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Quelle éducation à la santé à l'école ?

Avant de proposer quelques éléments de réflexion quant aux modalités de mise en œuvre d’une éducation à la
1santé en milieu scolaire, nous nous proposons de tenter d’éclairer la question de la légitimité d’une telle éducation
à l’école. Les deux arguments les plus fréquemment invoqués pour justifier sa mise en œuvre sont d’une part le fait
2qu’une action précoce est un gage d’efficacité de l’action préventive et d’autre part que l’école permet d’atteindre
l’ensemble des individus d’une classe d’âge déterminée. Pour autant, ces justifications et le fait que notre société
soit confrontée à des « urgences » en terme de santé publique sont-ils suffisants pour autoriser n’importe quelle
stratégie d’éducation à la santé ? L’alcool tue, il faut immédiatement dire aux élèves de cesser de boire, le tabac
fait des ravages, intervenons derechef pour les inciter à ne pas fumer, le SIDA revient en force, une information sur
l’usage du préservatif s’impose … Le tout sans oublier le cannabis, les accidents de la route et les accidents
domestiques, l’obésité, les maladies cardiovasculaires, celles liées à une exposition inadaptée au soleil … Le trait
est à peine forcé, chaque jour l’école est sollicitée pour mettre en œuvre des actions relatives à la santé des
élèves. Pour éminemment justifiables qu’elles soient au plan épidémiologiques ces injonctions s’avèrent en fait
bien peu compatibles avec le rôle de l’école dont la mission ...

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Quelle éducation à la santé à l'école ?Avant de proposer quelques éléments de réflexion quant aux modalités de mise en œuvre d’une éducation à la 1 santé enmilieu scolaire, nous nous proposons de tenter d’éclairer la question de la légitimité d’une telle éducation à l’école. Les deux arguments les plus fréquemment invoqués pour justifier sa mise en œuvre sont d’une part le fait 2 qu’une action précoce est un gage d’efficacité de l’action préventiveet d’autre part que l’école permet d’atteindre l’ensemble des individus d’une classe d’âge déterminée. Pour autant, ces justifications et le fait que notre société soit confrontée à des «urgences »en terme de santé publique sontils suffisants pour autoriser n’importe quelle stratégie d’éducation à la santé ? L’alcool tue, il faut immédiatement dire aux élèves de cesser de boire, le tabac fait des ravages, intervenons derechef pour les inciter à ne pas fumer, le SIDA revient en force, une information sur l’usage du préservatif s’impose … Le tout sans oublier le cannabis, les accidents de la route et les accidents domestiques, l’obésité, les maladies cardiovasculaires, celles liées à une exposition inadaptée au soleil … Le trait est à peine forcé, chaque jour l’école est sollicitée pour mettre en œuvre des actions relatives à la santé des élèves. Pour éminemment justifiables qu’elles soient au plan épidémiologiques ces injonctions s’avèrent en fait bien peu compatibles avec le rôle de l’école dont la mission consiste en le développement des capacités de l’individu comme personne et comme citoyen. L’empilement d’actions préventives sur les différents sujets évoqués plus haut ne peut être le support d’une éducation de la personne dans sa globalité. Education à la santé et mission de l’école Pour autant, ces quelques éléments ne conduisent pas à nier le rôle de l’école et à laisser l’intégralité de la responsabilité de cette éducation à la famille. Ils soulignent la nécessité d’une confrontation des objectifs de santé 3 publique à la mission de l’école. La loi d’orientation de juillet 1989qui définit les missions du système éducatif met en avant les principes fondamentaux d'égalité, de liberté et de la laïcité. Elle stipule que «l ’école a pour but de former… les femmes et les hommes de demain, des femmes et des hommes en mesure de conduire leur vie personnelle, civique et professionnelle en pleine responsabilité et capables d'adaptation, de créativité et de solidarité.est centrale, elle renvoie à la fois à l’égalité et à l’autonomie de la pensée, à ce» La référence à la laïcité qui oppose le