Les premiers chrétiens et les Dieux - article ; n°1 ; vol.14, pg 3-16
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Description

Mélanges d'archéologie et d'histoire - Année 1894 - Volume 14 - Numéro 1 - Pages 3-16
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1894
Nombre de lectures 8
Langue Français

Extrait

Edmond Le Blant
Les premiers chrétiens et les Dieux
In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 14, 1894. pp. 3-16.
Citer ce document / Cite this document :
Le Blant Edmond. Les premiers chrétiens et les Dieux. In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 14, 1894. pp. 3-16.
doi : 10.3406/mefr.1894.6780
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-4874_1894_num_14_1_6780PREMIERS CHRETIENS ET LES DIEUX LES
Les quelques traits que je vais noter nous reportent, pour
la plupart, aux temps lointains d'une lutte maintenant oubliée,
mais qui, pendant de longs siècles, a tenu dans l'histoire une
place capitale. Deux cultes, l'un fort de son antiquité, sou
tenu par l'appui d'une aristocratie puissante, l'autre riche
d'une sève nouvelle qui devait régénérer le monde, étaient
en présence, attaqués, défendus avec une ardeur égale. Ce
qu'opposaient à leurs ennemis, en même temps qu'un courage
inébranlable, ceux qui sortirent vainqueurs de ce combat, ce
qu'ils pensaient des dieux et des idoles devant lesquelles on
le« venait traîner, n'est point, par le détail, chose si exacte
ment connue que l'on n'y puisse jeter un rapide regard.
On sait comment, par ignorance, souvent aussi par des
erreurs voulues, les païens portaient contre les fidèles les ac
cusations les plus étranges. Point n'était besoin à ces derniers
rli-1 rien imaginer ni de chercher au loin pour démontrer, pour
proclamer la folie et riinpureté du vieux culte. Aux mains de
tons étaient les livres qui disaient l'histoire des dieux, leurs
forfaits, leurs débauches et le détail de cette généalogie dont
le trouble égayait les païens meines. Dans la Cistdlaria de
Pliai te, i.i η personnage veut invoquer la protection des im
mortels : " Que la reine .Junon. dit-il, cette fille du grand
Fupiter, fjue Saturne, son oncle...... u Par Castor _, lui répli-
K c'est son père ... " Que la puissante Cybèle. ijiu-'-t-on,
son. aïeule... „. c Mais non; c'est sa mere. . L'homme reprend: LES PREMIERS CHRÉTIENS ET LES DIEUX. 4
" Que Junon, sa fille, que Saturne, son oncle... Eh! tu nie
troubles, et je ne sais plus ce que je veux dire „ (1).
Moins facile, l'interlocuteur aurait pu l'arrêter une fois
de plus, car la fable faisait aussi de Junon la sœur et l'épouse
de Jupiter. Au VIe siècle après le Christ, Grégoire de Tours
le rappelait encore, lorsqu'il mettait en scène Clotilde s' ef
forçant de convertir Clovis (2). De longues années après, on
allait toujours répétant, dans les campagnes, que les dieux
s'étaient engendrés les uns les autres; et, de cette affirmation,
les chrétiens se faisaient une arme. " Gardons-nous „, écrivait-on
" gardons-nous au grand apôtre des Allemands, saint Boniface,
de combattre ceux qui parlent de la sorte. Rien ne saurait
mieux établir que les prétendus immortels n'ont pas existé de
tout temps, et que, si le monde a eu un commencement, il a
dû avoir un créateur „ .
Un système imaginé trois siècles avant la venue du Christ
concordait avec la croyance païenne. Evhémère voyait dans les
dieux de l'Olympe des hommes divinisés par la superstition
populaire; Uranus leur aïeul à tous, Saturne, Jupiter avaient
été des rois dont il énumérait la descendance et retraçait l'his
toire, s'appuyant, disait-il, sur d'antiques inscriptions conser
vées dans les temples (3). Les Pères s'étaient empressés d'ap
plaudir aux paroles du philosophe qui voulait voir ainsi de
simples mortels dans les êtres dont on faisait des dieux. " Omnes
dii gentium daemonia „, avait dit le Psalmiste f4). Esprits venus
de l'enfer, ou morts divinisés, les hôtes de l'Olympe n'étaient
pour les fidèles que des créatures souillées de tous les crimes;
>'\) Act. IL se. 1.
(2) Ilistoria Francorv.ra, L. II, c. XXIX.
'3) Cicero, De natwrn.- deorwm,, L. I, c. XLII; Lactaxrfc. Lrmt. die,
L. I, c XI.
'4} XCV\ 5. LES PREMIERS CHRETIENS ET LES DIEUX. 5
