Les journalistes - article ; n°4 ; vol.9, pg 901-934
35 pages
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Description

Revue française de science politique - Année 1959 - Volume 9 - Numéro 4 - Pages 901-934
34 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1959
Nombre de lectures 36
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Bernard Voyenne
Les journalistes
In: Revue française de science politique, 9e année, n°4, 1959. pp. 901-934.
Citer ce document / Cite this document :
Voyenne Bernard. Les journalistes. In: Revue française de science politique, 9e année, n°4, 1959. pp. 901-934.
doi : 10.3406/rfsp.1959.403031
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1959_num_9_4_403031Les Journalistes
BERNARD VOYENNE
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nécessité bien d'un auprès s'attira calomnier féconds, en fournissant connaître trouver même d'écouter et menanti, « Non gazetier arrachait Cependant, somme, que grand vouons-le sans de à du l'un là l'égard l'abbé ». je ces savoir aux et ». quelque n'est raison, au comte qu'un personnel lui-même vive on de la Longtemps profanateurs portes. bon après Desfontaines. le langue pas : ces de ! écrire, l'acte », secteur rémunère d'ailleurs. d'Argenson bâtardise. moment. cette encore le Basile la les On pour ! ministre de mais plupart douteuse Et, gazettes, il ne de naissance alimenter un semi-professionnels, portera d'un En en seulement Car lui sa Comme La secrets en métier. lui des revanche effet, propagande, demande condescendance, pot-de-vin. extraction le on disant rétorqua « de l'opprobre journaliste, la informations auxquels il avait tout On notre d'avoir s'excusait chronique : on pas connaît « vu l'art : ne profession Monseigneur, D'ailleurs, « il affecte d'être apparaître Je lui on l'ouïe qui n'est et ce du n'en ont » de voire et, coupait non la pesait fut à gazetier, intelligent, de fine guère ses à pas répartie ce vois est d'abord ce le des ne qui besognes les et manqué. Pouvoir la prix-là, entaché sur mépris, il besoin pas moins de n'est, jourmain c'est faut que les se ni la le
naux (Journal des savants, 1665 ; Journal de Trévoux, 1701) 1 et,
avec eux, les journalistes. Contrairement à ce que suggère l'étymo-
logie, ces journaux ne sont pas tout d'abord quotidiens : le premier
de ceux-ci sera Le Journal de Paris en 1777. Mais le nouveau mot
1. C'est dans ce Journal de Trévoux que Dauzat rencontre pour la pre
mière fois le terme «journaliste», en 1704. Littré le trouve, à peu près à la
même époque, chez Fontenelle. Le mot journal, lui, était apparu dès 1631 dans
La Gazette de France par ellipse de papier-journal. Journalisme se trouve, en
1781, chez Sébastien Mercier, mais Littré le donne encore pour un néologisme.
901 Bernard Voyenne
traduit une réaction contre la futilité de la gazette. Déjà la presse
veut être de l'histoire au jour le jour. Le journal visera un public
plus cultivé : il est le moyen de communication de l'élite intellec
tuelle. Ainsi répond-il à un besoin ; en même temps il occupe la
seule place qui, sous un régime absolutiste, soit relativement libre.
Dès lors le journalisme commence à être, sinon encore une activité
sui generis, du moins une occupation à peu près régulière et, par
tant, rétribuée. Il ne s'ensuit pas que le « journaliste » soit mieux
considéré que le gazetier, son pitoyable prédécesseur. Car le phi
losophe ou l'écrivain, quand il collabore à un journal, ne distingue
pas nettement cette tâche de l'ensemble de son activité littéraire.
Le journaliste, c'est celui qui n'est que journaliste. Autrement dit,
le plumitif à gages, condamné à se faire les dents sur les oeuvres
des autres par impuissance à créer lui-même. C'est, peu ou prou,
le « pauvre diable » de Voltaire qui, « n'ayant point dîné », se voit
contraint de passer sous les fourches caudines d'un Fréron et
raconte ainsi sa médiocre aventure :
Je m'accostai d'un homme à lourde mine
Qui sur sa plume a fondé sa cuisine (...)
Je m'engageai sous l'espoir d'un salaire,
A travailler à son hebdomadaire,
Qu'aucuns nommaient alors patibulaire.
Il m'enseigna comment on dépeçait
Un livre entier, comme on le recousait,
Comme on jugeait du tout par la préface, on louait un sot auteur en place,
Comme on fondait avec lourde roideur
Sur l'écrivain pauvre et sans protecteur.
