Nouveau regard sur Śiva-Īśvara au Cambodge - article ; n°1 ; vol.89, pg 145-182
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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 2002 - Volume 89 - Numéro 1 - Pages 145-182
38 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 7
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Pou-Lewitz
Nouveau regard sur Śiva-Īśvara au Cambodge
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 89, 2002. pp. 145-182.
Citer ce document / Cite this document :
Pou-Lewitz. Nouveau regard sur Śiva-Īśvara au Cambodge. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 89, 2002.
pp. 145-182.
doi : 10.3406/befeo.2002.3565
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_2002_num_89_1_3565Abstract
Saveros Pou
Afresh look at Śiva-Īśvara in Cambodia
While carrying out linguistic research through these last twenty-odd years, I have been struck by the
close relationship between the spiritual system, commonly termed the "religion", of the Khmer people,
and the means of expression (language, arts) of the entire community. The more I got involved in
linguistic analysis and collected data, the more I became aware of the "interaction" of the two currents of
research with regard to every period of history. In the meantime, I became strongly interested in the
lingering success-story of the main Brahmanical gods in Theravādin Cambodia, in particular that of
Śiva-Īśvara, our Brah Īsūr, present in every nook and cranny, so to speak, of Cambodian territory and
culture. This led me to attempt to sketch his portrait - as I have also done with other gods, including
Rama of the Khmer Rāmakerti. Recently discovered inscriptions have brought to light lots of new
information on Īśvara and his kin, as well as his powerful linga, which speaks of the impact they have
made on Khmer people's mentality. I have therefore been able to take a step forward in presenting a
new, more detailed portrait of the god, who is alien to Cambodia's Buddhist system, and yet continues
to be worshipped as the country's and community's protector and a bestower of success.
Résumé
Saveros Pou
Nouveau regard sur Śiva-Īśvara au Cambodge
Durant mes dernières vingt années de recherches linguistiques, j'étais frappée par le rapport étroit entre
le système spirituel - on parle plus simplement de « religion » - du peuple khmer et les moyens
d'expression (langue et arts) dont dispose toute la communauté. Un long maniement de textes et leur
analyse de plus en plus approfondie, jusqu'à atteindre l'élément lexical minimal ou « mot », avaient pour
principal effet de me dessiner de plus en plus clairement la société khmère ainsi que sa pensée,
laquelle n'a cessé d'évoluer depuis le début de l'histoire. Parallèlement, je scrutais plus minutieusement
les grandes figures divines brahmaniques en terre khmère, en particulier le dieu Śiva-Īśvara, notre
Brah Īsūr, qui est présent partout dans la vie de la communauté theravādin. J'esquissais alors son
portrait, toujours au moyen de documents linguistiques, comme je faisais ceux des autres dieux, ainsi
que notre Brah Rāma. Des découvertes épigraphiques récentes me confortèrent dans cette voie socio-
linguistique, et de surcroît dévoilèrent des faits inattendus et percutants relatifs à îsvara et aux siens, à
son puissant linga, et donc leur impact sur la mentalité des Khmers. Ces faits nouveaux s'ajoutent aux
nombreuses informations recueillies antérieurement en un heureux agencement, si révélateur que j'ai
fait un nouveau pas en présentant un portrait agrandi du grand dieu, qui est, faut-il le rappeler, à l'écart
du bouddhisme actuel, mais qui est toujours vénéré comme garant du succès et protecteur du pays et
de toute la communauté.Nouveau regard sur Šiva-Išvara au Cambodge
Saveros Pou*
J'ai évité à dessein de parler ici de « sivaïsme » ou de religion de Šiva du Cambodge,
car cette religion florissante dans le passé (Vle-Xllle siècles), dominant de loin d'autres
religions brahmaniques et le bouddhisme, s'est écroulée en même temps que toute la
structure religieuse ancienne, laquelle fut remplacée par un nouveau système religieux, à
savoir le bouddhisme theravâda, reconnu religion officielle aujourd'hui. En théorie, donc,
faute de structure propre, il ne convient point de parler de sivaïsme à propos du Cambodge
actuel. Mais, en pratique, le dieu Siva-ïsvara, ou Brah Isur, est toujours présent dans la vie
spirituelle du pays, sinon dans la culture, à différents niveaux de la société, et perceptible
par tous les observateurs. Les profanes, ne voyant en lui qu'un grand magicien, ont du mal
à le saisir dans sa véritable identité, et en conséquence en font facilement une figure des
superstitions populaires. Les spécialistes du Cambodge ancien, de leur côté, n'y
trouveront pas non plus d'écho de ce qu'ils ont appris du passé, et établi, car il leur
manque une connaissance approfondie du khmer moderne, seul moyen de communication
tant dans la lecture des documents que dans la perception de la tradition populaire.
