Représentations anciennes de Krsna luttant contre le cheval Keśin sur des haltères : l avatāra de Visnu et le dieu du Mahābhārata - article ; n°1 ; vol.86, pg 65-104
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Représentations anciennes de Krsna luttant contre le cheval Keśin sur des haltères : l'avatāra de Visnu et le dieu du Mahābhārata - article ; n°1 ; vol.86, pg 65-104

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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 1999 - Volume 86 - Numéro 1 - Pages 65-104
40 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

Charlotte Schmid
Représentations anciennes de Krsna luttant contre le cheval
Keśin sur des haltères : l'avatāra de Visnu et le dieu du
Mahābhārata
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 86, 1999. pp. 65-104.
Citer ce document / Cite this document :
Schmid Charlotte. Représentations anciennes de Krsna luttant contre le cheval Keśin sur des haltères : l'avatāra de Visnu et le
dieu du Mahābhārata. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 86, 1999. pp. 65-104.
doi : 10.3406/befeo.1999.3406
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1999_num_86_1_3406Représentations anciennes
de Krsna luttant contre le cheval Kešin sur des haltères
Y avatar a de Visnu et le dieu du Mahâbhârata
Charlotte Schmid *
C'est seulement depuis une douzaine d'années que les images cultuelles de Krsna,
qu'on a longtemps cru être celles de Visnu, sont bien identifiées. Les difficultés qu'elles
soulèvent, en particulier l'emprunt à la fin du IIIe ou au début du IVe siècle de
l'iconographie cultuelle de Krsna pour représenter Visnu, sont loin d'être résolues. Mais
l'intérêt légitime qu'éveillent ces premières images cultuelles de Krsna occulte
l'importance des très rares représentations contemporaines de type narratif. En effet la
première iconographie krishnaïte se partage en deux genres différents. Des bas-reliefs
narratifs qui illustrent la légende de Vàsudeva-Krsna luttant avec ses deux mains nues
contre le cheval cannibale Kešin apparaissent en même temps que les statues de culte d'un
Vâsudeva-Krsna à quatre bras porteur d'attributs caractéristiques. Ces représentations
Krsna lutteur posent des problèmes spécifiques mais participent aussi, plus largement, de
la constitution d'une première iconographie krishnaïte dont la divinité correspond à celle
du Mahâbhârata, puis, à partir de l'âge gupta, d'une deuxième iconographie s'inspirant
largement des quelques bas-reliefs narratifs de la période précédente et correspondant à la
biographie légendaire de Krsna telle qu'elle apparaît dans le Harivamsa, l'« appendice »
du Mahâbhârata.
Les deux iconographies apparues durant les deux premiers siècles de notre ère sont
très différentes l'une de l'autre. La distinction entre sculptures de type narratif et statues
cultuelles est si nette qu'elle pourrait bien en réalité exprimer un clivage entre deux
aspects du dieu Krsna, puis du dieu Visnu, forme incarnée et forme suprême de la
divinité telle qu'elle se présente dans les textes. Les représentations de Krsna luttant
contre Kešin semblent ainsi susceptibles d'éclairer certains aspects de la construction
progressive du culte d'un Visnu devenant une divinité suprême. En effet, l'évolution
des seules statues cultuelles, qu'elles représentent Krsna ou Visnu, plutôt qu'expliquer
le processus qui fit de Visnu l'un des grands dieux de bhakti, en souligne les parts
d'ombre.
C'est sans doute autant à l'ancienneté de la tradition qu'elle illustre qu'à ses
possibilités d'adaptation que la lutte contre un cheval cannibale doit d'être la première
aventure de Krsna à avoir été représentée. La complexité de ce mythe multiforme le
signale ainsi comme un témoin privilégié pour l'étude de la genèse du culte de Krsna et
surtout pour celle de son intégration dans l'adoration portée à Visnu. C'est pourquoi, après
avoir évoqué les quatre représentations anciennes de la lutte contre Kešin, je mettrai en
* Membre de l'École française d'Extrême-Orient.
Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient, 86 (1999), p. 65-104. 66 Charlotte SCHMID
valeur, à partir des textes correspondants puis d'autres images qui leur font écho, la place
