Les lois et la politique de l avortement en Indonésie : un dilemme pour les femmes ? - article ; n°1 ; vol.65, pg 43-54
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Les lois et la politique de l'avortement en Indonésie : un dilemme pour les femmes ? - article ; n°1 ; vol.65, pg 43-54

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Archipel - Année 2003 - Volume 65 - Numéro 1 - Pages 43-54
Wening Udasmoro
Two laws regulate abortion in Indonesia today. Firstly, an existing article of the penal code that prohibits abortion in any case. Secondly, the recent Law on Health of 1992 that authorizes abortion for medical reasons. However, in practice, abortion is also accorded to married women whose contraception failed and this abortion can only be carried out in the clinics belonging to the Indonesian Family Planning Association (the PKBI). In this article, the author underlines particularly the negative effects of the legislation and the government policy on abortion which in fact deprive women of their rights to have their body at their own disposal.
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Wening Udasmoro
Les lois et la politique de l'avortement en Indonésie : un
dilemme pour les femmes ?
In: Archipel. Volume 65, 2003. pp. 43-54.
Abstract
Wening Udasmoro
Two laws regulate abortion in Indonesia today. Firstly, an existing article of the penal code that prohibits abortion in any case.
Secondly, the recent Law on Health of 1992 that authorizes abortion for medical reasons. However, in practice, abortion is also
accorded to married women whose contraception failed and this abortion can only be carried out in the clinics belonging to the
Indonesian Family Planning Association (the PKBI). In this article, the author underlines particularly the negative effects of the
legislation and the government policy on abortion which in fact deprive women of their rights to have their body at their own
disposal.
Citer ce document / Cite this document :
Udasmoro Wening. Les lois et la politique de l'avortement en Indonésie : un dilemme pour les femmes ?. In: Archipel. Volume
65, 2003. pp. 43-54.
doi : 10.3406/arch.2003.3749
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_2003_num_65_1_3749Udasmoro Wening
Les lois et la politique de l'avortement en Indonésie
un dilemme pour les femmes ?
Ce travail a pour but de présenter les lois et la politique de l'État indoné
sien en matière d'avortement et leur impact sur le droit des femmes à la pro
création 0). Sur le million et demi de femmes dont on estime qu'elles ont subi
un avortement en Indonésie, la moitié sont des femmes mariées ayant géné
ralement connu un échec avec la méthode du planning familial. La loi
n'autorise l'avortement que pour des raisons médicales (si, par exemple, la
femme est malade ou si le fœtus met sa vie en danger). Dans les autres cas, il
est toujours considéré comme un acte criminel. Le gouvernement permet
cependant aux cliniques de l'Association indonésienne du Planning familial
(Perkumpulan Keluarga Berencana Indonesia/PKBI) de pratiquer des avorte-
ments sur des femmes mariées en cas d'échec de la contraception.
Dans cet article, on traitera trois aspects de cette question. Premièrement,
comment le gouvernement explique-t-il le fait que ne doivent figurer dans la
loi que les seules raisons médicales ; deuxièmement, comment justifie-t-il sa
tolérance à l'égard de l'avortement pour les femmes mariées dont la méthode
du planning familial a échoué ; troisièmement, quels sont les effets de sa
politique sur la vie des femmes ?
1. Cet article est fondé sur une communication présentée à la Conférence annuelle suisse des
Sciences politiques (atelier sur les Études féministes et politiques), Fribourg (Suisse), 8-9
novembre 2001. Je remercie le Professeur Thanh-Huyen Ballmer-Cao (Université de Genève)
pour ses commentaires critiques et ses suggestions. Cet article fait suite à ma thèse de DEA :
« La politique de l'avortement et les public ideas en Indonésie : Symbiose entre religion, cul
ture et État» (Université de Genève, 2001).
Archipel 65, Paris, 2003, pp. 43-54 44 Wening Udasmoro
Pour les analyser, nous adopterons le point de vue des « idées reçues » (2)
et la perspective féministe. Les idées reçues constituent un concept import
ant, en raison de leur forte influence sur la politique de l'État en matière
d'avortement. La perspective féministe, quant à elle, considère que l'avort
ement fait partie du droit des femmes à contrôler leurs grossesses (Charles,
2000). De ce point de vue, c'est aux femmes seules qu'incombe le contrôle
de leur corps et non pas aux politiciens, aux avocats, aux religieux, ou aux
médecins. Cette perspective remplace le concept d'« avortement sur
demande» par celui du «droit à la procréation» ou du «droit des femmes à
choisir». Nous l'avons pris en considération car ce sont naturellement les
femmes les plus concernées par la réglementation de l'avortement.
