17 18 Sénégal , en Djibouti , au Rwanda , le candidat à la Présidence de la République doit être d’une seulenationalitéà l’exclusionde toute autre. La nationalité initiale et exclusive aurait pour objectif d’exclure les situations de double nationalité. Mieux au Gabon, toute personne ayant acquis la nationalité gabonaise ne peut se comporter comme candidat à la Présidence de la République. Seule sa descendance ayant demeuré sans discontinuité au Gabon le peut, à partir 19 seulement de la quatrième génération . Au Togo, cette exigence empêche Kofi Yamgnane,
14  SINDJOUN (L.),Les grandes décisions…, op. cit. p. 13.WODIE (F. W.),Institutions politiques et droit constitutionnel en Côted’Ivoire, PUCI, 1996, p. 308.
15 Cette révision se manifeste par le renforcement du statut et des pouvoirs du président de la République, d’abord à travers les conditions nouvelles d’élection, le rallongement de son mandat qui passe de cinq (5) à sept (7) ans. Voir MELEDJE DJEDJRO (F.), «La révision constitutionnelle du 02 juillet 1998 en Côte d’Ivoire; un réveil du présidentialisme autoritaire ? ».InPubbblico Comparato Ed. Europeo 1999 I. G. Giappichelle Editore, Diritto Turin, p. 121 et p. 288-289. Dans le même sens, NIAMKEY-KOFFI (R.),Réformes institutionnelles de Côte d’ivoire –la question de l’éligibilité,Presses des Universités de Côte d’Ivoire, Abidjan, 1999.
16 «Le candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise», article 28 de la Constitution du 22 janvier 2001.
17 «Le candidat aux fonctions de président de la République doit être de nationalité djiboutienne à l’exclusion de ème toute autre», article 24, Constitution du 15 septembre 1992, révisée par la loi constitutionnelle N° 92/AN 10/6 du 19 avril 2010.
18 «Le candidat à la Présidence de la République doit être de nationalité rwandaise d’origine, ne pas détenir une autre nationalité, avoir au moins un de ses parents de nationalité rwandaise d'origine», article 99 de la Constitution du Rwanda du 4 juin 2003.
19 Article 10, Constitution gabonaise du 26 mars 1991.
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20 ancien ministre français possédant la double nationalité de se présenter malgré son souhait . Le juge constitutionnel béninoisa conclu autrement relativement à l’amendement Tévoédjrè-Ladikpo qui viserait Nicéphore Soglo, Président en exercice, également de nationalité française. 21 Il a censurél’obligation faite à chaque candidat de fournir la preuve de sa renonciation à toute nationalité autre que celle du Bénin.
22 Le Burkina Faso appliquera longtemps la nationalité initiale et exclusive avant de l’assouplir sous la pression de l’opposition politique.Désormais, seule la nationalité de naissance du candidat compte. La révision constitutionnelle de juin 2012, dans un esprit 23 d’assouplissement, a supprimé la. Leréférence à la nationalité des parents du candidat relâchement de la condition tenant à la nationalité est également observable dans d’autres pays 24 comme la Guinée . De même en Madagascar,tout malgache sans exigence d’aucune sorte tenant à l’origine et à l’exclusivité de la nationalité, peut être candidat aux fonctions de président 25 de la République . Dans ce cas, même le naturalisé peut prétendre aux fonctions de président de la République après avoir satisfait au délai de stage, comme c’est le cas dans plusieurs 26 législations sur la nationalité .
Le cas du Madagascar reste tout de même exceptionnel,c’est le signe d’une véritable ouverture politique. Vu que la question de la nationalité sert de moyen aux mains des pouvoirs en place pour empêcher légalement la candidature d’hommes politiques d’une certaine envergure. Mais contrairement à la nationalité, la condition qui tient à l’âge peut faire
20 «Nul ne peut être candidat aux fonctions de Président de la République s'il : - n'est exclusivement de nationalité togolaise de naissance», article 62, Constitution du 27 septembre 1992.
