Les mouvements de citoyens est-allemands, 1989-1994. Chronique d un discours démocratique - article ; n°1 ; vol.42, pg 92-101
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Les mouvements de citoyens est-allemands, 1989-1994. Chronique d'un discours démocratique - article ; n°1 ; vol.42, pg 92-101

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Description

Mots - Année 1995 - Volume 42 - Numéro 1 - Pages 92-101
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 17
Langue Français

Extrait

René-Pierre Chibret
Les mouvements de citoyens est-allemands, 1989-1994.
Chronique d'un discours démocratique
In: Mots, mars 1995, N°42. pp. 92-101.
Citer ce document / Cite this document :
Chibret René-Pierre. Les mouvements de citoyens est-allemands, 1989-1994. Chronique d'un discours démocratique. In: Mots,
mars 1995, N°42. pp. 92-101.
doi : 10.3406/mots.1995.1955
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mots_0243-6450_1995_num_42_1_1955René-Кегге CHTORET
Les mouvements de citoyens
est-allemands, 1989-1994
Chronique d'un discours démocratique
précocement ont L'unification pu laisser achevée allemande penser, et que qu'ici, et la l'incorporation question la transition de la de démocratique consolidation la RDA à la démocs'était RFA
ratique, enjeu majeur dans les autres pays est-européens, ne se
posait plus ou, du moins, se réduisait à la simple assimilation
progressive du modèle socio-politique de la RFA. Nombre d'analyses
ont tôt fait de postuler, ainsi, une intégration rapide des deux
ensembles est — et ouest-allemands, nonobstant les avatars de la
transition économique, en constatant l'approbation populaire massive
de ce processus en 1990, l'unification formelle menée avec diligence
et exhaustivité par le transfert institutionnel dans les nouveaux
Lànder, ou le succès de l'implantation à l'Est du système ouest-
allemand de médiation des intérêts et de représentation politique,
malgré des différences notoires ; les principales manifestations de
résistance à cette logique intégratrice sont ravalées au rang de
simples effets pervers du legs communiste, de séquelles transitoires
condamnées à disparaître, qu'il s'agisse de l'emprise anesthésiante
d'une culture politique autoritaire, sujette, passive, voire d'une
« mentalité d'assisté », ou du maintien en sursis du parti néo
communiste.
Ces analyses optimistes sont pourtant loin de rendre compte de
la complexité du phénomène et se voient contredites par divers
signes dont la multiplication plaide en faveur de ceux qui considèrent
l'unification comme un processus à long terme d'acculturation
politique, plus lent et conflictuel que prévu. Celle-ci, en effet, ne
° Docteur en sociologie politique Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
92 pas sans réactions et involutions caractérisées par une polarisation va
identitaire entre Ossis (Allemands de l'Est) et Wessis (Allemands
de l'Ouest), l'émergence d'un ressentiment de la part des premiers
et d'un fossé psychologique, mais surtout, sur le terrain politique,
par la cristallisation d'une spécificité est-allemande qui s'exprime
dans la réaffirmation distance vis-à-vis du système politique
actuel et d'un phénomène d'idéalisation de la RDA, ainsi que dans
les évolutions récentes des comportements consacrant un paysage
politique original.
Les soubresauts de l'intégration démontrent l'échec, au moins
partiel, de l'importation du modèle représentatif ouest-allemand dans
sa capacité à assurer la représentation effective des citoyens est-
allemands, à ce niveau fondamental de leurs identifications sym
boliques et normatives avec la démocratie et, en particulier, vis-à-
vis des partis politiques. Appréhendée au travers d'une approche
sémiotique de l'idéologie et de la culture perçues comme des
systèmes de sens, des cadres symboliques d'interprétation du réel,
l'évolution du discours démocratique des mouvements de citoyens,
premiers hérauts de la révolution de 1989 et principaux vecteurs
d'une revendication élaborée, confirme, à cet égard,
la pérennisation d'un sens politique potentiellement critique et même
réfractaire à l'égard du modèle occidental. Or la connaissance de
leur idéologie démocratique se révèle doublement pertinente dans
la perspective de l'intégration politique des nouveaux Lànder
puisque, d'une part, c'est en leur sein que se sont développés