savoir aux croyances ou opinions. Viser à permettre l’émergence d’esprits capables de penser par euxmêmes c’est leur permettre de résister aux formes d’emprise auxquels ils sont confrontés ici et maintenant : les stéréotypes, la pression des pairs, le pouvoir des médias mais aussi les réactions émotionnelles immédiates (si largement utilisées par certains médias du reste)… La circulaire n° 98237 du 24/11/1998, précise qu’ «à l’opposé d’un conditionnement, l’éducation à la santé vise à aider chaque jeune à s’approprier progressivement les moyens d’opérer des choix, d’adopter des comportements responsables, pour luimême comme visàvis d’autrui et de l’environnement. Elle permet aussi de préparer les jeunes à exercer leur citoyenneté avec responsabilité, dans une société où les questions de santé constituent une préoccupation majeure. Ni simple discours sur la santé, ni seulement apport d’informations, elle a pour objectif le développement de compétences». Ces éléments permettent de situer la légitimité de l’éducation à la santé non pas en référence aux problèmes de santé mais en terme de construction de compétences visant à permettre à la personne de faire des choix éclairés et responsables. Prenons l’exemple de la consommation d’alcool. Celleci est légale dans notre pays, boire de l’alcool 1 Dans la littérature on trouve soit « éducation à la santé » soit « éducation pour la santé ». Dans le milieu scolaire, les deux expressions sont employées indifféremment, la préposition « à » est employée par les acteurs de l’école par analogie avec l’éducation « à la citoyenneté » et ses déclinaisons (« à l’environnement », « à la consommation » ….). Il ne s’agit pas ici de concevoir l’éducation à la santé comme l’apport de connaissances nécessaires à un individu pour atteindre « l’état de santé « (le « bienêtre » de la définition de la santé par l’OMS en 1946) mais plutôt d’insister sur la dimension éducative de cette mission constitutive de l’éducation de la personne dans son intégralité. 2 Cet article n’est pas le lieu d’une discussion sur ce thème mais il est intéressant de noter quedes auteurs soulignent que l’argument du conditionnement précoce relève en grande partie du mythe. Il n’y a aucune automaticité … Parmi les enfants de 78 ans qui se déclarent antitabac, 60 % auront, dix ans plus tard changé d’attitude et de comportements tant les facteurs qui régissent ces actions multiples, complexes et changeants selon les contextes (Larue et al, école et santé : le pari de l’éducation, Hachette 2000). p1
relève donc de la liberté individuelle (à condition de respecter la loi, en particulier dans le domaine de la conduite automobile). Si l’école est légitime a délivrer une éducation dans ce domaine ce n’est pas au titre d’un interdit légal (comme c’est le cas pour les drogues illicites) mais au nom d’une idée de l’homme et du citoyen : la consommation d’alcool comme des autres psychotropes peut générer une dépendance, une aliénation, une perte de liberté. L’école est fondée à mettre en œuvre des activités (connaissance des produits et des effets, capacité à résister à l’emprise des médias, des pairs …) permettant à l’élève de disposer des compétences lui permettant de conserver sa liberté, c’est à dire d’être capable de faire des choix. Il s’agit de permettre aux élèves de s’approprier les moyens de construire leur propre liberté au cœur de la cité comme personne et comme citoyen (la santé ressort à la fois de la sphère du privé et de celle du publique) … c’est à dire d’éduquer à la citoyenneté. Même si la référence de l’éducation à la santé à l’école est la construction de le personne et non tel ou tel problème de santé, cela ne signifie nullement que l’école n’ait pas à permettre aux enfants et adolescents de travailler sur les rythmes de vie ou la consommation de tabac. Il reste néanmoins clair qu’elle n’a pas à délivrer un message normatif univoque sur ces sujets (ce qui n’est évidemment pas le cas lorsque les comportements visés transgressent la loi). En effet, la responsabilité de l’éducation et de la santé d’un enfant (circulaire 2002098 du 24/04/02) incombe en premier lieu aux parents. Ces derniers