importante de ce mythe dans le développement de la légende krishnaïte ainsi que
l'originalité de son témoignage sur l'évolution de la religion vishnouite.
Les représentations
Durant les trois premiers siècles de notre ère, lorsque apparaissent nombre des
premières images de divinités indiennes, Krsna combattant un cheval est représenté
uniquement sur des haltères dont les dimensions réduites ne correspondent pas
nécessairement à une utilisation réelle. Étant donné le poids relativement faible (une
douzaine de kilogrammes environ) des haltères qu'ils ont étudiés, P. Bernard et
Ch. P. Jullien (1982: 38) concluent qu'il s'agit sans doute d'ex-voto de lutteurs1.
Cependant, on ne leur connaît actuellement aucun équivalent d'une taille bien supérieure
et je n'utiliserai donc pas l'adjectif «votif» dont on les qualifie parfois. C'est en fait le
décor de ces objets qui nous intéresse ici et qui tend à leur faire attribuer, que ces haltères
aient ou non été utilisés lors d'exercices ou bien de tournois, une fonction cultuelle ou
simplement ornementale2.
On a retrouvé des haltères de ce type dans les régions du Gandhâra et de Mathurâ. Les
haltères originaires de Mathurâ semblent avoir été exportés, car on a découvert, au
Gandhâra et dans la vallée de Katmandou, des haltères en provenance de cette ville3. Ces
objets en pierre apparaissent aux alentours de notre ère tant au Gandhâra qu'à Mathurâ.
Mais la tradition qu'ils représentaient s'est perpétuée plus longtemps au Gandhâra, où l'on
1. Cependant le Mallasâstra de Devïsimha, un ouvrage du XIe siècle consacré, comme son titre
l'indique, à la lutte et aux lutteurs, mentionne dans la liste qu'il donne des exercices physiques auxquels
s'astreint le lutteur, le laghugaunitakašrama, l'exercice consistant à soulever des poids de nature légère, à
côté du gurugaunitakašrama, le même exercice mais exécuté avec des poids lourds. Les lutteurs se
servaient donc aussi d'haltères « légers » dans le cadre de leurs exercices, cf. Kulkami, 1974 : 182. Au
reste, il n'est pas évident que tous les haltères décorés n'aient pesé qu'une douzaine de kilogrammes.
L'exemplaire que j'ai examiné à Mathurâ devait peser au moins une vingtaine de kilogrammes, puisque la
moitié restante en pèse une dizaine.
2. Un haltère de Mathurâ retrouvé à Katmandou (HSN 191 ; Verardi, 1992 : 13, 1 14-1 15, fig. 85 et
pi. 29-33, 68-72), lors des récentes fouilles du site de Harigaon, est de plus grande taille et devait peser
environ 25 kilogrammes, mais il a, lui aussi, été interprété comme un haltère votif par G. Verardi (1992 :
14), qui suppose que l'haltère était décoré d'une représentation de la lutte contre Kešin. Il ne peut
pourtant y avoir aucune certitude à ce sujet car il n'y a aucune trace d'un quelconque décor sur la pièce
retrouvée. Il existe au Gandhâra une iconographie assez diversifiée pour ce genre d'objet, même si elle a
généralement pour thème la lutte. Bien que cet haltère soit en grès de Mathurâ, on ne connaît pas assez
d'haltères exportés par cette ville pour être certain que ces objets portaient toujours la même
représentation. Il semble même qu'ils pouvaient fort bien être décorés par une autre image car on a
retrouvé au Gandhâra un haltère décoré par une triade vrsni, une petite femme encadrée par Krsna et
Balarâma. Cette représentation, dont fait état D. M. Srinivasan (1989 : note 10), n'est cependant pas
publiée. Enfin, on ne peut être certain que ce grand haltère ait jamais porté de représentation figurée. Il
pouvait n'être sculpté que de motifs décoratifs, comme un haltère exposé au Museo Nationale d'Arte
Orientale de Rome. Il pouvait ne pas être sculpté du tout. Le corpus comparatif est pour l'instant trop
réduit pour que l'hypothèse de l'exportation au Népal d'une représentation de Krsna contre Kešin ne soit
pas utilisée sans beaucoup de précautions et je n'y aurai pas recours ici.
3. Bernard & Jullien (1982 : 41) donnent la bibliographie des haltères représentant des scènes de
lutte au Gandhâra. Représentations anciennes de Krsna 67
a retrouvé des haltères datant du IVe siècle, si ce n'est du Ve s

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