leurs débauches, leurs actes infâmes révoltaient la conscience
humaine. " A ces dieux de la Grèce „, écrivait Clément d'A
lexandrie, " je préfère encore les animaux grossiers qu'adore
FEg3^pte; ce ne sont là du moins que des bêtes brutes, et non
des monstres d'impudeur „. (1).
Un fragment attribué à Tertullien énumère les lois sous
le coup desquelles tombait à la fois Jupiter, comme fils impie,
comme corrupteur (2) ; et, si ce texte ne mérite pas une en
tière confiance, au moins la pensée dont il témoigne était-elle
bien dans l'esprit des fidèles. Je la retrouve, dès le second
siècle, chez saint Justin (3) ; plus tard, amené devant le juge,
un martyr s'écrie, en rappelant les crimes des immortels: " Vos
lois ne punissent-elles pas de tels forfaits ? „ (4). Jupiter, disait
le poète Prudence, Jupiter, ne saurait échapper, s'il devait comp
araître en justice, h l'application de la loi Julia; la loi Scan-
tinia le jetterait dans les fers (5). Même pensée chez Firmicus
Maternus, alors qu'il rappelle les infâmes passions des faux
dieux, l'amour de leur maître pour Ganymède, ceux d'Hercule
pour Hylas, d'Apollon pour Hyacinthe u funestes exemples par
lesquels chacun peut se croire permis ce que la législation ro
maine punit des peines les plus graves« (6).
Vainement les païens cherchaient-ils à dégager leur culte
des traits bizarres ou monstrueux qu'avaient ainsi imaginés les
Grecs (7); en vain proclarnaient-ils chose insensée d'en ins-
(1) Cohortatio ad graecos. Edit. Potter, p. 33.
(2) De exsecrandis dits gentium. Ed. Dehler, T. II p. 766.
(3) Oratio ad graecos, c. II.
(4) Passio S. Theodoreti Ancyrani, § 2i (Ruin art, Acta sincera,
p. 340).
(5) Peristeph. Hymn. X, s. Roman, v. 201-205.
(6) De errore profanarum religionum, C. XII. Cf. Digest. L. I,
tit. XVIII. 1. 21; L. XI, tit. Ill, 1. 2; L. XLVIII, tit. V, 1. 6; Valer.
Maxim. L. VI, c. I. § 7, 10, 11, 12; Pseudo-Quintil. Declam. III.
(7) S. Cyrill. Contra Julian. Ed. Migne, T. IX, pag. 567. LES PREMIERS CHRÉTIENS ET LES DIEUX. 6
truire les jeunes gens et les simples (1) ; en vain enseignait- 011
publiquement dans les temples comment devaient être comp
rises, interprétées les inventions mythologiques (2), comment
sous les récits de la fable se cachaient de pures allégories (3).
Ce qui devait frapper, ce qui frappait l'esprit, comme les yeux
de la multitude, c'était le brillant étalage de toute une théo
logie d'impureté, c'étaient les œuvres des sculpteurs, des gra
veurs, des peintres, des brodeurs, des mosaïstes reproduisant
à l'infini, et jusque dans la maison de famille, les étranges aven
tures des habitants de l'Olympe, l'image de Vénus surprise
aux bras de Mars, le groupe de Jupiter et de Lèda (4). L'un
des vôtres, écrit saint Augustin, ne nous montre-t-il pas un
jeune homme excité au mal par la vue d'une fresque repré
sentant l'aventure de Danaé? (5), II n'était point de faute qui
ne pût trouver, qui ne trouvât ainsi, dans l'histoire même des
dieux, et son exemple et son excuse (ß).
Dans la controverse engagée entre les tenants des deux
cultes, chacun des partis s'ingéniait à railler les croyances de
l'adversaire. C'était chose aisée aux fidèles, car leurs ennemis
eux-mêmes leur avaient singulièrement facilité la tâche. Au
théâtre, comme dans leurs œuvres d'art, les idolâtres paro-
(1) Th.eodoret. Graecarum affectionum curatio, Sermo III, T. IV,
pag. 769.
(2) S. Augustin. Epist. XCI, Nectario, § 5.
(3) Cf. Euseb. Praeparatio evangelica, Lib. Ill, C. IV à XII :
Prudent. Contra Syrumachum, L. I, v. 297 et suiv. ; Peristepli. Hymn.
Χ, ν. 399.
(4) Clem. Alex. Cohortatio ad yentes, Ed. Potter, p. 53; Theodoret.
Graecarum aff'ectionum curatio, Sermo VII, T. IV, p. 884.
(5) S. Augustin. Epist. cit. § 4.
(fi) Tertullian. Apolog. IX : « Incesti qui magis quam quos ipse
Jupiter docuit?». Firmicus Maternus, § 12: «Adulterio delectatur
aliquis: Jovem respicit et inde cupiditatis suas fomenta conquirit,
probat, imitatur et laudat, quod deus smis in cygno fallit, in tauro
rapit, ludit in satyro » etc. LES PREMIERS CHRÉTIENS ET LES DIEUX. 7
•liaient les aventures de ceux-là même qu'ils adoraient (1). Sur
les reliefs d&#

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