Politique et idéologie : le surréalisme en 1930-1933 - article ; n°1 ; vol.5, pg 85-101
19 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Politique et idéologie : le surréalisme en 1930-1933 - article ; n°1 ; vol.5, pg 85-101

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
19 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Mots - Année 1982 - Volume 5 - Numéro 1 - Pages 85-101
POLITIQUE ET IDÉOLOGIE: LE SURRÉALISME EN 1930-1933 Le support de cette étude, Le Surréalisme au service de la révolution, organe que se sont donnés les surréalistes pour défendre leurs positions communes entre 1930 et 1933, se réclame du matérialisme dialectique. La revue se donne en conséquence le double objectif « de répondre d'une façon actuelle à la canaille qui fait métier de penser» et de «préparer le détournement définitif des forces intellectuelles aujourd'hui vivantes au profit de la fatalité révolutionnaire». Canaille: certes, ce qualificatif s'applique aux tenants de la droite, qui a le mérite d'afficher également de la révolution sociale. Ce qu'affirme alors avec violence le discours surréaliste, c'est une prise de position très ferme quant au rôle de l'intellectuel dans le processus révolutionnaire: il s'agit, vu la spécificité du capitalisme occidental, d'ouvrir et de développer un front de lutte idéologique, pour débusquer l'idéologie dominante jusque sous les oripeaux de la gauche dont elle s'affuble. Sur la base de dépouillements lexicaux effectués par ordinateur, J.-L.R. mesure les enjeux qui sous-tendent cette polémique, repère les axes et les referents autour desquels s'organisent les divergences. Se dégagent alors, investis dans des pratiques discursives dont l'écart formel est significatif, les termes d'un clivage théorique qui n'a rien d'inactuel, concernant les fonctions de l'avant-garde.
POLITICS AND IDEOLOGY: SURREALISM IN 1930-1933 The support for this study, Le Surréalisme au Service de la révolution which provided the surrealists with a means of defending their collective views between 1930 and 1933 claims to take its inspiration from dialectic materialism. The «revue» consequently sets itself a double objective that is «to reply in a present day manner to the canaille which makes its profession from thinking» and «to prepare for the final diversion of to-day's living intellectual forces for the benefit of the revolutionnary fate ». Admittedly the term canailles is applied to the adherents of the right wing whose advantage it is that it displays its positions. But also it applies, at least to the same extent, to intellectuals who refer back to the spirit of the social revolution. Thus what the surrealist discourse states with violence is an extremely ferm position as to the role of the intellectual in the revolutionary process. This involves opening and developing an ideological battle front, given the specificity the ostentations left wing rags adoring it. On the basis of lexicological data given by the computer, J.L.R. gives an estimate of the issues at stake in this controversy and maps out the axes and referents around which the divergences are patterned. Therefore the terms of a theorical cleavage which are invested in discursive practices where the formal split is significant, emerge, a cleavage which is by no nears out of date, relatively to the functions of the « avant-garde ».
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-Luc Rispail
Politique et idéologie : le surréalisme en 1930-1933
In: Mots, octobre 1982, N°5. pp. 85-101.
Citer ce document / Cite this document :
Rispail Jean-Luc. Politique et idéologie : le surréalisme en 1930-1933. In: Mots, octobre 1982, N°5. pp. 85-101.
doi : 10.3406/mots.1982.1076
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mots_0243-6450_1982_num_5_1_1076Résumé
POLITIQUE ET IDÉOLOGIE: LE SURRÉALISME EN 1930-1933 Le support de cette étude, Le
Surréalisme au service de la révolution, organe que se sont donnés les surréalistes pour défendre leurs
positions communes entre 1930 et 1933, se réclame du matérialisme dialectique. La revue se donne en
conséquence le double objectif « de répondre d'une façon actuelle à la canaille qui fait métier de
penser» et de «préparer le détournement définitif des forces intellectuelles aujourd'hui vivantes au profit
de la fatalité révolutionnaire». Canaille: certes, ce qualificatif s'applique aux tenants de la droite, qui a le
mérite d'afficher également de la révolution sociale. Ce qu'affirme alors avec violence le discours
surréaliste, c'est une prise de position très ferme quant au rôle de l'intellectuel dans le processus
révolutionnaire: il s'agit, vu la spécificité du capitalisme occidental, d'ouvrir et de développer un front de
lutte idéologique, pour débusquer l'idéologie dominante jusque sous les oripeaux de la gauche dont elle
s'affuble. Sur la base de dépouillements lexicaux effectués par ordinateur, J.-L.R. mesure les enjeux qui
sous-tendent cette polémique, repère les axes et les referents autour desquels s'organisent les
divergences. Se dégagent alors, investis dans des pratiques discursives dont l'écart formel est
significatif, les termes d'un clivage théorique qui n'a rien d'inactuel, concernant les fonctions de l'avant-
garde.
