Les Espagnols devant leur régime - article ; n°1 ; vol.20, pg 5-36
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Description

Revue française de science politique - Année 1970 - Volume 20 - Numéro 1 - Pages 5-36
Les Espagnols devant leur régime, par Guy Hermet Jusqu'au début des années 1950, le régime franquiste a bénéficié d'une certaine popularité, non seulement dans les catégories privilégiées et dans les milieux ruraux traditionnels, mais aussi dans de vastes secteurs des classes moyennes. Par la suite, ce soutien au moins passif d'une fraction importante de la population s'est trouvé remis en cause en fonction de la disparition progressive de la génération de la guerre civile, de l'ouverture des frontières et de la croissance économique, dont il faut aujourd'hui partager les fruits. Tenant compte de ce phénomène, l'équipe des ministres technocrates mise en place à partir de 1956 s'efforce de conquérir une nouvelle clientèle politique favorable au régime, en misant sur l'augmentation du niveau de vie, sur une libéralisation prudente et, plus généralement, sur l'achèvement d'une révolution bourgeoise qui n'a pas encore été menée à son terme en Espagne. Face à cette tentative, la vieille opposition paraît impuissante, tandis que les nouvelles oppositions, ouvrière, étudiante et catholique, se radicalisent au point de perdre contact avec les aspirations plus modérées et consommatrices de la masse des Espagnols.
The Spanish regime and public opinion, by Guy Hermet Until the beginning of the 1950s the Frankist regime was to a certain extent popular not only among the more privileged classes and in the traditional rural circles but also in vast sectors of the middle classes. Later on this passive support of a large fraction of the population might have been eroded as the generation of the civil war gradually lost numerical importance, as the frontiers were opened and the economy flourished. But the team of technocratic ministers, established from 1956 onwards, tried to convince a new political clientele by putting the accent on the rising standard of living, on a certain prudent liberalisation and more generally on the completion of a bourgeois revolution which has not yet been completed in Spain. Faced with this policy the former opposition seems powerless, whilst the newer currents of opposition, among workers, students or the catholics, have become so radical that they have lost all contact with the more moderate desires of the mass of the Spanish people who aspire to prosperity.
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 15
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Guy Hermet
Les Espagnols devant leur régime
In: Revue française de science politique, 20e année, n°1, 1970. pp. 5-36.
Citer ce document / Cite this document :
Hermet Guy. Les Espagnols devant leur régime. In: Revue française de science politique, 20e année, n°1, 1970. pp. 5-36.
doi : 10.3406/rfsp.1970.393210
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1970_num_20_1_393210Abstract
The Spanish regime and public opinion, by Guy Hermet
Until the beginning of the 1950s the Frankist regime was to a certain extent popular not only among the
more privileged classes and in the traditional rural circles but also in vast sectors of the middle classes.
Later on this passive support of a large fraction of the population might have been eroded as the
generation of the civil war gradually lost numerical importance, as the frontiers were opened and the
economy flourished. But the team of technocratic ministers, established from 1956 onwards, tried to
convince a new political clientele by putting the accent on the rising standard of living, on a certain
prudent liberalisation and more generally on the completion of a bourgeois revolution which has not yet
been completed in Spain. Faced with this policy the former opposition seems powerless, whilst the
newer currents of opposition, among workers, students or the catholics, have become so radical that
they have lost all contact with the more moderate desires of the mass of the Spanish people who aspire
to prosperity.
Résumé
Les Espagnols devant leur régime, par Guy Hermet
Jusqu'au début des années 1950, le régime franquiste a bénéficié d'une certaine popularité, non
seulement dans les catégories privilégiées et dans les milieux ruraux traditionnels, mais aussi dans de
vastes secteurs des classes moyennes. Par la suite, ce soutien au moins passif d'une fraction
importante de la population s'est trouvé remis en cause en fonction de la disparition progressive de la
génération de la guerre civile, de l'ouverture des frontières et de la croissance économique, dont il faut
aujourd'hui partager les fruits. Tenant compte de ce phénomène, l'équipe des ministres technocrates
mise en place à partir de 1956 s'efforce de conquérir une nouvelle clientèle politique favorable au
régime, en misant sur l'augmentation du niveau de vie, sur une libéralisation prudente et, plus
généralement, sur l'achèvement d'une "révolution bourgeoise" qui n'a pas encore été menée à son
terme en Espagne. Face à cette tentative, la vieille opposition paraît impuissante, tandis que les
nouvelles oppositions, ouvrière, étudiante et catholique, se radicalisent au point de perdre contact avec
les aspirations plus modérées et consommatrices de la masse des Espagnols.LES ESPAGNOLS DEVANT LEUR RÉGIME
GUY HERMET
Depuis le 23 juillet 1969, la désignation par le général Franco
du prince Juan Carlos comme son successeur à la tête du
Royaume d'Espagne pose une nouvelle question quant aux
attitudes des Espagnols en matière politique. Cette s'ajoute
à l'interrogation posée depuis trente-trois ans concernant le
consensus réel dont bénéficie le régime mis en place après la rébellion
militaire du 18 juillet 1936. Elle s'ajoute également à celle qui se rap
porte, de façon de plus en plus plausible, aux attitudes suscitées par
les diverses alternatives politiques concevables dans l'hypothèse d'un
remplacement du régime franquiste.