Je m'enrôlai, je servis le corsaire ;
Je critiquai sans mesure et sans choix,
Impunément le théâtre, la chaire,
Et je mentis pour dix écus par mois (2).
Certes, il faut faire la part de l'aigreur dans ce tableau. L'homme
de Ferney, qui ne se privait pas de dauber sur autrui, avait, en
sens inverse, l'épiderme particulièrement sensible. Et il n'était guère
regardant sur les moyens, pourvu que ceux-ci mettent les rieurs de
son côté. Pourtant, dix autres témoignages l'attesteraient, c'est bien
ainsi que dans l'ensemble l'homme de lettres « arrivé » voyait ses
impécunieux confrères, réduits à « faire du journalisme » pour subs
ister. Malgré ses sombres couleurs cette peinture est certainement
une image fidèle de l'idée que l'on se faisait du journalisme au
2. Le Pauvre Diable, v. 129-152.
902 Les Journalistes
milieu du xvme siècle. Elle l'est aussi, dans une assez large mesure,
de la réalité du journalisme de ce temps. Si l'on en doute, il n'est
que de se reporter aux corps mêmes du délit, à savoir Le Nouvell
iste du Parnasse ou L'Année littéraire : nos feuilles les plus caus
tiques sont, en comparaison, de l'eau bénite de cour. La satire de
Voltaire a même le mérite de nous fournir notre premier relevé de
salaire mensuel : dix écus, soit trente livres. C'était le prix d'une
dizaine de boisseaux de blé ! Là, vraiment, la verve polémique de
Voltaire — ou les besoins de sa prosodie — doit l'emporter.
A moins qu'il s'agisse seulement d'une « pige »...
Quoi qu'il en soit, il ne fait guère de doute que les journalistes
du XVIIIe siècle — d'ailleurs fort peu nombreux — étaient, dans
l'ensemble, des besogneux. En règle générale, une publication est
alors faite par un seul homme. Astucieux commerçant, il vendra
non seulement son papier mais ce qu'il y enveloppe et, bon an
mal an, grâce aux petits retours de bâton, et aux plus grands, il
prospérera. Fréron pouvait passer pour un homme riche : il roulait
carrosse et tenait table ouverte dans ses maisons de ville ou de
campagne. Mais les obscurs tâcherons qui lui servaient de
« nègres », hommes à toutes mains, ancêtres de nos secrétaires de
rédaction, de nos « rewriters », mais aussi de nos employés de
presse, occupaient le plus bas degré de l'échelle sociale. C'est seu
lement vers la fin du siècle que certains entrepreneurs de librairie,
devenus de purs hommes d'affaires et ne se mêlant plus d'écrire,
engageront, parfois à prix d'or, des « rédacteurs en chef » connus
et aimés du public. En 1772, Panckoucke s'attacha ainsi, pour
10 000 livres par an, l'avocat Linguet. Un peu plus tard, Mallet
du Pan sera le premier des journalistes, au sens où nous l'enten
dons, et il tirera d'une activité exemplaire considération et profits.
Mais ces exemples sont de rarissimes exceptions, qui confirment la
règle. Sous la Révolution, en particulier, il est clair que la quasi-
totalité des journaux — et pourtant ceux-ci furent innombrables —
n'étaient pas autre chose que des prospectus, quotidiens ou pério
diques, rédigés, administrés et, parfois, composés par un Maître
Jacques qui, la plupart du temps, n'en vivait même pas. Les jour
naux révolutionnaires ne sont que des prolongements imprimés de
la tribune. Ils ressortissent à l'activité que nous appellerions de
loisir, à la poésie peut-être ! Leurs auteurs n'eussent jamais admis
qu'ils exerçaient un métier et ils auraient eu raison. Les écrivains
professionnels furent à peu près inexistants jusqu'à ce que la pre
mière législation sur le droit d'auteur (décrets de janvier 1791 et
90S Bernard Voyenne
juillet 1793) leur eût permis d'espérer vivre de leur plume. A for
tiori les journalistes se recrutaient-ils dans les rangs de ce que l'on
peut appeler, au sens large, l'amateurisme. On se lançait dans le
journalisme pour faciliter une carrière, ou parallèlement à une car
rière. Mais le journalisme lui-même n'en était pas une. Il en sera
ainsi dans toute la petite pres

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