La législation sur l'avortement en Indonésie
En ce qui concerne la législation sur l'avortement en Indonésie, il importe
de considérer les autorités religieuses et médicales. Les premières, ayant
sous leur contrôle des millions d'adeptes, ont un rôle important, car leur posi
tion dans de grandes organisations confessionnelles et des partis politiques
leur permet de participer, dans certains cas, aux prises de décision du gou
vernement. L'Association des ulémas indonésiens (MUI), par exemple, est
écoutée, aussi bien par le gouvernement que par la société, pour ce qui est
des questions concernant la vie quotidienne. Quant aux autorités médicales,
l'État s'appuie sur le groupe le plus puissant en matière de santé,
l'Association des médecins (IDI), pour prendre des décisions sur
l'avortement.
Il existe deux lois sur l'avortement en Indonésie. La première est un
article du Code pénal (Kitab Undang-Undang Hukum Pidana/KUHP), la
deuxième est la loi sur la santé de 1992, qui constitue un amendement à ce
même Code. La première loi interdit l'avortement. La deuxième l'autorise
pour raisons médicales uniquement. Ces deux lois sont toujours en vigueur,
ce qui signifie que, si tel cas d'avortement ne peut être réglé par la loi de
1992, il le sera par l'article du Code pénal. Nous allons ci-dessous retracer
l'histoire de ces deux lois.
V article du Code pénal indonésien sur V avortement
Après l'indépendance, le Code pénal indonésien a repris l'article sur
l'avortement du Code pénal néerlandais du 1er janvier 1918 qui considère comme un crime (Hull, Sarwono et Widyantoro, 1993). Cet
2. Nous traduisons ainsi la notion de public ideas, qui sont des idées massivement acceptées
par une société à un moment donné (cf. Yishai, 1993). Ces idées représentent des émotions
profondes de l'ensemble de la société, qui influencent le domaine public aussi bien que privé.
Elles prennent, chez chacun, la forme de croyances personnelles se développant inconsciem
ment, si bien que leurs aspects émotionnels les rendent résistantes au changement.
Archipel 65, Paris, 2003 Les lois et la politique de l'avortement en Indonésie 45
article, énoncé aux Pays-Bas, se fondait sur les enseignements du christiani
sme mettant l'accent sur l'importance de la vie humaine. Lorsqu'elle acquit
l'indépendance en 1945, l'Indonésie fit sienne le texte de son ancien coloni
sateur, qu'elle a continué à appliquer jusqu'à tout récemment encore.
Le principe du respect de la vie présent dans le Code pénal était tout à fait
conforme à la doctrine de l'islam, religion de la majorité des Indonésiens,
qui, à cette époque, étaient tout à fait opposés à l'avortement. Cette opposit
ion s'appuyait sur trois raisons fondamentales. La première était d'ordre rel
igieux. Selon le rite islamique shaféite (3>, auquel adhèrent les musulmans
indonésiens, l'avortement est interdit, quel que soit le motif. La deuxième
était d'ordre social. Après 1945 et jusqu'à la fin des années soixante, la sociét
é, alors traditionnelle, cantonnait les relations entre hommes et femmes céli
bataires dans les sphères religieuse et culturelle. Une relation trop intime
entre jeunes filles et jeunes gens était mal vue. Leur liberté était fortement
limitée. Ce contrôle de leurs relations permettait d'éviter un grand nombre de
grossesses hors mariage. La tradition consistant à marier les filles après leurs
premières règles allait aussi dans ce sens. La troisième raison était d'ordre
politique. Sukarno, un nataliste, refusait tout planning familial. Il voulait for
mer une grande nation, en lui assurant des ressources humaines massives
pour sa défense nationale (Koentjaraningrat, 1994, p. 14).
Les Indonésiens n'ont donc eu aucune difficulté à accepter l'article du
Code pénal néerlandais sur l'avortement. La société, l'État et les milieux rel
igieux du pays étaient tous du même avis : l'avortement devait être prohibé, et
les personnes le pratiquant, pour quelque raison que ce soit, même en cas de
danger pour la vie des femmes, devaient être punies.
La loi sur la santé de 1992
Alléguant que de nombreuses femmes connaissaient pendant leur gros
sesse des complications mettant leur vie en danger, mais que la législation
leur interdisait d'avorter (Hull, Sarwono et Widyantoro, 1993),

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