Métaphore, contexte, analogie : « Le lézard » de Francis Ponge - article ; n°1 ; vol.110, pg 103-117
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Métaphore, contexte, analogie : « Le lézard » de Francis Ponge - article ; n°1 ; vol.110, pg 103-117

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Description

Langue française - Année 1996 - Volume 110 - Numéro 1 - Pages 103-117
Joseph SANCHEZ : Métaphore, contexte, analogie ; LE LEZARD de Francis Ponge. I introduce a hypothesis on the metaphorical process, based on a study of Francis Ponge's poem Le Lézard (« The Lizard »). Within a cognitivist framework, I try to define the concepts of context and analogy in the way they are linked in the production of metaphorical sentences.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 359
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Jean-Pierre Sanchez
Métaphore, contexte, analogie : « Le lézard » de Francis Ponge
In: Langue française. N°110, 1996. pp. 103-117.
Abstract
Joseph Sanchez : Métaphore, contexte, analogie ; "Le Lézard" de Francis Ponge.
I introduce a hypothesis on the metaphorical process, based on a study of Francis Ponge's poem Le Lézard (« The Lizard »).
Within a cognitivist framework, I try to define the concepts of context and analogy in the way they are linked in the production of
metaphorical sentences.
Citer ce document / Cite this document :
Sanchez Jean-Pierre. Métaphore, contexte, analogie : « Le lézard » de Francis Ponge. In: Langue française. N°110, 1996. pp.
103-117.
doi : 10.3406/lfr.1996.5345
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1996_num_110_1_5345Joseph SANCHEZ
Paris 8 - URA 1720
METAPHORE, CONTEXTE, ANALOGIE
LE LÉZARD DE FRANCIS PONGE*
INTRODUCTION
Les textes poétiques donnent rarement au linguiste matière à analyse théorique, y
compris lorsque le phénomène étudié, sans être spécifique à la poésie, trouve en celle-ci des
illustrations nombreuses et variées. La métaphore en est un exemple frappant. Malgré
l'enjeu théorique qu'elle représente ], les travaux qui lui sont consacrés se fondent en
général sur un corpus d'exemples dont le contexte immédiatement accessible est nécessai
rement celui que le linguiste crée par son étude ou qu'il spécifie au besoin pour justifier sa
position. On pourrait, me semble-t-il, dire du contexte ce que Kleiber rappelle du recours
qui était fait à la pragmatique avant qu'elle ne renouvelle l'approche de la métaphore ; il
sert souvent de roue de secours aux analyses défaillantes 2. Son invocation ad hoc impose
qu'en toute rigueur soit précisé le rôle du contexte dans la définition du processus
métaphorique. Il importe donc de considérer des métaphores qui comportent le contexte
de leur interprétation sans qu'il soit nécessaire de l'imaginer ou de s'en tenir au
par défaut des énoncés pris isolément. Un poème satisfait généralement à cette exigence.
Je me propose ainsi d'analyser LE LÉZARD de Francis Ponge avec le double objectif
d'interpréter le réseau métaphorique que développe le texte et d'évaluer la fonction du
contexte dans l'interprétation des métaphores. Je mènerai l'analyse dans le cadre de la
pragmatique cognitive, à partir des notions de contexte et ď analogie définies par Sperber
et Wilson 3. Je proposerai ainsi une conception de la métaphore qui intègre la notion de
contexte en la reliant à celle d'analogie.
1 . Les métaphores du petit animal : trois hypothèses de base
Etant donné que l'ensemble des contextes accessibles pour l'interprétation d'une
expression métaphorique est ordonné par une relation d'inclusion qui correspond à leur
ordre d'accessibilité 4, et puisque mon but est de déterminer la fonction du contexte dans
* Le texte est donné en annexe.
1. La métaphore constitue, on le sait, un banc d'essai classique pour toute nouvelle théorie
sémantique. G. Kleiber (1994a), p. 177.
2. G. Kleiber (1984), p. 124.
3. Sperber et Wilson (1986), notamment le chapitre III (pp. 209-215) pour la notion de conteste, et
le chapitre IV, pour celle d'analogie (p. 348). Bien que je retienne ces notions, je ne partage pas
Г assimilation des métaphores aux énoncés approximatifs, idem chapitre IV (pp. 348-356). Pour une
discussion de cette position, voir Kleiber (1994a), pp. 184-187, et Gouvard (1995).
4. Idem, chapitre III, pp. 215-227.
103 l'interprétation des métaphores, je commenterai les métaphores du LÉZARD dans l'ordre