doivent être respectés dans leurs choix (là aussi, dans la mesure où ils sont compatibles avec la loi). De plus, il est légitime que ces derniers connaissent avec clarté les objectifs et méthodes employées dans les diverses structures sociales qui contribuent à l’éducation de leur enfant, l’école en particulier. Ainsi, la loi d’orientation et les programmes scolaires constituentils un contrat entre les citoyens et l’école. Lorsque je mets mon enfant dans une école, j’accepte que ce dernier participe à des activitésLes Objectifs propres à l’éducation à la sexualité (BO du 19/11/1998): visant à lui permettre de maîtriser la technique de la¾Image de soi soustraction ou de la division mais aussi à des activités Construire une image positive de soimême et de la sexualité comme composante essentielle de la vie de chacun. ¾Dimensions de la sexualité humaine éducatives dans le domaine de la santé. Des textes donnent pprendre à identifier et à intégrer les différentes dimensions biologiques, affectives, psychologiques, juridiques, sociales et un cadre général à cette dimension de l’éducation de la éthiques. ¾Relation à l’autre personne. L’éducation à la sexualité (circulaire n° 98234 du nalyser la relation à l’autre dans ses composantes personnelles et sociales, à partir de connaissances précises de chaque sexe. 19 novembre1998), par exemple, est fondée sur une prise¾Dro it à la sexualité et respect de l’autre Comprendre qu’il puisse y avoir des comportements sexuels variés. en compte des différents aspects de la sexualité comme¾Exercice du jugement critique Développer l’esprit critique à l’égard des stéréotypes en matière de constitutive de la vie humaine laissant la place à une grandesexualité, en amenant notamment les élèves à travailler sur les représentations idéalisées, irrationnelles et sexistes. diversité d’approches mais dans le cadre fondamental du ¾Attitude de prévention dopter des attitudes responsables et des comportements préventifs, en particulier en ce qui concerne les abus et l’exploitation respect de la dignité humaine (la sienne et celle d’autrui) … sexuels, les maladies sexuellement transmissibles et le sida, les grossesses non désirées. Le «contrat »stipule que l’école ne dit pas qu’il y a une ¾Education à la responsabilité Intégrer positivement des attitudes de responsabilité individuelle, « bonne »et une «mauvaise »façon de vivre sa sexualité familiale et sociale fondées notamment sur les valeurs humanistes du respect de soi et d’autrui, préparant à des choix lucides dans le mais une diversité au sein de laquelle l’essentiel réside domaine de la sexualité.dans le respect de soi et d’autrui et d’un recul critique visà vis des stéréotypes. (cf encadré). C’est bien la personne et son émancipation qui est le cœur de l’éducation à la santé à l’école.
Ecole et santé publique : une nécessaire médiation Ce qui précède ne permet nullement de considérer l’école comme un simple instrument susceptible de dispenser une information sanitaire, sa mission est d’une autre nature. Pour autant, qu’elle soit interpellée sur le fait que certains types de comportements conduisent les personnes qui les mettent en œuvre à s’aliéner à un produit, à 3 Loi 89486 du 10 juillet 1989p2
porter atteinte à leur dignité et à celle d’autrui, à mettre en cause le «vivre ensemble» de notre société est pleinement légitime. L’école se doit donc de travailler à la façon dont ces questions sociales ou/et sanitaires peuvent être prises en compte dans l’éducation de la personne. Les enjeux éducatifs évoluent constamment, l’école doit nécessairement adapter ses programmes, ses contenus, ses méthodes, ses modes d’accueils des élèves. Faire changer les programmes scolaires, les méthodes d’enseignement, la formation des acteurs de l’école dans le but de répondre aux enjeux éducatifs actuels dans le domaine de la santé n’est pas du même ordre qu’être la courroie de transmission d’un message sanitaire univoque. Il reste néanmoins clair que cette position institutionnelle de l’école visàvis des légitimes enjeux de santé publique n’est pas simple à tenir. A notre sens l’idée fondamentale est celle de médiation, en effet, l’école ne