Le quartier sociologique, le quartier administratif. Sources et lectures de la Camorra napolitaine du XIXe - article ; n°2 ; vol.105, pg 503-538
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Le quartier sociologique, le quartier administratif. Sources et lectures de la Camorra napolitaine du XIXe - article ; n°2 ; vol.105, pg 503-538

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Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée - Année 1993 - Volume 105 - Numéro 2 - Pages 503-538
Marcella Marmo, Le quartier sociologique, le quartier administratif. Sources et lectures de la Camorra napolitaine du XIXe siècle, p. 503-538. Dans cet essai on trace le profil de la camorra napolitaine du XIXe siècle en comparant les acquisitions de la recherche historique avec les lectures sociologiques fonctionnalistes qui soulignent la nature sous-culturelle du phénomène et ses fonctions d'ordre (analogies avec le «bandit social»; médiations fiduciaires sur les marchés). Les sources historiques, au contraire, présentent un phénomène plutôt désordonné, tout proche de la petite délinquence et spécialisé dans l'extorsion parasitaire. On utilise surtout les riches sources de police des années 1860, qui montrent une élite criminelle, à l'œuvre dans les prisons, les quartiers et les marchés, mais ouverte aux networks sociaux aussi vers le haut; les notions d'ordre, de pouvoir, de culture sont ainsi désagrégées. On discute de la genèse post- (v. au verso) napoléonienne de la camorra par rapport à la récente réforme de la police et pourtant aux difficultés du premier État administratif de fonctionner sur le territoire urbain et de discipliner les pouvoirs plébéiens de la capitale.
36 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 43
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Marcella Marmo
Le quartier sociologique, le quartier administratif. Sources et
lectures de la Camorra napolitaine du XIXe
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée T. 105, N°2. 1993. pp. 503-538.
Résumé
Marcella Marmo, Le quartier sociologique, le quartier administratif. Sources et lectures de la Camorra napolitaine du XIXe siècle,
p. 503-538.
Dans cet essai on trace le profil de la camorra napolitaine du XIXe siècle en comparant les acquisitions de la recherche
historique avec les lectures sociologiques fonctionnalistes qui soulignent la nature sous-culturelle du phénomène et ses fonctions
d'ordre (analogies avec le «bandit social»; médiations fiduciaires sur les marchés). Les sources historiques, au contraire,
présentent un phénomène plutôt désordonné, tout proche de la petite délinquence et spécialisé dans l'extorsion parasitaire. On
utilise surtout les riches sources de police des années 1860, qui montrent une élite criminelle, à l'œuvre dans les prisons, les
quartiers et les marchés, mais ouverte aux networks sociaux aussi vers le haut; les notions d'ordre, de pouvoir, de culture sont
ainsi désagrégées. On discute de la genèse post-
(v. au verso) napoléonienne de la camorra par rapport à la récente réforme de la police et pourtant aux difficultés du premier État
administratif de fonctionner sur le territoire urbain et de discipliner les pouvoirs plébéiens de la capitale.
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Marmo Marcella. Le quartier sociologique, le quartier administratif. Sources et lectures de la Camorra napolitaine du XIXe. In:
Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée T. 105, N°2. 1993. pp. 503-538.
doi : 10.3406/mefr.1993.4289
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_1123-9891_1993_num_105_2_4289MARCELLA MARMO
LE QUARTIER SOCIOLOGIQUE,
LE ADMINISTRATIF
SOURCES ET LECTURES DE LA CAMORRA NAPOLITAINE
DU XIXe SIÈCLE
1 - Un pouvoir territorial entre XIXe et XXe siècle
L'étude du quartier urbain à l'époque moderne et contemporaine offre
un terrain de discussion historique et théorique particulièrement fécond.
La confrontation de recherches très diverses par leurs contextes et leurs ap
proches autorise en effet l'établissement de comparaisons entre les méthod
ologies, les sources, les résultats et les problématiques qui constitueront
sans doute l'un des principaux enseignements de cette rencontre.