Or donc, Brah ïsur est toujours présent dans la vie des Khmers theravâdin, en
particulier lors de l'accomplissement des rites, comme on le verra plus loin. Cette
permanence impose l'idée d'une longue évolution, aussi longue que l'histoire du
Cambodge. Sur le plan de la recherche proprement dite, on dira que Brah Isur a été
modelé par le sivaïsme ancien, tandis que celui-ci ne saurait être pleinement perçu et
compris sans le concours de l'épigraphie et l'art. Il nous sied donc de commencer par une
revue de la recherche sur Šiva, afin d'en faire le point et d'en définir les perspectives '.
Les premiers acquis de la recherche
1 - On n'apprendra rien de nouveau aux chercheurs en mentionnant le succès du dieu
Šiva dans l'ancien Cambodge. Comme il vient d'être signalé, c'est l'utilisation conjuguée
des inscriptions et de l'art qui a permis aux savants de décrire le sivaïsme dans le cadre
des études cambodgiennes, lesquelles ont maintenant un siècle. L'image du dieu a été
dégagée de l'étude des différentes inscriptions sanskrites et de l'iconographie, puis
diffusée par de grands indianistes. Il a fallu attendre plusieurs décennies pour qu'elles se
* Cet article est dédié à mon maître, Jean Filliozat.
1. Plusieurs collègues et amis m'ont obligeamment prêté leur concours sous diverses formes : je
dois sans tarder leur exprimer mes plus chaleureux remerciements. Bien entendu toutes les faiblesses
décelables ici seront de ma seule responsabilité. Les documents khmers utilisés, même émanant d'autres
auteurs, seront rendus dans mes propres analyses et traductions.
Bulletin de l'École française d'Extrême-Orient, 89 (2002), p. 145-182. Saveros Pou 146
cristallisent dans une meilleure orientation, puis dans un travail d'ensemble sur l'aspect
religieux du Cambodge vu de l'Inde. Il s'agit de l'ouvrage Les religions brahmaniques
dans l'ancien Cambodge, composé par K. Bhattacharya en 1961, qui, brièvement,
comporte la description des divinités et toutes les spéculations philosophiques relatives au
sujet, avec en complément de précieuses références aux sources indiennes (textes anciens
et géographie actuelle).
À la même époque, le thème propre de Šiva et du sivaïsme fut initié par le grand
indianiste qu'était Jean Filliozat. Ce savant y avait été amené par l'interprétation du
vocable devarâja tiré de l'inscription de Sdok Как Thorn, К. 235, dans sa partie sanskrite 2.
L'idée proposée alors par George Cœdès, acceptée par de nombreux chercheurs et
assimilés, puis largement diffusée, est celle de « dieu-roi » définissant la nature des
souverains de l'ancien Cambodge. Filliozat, partant du même texte, réfuta cette interpré
tation en proposant plutôt celle de « roi des dieux », alias Šiva, proposition inspirée de la
culture indienne même. Dans le cas précis de Sdok Как Thorn, ce terme, ou ce nom, se
rapporte à un Šiva de la tradition tantrique du nom de Tumburu, explicitement mentionné,
dont le culte, instauré et maintenu par les rois angkoriens, est corroboré par la partie
khmère de l'inscription comme étant basé sur quatre textes tantriques {Vinâsikha,
Nayottara, Sammoha, Sirascheda).
Sans vouloir m'appesantir sur cette controverse relativement longue et bien connue, je
tiens toutefois à mettre en lumière le sens de la proposition de Jean Filliozat, ses
démarches et ce qui en résultait, en rapport avec notre présent sujet. Si l'on se tient
strictement au texte de Sdok Как Thorn comme point de départ de cette controverse,
l'interprétation de Filliozat prévalait de loin contre l&

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