peut ni être le relais pur et simple d’une politique de santé ni être totalement hermétique aux sollicitations sociales mais plutôt qu’elle doive les tenir à distance, exercer une médiation. L’éducation à la santé dans les activités de classe Des leçons de morale sur l'hygiène, la tuberculose ou l'alcoolisme de la fin du XIXème siècle à l'intégration de l'éducation à la santé dans les programmes actuels, l'école a toujours été l’un des principaux lieux de prévention et d’éducation à la santé. La loi d’orientation sur l’école de 1989 a conduit à une actualisation de la place de cette dernière dans les enseignements et dans la vie collective des établissements. Cette loi et les textes qui ont été publiés par la suite: "les cycles à l'école élémentaire", le "projet d'école", les programmes du primaire et du 4 secondaire, des circulaires spécifiques (création des CESC, orientation pour l’éducation à la santé à l’école 5 primaire et au collège…) donnent un cadre institutionnel à l'éducation à la santé à l'école. Si les textes officiels situent clairement la santé comme n’étant pas une discipline supplémentaire, les programmes de l’école maternelle et élémentaire incluent des savoirs, des savoirfaire et des savoirêtre qui concourent à l’éducation à la santé des enfants dans diverses matières : éducation civique, éducation artistique, éducation physique, sciences du vivant. L’éducation à la santé tient une place importante à l’école maternelle, d’une façon générale, on peut considérer qu’elle peut être abordée par trois entrées: ledéveloppement des compétences liées à l’autonomie, la confiance en soi, la responsabilité, la relation aux autres, à l’action, l’adaptation ; l’hygiène quotidienne à l’école (passage aux toilettes, lavage des mains, goûter) ; une sensibilisation aux problèmes de santé (rythmes, alimentation, hygiène) conduisant à l’élaboration de règles de vie simples. L’école maternelle constitue le lieu privilégié où, par les missions qui lui sont confiées, les conditions d’enseignement et l’attention portée au bienêtre de l’enfant, il est possible d’éduquer à la santé de façon globale. C’est un travail de tous les jours dans l'accueil, dans les situations permettant à l’enfant de s’affirmer comme une personne dotée d’une identité, dans les temps d’explicitation des sentiments, des désirs, des souffrances, des contraintes et règles de la vie collective qui peut être enrichi par des projets spécifiques. A l’école élémentaire, les activités d’éducation à la santé pourront être mises en œuvre dans une approche pluridisciplinaire susceptible d’inclure des dimensions physiologiques (en lien avec le travail de biologie sur le fonctionnement du corps), de connaissance de soi (en lien avec les activités physiques ou artistiques) ou de respect de soi et d’autrui (dans toutes les situations de la vie quotidienne ou dans le cadre d’approches plus spécifiques). En second degré, une place explicite est accordée à l’éducation à la santé dans les programmes de sciences de la vie, d’éducation physique et sportive, d’histoiregéographieéducation civique. Par exemple, dans cette dernière discipline, l ’éducation à la sécurité et l ’éducation à la santé (dignité de la personne) sont des parties identifiées du programme de cinquième. L ’éducation à la sécurité routière représente un enjeu fort pour le professeur d ’histoire 4 CESC : comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté circulaire 98108 du 1 juillet 1998 p3
géographie. Le travail sur le refus des discriminations, la solidarité appelle une réflexion sur la santé. Au lycée les séances «d’éducation civique juridique et sociale» constituent des lieux au sein desquels un travail relatif aux questions de santé (dépénalisation du cannabis, SIDA …) est possible. L’éducation à la santé à l’école : une dynamique collective Au delà des éléments constitutifs des enseignements dans diverses matières, l’éducation à la santé ne peut prendre tout son sens que dans la mesure où elle s’insère dans une démarche plus vaste de promotion de la 6 santé ausein de l’école, du collège ou du lycée. Hors d’un réel investissement en matière de vie collective au sein