L'« opinion » des Espagnols n'est malheureusement pas mesurable
selon les critères retenus par la science politique et la psychologie so
ciale. L'absence d'élections législatives prive l'observateur des informat
ions fournies dans d'autres pays par les statistiques électorales. Les
référendums, qui prétendent entretenir l'image d'une certaine démoc
ratie, à l'intérieur comme à l'étranger, donnent des résultats beau
coup trop univoques pour apporter des indications utilisables pour la
même fin. Les sondages para-officiels effectués depuis 1963 par l'Ins
titut de l'opinion publique ne comportent que des questions anodines,
sans signification politique précise, tandis que les enquêtes réalisées
de façon plus ou moins clandestine sont inévitablement mal faites, et
donc peu dignes de foi. La lecture des journaux qui restent étroit
ement assujettis au contrôle de l'Etat est presque aussi décevante, au
moins pour celui qui y chercherait des manifestations explicites d'op
position. L'interdiction des organisations autres que le Mouvement
phalangiste, enfin, contribue de manière décisive à limiter l'expression
des courants d'opinion.
Cela ne signifie pas, cependant, que l'on ne puisse rien connaître
des attitudes politiques présentes des Espagnols. La période de pénurie
presque totale d'informations sur l'état de l'opinion, pendant laquelle Her met Guy
on ne pouvait que conjecturer sur des rumeurs venues des salons
monarchistes, ou émanant de « personnes proches du pouvoir », est
aujourd'hui révolue. L'agitation ouvrière, l'extension et la radicalisa-
tion du mouvement étudiant, la contestation ouverte des intellectuels
fournissent aujourd'hui des faits directement observables et témoi
gnent d'un tournant dans la vie politique de l'Espagne. Dans le même
temps, les organisations clandestines ont en grande partie cessé de
dépendre matériellement et idéologiquement des vieux partis et syn
dicats exilés ; elles expriment, de façon de plus en plus large, les
conceptions propres aux diverses fractions militantes de la populat
ion. Entraînée par ce courant et encouragée au début par le gouver
nement soucieux de présenter une façade plus libérale, la presse
légale elle-même s'adonne à une critique prudente du régime. De leur
côté, les Cortès s'enhardissent jusqu'à faire preuve d'une certaine
indépendance à l'égard du pouvoir, par exemple en la personne des
vingt-huit procurateurs qui ont émis un vote négatif ou se sont abste
nus lors du scrutin sur la désignation de Juan Carlos comme futur
roi d'Espagne.
La possibilité existe donc maintenant, sinon de mesurer les att
itudes politiques des Espagnols à la manière des instituts de sondage,
du moins d'esquisser les grandes lignes et de tenter d'évaluer gros
sièrement la force des courants d'opinion qui se manifestent en Es
pagne. Tel est, en tout cas, le propos que nous nous sommes assigné
dans les trois volets de cet article consacré à la « popularité » du
régime franquiste, à la réalité des oppositions et à l'audience de celles-
ci dans la masse de la population '.
I. LA « POPULARITÉ » DU RÉGIME FRANQUISTE
L'armée, l'Eglise, les grands propriétaires terriens, les milieux
financiers et industriels, les phalangistes, les monarchistes, les carlis
tes et la haute bureaucratie sont considérés, à juste titre, comme les
membres fondateurs et les « piliers » du régime franquiste. Bien qu'il
n'ait cessé de jouer sur les oppositions de ces divers soutiens pour
éviter que l'un d'eux ne prédomine, le général Franco les a suffisam
ment servis pour qu'ils lui conservent une fidélité encore presque una
nime dans les hauts grades de l'armée et parmi les grands proprié-
1. Cet article porte sur les attitudes des Espagnols face au système de gouverne
ment actuel. Il laisse de côté les suscitées par l'existence des courants auto
nomistes basque, catalan et galicien. Les Espagnols devant leur régime
taire s, et qui devient à peine réticente chez les évêques, dans la Pha
lange, l'aristocratie et les milieux d'affaires.
Est-ce à dire, comme le suggèrent certaines analyses rapides de la
situation politique de l'Espagne, que le système franquiste repose
entièrement et uniquement sur un jeu d'équilibre entre les principaux
éléments d'une coalition oligarchique formée par quelques centaines
ou quelques milliers de personnes ? Une telle simplification, infirmée
par le changement ministériel à dominante technocratique d'octobre
1969, mais assez exacte si elle ne prétend rendre compte que de la
composition de l'élite effectivement pourvue des leviers du pouvoir
jusqu'à cette date, a le défaut de faire apparaître la dictature du génér
al Franco comme privée de base

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