ouvertement une discussion et des conflits renouvelés autour de
l'enjeu de l'adaptation au nouveau système démocratique, et que,
d'autre part, s'épanouit chez eux une vision apolitique de la
démocratie qui, affectant les fondements de la médiation politique,
semble porteuse d'un éclairage approfondi sur les difficultés génér
ales d'acclimatation de la démocratie représentative dans les nou
veaux Lànder.
Héritage révolutionnaire
et contraintes post-transitionnelles
A la différence des autres pays est-européens, les mouvements
de citoyens nés de l'opposition démocratique au pouvoir socialiste
ont subi en RDA une rupture rapide de l'osmose entre eux et le
mouvement populaire : leur marginalisation électorale au printemps
93 1990 consacrera la fin de cette phase révolutionnaire unanimiste.
Les processus de décantation, scissions, défections, reclassements,
vont s'arrêter autour du noyau stable des mouvements de citoyens
constitué par les trois organisations qui seront à la base de la
future Alliance 90 Biïndnis 90) : Démocratie maintenant, Initiative
pour la paix et les Droits de l'homme, et le Nouveau Forum, la
principale organisation du soulèvement populaire de 1989 ; ils sont
surtout le résultat des choix stratégiques et identitaires des acteurs
de ces mouvements qui ont opté pour un profil politique original,
intempestif, défini à partir de deux enjeux essentiels.
Les de citoyens se sont ainsi distingués sur la base
de l'enjeu national par leur revendication d'une unification différée,
sous conditions et sur un pied d'égalité, exprimant leur désir de
préserver une spécificité est-allemande. C'est, d'autre part et surtout,
la question de l'identité politique propre à ces mouvements, et
notamment de leurs formes d'organisation, qui constitue le discr
iminant majeur : le sens de leur appellation de « mouvements de
citoyens » suggère la volonté de se présenter comme une entité
politique nouvelle, refusant avec force le statut de parti au nom
d'une critique de la démocratie représentative, d'un projet de
démocratie directe privilégiant l'action extra-parlementaire et le
dialogue social sur le mode des « tables rondes » qui restera, pour
eux, une expérience fondatrice et la norme démocratique de réfé
rence, et, enfin, d'une éthique forgée au contact de l'Eglise
évangélique, génératrice de préoccupations (paix, Tiers Monde,
écologie) méta-politiques. Ce sont ces catégories et schemes de
perception qui fondent très tôt leur refus de se poser comme une
véritable opposition politique, prête à incarner une alternative au
pouvoir en place, au nom d'une éthique de la résistance plus
orientée vers un travail pédagogique de démocratisation de la société,
trahissant « un rapport problématique avec le pouvoir » l.
1. Marianne Schulz, «Neues Forum», dans Helmut Muller-Enbergs et al. (hrsg),
Von der Illegalitàt ins Parlament. Werdegang und Konzept der neuen Burgerbewe-
gungen, Berlin, С Links Verlag, 1992, p. 28. Notre article s'appuie sur une analyse
des publications émanant des mouvements de citoyens (notamment leur revue Bùndnis
2000), et des données empiriques fournies par les travaux de Jan Wielgohs,
« Auflôsung und Transformation der ost-deutschen Burgerbewegungen », Deutschland
Archiv, 4, 1993, p. 426-434 ; Jan Wielgohs, Marianne Schulz, Helmut Muller-Enbergs,
Bùndnis 90. Entstehung, Entwicklung, Perspektiven, Berlin, GSFP, 1992 ; les contri
butions réunies dans Helmut Muller-Enbergs et al. (hrsg), Von der Illegalitàt ins
Parlament, op. cit. ; Jan Wielgohs, Marianne Schulz, « Von der friedlichen Revolution
in die politische Normalitàt », dans Hans Joas, Martin Kohli, (hrsg), Der Zusammen-
bruch der DDR, Francfort, Suhrkamp, 1993, p. 220 et suiv. ; Lothar Probst,
Ostdeutsche Burgerbewegungen und Perspektiven der Demokratie, Cologne, Bund
Verlag, 1993.
94 définition identitaire fut rapidement déterminée par les effets Cette
des deux contraintes structurelles majeures qui commencent à être
perçues avant la fin de 1990. Les mouvements de citoyens ont
d'abord été particulièrement touchés par l'effondrement des pers
pectives de mobilisation collective dans les nouveaux Lànder et
l'impossibilité de revitaliser la société civile, dans un contexte
éminemment défavorable de sortie du totalitaris

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