de l’établissement, d’accueil des élèves, de relation aux parents et aux partenaires, de présence de services sociaux et de santé, les activités pédagogiques en éducation à la santé restent formelles, elles ne sont qu’un verni superficiel qui a bien peu de chance de rejoindre la personne humaine dans la dynamique de son développement. Les textes appellent à une telle prise en compte de l’éducation à la santé au cœur du projet éducatif :« l’éducation à la santé prend appui sur la transmission de savoirs et de connaissances etpasse par l'organisation du cadre de 5 vie à l'école et des activités éducatives». Le projet d’établissement (pour le second degré) et le projet d’école (pour le premier degré) constituent des outils au service d’une prise en compte de la santé dans la vie de l’école. «Le projet d’école a pour but de mettre en relation les objectifs nationaux et la situation locale, et de définir les stratégies qui paraissent les mieux appropriées pour atteindre les objectifs en tenant compte du contexte». Selon les situations et les besoins perçus à la suite d’une analyse de la réalité locale, le projet d'école peut inclure une « dimensionsanté »impliquant divers partenaires (parents, spécialistes de la prévention, infirmiers, assistants sociaux, médecins, municipalité …). Cette « dimension santé » n’étant que l’un des éléments d’un projet incluant plusieurs composantes. Cette intégration du projet santé dans le projet d'établissement est bien dans la logique d'une approche partenariale de la prévention, elle contribue à faire de l’éducation à la santé un objet commun à tous les acteurs de l’école. Enfin, depuis le début des années 1990, les établissements et les bassins de formation disposent d’un autre outil : 4 il s’agit du comité d ’éducation à la santé et à la citoyenneté . Ce dernier à pour objectif de «fédérer les actions de prévention, mobiliser les acteurs de la communauté éducative, renforcer les partenariats, améliorer le climat et les relations au sein de l ’établissement contribuer à la mise en place de l ’éducation citoyenne, organiser la prévention des dépendances, des conduites à risque et de la violence dans le cadre du projet d’établissement, assurer le suivi des jeunes dans et hors de l ’école, venir en aide aux élèves, renforcer les liens avec les familles, apporter un appui aux acteurs de la lutte contre l’exclusion en renforçant les liens entre l ’établissement, les parents les plus en difficulté et les autres partenaires concernés». Une réalité contrastée Les quelques éléments précédemment développés permettent de situer la place de l’éducation à la santé à l’école, se pose maintenant la question de savoir ce qu’il en est des pratiques. De nombreux auteurs soulignent la faible implication de l’école dans l’éducation à la santé et se répandent bien souvent en incantations. Il est clair que la prise en compte de l’éducation à la santé dans la vie de établissements scolaire reste morcelée et insuffisante. Il est néanmoins important d’être conscient de l’existence d’un travail de fond qui, bien que sans doute insatisfaisant au plan méthodologique, peut servir de base à une promotion de l’éducation à la santé à l’école. Dans ce domaine 5Circulaire n° 98237 du 24/11/1998
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comme dans d’autres, les acteurs de l’école sontils sans doute plus à soutenir qu’à blâmer ! En premier degré, les 7 résultats d’une étude récentemontrent que la majorité des enseignants (plus de 70 %) déclare pratiquer l’éducation à la santé. L’approche est principalement thématique, essentiellement limitée à des séquences pédagogiques puisqu’elle n’est intégrée à un projet que dans 20% des cas. Un maître sur trois a fait appel à des partenaires issus majoritairement de la santé scolaire, les parents quant à eux, ne sont qu’exceptionnellement associés. Deux paramètres influencent les pratiques et les représentations des enseignants. Il s’agit d’abord du fait de travailler en zones ou des réseaux d’éducation prioritaire et en regroupement pédagogique intercommunal ; les enseignants sont plus nombreux à faire de l’éducation à la santé dans ces écoles en