21 Cour Constitutionnelle du Bénin, Décision DCC 96-002 du 5 janvier 1996. La censure de ce texte est d’autant plus remarquable qu’à l’initiative de l’opposition radicale l'Assemblée Nationale avait adoptéclause, le 22 la septembre 1995, par 72 voix pour, 1 contre et 6 abstentions.
22 «Le candidat aux fonctions de Président du Faso doit être burkinabè de naissance et né de parents eux-mêmes burkinabè», article 38 de la constitution de juin 1991.
23 er Article 1 Loi N°033-2012/AN du 11 juin 2012.
24 Article 29, Constitution de la Guinée.
25 Article 50, Constitution de septembre 2010.
26 Article 43.1, loi n° 61-415 du 14 décembre 1961 portant Code de la nationalité ivoirienne, modifiée par la loi B° 72 -852 du 21 décembre 1972. En Sierra Leone, 25 années de séjour continu est nécessaire avant que le naturalisé prétende aux postes électives.En Guinée, les étrangers naturalisés ne sont autorisés à se présenter à une élection que 10 ans après leur naturalisation étant entendu que les personnes concernées ont habité depuis lors dans le pays.
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difficilement l’objet de manipulations. Sonabaissement participe de l’esprit d’ouverture politique.
2/L’abaissement de l’âge du candidat, un signe d’ouvertureEn Afrique, l’on est habitué à voir mourir les chefs d’Etats au pouvoir, souvent sous 27 le poids de l’âge. Dans le contexte du parti unique,lesdes coups d’Etat militaireset le décès du président de laRépublique, père de l’indépendance et de la nation, étaientl’undes facteurs 28 d’alternance politique. Le processus de démocratisation enclenché au début des années 1990, 29 initie l’institutionnalisation d’un âge minimum et maximum pour présider à la destinée de l’Etat. Absent du dispositif électoral duBurkina Faso, c’estrécemment à la faveur de la révision 30 constitutionnelle de juin 2012 qu’un âge plafonda été introduit. C’est donc pour forcer l’alternance et mettre fin au continuisme que les rédacteursdes nouvelles constitutions des transitions démocratiques, instituent surtout, la condition d’âge maximum.
En revanche, les chefs d’Etats sortants obtiennent que l’âge minimumsoit relevé. L’exigence d’une certaine majorité électorale avait cours sous le régime du parti unique, et a
consisté à laisser sur le côté la franche de la population la plus importante. En fait, sous le régime du parti unique et même bien longtemps après, l’exclusion de la jeunesse a été rendue 31 possible par le relèvement de la majorité électorale à vingt-et-un (21) ans ou plus . Par exemple en Côte d’ivoire, le vote à dix-huit (18) ansest effectif qu’à la faveur de la Constitution de la
deuxième République d’août2000.
27 A propos des incursions de l’armée dans le jeu politique africain, voir BANGOURA (D.),Les armées africaines 1960-1990,Paris, CHEAM, 1992.
28 Togo (2005), Gabon (2009). Il a déjà été observé que ce type de transmission constitutionnelle du pouvoir d’Etat «est un blocage de l’alternance au Pouvoir», surtout dans ce cas précis du Togo. Voir KAMTO (M.), « Le dauphin constitutionnel dans les régimes politiques africains (les cas du Cameroun et du Sénégal) », op. cit. p. 256 et s. ces cas ci-dessus cités, sont à distinguer de celui de la GuinéeConakry où l’on peut considérer que c’est la disparition brutale du général Conté qui est le véritablecatalyseur de l’alternance.
29 Au Congo Brazzaville, la nouvelle constitution d’octobre 2015 (article 65) supprime l’âge maximum jusque là fixée à 70 ans. Cette disposition est de nature à retarder toute alternance, elle consolide la présidence trentenaire de Sassou.
30 La révision de juin 2012 (N°033-2012/AN du 11 juin 2012) introduit trois innovations : d’abord elle supprime toute référence à la nationalité des parents du candidat, ensuite elle remplace l’expression «35 révolus» par «35 ans au moins»,enfin elle fixe un âge plafond à savoir «75 ans».Il n’y a pas d’âge plafond ni au Cameroun, ni en Algérie ; la preuve le président Bouteflika, à 77 ans, vient de rempiler un quatrième mandat de 5 ans. Il mourra certainement au pouvoir.