Abstract
POLITICS AND IDEOLOGY: SURREALISM IN 1930-1933 The support for this study, Le Surréalisme au
Service de la révolution which provided the surrealists with a means of defending their collective views
between 1930 and 1933 claims to take its inspiration from dialectic materialism. The «revue»
consequently sets itself a double objective that is «to reply in a present day manner to the canaille
which makes its profession from thinking» and «to prepare for the final diversion of to-day's living
intellectual forces for the benefit of the revolutionnary fate ». Admittedly the term canailles is applied to
the adherents of the right wing whose advantage it is that it displays its positions. But also it applies, at
least to the same extent, to intellectuals who refer back to the spirit of the social revolution. Thus what
the surrealist discourse states with violence is an extremely ferm position as to the role of the intellectual
in the revolutionary process. This involves opening and developing an ideological battle front, given the
specificity the ostentations left wing rags adoring it. On the basis of lexicological data given by the
computer, J.L.R. gives an estimate of the issues at stake in this controversy and maps out the axes and
referents around which the divergences are patterned. Therefore the terms of a theorical cleavage
which are invested in discursive practices where the formal split is significant, emerge, a cleavage which
is by no nears out of date, relatively to the functions of the « avant-garde ».JEAN-LUC RISPAIL
UNITÉ DE RECHERCHE LEXICOLOGIE ET TERMINOLOGIE LITTÉRAIRES
INSTITUT DE LA LANGUE FRANÇAISE, CNRS Mots, 5, 1982
Politique et idéologie :
le surréalisme en 1930-1933
Dans La vie est ailleurs J, un vieux poète surréaliste, en 1949, se fait huer par la jeunesse
socialiste de la Tchécoslovaquie pour avoir osé proclamer qu'il faut «accoupler le socialisme
avec le surréalisme, le chat avec le cheval, l'avenir avec le passé». «La liberté, lance- t-il à
son auditoire, est le devoir de la poésie ! ». Et de se faire huer de plus belle.
Le débat n'est pas neuf, qui fait du surréalisme, aux yeux des révolutionnaires, cette
tentative destinée à rester toujours en deçà ou à côté du politique, pour avoir voulu lui
donner un sens plus large. Dans les années 1925-1930, que Naville a pu appeler la «période
raisonnante» du surréalisme2, la question s'est posée avec une acuité particulière: Aragon,
Breton, Crevel, Eluard, Unik ont adhéré au Parti communiste, signifiant ainsi leur volonté de
s'intégrer institutionnellement au représentant du mouvement marxiste en France. Mais
devant le peu de place laissé à la spécificité surréaliste dans cette organisation3, tous, sauf
Aragon et Unik, prennent assez vite leurs distances. Ils sont exclus du PC en 1933 4.
1. Milan Kundera, La vie est ailleurs, Paris, Gallimard, 1973, p. 245.
2. Maurice Nadeau, Histoire du surréalisme, Paris, Le Seuil, 1964, p. 97.
3. Ainsi Breton, Second manifeste du surréalisme, 1929: «Je ne vois vraiment pas, n'en déplaise à quelques
révolutionnaires d'esprit borné, pourquoi nous nous abstiendrions de soulever, pourvu que nous les envisagions
sous le même angle que celui sous lequel ils les envisagent — et nous aussi — la Révolution : les problèmes de
l'amour, du rêve, de la folie, de l'art et de la religion ...»
4. Après la parution, dans le n° 4 du SASDLR, d'une lettre de Ferdinand Alquié, très critique envers
l'URSS. 86 JEAN-LUC RIS PAIL
Entre ces deux dates, les positions surréalistes communes s'expriment dans Le
Surréalisme au service de la révolution (SASDLR) 5. Le débat ou le combat que l'on serait
tenté de nommer politique y est constant. Est-ce à dire que Г« énoncé politique» tienne dans
la revue une place essentielle? Certainement pas, si l'on donne à cette expression un sens
restrictif. Est-ce à dire que le «vocabulaire poltique» y soit massivement présent? Guère
plus, si l'on limite le champ lexical du «politique» à un ensemble de termes recouvrant les
relations entre Etat et individu, entre intérêts collectifs et intérêts particuliers, les rapports de
classes, etc. Pourtant, dans cette période, les surréalistes se réclament du marxisme, donc
d'une théorie du tout social, de l'histoire et des contradictions qui en sont le moteur, et d'un
programme révolutionnaire.
Ce qui nous a alors frappé dans le discours surréaliste commun des années 1930-1933,
c'est la dimension politique d'un propos qui ne passe pas nécessairement par le vocabulaire
que l'on a coutume d'appeler politique. Nous avons ainsi été amené, à partir d'un va-et-vient
entre l'index alphabétique et le corpus, à nous interroger sur les formes d'expression de cette
revendication, et sur les légitimations qu'elle se donne. Les questions que nous nous sommes
posées peuvent se résumer ainsi:
— Au sein des forces qui se réclament du marxisme, quelle est la position spécifique des
surréalistes et du SASDLR1
— Sur quels plans essentiels s'opposent-ils, et à qui?
— Dans quelle lignée théorique cette entreprise peut-elle s'inscrire?
Deux ensembles de formes récurrentes, regroupables en paradigmes, paraissent fournir
un bon ancrage pour l'analyse de ces prises de position idéologiques. Pour deux raisons
principales: leur répétitivité dans l'énoncé polémique (ou négatif) ou programmatique (ou
positif), et la dimension commune qu'ils désignent dans leur opposition — cette dimension
déterminant, selon nous, à la fois la spécificité de l'entreprise surréaliste par rapport au
5. Situation dans la production textuelle politique surréaliste: le SASDLR (qui fait suite à La Révolution
surréaliste, 1924-1929) s'inscrit entre la tentative de collaboration avec Clarté et la participation à Contre- Attaque.
Description sommaire du corpus: le SASDLR connaît en tout six numéros, deux en 1930, deux en 1931, deux en
1933. Sa pagination varie entre 36 et 56 pages, le nombre des collaborateurs, entre 10 et 25. Le corpus total
comprend 206 000 occurrences pour un peu plus de 21 000 formes. Les auteurs les plus importants quantitative
ment sont dans l'ordre: Breton, Tzara, Aragon, Crevel, Dali, Eluard, Sadoul, Heine, Thirion, Char,, Ernst,
Valentin, Péret. SURRÉALISME EN 1930-1933 87 LE
discours politique, et l'inscription du champ politique dans un combat qui, par sa visée, le
dépasse.
Les valeurs qu'il s'agit d'abattre. Celles dont on se réclame. A l'examen de ces deux

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents