Louvois, ministre d État (1673-1691) - article ; n°1 ; vol.15, pg 37-46
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Description

Histoire, économie et société - Année 1996 - Volume 15 - Numéro 1 - Pages 37-46
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 22
Langue Français

Extrait

Jean Berenger
Louvois, ministre d'État (1673-1691)
In: Histoire, économie et société. 1996, 15e année, n°1. pp. 37-46.
Citer ce document / Cite this document :
Berenger Jean. Louvois, ministre d'État (1673-1691). In: Histoire, économie et société. 1996, 15e année, n°1. pp. 37-46.
doi : 10.3406/hes.1996.1849
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1996_num_15_1_1849LOUVOIS MINISTRE D'ETAT
(1672-1691)
par Jean BÉRENGER
Quand on évoque Louvois, on associe immédiatement à son nom et à son
œuvre le secrétariat d'État à la guerre, à la création duquel sa famille est
indissolublement liée. Pourtant il a siégé durant près de vingt ans, de 1672 à
sa mort, au conseil d'En haut, en tant que ministre d'État, tout en continuant
d'exercer des fonctions dans un ministère technique, dont nous n'avons pas à
traiter ici. Au conseil d'En haut, il orienta vigoureusement la politique général
e de la France, en particulier dans les années 1680, au point que les historiens
de l'école positiviste lui ont attribué toutes « les erreurs » qu'ils reprochaient
à Louis XIV.
S'il atteignit ces sommets du pouvoir, c'est en partie grâce à la complicité de
son père qui porta déjà bien haut la fortune des Le Tellier. En effet Michel Le
Tellier, son père, d'abord secrétaire d'État de la guerre, imprima une marque
indélébile à ce département à partir de 1643, date de son entrée en fonction, et
contribua à la victoire des armées françaises durant la guerre de Trente Ans en
fournissant aux généraux de Louis XIV le support logistique, encore bien
imparfait, qui contribua à leurs succès sur le terrain. Dès 1662, Michel Le
Tellier réussit à transmettre à son fils le secrétariat d'État à la guerre, dont son
petit-fils Barbezieux devait hériter à la mort de Louvois en 1691, de sorte que le
clan des Le Tellier a imprimé sa marque à ce département pendant plus d'un
demi-siècle, créant une administration des guerres « à la française ».
Michel Le Tellier servit de modèle à son fils, puisque son action ne se
puisqu' après avoir été l'un des fidèles limita pas à ce ministère « technique »,
de la Régente durant la Fronde il fut l'un des bénéficiaires de la « révolution
de 1661 » : Louis XIV, à la mort de Mazarin, en le nommant ministre d'État,
l'associa au pouvoir suprême en l'invitant à siéger au conseil d'En haut, qui
se substitua alors au premier ministre pour diriger la politique générale du
royaume '.
Quant aux attributions du conseil d'En haut, l'ambassadeur vénitien Pietro
Venier nous les rappelle peu après la mort de Louvois dans son rapport de fin
de mission : « Les Conseils se réunissent très régulièrement mais par dessus
1. J. Bérenger, « Pour une enquête européenne : le problème du Ministerial au XVIIe siècle », Annales
E.S.C., 1974, p. 171-189.
HES 1996 ( 15e année, n° 1) 38 Histoire Économie et Société
tout avec une grande régularité, le Conseil d'État 2 se réunit toute l'année,
tous les mercredis, jeudis et dimanches, dans lequel on examine les matières
politiques, économiques et militaires et tout ce qui regarde l'État. » 3
Le jeune roi, fidèle aux ultimes recommandations de Mazarin avait en effet
décidé, aussitôt après la mort du Cardinal, de prendre en main la politique
générale du royaume avec l'aide de quelques personnes en qui il avait toute
confiance : « Pour les intérêts les plus importants de l'État et les affaires
secrètes, où le petit nombre des têtes est à désirer autant qu'autre chose et qui
seules demandaient plus de temps et plus d'application que toutes les autres
ensemble, ne voulant pas les confier à un seul ministre, les trois que je crus y
pouvoir servir le plus utilement furent Le Tellier, Fouquet et Lionne. » 4
Voilà pour la composition du Conseil et nous verrons que le roi est demeur