réseau que dans les autres. On peut ensuite noter que le fait d’avoir eu une formation influence très fortement la pratique des enseignants. Ces éléments suggèrent qu’une politique visant la généralisation de la prise en compte de l’éducation à la santé à l’école doit développer la formation ainsi que soutenir et accompagner les dynamiques collectives au sein des écoles. En second degré, il est plus difficile d’obtenir des données significatives. La mise en œuvre d’une éducation à la santé se révèle multiforme et difficile à saisir de façon globale. Estce développer un véritable projet collectif centré sur la promotion de la santé? Les collèges et lycées concernés sont relativement peu nombreux même si le nombre d’établissements au sein desquels fonctionne un CESC est en augmentation puisqu’il est passé de 47 % 8 en 1999 à 67,5 % en 2001 . Estce avoir un projet prenant explicitement en compte les conduites à risques ? Leur nombre sera déjà plus important. Estce proposer des interventions ponctuelles sur tel ou tel thème ? Beaucoup de lycées et collèges sont alors concernés puisque près de 70 % des principaux de collège soulignent que des 9 actions d’éducation à la santé sont organisées sur la base de plages horaires inscrites dans l’emploi du temps . Estce aborder les différents aspects relatifs à la santé dans le programme obligatoire de « sciences de la vie et de la Terre », « d’histoiregéographieéducation civique » ou bien « d’éducation physique et sportive » ainsi que dans le cadre des séquences d’éducation à la sexualité ? Dans ce cas tous les établissements sont concernés ! D’une approche hygiéniste à une approche globale Aujourd’hui, l’éducation à la santé est encore souvent basée sur le modèle hygiéniste qui consiste à donner une information ponctuelle sur des comportements et leurs conséquences. Cette approche a clairement montré ses limites visàvis des principaux problèmes de santé publique actuels. Comme nous l’avons indiqué précédemment, elle ne peut que constituer l’un des aspects d’une éducation à la santé en milieu scolaire. En effet, dans la perspective d’une éducation à la liberté, le fait de disposer d’informations rationnelles est un élément absolument indispensable … mais notoirement insuffisant. De plus de nombreux travaux ont montré que cette approche présentait la caractéristique d’être peu ou pas efficace. Néanmoins, depuis de nombreuses années, d’autres pratiques d’éducation à la santé se développent dans l’esprit que nous avons développé plus haut. Ces approches sont basées non sur l’exposé des conséquences d’un « fléau » mais sur un travail éducatif en relation avec les déterminants des conduites à risques. Schématiquement, on peut proposer de regrouper ces derniers autour de trois axes : ceux liés à la personne, à l’environnement et au comportement luimême. En effet, les travaux épidémiologiques ont montré l’importance des facteurs liés à la personne (estime de soi, communication, gestion du stress, gestion du risque …), à l’environnement social, médiatique et aux effets spécifiques des produits ou des conduites. Pour l’éducateur, il s’agit donc de contribuer à
6 La promotion de la santé (Charte d’Ottawa, 1986) a pour but de donner aux individus davantage de maîtrise sur leur propre santé et davantage de moyens pour l’améliorer. Le concept de promotion de santé dépasse l’individu pour penser la communauté et prendre en compte interactions entre la personne et son environnement tant physique qu’humain. 7 Jourdan, D et al. (2002) Éducation à la santé à l’école : pratiques et représentations des enseignants du primaire. Santé publique. n°41. 403423 8 Baeumler J.P.,L’Ecole citoyenne. Le rôle du CESC rapport 2002présenté à Monsieur le Premier Ministre 9 ChiLan Do et François AlluinL'éducation à la santé et à la sexualité à l'école et au collège en 20012002, note d’information DPD D3, avril 2003.p5