La Camorra napolitaine, qui est l'objet de ce travail, ouvre à cet égard
un important champ de réflexion. Bien que la Camorra en tant qu'organisat
ion spécialisée dans les extorsions, répandue dans les prisons comme sur
un vaste territoire urbain et rural, soit un phénomène des XIXe et XXe
siècles, sa naissance lors des décennies de la restauration bourbonienne ne
peut pas ne pas intéresser l'histoire de la criminalité populaire de l'âge mo
derne et des formes de contrôle antérieures aux systèmes de police du nouv
el État administratif. Questions malheureusement encore et toujours élu
dées par l'historiographie moderne, comme le signale dans ce colloque
l'importante recherche conduite par Brigitte Marin sur la restructuration
du territoire urbain entre les directives bourboniennes de la fin du XVIIIe
siècle et la période française. Les sources disponibles n'étant pas anté
rieures à l'Unité nationale, on ne pourra émettre que quelques hypothèses
sur la genèse de la première' organisation camorriste, qui avait étendu aux
douze quartiers de la capitale des traditions d'extorsion déjà attestées dans
les prisons du Vice-Regno et des pratiques criminelles variées, au lende
main de la restructuration administrative du territoire urbain et de l'ét
ablissement des premières formes de contrôle policier. On voudrait ainsi
réexaminer les sources relatives à la camorra du XIXe siècle en prêtant une
attention particulière aux espaces (topographiques, sociaux, politiques) au
MEFRIM - 105 - 1993 - 2, p. 503-538. 504 MARCELLA MARMO
sein desquels ce type de pouvoir territorial a pris racine à Naples depuis
150 ans au moins. La notion même de pouvoir territorial, qui bouleverse
les visions rassurantes d'un pouvoir situé au sommet (élites sociales, inst
itutions politiques et administratives), rend compte du fait que nous nous
trouvons face à un phénomène complexe, présentant certains éléments es
sentiels récurrents entre passé et présent. Les aspects économiques et so
ciaux, la culture et la politique des comportements interagissent sans se
laisser facilement classer dans une hiérarchie de causes et d'effets. Dans les
sources au milieu du XIXe siècle, comme dans les récits conservés, la Ca
morra se situe constamment à cheval entre une économie criminelle et dif
férents marchés : elle présente une culture et un mode d'intervention ma
nifestement parasitaires mais jouit néanmoins d'une large légitimation;
elle établit des cadres d'organisation de type corporatif entre criminels sus
ceptibles de former des networks au sein de l'ensemble du réseau social,
aussi bien vers le haut que vers le bas. Qui plus est, le nom et la chose (l'o
rganisation camorriste et les stratégies d'extorsion qui sont l'invention
propre à ces élites du banditisme) se sont reproduits, sans difficultés maj
eures à travers des formes d'État aussi différentes que l'absolutisme bour
bonien, l'État libéral et l'État démocratique, grâce à une évidente capacité
d'adaptation à leurs modes de fonctionnement et aux transformations du
contexte. Un phénomène multiforme et karstique (pour reprendre l'expres
sion de la récente synthèse historique et sociologique de I. Sales1) qui réuss
it peu à peu à neutraliser les formes institutionnelles du contrôle social
ainsi qu'à récupérer et relancer une pratique et une culture camorriste au-
delà même des périodes de vacance.
Dans la ville du milieu du XIXe siècle, c'est une organisation spéciali
sée dans l'extorsion qui domine la scène. Maîtresse absolue des prisons,
elle est aussi présente sur bien des marchés légaux ou illégaux et on la
nommera «modèle napolitain» pour la distinguer des formes plus fluides
et non spécialisées dans l'extorsion, que l'on retrouve dans la Camorra ru
rale de cette même période sur toute l'étendue de la Campania Felix1. Dans
la ville capitale, entre les douze quartiers et les prisons (même les plus éloi
gnées), les différents travaux conduits sur ce sujet comme les sources ad
ministratives nées avec la constitution du royaume d'Italie décrivent assez
précisément des structures criminelles connues sous le nom de Consorteria
1 1. Sales, La camorra, le camorre, Rome, 1988.
2 Pour un tableau d'ensemble de cette recherche sur la camorra à l'époque libé
rale, je renvoie à mon essai : Tra le carceri e i mercati. Spazi e modelli storici del feno
meno camorrista, dans P. Macry et P. Villani (a cura di), Storia d'Italia. Le regioni
dall'Unità ad oggi. La Campania, Turin, 1990. SOURCES ET LECTURES DE LA CAMORRA NAPOLITAINE 505
dei camorristi placée «sous le patronage de la Madonna del Carmine» (la
Madone de la place du marché qui conserve encore le souvenir de Masa-
niello); ou ailleurs, plus simplement, sous celui de Camorra ou de Bella So
cietà riformata', ou encore sous l'appellation de Società onorata. Cette pre
mière Camorra a un «organamento» qui s'articule en quartiers et «paranze»
selon une hiérarchie interne et une rigoureuse discipline de groupe uni qui
dénotent une culture d'élite du banditisme, riche en références autonomes,
parfois archaïsantes (comme l'honneur, le patronage de la Madone du Car-
mel), et parfois plus proche des formes d'associations sectaires contempor
aines : la bella società riformata, l'agrégation rituelle aux deux niveaux de
società minore et maggiore, semblent autant d'échos francs-maçons,
probablement induits par la permanence commune dans les prisons bour
boniennes des camorristes et des libéraux que les camorristes espionnaient
pour le compte de la police politique.
Dans la première interprétation libérale, cette cruelle organisation de
criminels, apparue sur la scène urbaine en 1820-30 seulement, devait es
sentiellement son succès à

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