31 Le Cameroun (art. 45, code électoral de 2012) et le Maroc marqueront la différence en maintenant l’âge électoral à vingt (20) ans.
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32 vingt-et-un (21) ou vingt-et-neuf (29) ans pour être électeur, quarante (40) ou quarante-cinq (45) ans pour tout candidat à la présidence de la République. Ladifférence d’âge entre l’électeur etcandidat contredit le principe suivant lequel «tout électeur peut faire acte de 33 candidature » , la qualité d’électeur étantla première conditiond’éligibilité.Toutefois, cette différence peut se justifier compte tenu de la nature de certaines charges publiques et du niveau 34 de responsabilité nécessaire . Tout de même,l’écartentre les deux âges est on ne peut plus déraisonnable. Il diffère loin, très loin, la possibilité pour le « politiquement majeur » de briguer 35 des postes électifs. Pour prendre l’exemple de la France, le droit de voter devait emporter 36 automatiquement le droit de se porter candidat. C’est évidemment, la réalisation de ce couple de prérogatives qui rend effectif le droit à la participation politique ducitoyen. Et l’abaissement de l’âge du candidat participe de cette réalité.
En effet, à la faveur des transitions démocratiques, une plus grande extension du suffrageest réalisée par l’abaissementde la majorité électorale à dix-huit (18) ans et del’âge minimum du candidat. Ce qui a favorisé une importante participation des citoyens, précisément des jeunes au processus de désignation des autorités politiques. On se souvient de la 37 mobilisation des jeunes ivoiriens pour le respecter du verdict de la présidentielle de 2000, lorsque le général Guéï, contestant les résultats de la Commissionélectorale, s’estautoproclamé. Votant pour la première fois à 18 ans, les jeunes ivoiriens ont vu dans cette attitude le reniement de leur droit de participation à la vie politique et la méconnaissance de leur choix. De même au Sénégal, la fermeté des jeunes (Y’EN A MARRE) a eu raison du projet de révision constitutionnelle initié par le président Wade. L’abaissement de l’âge électoral apparaît alors comme l’élément catalyseur. La jeunesse africaine se préoccupe de plus en plus à la gestion des affaires publiques et surtout veille comme une sentinelle au respect des
32 Dans un passé récent, la majorité électorale était de 29 ans, notamment, au Maroc, au Bénin et au Niger.
33 «Tout électeur peut faire actede candidature…»,article 17, code électoral ivoirien, op. cit.
34 Généralement, l’âge exigé pour les élections législative et locale correspond à la majorité électorale.
35 En France, l’électeur et le candidat à l’élection présidentielle sont soumis à la même condition d’âge: 18 ans révolus (art. LO 127 du code électoral.
36 Pour le Conseil constitutionnel français, il résulte du rapprochement des articles 3 de la Constitution et 6 de la Déclaration des droits de l’homme que «la qualité de citoyen ouvre […] l’éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n’en sont pas exclus pour une raison d’âge, d’incapacité ou de nationalité ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l’électeur ou l’indépendance de l’élu».cf.82-146 DC du 18 nov. 1982, Rec. p. 66.
37  Christophe Champin, journaliste sur Radio France internationale, a parlé «d’insurrection populaire».cf. CHAMPIN (C.), «une journée d’insurrection populaire»,Archives, sur RFI,le 26 octobre 2000.
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institutions. Au Burkina Faso, le président Compaorén’a eu de choix que d’abdiquer face aux mouvements de la jeunesse.
Redoutant en effet, la remise en cause de cet acquis des transitions démocratiques, les jeunes récemment acceptés à la dignité électorale, veillent aux avancées démocratiques et participent ainsi à leur consolidation. Certains Etats ont vite fait d’élever cet acquis au rang de 38 principe constitutionnel ,de sorte qu’aujourd’hui dans le continent, la majorité électorale à dix-huit (18) ans, est la règle. Cependant contrairement au consensus qui se dégage autour de l’âge électoral, l’âge minimum exigé au candidat varie d’un pays à un autre,mais dans un sens positif.