(1) l’apprentissage de savoirêtre (les compétences psychosociales citées plus haut), (2) d’aborder et de permettre l’expression des élèves sur des problèmes de santé qui font appel à la fois à des valeurs, des lois, des savoirs scientifiques et (3) développer chez les enfants la résistance à l’emprise de l’environnement, des stéréotypes en particulier par une éducation aux médias. A titre d’exemple, on peut noter que de nombreux programmes d’éducation nutritionnelle sont développés en milieu scolaire. Ces programmes, souvent très pertinent au plan pédagogiques, permettent aux élèves de s’approprier des savoirs et des savoirs faire relatifs à l’équilibre alimentaire. Cet aspect nécessaire gagnerait à être complété par (1) un travail sur l’image de soi, la perception du corps, l’estime de soi (tant on connaît le lien entre trouble du comportement alimentaire et construction de l’image de soi !) et (2) des activités visant à développer un regard critique vis à vis stéréotypes médiatiques de la minceur extrême, des publicités relatives aux produits alimentaires ... Autrement dit, éduquer à la santé de façon globale revient à permettre à l’enfant de développer des capacités d’agir, de choisir, de décider d’une manière autonome et responsable ainsi que des capacités d’affronter la réalité et de faire face aux conflits. Il est évident que l’objectif du développement de ces compétences n’est pas l’apanage de l’éducation à la santé, il s’agit des objectifs généraux de toute éducation humaine. Elles sont développées dans le quotidien de la classe et pas seulement au cours de séquences spécifiques. Construire un projet d’éducation à la santé à l’école Quelques pistes peuvent être suggérées quant à ce que pourrait être un projet d’éducation à la santé intégrant les spécificités et les contraintes du travail en milieu scolaire. Ce dernier gagnerait à être global dans le sens où il prendrait en compte tous les aspects de la vie de l’élève ; partenarial dans le sens où il donnerait sa place à tous les acteurs de la communauté éducative en particulier aux parents; pluridisciplinaire dans le sens où il serait considéré comme éducation à la citoyenneté et en aucun cas limité à la dimension physiologique ; intégré au projet 4 d’établissement ou d’école et conduit par le CESCdans le sens où une contractualisation est nécessaire à la pérennité de l’action ; géré par les personnels de l’établissement (et non soustraité à des « spécialistes »). En tout état de cause, il est important de redire que l’éducation à la santé est un travail d’éducation qui concerne tous les acteurs de la communauté éducative et en particulier les enseignants. Il est possible de conclure de cette rapide réflexion que l’éducation à la santé est bien l’un des aspects de la mission de l’école dans le champ de la citoyenneté, elle relève de la responsabilité de l’ensemble de la communauté éducative. Cela ne signifie nullement que tous les intervenants aient à se situer de la même façon mais bien que chacun a sa place spécifique. Les acteurs issus du champ sanitaire et social (assistants sociaux, infirmiers, médecin) ont un rôle d’expert, de conseillers au service du projet pour lequel les actions éducatives seront essentiellement le fait des parents et des enseignants. Les équipes d’encadrement et de vie scolaire jouant un rôle déterminant dans l’analyse des besoins, l’élaboration et le suivi du projet. Pour autant, le nécessaire partenariat entre ces acteurs ne s’improvise pas, il est le résultat d’une démarche collective durable qui conduit à l’émergence d’une culture commune. Dans cette perspective la formation des acteurs se révèle être un enjeu capital ! Enfin, il nous semble important de revenir sur la prégnance du questionnement éthique en éducation à la santé. On ne saurait faire l’économie d’une interrogation perpétuelle de ses fins et de ses moyens, de sa place structurante au cœur de l’éducation du citoyen dans le cadre laïc de l’école. A tel point que nous rejoignions JeanPierre
p6
10 Deschamps lorsqu’ilinvite à considérer «l'éthique, non plus comme une réflexion sur l'éducation pour la santé, mais comme l'objet de celleci». D. Jourdan IUFM d'Auvergne (texte publié dans la revue des professionnels de l'enfance n°272004)
10 Deschamps JP (2000) Ethique et éducation à la santé, plus qu’un enjeu : un objectif in La santé de l’Homme n° 345 janvier/février.
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