que détermine l'accessibilité de leur contexte. C'est en fait l'ordre même de la lecture, qui
va du plus simple au plus complexe. Je ferai cependant un sort à part aux métaphores dont
la valeur métalinguistique modifie l'appréhension globale du texte et s'avère particulière
ment intéressante pour la définition du processus métaphorique.
La première métaphore recevant une interprétation immédiate a pour cible le lézard,
en (1,4) ; un chef-d'œuvre de la bijouterie préhistorique. Cette spontanéité de l'interpré
tation est liée aux énoncés qui, dans ce paragraphe, représentent le petit animal.
Celui-ci est d'abord associé au heu de son apparition, le mur de fond de jardin, dont
la métaphorisation en mur de la préhistoire, n'est pas d'emblée interprétable (j'y revien
drai), mais fait en tout cas du reptile une émanation de la préhistoire. Quelques-unes de
ses caractéristiques physiques ou comportementales sont ensuite évoquées ; sa taille,
petit, sa silhouette, formidablement dessiné, comme un dragon chinois, son comporte
ment, brusque mais inoffensif.
Les traits ainsi sélectionnés ne constituent pas une description du lézard ; les termes
en sont vagues (un petit animal, brusque, inoffensif) ou révèlent une subjectivité à travers
des jugements (formidablement dessiné, et ça le rend bien sympathique) , des métaphores
(mur de la préhistoire) et une comparaison (comme un dragon chinois). Ils ne permett
raient pas au lecteur ignorant de ce qu'est un lézard d'en imaginer l'aspect mais renvoie
à un savoir manifeste 5 mobilisé dès la description définie du titre. Il convoque en effet
chez le lecteur une représentation a priori, en fonction de la compétence encyclopédique
dont celui-ci dispose.
Le premier paragraphe nous renvoie ensuite à une expérience de l'enfance, très
commune, celle du mur de fond de jardin où apparaît le petit saurien. L'absence de
déterminant dans le GN de de (et non du fond du jardin), transforme
d'ailleurs la détermination de mur en une caractérisation et classe celui-ci dans une
sous-catégorie de murs dont il serait possible de convoquer la représentation.
L'interprétation immédiate des expressions qui représentent le lézard permet à
l'analogie de s'exercer d'emblée entre la source et la cible de la métaphorisation. En effet,
la reprise du syntagme un petit animal par un chef-d'œuvre de la bijouterie préhistorique
suppose l'identité des deux objets désignés et induit une interprétation analogique du
syntagme de reprise ; or les traits sélectionnés pour constituer le concept-cible de lézard
(petit, formidablement dessiné, préhistorique) peuvent aussi s'appliquer au concept-
source, chef-d'œuvre de la bijouterie préhistorique. L'analogie, en dégageant une identité
partielle entre les concepts des deux objets, induit l'interprétation métaphorique de
chef-d'œuvre de la bijouterie préhistorique. La comparaison du reptile avec un dragon
chinois prépare d'ailleurs l'analogie en associant la monstruosité apparente que le lézard
doit à son origine préhistorique et l'esthétique de l'objet artisanal qu'il devient dans
l'expression métaphorique.
L'expression un chef-d'œuvre de la bijouterie préhistorique est ainsi reconnue et
interprétée comme métaphore sans qu'il soit nécessaire de supposer une lecture littérale,
jugée inacceptable, entraînant l'interprétation métaphorique. En fait, la littérale
de l'expression participe à l'induction de son interprétation métaphorique ; elle fournit le
concept de l'objet à la source, comme pour le lézard, en fonction de la représentation a
priori que le lecteur peut former d'un chef-d'œuvre de la bijouterie préhistorique. Trois
facteurs interviennent donc dans l'interprétation métaphorique de cette expression ; la
5. Idem chapitre I, p. 65.
104 formation préalable des concept-source et cible, ensuite l'équivalence, marquée dans le
texte, des objets définis par ces concepts, enfin la transformation de l'équivalence en lien
analogique. Le contexte minimal retenu pour l'interprétation métaphorique rassemble
donc les propositions définissant le petit animal et le chef-ďceuvre de la bijouterie
préhistorique. Le contexte ainsi défini ne suffit pas à produire cette interprétation mais il
exerce sur elle une contrainte décisive à la fois sur sa réalisation et sur son résultat.
Les métaphores qui représentent ensuite l'apparence ou les déplacements du lézard,
c

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