é fidèle à ce principe. S'il a retenu Michel Le Tellier, secrétaire d'État depuis
1643, c'est pour sa fidélité, son assiduité et sa grande connaissance des
affaires. Tout à fait représentatif de la grande robe parisienne, il avait com
mencé sa carrière comme conseiller au grand Conseil et avait montré ses
capacités de gestionnaire comme intendant de l'armée de Piémont ; c'était un
homme pieux, sage et modeste, qui sut toujours se tenir dans une prudente
réserve, et par son caractère il était bien différent de son fils Louvois. Lionne,
chargé des affaires étrangères n'eut le secrétariat d'État qu'en 1666, après la
mort du titulaire Loménie de Brienne, qui avait refusé de s'en défaire. Esprit
brillant et cultivé, c'était le diplomate du Conseil, qui avait été le bras droit de
Mazarin pour les affaires étrangères comme Jean-Baptiste Colbert avait été le
fidèle adjoint du Cardinal pour les affaires financières. Lionne avait participé
à toutes les grandes négociations postérieures au congrès de Westphalie. La
carrière du surintendant Fouquet devait durer six mois, car, après son arresta
tion à Nantes au début de septembre 1661, Colbert, simple intendant de
finances, vint remplacer le surintendant comme ministre d'Etat et le conseil
d'En haut acquit la forme définitive qu'il conservera jusqu'à la mort de Louis
XIV en septembre 1715 : fidèle à une doctrine qu'il a exposée lui-même au
grand Dauphin dans les Mémoires destinés à son instruction, le roi partagea le
pouvoir avec cinq personnes au plus ; il écarta du Conseil les membres de la
famille royale, les princes du sang et l'aristocratie de naissance, pour n'appel
er aux réunions du Conseil que des représentants de quelques dynasties
ministérielles qui lui devaient tout. Ces clans familiaux, dévoués au roi mais
rivaux, s'équilibraient pour le plus grand bien de l'État : le clan Colbert, qui
demeura finalement aux affaires jusqu'en 1715 en la personne de Colbert de
Torcy, neveu du grand Colbert, secrétaire d'État aux affaires étrangères depuis
2. Il est bien évident que pour lui le conseil d'État {Consiglio di Stato) correspond à ce que nous appe
lons le conseil d'En haut.
3. Relation finale de Pietro Venier, ambassadeur de Venise auprès de Louis XIV, 1695, original italien,
Relazione degli Ambasciatori veneti nel 17° Secolo, Francia, II, p. 509.
4. Mémoires de Louis XIV destinés à l'instruction du Dauphin pour l'année 1661, édition J. Longnon,
Paris, 1927, p. 46. VOIS MINISTRE D' ETAT ( 1 672- 1 69 1 ) 39 LOU
1696, le clan Le Tellier, qui s'éclipsa après la mort brutale de Louvois, et
d'autres clans, dont le plus notable est celui des Pontchartrain, qui tient le
devant de la scène à partir de 1689 jusqu'en 1714, date à laquelle le chancel
ier décida de se retirer.
Jamais il n'a été question de la part du roi de rétablir le poste de principal
ministre, qui lui rappelait trop le maire du palais des rois fainéants méroving
iens, dont l'histoire de Mézeray lui avait fait horreur dès sa prime jeunesse.
Mazarin, sur son lit de mort, l'avait mis en garde contre les dangers d'une
autorité parallèle à la sienne, en théorie subordonnée, en pratique égale ou
supérieure, car un premier ministre pouvait se constituer une clientèle en dis
tribuant faveurs, emplois et pensions à sa place. Le système du conseil étroit
avait l'avantage de le laisser maître de la situation, puisque la majorité des
avis ne l'engageait même pas. Louvois était trop fin politique pour s'imaginer
qu'il en pourrait être autrement. Le débat était ailleurs : savoir si l'un des
deux clans dominer le conseil d'En haut ; et, à partir des années
1670, une lutte très âpre s'est développée entre les Colbert et les Le Tellier
pour tenter de dominer le conseil d'En haut. Faute de devenir premier
ministre, il n'était pas interdit à Louvois d'espérer qu'il dominerait un jour le
conseil d'En haut et nous allons voir comment les Le Tellier, ou plus exacte
ment Louvois avec la complicité de

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