39 Quarante (40)ans révolus au jour de l'élection en Algérie, en Côte d’Ivoire, en 40 Djibouti, au Gabon, en Mauritanie, en Tunisie ; trente-cinq (35) ans au moins à la date de clôture du dépôt des candidatures, au Cameroun, en Guinée, à Madagascar, au Niger, au
Rwanda, au Sénégal, au Togo, en Namibie. L’ouverture est encore plus perceptible au Burkina 41 Faso, où l’on est passé de trente-cinq (35) ans révolus à trente-cinq (35) ans au moins . La 42 République démocratiquedu Congo fait office d’exceptionavec un âge minimum de trente (30) ans requis pour tout candidat à l’élection présidentielle.
43 Avec une telle évolution, on note une plus grande participation aux joutes électorales . Des candidatures uniques, on enregistre aujourd’hui plus d’une dizainede candidats aux seuls scrutins présidentiels, bien plus aux législatifs et aux élections locales.
38 Par exemple, la République du Congo, article 5 de la Constitution de mars 1992; Côte d’Ivoire, article 33 de la Constitution d’août 2000; Sénégal, loi; Gabon, Constitution de mars 1991, révisée en 1994, article 4 constitutionnelle de 1963 révisée le 6 octobre 1991, article 2 ; Togo, Constitution adoptée en septembre 1992, article 5, etc.
39  Article 73 de la Constitution, Algérie (décembre 1996); article 35, Côte d’Ivoire (août 2000); article 23, Djibouti (septembre 1992) ; article 10, Gabon (mars 1991) ; article 26, Mauritanie (juillet 1991) ; article 40, Tunisie (juin 1959) ; etc.
40 ème  Article 6.5, Cameroun (juin 1972) ; article 29, Guinée (Constitution. De la 2 République) ; article 50, ème Madagascar (version septembre 2010) ; article 47, Niger (Constitution de la 7 République) ; article 99, Rwanda (version de juin 2010) ; article 28, Sénégal (janvier 2001) ; article 62, Togo (septembre 1992) ; article 28, Constitution namibienne de février 1990 ; etc.
41 Article 38, Burkina Faso (Constitution de juin 1991 modifiée par la loi N° 033-2012/AN du 11 juin 2012).
42  Article 72, République démocratique du Congo (février 2006). De même, la nouvelle constitution du Congo Brazzaville consacre 30 ans comme âge minimum.
43 L’ouverture politique est à l’origine de la dynamique de participation électorale: au mali à la présidentielle de 2000, l’on a enregistré vingt quatre (24) candidats; quatorze candidats (14) à la présidentielle ivoirienne d’octobre
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Ces cas d’ouverture fontcependant contraste avec les appréciations détournées de la durée de résidence et de la moralité. On al’impression que l’on reprendpar la main gauche ce que l’on a magnanimement donné par la main droite. L’interprétation de ladurée de séjour, de la moralité et de la probité du candidat, sont souvent le lieu pour écarter subtilement certaines 44 candidatures. L’impartialitédu juge constitutionnel est parfois mise en cause.
B.La résidence et la moralité du candidat, des conditions classiques complémentaires En plus de satisfaire aux conditions de nationalité et d’âge minimum, le candidat «doit avoir résidé en Côte d'Ivoire de façon continue pendant cinq années précédant la date des élections et avoir totalisé dix ans de présence effectiveIl doit être de bonne moralité et d'une 45 grande probité» .L’appréciation des notions telles «présenceeffective», «bonne moralité», «grande probité»,laissée à la discrétion du juge des candidatures, à défaut d’indices clairementdéfinisposent d’énormes difficultés. En effet, que comprendre par «présence effective» ? A quoi tient «bonne moralité et grande probité» ?
Au moyen de l’obligation de résidence continue et de l’exigence dela bonne moralité, 46 les codes électoraux aggravent les conditions discriminatoiresde l’éligibilité. En ajoutant à leur imprécision, les législations électorales font le lit d’une interprétation subjective pourune application détournée et orientée. Effectivement, le défaut de présence effective (1) et le simple
doute sur la moralité et la probité (2), ont suffi pour écarter certaines candidatures.
1/Le défaut de présence effective, une manœuvre d’exclusion
2000, avec un taux departicipation estimé à plus de 80%, de même qu’à la dernière présidentielle malienne de septembre 2013; plus de trente (30) candidats à la présidentielle malgache d’octobre 2013.
44 FALL (A.B.), « Les processus de démocratisation en Afrique francophone :le juge de l’élection dans l’impasse ? »,in Démocratie et élections dans l’espace francophone, op. cit. p. 553 et s. BOLLE (S.), « Vices et vertus du contentieux des élections en Afrique »,in Démocratie et élections dans l’espace francophone, op. cit. p. 532 et s.
45 Article 35, loi portant Constitution de Côte d’Ivoire, op.cit.
46 L’application parcimonieuse par exemple de l’obligation de résidence sans discontinuité, amène Ouraga Obou à poser la question de la différence de légitimité entre le citoyen qui aurait l’aval de l’Etat et celui qui en serait dépourvu pour servir à l’extérieur. Pour lui, le recours probable au critère de l’intérêt général pour justifier cette discrimination ne semble pas résister à l’analyse. OURAGA (O.), op.cit. p.63.
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Le séjour nécessaire à la postulation varie d’un pays à un autre. En Côte d’Ivoire, il faut résider de façon continue pendant cinq (5) années avant la date des élections et avoir totalisé dix années de présence effective. Au moins douze (12) mois de présence sur le territoire togolais. A Madagascar, au moins six (6) mois avant le jour de la date limite fixée pour le dépôt des candidatures. Au Rwanda, les choses sont plus simples. Il suffit de résider sur le territoire 47 48 au moment du dépôt de sa candidature ou encore au moment des élections .
Prises au pied de la lettre, ces dispositions donnent l’impression d’un assouplissement progressif de la durée du séjour. Mais dans la pratique, l’application qui en est faite, reste à plaindre. En Guinée, le principal adversaire du président Lansana Conté, Alpha Condé a été empêchépour motif de trop long séjour à l’étranger. Au Togo,un des principaux opposants, Gilchrist Olympio, ne sera pas autorisé à se présenter en raison de son exil en France. Peu importe que l’obligation de résidence ne s’applique pas aux exilés politiques. Le juge des 49 candidatures, repoussant tous les arguments avancés , a tranché que le requérant qui vit à 50 l'étranger ne pouvait se soustraire à l'obligation de résidence. Le juge électoral n’est pas souvent sans reproche lorsque dans le traitement des candidatures, il exige plus à certainsqu’à d’autres. La loi fondamentale serait donc aux dépens des uns et au profit des autres.
Ainsi au Congo-Brazzaville, à la présidentielle de juillet 2009, la Cour 51 constitutionnelle, garante d’un droit draconien qui verrouille l’accès à la compétition, a donné la preuve de sa partialité. Elle enjoint aux postulants, après la date limite de dépôt des candidatures, de compléter leurs dossiers par un certificat de résidence. La Cour invalide par la
suite, quatre (4) des dix-sept (17) candidatures reçues, dont trois (3) pour non respect de la
47 Article 99 (8) de la constitution rwandaise, op. cit.
48 Article 44 de la Constitution du Bénin du 11 décembre 1990.
49 Le requérant soutenait que l'obligation de résidence imposée en mars 2002 par la modification du code électoral était inconstitutionnelle en ce que la Constitution ne contenait aucune disposition en ce sens. Et que la révision constitutionnelle du 31 décembre 2002 opérée à la seule fin de couvrir cette inconstitutionnalité ne pouvait être rétroactive ; par conséquent sa candidature était juridiquement fondée. Mais, la Cour a estimé que les dispositions relatives à l'obligation de résidence sont d'application immédiate.
50 KESSOUGBO (K.), « La Cour constitutionnelle et la régulation de la démocratie au Togo »,Revue Béninoise des Sciences Juridiques et Administratives, n°15, 2005, p. 33-98.
51 Selon l’article 58 de la Constitution de la République du Congo du 20 janvier 2002, «Nul ne peut être candidat aux fonctions de Président de la République : -s’il ne réside de façon ininterrompue sur le territoire de la République au moment du dépôt de sa candidature depuis au moins vingt quatre mois…».
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